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Temps de lecture estimé : 22 mn
07/09/04
Résumé:  Mathilde, avant de me quitter, me raconta ce qu'elle m'avait caché.
Critères:  ff amour
Auteur : Denis      
Vies de Mathilde


Mathilde vient de me quitter. Écrire ici est une sorte de vengeance impossible. D’autant que ce que je vais vous raconter, Mathilde m’a demandé de ne le confier à qui ce soit. Malgré tout, je maquille les noms et ferai en sorte de tordre les événements afin de les rendre méconnaissables.


Donc, Mathilde est partie. Elle a fait sa valise, il y a un mois. Je n’ai plus aucune nouvelle. Et ça m’étonnerait que j’en ai de sitôt. Je lui ai dit de ne plus m’appeler pour préserver son bonheur et ma peine. Mathilde vit chez sa copine Aline. Elles sont amantes. Je l’ai découvert par hasard il y a deux mois en rentrant plus tôt du bureau. Il y avait des bruits qui venaient de la chambre. J’ai tout de suite pensé qu’elle était avec un mec. J’ai ouvert la porte, ma femme avait la tête dans les jambes d’Aline, sa meilleure amie. Gros scandale. J’ai réussi à rester calme. J’ai fermé la porte. Aline est partie en vitesse et Mathilde est venue me parler au salon.


Elle était en désordre et disait : « Je suis désolée »


Je ne pouvais pas parler. Elle répétait en boucle : Je suis désolée. Je suis désolée. Pouvais-je lui poser des questions ? Oui. Elle répondait comme à un malade. J’ai demandé si ça faisait longtemps. Oui. Combien ? presque un an. Nous ça faisait deux ans qu’on était ensemble. Un an ! J’étais abasourdi. Et la question qui tue :


« Tu es amoureuse d’elle ? »


« Oui »


Je me suis levé pour me servir un verre. Whisky. Elle en voulait un aussi. Elle était assise en face de moi, son joli cul moulé dans un jeans et je ne pouvais m’empêcher de regarder cette bouche sans penser qu’une demi-heure plus tôt elle léchait la vulve de son amie. Je me suis énervé. Mathilde se taisait. Puis elle a demandé si je voulais qu’elle m’explique.


« Je veux bien »


« Ça va te faire du mal »


« Oui mais je veux comprendre »


On s’est resservi à boire et elle a commencé son récit.




« D’abord je voudrais te dire que j’ai toujours été sincère avec toi. Quand je te disais que je t’aimais, je t’aimais. Quand je te disais que j’avais pris du plaisir, j’avais vraiment pris du plaisir. Toujours c’était sincère. Crois-moi. Et je pensais que notre amour était plus fort que tout. Plus fort même que ce que j’avais pu vivre avant toi. Plus fort que mes fantasmes. Je ne t’ai jamais dit ce que j’avais vécu avant toi parce que je pensais que ton amour me ferait oublier. Je voulais tourner la page. »


« Qu’est-ce que tu as vécu avant moi ? Une histoire d’amour avec une fille ? »


« Oui mais quand on s’est connus toi et moi, j’avais rompu avec elle depuis un an. Je sortais d’une période noire où je n’arrivais pas à oublier mon ancienne copine. Puis je t’ai rencontré. Et là, miracle, grâce à toi je découvrais que je pouvais à nouveau redevenir heureuse. »


« Vous vous êtes connues en première année donc ? »


« Oui. Je débarquais de ma campagne. Mes parents m’avaient installée dans un studio dans une résidence d’étudiants. Tout allait bien. J’allais à la fac, je me faisais quelques amis, je sortais un peu. Mon copain venait parfois me voir. À la résidence, j’avais une grande amie. Elle s’appelait Séverine. On s’entendait trop bien. Je n’avais jamais eu une meilleure amie à qui je pouvais aussi bien me confier. Je lui disais qu’avec mon copain, ce n’était plus trop ça. Qu’il buvait tous les week-ends, qu’il voulait tout le temps faire l’amour mais à chaque fois il était bourré, qu’on n’avait plus grand chose à se dire. Je lui racontais ça mais aussi plein d’autres choses de la vie. Et elle pareil. C’était cool. On passait au moins une heure tous les soirs ensemble. Parfois plus. Il nous arrivait d’aller au cinéma ou d’aller manger des crêpes. Un week-end j’ai dit à mon copain que j’allais chez mes parents. Et je suis resté à la résidence. Mais il a téléphoné chez mes parents qui lui ont dit que je ne revenais pas. Alors il a laissé un message sur mon répondeur pour dire que c’était fini. Curieusement je n’étais pas triste. Je l’ai dit à Séverine qui n’avait pas de petit copain. Elle n’a rien dit mais j’ai eu l’impression qu’elle était contente. À partir de là, j’ai passé beaucoup plus de week-ends sans revenir chez mes parents. Notre amitié grandissait avec Séverine. Je me rendais compte qu’elle me devenait petit à petit indispensable. Vers le milieu de l’année, on a décidé de prendre un appartement toutes les deux. Nos parents étaient très contents car ça leur faisait moins de frais. C’était un joli T2. On avait décidé que Séverine prendrait la chambre et moi je dormirai dans le canapé du salon. Qu’est-ce qu’on était heureuses ! On était tellement contentes qu’on ne sortait presque plus le soir. On passait nos soirées à étudier puis on dînait, on se faisait de la tisane et on papotait des heures. Ou bien on regardait un film. Parfois j’étais fatiguée, alors j’allais me coucher dans son lit pour qu’elle puisse continuer à regarder la télé. Elle me rejoignait quand c’était fini, elle m’embrassait dans le cou et on se câlinait un peu. La chose se répétait assez souvent. Parfois elle allait se coucher, je traînais, puis voyant qu’il y avait encore de la lumière j’allais lui dire au revoir. Elle ou moi proposait un petit câlin et on passait une heure ou deux dans les bras l’une de l’autre à se faire des petits bisous dans le cou, sur les joues, à se caresser les cheveux. Tout ça était très chaste, très innocent, super tendre. »


« Et il ne se passait rien d’autre ? Tu n’avais pas de petit copain ? »


« Non il ne se passait rien d’autre. C’est difficile à croire pour un garçon mais je me passais très bien de relations sexuelles. Parfois je sortais avec des garçons en boîte ou dans des soirées mais ce n’étaient que des flirts. »


« Et Séverine ? »


« Elle non. Elle avait eu un copain pendant deux ans. Mais depuis rien. Elle faisait un peu peur aux garçons. »


« Pourquoi elle était moche ? »


« Au contraire. Trop belle. Les garçons n’osaient pas l’aborder. »


« Elle était comment ? »


« Une magnifique métisse asiatique, tout petite, à la fois menue et pulpeuse, avec un visage parfait mais qui pouvait effrayer au début par une apparente froideur. »


« Et comment en êtes-vous arrivées à…? »


« Les vacances de Pâques sont arrivées. Il était prévu que nous rentrions toutes les deux dans nos familles. J’étais contente, elle aussi. Nous n’étions pas rentrées depuis plus d’un mois. Nous étions tristes de nous quitter mais sans plus. Comme deux copines qui vont se revoir dans quinze jours. On a eu notre câlin qui entre-temps était devenu un rituel, un petit peu plus long que d’habitude car nous allions en être privées deux semaines. En plaisantant, on se faisait des petits bisous sur la bouche, et on s’enlaçait un peu plus fort que d’habitude. Tout à nos tendresses, je lui susurrais qu’elle allait me manquer et elle me disait : « Ne pars pas, reste près de moi ». Nous nous serrions très fort en nous disant cela. Et le câlin n’en finissait pas. Nous avions chaud, nos bisous étaient de plus en plus tendres, chacune plongée dans le cou de l’autre. À un moment j’ai eu envie de me lever. Elle m’a dit : « Ne pars pas ». J’ai répondu : « Je dois juste aller aux toilettes ». En faisant pipi, je me suis rendue compte que j’étais trempée mais je n’y voyais rien encore de sexuel. C’était juste un effet de la tendresse. Je ne pensais même pas à aller plus loin. Je l’ai retrouvée et on a convenu que je restais dormir dans son lit. On s’est câlinées encore un peu puis on s’est endormies dans les bras l’une de l’autre. Le lendemain matin, on devait partir toutes les deux tôt mais on n’a pas entendu le réveil, ce qui fait qu’on a loupé nos trains. Pour moi je ne pouvais plus partir avant le soir mais ça faisait arriver tellement tard que j’ai décidé de partir le lendemain matin. Séverine pouvait partir dans la journée mais il était hors de question pour elle de m’abandonner. On a téléphoné chez nous, on s’est fait du café puis on a prolongé notre grasse matinée. Et de nouveau on s’est fait des tendresses. Puis on s’est levées. On est allées se promener. Et le soir on est allées au cinéma. On s’est couchées tôt pour, cette fois, ne pas louper nos trains. Ce sursis nous avait rendu la séparation plus difficile. On était tristes. On savait qu’on allait se manquer. Alors on avait bien droit à un dernier câlin. Et à un bon massage. On s’est mises torse nu pour à tour de rôle se masser le dos avec une crème parfumée. Je lui avais déjà fait des massages mais ce soir-là j’étais trop tendre, je ne pouvais pas la pétrir, je la frôlais. Je mettais la crème sur son dos et je l’étalais. Je faisais les mêmes gestes que pour le massage mais en caressant. Séverine ronronnait de plaisir. Les épaules, le cou, très haut sur la nuque, les épaules à nouveau, le bas des épaules, la colonne vertébrale les deux mains à plat l’une contre l’autre, le bassin, la naissance des fesses, baisser un peu le bas du pyjama pour masser jusqu’au coccyx, remonter en massant les bords du dos, effleurer les seins, caresses à nouveau de la nuque, les joues, baisers sur les joues, elle tourne la tête, ouvre les yeux, smack. Yeux dans les yeux. Je suis toujours à cheval sur elle. Elle se retourne, je me soulève pour qu’elle puisse passer sur le dos, moi sur elle qui m’ouvre les bras. Je me penche et nous nous embrassons. Contrairement à ce que tu peux croire, c’était encore très sensuel et à peine sexuel. »


« Oh je ne crois rien, fis-je, je ne crois rien ». Je ne pouvais aligner une phrase complète tellement j’étais abasourdi par sa franchise, par la force sensuelle de son récit. Je luttais pour ne pas que ça m’excite.


« Je continue ? On arrête si tu veux. »


« Non continue »


« J’en étais où déjà ? »


« Tu la massais et… »


« Ah oui c’est ça et puis on s’est embrassées. Toutes les deux torse nu. Et là le plaisir est devenu plus évident. Ce n’était pas la première fois que nous nous embrassions sur la bouche, pas la première fois que nos seins se touchaient. Mais avant cela nous avions nos chemises de nuit, ou nos pyjamas, un sein dépassait parfois, mais c’est tout. Et nos baisers relevaient plus de la plaisanterie que du flirt. Là, c’était quelque chose de très plaisant. Nous gesticulions pour frotter nos ventres, nos poitrines et nous ne lâchions plus les lèvres l’une de l’autre. Mais nous ne mettions pas la langue. J’ai changé de position, suis venue m’allonger à côté d’elle. On s’est regardées en se disant des douceurs, on était au bord des mots d’amour. Nos bouches se sont approchées, et c’est devenu un vrai baiser. Suave. Elle avait ses mains dans mes cheveux, gardaient ses yeux ouverts dans les miens. Et sa langue tournait autour de la mienne dans ma bouche. Mes mains parcouraient son dos, descendirent vers les fesses, entrèrent sous le pyjama, frôlèrent les cuisses puis remontèrent par l’intérieur, effleurèrent la toison, sortirent du pyjama, caressèrent le ventre et enfin les seins. Sa poitrine élégante, tendue par le désir. Quelle douceur ! Je quittais sa bouche pour poser la mienne sur ses seins que j’embrassais et titillais de la langue. Elle me fit pareil et personne ne s’était jamais occupé de ma poitrine comme ça. »


« Même pas moi ? »


« Non. Même pas toi bien que tu sois le meilleur amant que j’ai eu et que tu m’aies donné beaucoup de plaisir. Mais elle, elle avait une façon de la lécher, de l’aspirer dans sa bouche qui pouvait me donner des orgasmes. Et j’en eu un d’ailleurs. Foudroyant. Je m’agrippai à elle soudain, entourant sa jambe des miennes et j’ai joui longtemps tandis qu’elle avait un de mes seins dans sa bouche. Elle fit : « Oh ma chérie », et m’embrassa dans le cou. Elle m’enleva alors mon bas de pyjama, prit un kleenex sur la table de nuit, et essuya les torrents de mouille sur la vulve et autour. Elle regardait mon vagin avec tendresse et son essuyage était un enchantement. Je la laissai faire, pantalon aux genoux, cuisses écartées, les yeux fermés. J’ai alors senti son souffle approcher de mon ventre, ses lèvres se poser, embrasser le nombril, descendre. Elle respirait fort. On sentait qu’elle n’osait pas. J’ai ouvert les yeux, elle me regardait. Je me suis relevée et je l’ai embrassée. Longtemps. En lui caressant le dos, les cheveux, les seins. Puis je lui ai posé la main sur le torse pour qu’elle s’allonge et j’ai commencé à lui lécher les seins, le ventre, le bas du ventre. Au fur et à mesure que j’avançais, je sentais l’envie devenir plus forte. Les odeurs qui émanaient de son pantalon en soie étaient terriblement enivrantes. J’ai d’abord déposé des baisers à travers mais les touches humides, les senteurs m’empêchèrent de résister plus longtemps. Elle souleva les fesses pour m’aider, et leva ses jambes. Enfin elle était nue et je la découvris par cet espace tremblant sensuel et trempé dans lequel je plongeai et que je bus, assoiffée d’elle. Voilà notre première nuit. Inutile de te dire que je suis rentrée chez mes parents pour repartir presque illico. Nous nous sommes aimées très fort. Et beaucoup. Jamais un garçon ne m’avait aimée ainsi. Et à la fin de l’année universitaire, elle m’a annoncé qu’elle partait l’année d’après aux États-Unis. Que ça risquait de finir entre nous. Et effectivement, cette annonce a brisé quelque chose. Plus rien n’a jamais été comme avant. Et au mois de juin, on a décidé de se séparer définitivement. J’ai mis un an à m’en remettre. Et puis je t’ai rencontré. »


« Tu mais…tu… », je n’arrivais pas à réagir à ce qu’elle venait de me dire. Je la regardais, tellement touchante, en jeans et tee-shirt blanc, pieds nus, jambes repliées contre ses fesses sur le canapé. L’air si désolée.


« Mais après elle tu n’as pas pensé que tu étais lesbienne ? »


« Non, j’étais triste, je pensais à elle tout le temps mais c’est tout, je ne me disais rien d’autre. »


« C’est pour ça que tu étais si réticente quand tu m’as rencontrée. »


« Oui. Quand même ça m’étonnait d’être de nouveau attirée par un homme et je ne voulais surtout pas me tromper ou faire d’erreur. Et, t’es d’accord, ça s’est super bien passé ? »


« Un de mes plus beaux souvenirs. »


On se regardait tous les deux en se souvenant de ces instants de grande séduction, de désir, qui avaient précédé la première fois où nous fîmes l’amour.


« Qu’est-ce qui s’est passé après, Mathilde ? »


« Jusqu’à ce qu’on s’installe, je n’ai jamais été aussi heureuse. »


« Plus qu’avec Séverine ? »


« Rien à voir, on ne peut pas comparer. Heureuse de façon plus adulte. »


« Et après ? »


« Après j’ai sympathisé avec Aline, la femme de Cédric. »


« Tu as eu le coup de foudre ? »


« Un coup de foudre amical. Je te jure qu’il n’y avait rien d’autre. »


« Et à partir de quand il y a eu autre chose ? Pendant les vacances en Espagne ? »


« Non. Plus tard. »


« Comment est-ce arrivé ? »


« Par hasard. Et je n’en suis pas forcément l’instigatrice. »


« Raconte. »


« Un jour, on déjeunait ensemble dans une brasserie et Séverine, que je n’avais jamais revue depuis notre rupture, est entrée. Tout de suite je l’ai vue. Elle était avec une fille. Est-ce qu’elle m’a vue ? Je pense que oui. Mais elle a fait comme si je n’existais pas. J’étais bouleversée. Soudain je ne parlais plus. Incapable de finir mon assiette. Aline ne comprenait pas. En sortant du restaurant ça n’allait plus du tout. J’ai éclaté en sanglots dans la rue. On est allées chez Aline à qui je n’ai pas pu faire autrement que de tout raconter. Je me suis alors aperçue que j’avais refoulé ce souvenir. Ça me faisait du bien d’en parler avec quelqu’un. Aline a su m’écouter, me réconforter, et elle ne me jugeait pas. Elle demanda si j’avais encore des désirs lesbiens. Non. Ce qui était vrai. Je me suis sentie mieux et après on n’en a plus jamais reparlé. Pour moi, en revanche, cette rencontre inattendue avait fait remonter des tas de souvenirs sensuels que j’avais du mal à gérer. »


« Tu ne m’en as rien dit à l’époque, pourquoi ? »


« D’abord parce qu’entre nous ça continuait à très bien se passer. Je pensais que ce n’était que le contrecoup d’avoir revu Séverine. Et que je n’y penserai plus. »


« Je ne te suffisais plus ? »


« Mais si, tu ne comprends pas. D’ailleurs ça me troublait beaucoup ces pensées. Et j’aurais préféré ne pas les avoir, je te promets. »


« Oui, bon. Et ensuite… »


« T’énerve pas mon chéri. »


« Je m’énerve pas. J’ai un peu les boules, mais continue s’il te plaît »


« J’ai commencé à aller un peu moins bien. À dormir trop. À avoir moins envie de faire l’amour avec toi, etc. »


« Je me souviens. »


« Je discutais sur Internet avec des filles qui connaissaient des choses équivalentes. Nous parlions de nos expériences. Je savais que je ne devais pas faire cela car ça ravivait des désirs mais c’était plus fort que moi. Aline, qui me voyait beaucoup moins, comprit que ça n’allait pas fort et pourquoi. J’en parlais beaucoup avec elle. Elle voulait m’aider mais je crois qu’elle était très curieuse de ça. À chaque fois qu’on se voyait elle me demandait où j’en étais. Si j’avais rencontré une fille. Si j’en avais plus ou moins envie. Elle m’avoua bientôt qu’elle aussi allait sur des sites pour essayer de comprendre ce que je ressentais, mais je crus reconnaître chez elle l’aveuglement que j’avais connu à mes débuts avec Séverine. Donc, quand on se voyait, on ne parlait que de ça. De filles qui ont des désirs contradictoires, de leurs amours, de la façon dont ça se manifeste etc. »


« Vous vous faisiez des câlins comme avec Séverine ? »


« Non. Parce qu’autant Aline que moi on ne fonctionnait pas sur la même ignorance. Aline était sur des positions théoriques, style je veux comprendre. Et moi, j’avais des désirs mais je ne pouvais évidemment imaginer les projeter sur mon amie. »


« Je ne comprends pas alors comment vous… »


« Nous non plus. C’est très étrange. En fait, un jour, elle m’apprit qu’elle avait rendez-vous avec une fille. J’étais sur le cul ! Mais elle s’empressa d’ajouter qu’il ne se passerait rien. Que c’était une fille avec qui elle discutait depuis un mois par MSN, avec qui elle s’entendait super bien. Je lui demandais si elle était lesbienne. Oui. Je n’y comprenais plus rien. »


Je subissais complètement cette conversation. Je n’étais plus vivant. Comment avais-je pu ignorer autant d’interrogations, autant de souffrances et de changements dans la tête de la femme avec qui je vivais ? Mathilde me parlait mais était-ce à moi qu’elle parlait ? Que nous restait-il de commun ? J’enregistrais sans réfléchir. Aujourd’hui encore, je ne suis pas à même de penser efficacement. Je restitue en espérant qu’un lecteur tirera parti de ce que j’écris et éventuellement me fera part de conclusions qui me feraient accéder à l’intelligence des événements. Mathilde n’arrêtait pas de se resservir du whisky. Elle en était donc à me conter la révélation pour le moins étonnante de son amie Aline.


« Elle alla à son rendez-vous. Je n’étais pas pour, mais bon. Elle m’appela ensuite pour me dire qu’elle avait fait la connaissance d’une fille géniale. Que je devrais la rencontrer. Qu’elles avaient beaucoup parlé de moi etc. etc. Le lendemain on se vit toutes les deux, Aline et moi, dans un salon de thé. Elle ne parlait que de Sophie, une étudiante de 21 ans, super intelligente, patati patata, l’air pas du tout lesbienne, ce qui semblait lui importer beaucoup, très mignonne. Elle pensait la revoir la semaine prochaine et avait parlé avec elle sur MSN dès qu’elle était rentrée chez elle. Plus Aline parlait, plus j’avais tendance à m’agacer. Je ne sais pas pourquoi. Je compris en la quittant. J’étais jalouse. Aline l’avait sentie mais n’avait rien dit. Pendant une semaine, on resta sans se voir ni se téléphoner. Puis elle m’appela le lundi suivant. Il fallait absolument qu’elle me voie. Que s’était-il donc passé ? Je fonçais chez elle. Elle était en beauté. Elle avait mis son ensemble pantacourt et veste courte en coton gaufré à rayures bleu clair et blanc. Elle avait le cheveu savamment en broussaille, l’air espiègle. Et sur les trois boutons de la veste déjà taillée pour voir le nombril, un seul servait d’attache, elle n’avait pas mis de soutien-gorge. Je lui fis des compliments et lui demandais ce qui valait qu’elle fût si belle. Avait-elle une amante ? Un amant ? Pour moi cela ne faisait aucun doute. Non, elle n’avait pas d’amante, ni d’amant, mais elle avait quelque chose à me dire. Elle faisait l’idiote, la mutine, mais je la sentais très nerveuse.



J’éclatais de rire mais nerveusement.



Elle était tout intimidée maintenant. Assise au fond du fauteuil les jambes croisées. Elle avait du mal à relever les yeux sur moi.



Et en riant, j’ajoutais :



Elle baissa la tête et derrière les cheveux qui lui obscurcissaient le visage, je vis qu’elle pleurait.


J’étais paralysée. Je ne savais plus quoi dire. J’étais troublée à un point. Moi qui ces derniers temps avais eu à lutter contre cette attirance qui s’exerçait aussi vers elle, je découvrais la même chose chez elle et pourtant la situation me paraissait intenable. D’abord m’attirait-elle vraiment ? Étais-je amoureuse ? Je n’en savais rien. Et ce qu’elle me disait me faisait très peur car n’avait-elle pas fait un transfert de tous mes récits sur elle, s’identifiant à mon homosexualité de manière purement irréelle. Mais, devant moi, mon amie pleurait maintenant à chaudes larmes, et j’en avais le cœur brisé. Je me levai et vins au pied de son fauteuil l’entourer de mes bras et la laisser pleurer sur moi. Elle réussit à se calmer. Elle déboucha une bouteille de vin et nous avons parlé toute l’après-midi. Mais pas directement de sa déclaration sur laquelle nous n’osions plus revenir. En rentrant à la maison, dans la voiture, je pensais à elle et j’étais émue plus encore que sur le moment par ce brin de fille, mon amie, qui s’était faite toute belle pour moi et qui m’avait fait une déclaration d’amour. Je dus me forcer pour ne pas faire demi-tour. »


« Mais il fallait que tu rentres. Ton copain t’attendait, qui ne s’était certainement pas fait aussi ’belle’. »


« Je t’en prie, Denis, ne sois pas amer. Je sais que c’est dur. Si tu préfères on arrête. »


« Je te demande pardon. Je n’arrive pas à faire d’humour. Raconte-moi tout. Je ne t’interromps plus. »


« Donc je suis rentrée avec ces drôles de pensées et je peux te jurer que j’étais heureuse de pouvoir te retrouver, m’appuyer sur ton calme et tranquille amour sur lequel je comptais vraiment pour chasser ces tentations. Ce soir-là d’ailleurs tu m’as magnifiquement fait l’amour. Et le lendemain j’ai appelé Aline pour lui dire que j’étais amoureuse de toi et qu’entre elle et moi il s’était passé une sorte de transfert et qu’il ne fallait pas qu’on abîme notre amitié. Elle avait l’air d’être d’accord. On a décidé de continuer à se voir comme d’habitude puisque de toutes façon on était dans la même fac. Ce qu’on a fait. Nous évitions le sujet ’filles’ et tout allait bien, on se voyait même plus qu’avant. Aline s’habillait juste plus sexy et j’étais parfois obligée de calmer les gestes de tendresse qu’elle pouvait avoir à mon égard. Mais rien ne trahissait qu’elle continuait à m’aimer et je m’interdisais de réaliser qu’elle m’émouvait au plus haut point. Nous passions tellement de temps ensemble que je m’étais habituée à une sorte d’amour chaste que je recouvrais du nom d’amitié forte. Et puis, toi et Cédric, vous êtes partis pendant les grandes vacances faire du surf je ne sais plus où et on a décidé, elle et moi, de rester bosser pour avoir un peu de fric pour l’année de licence. Vous avez suggéré qu’on habite ensemble pendant le mois où vous… »


« …tu ne vas quand même pas dire que c’est nous qui… »


« Ne sois pas con, Denis, ça aurait fini par arriver. »


« Enfin c’est grâce à nous si vous avez eu un mois pour vous ’découvrir’. Je plaisante chérie… »


« Oui et on vous remercie. Je plaisante aussi… »


« Donc tu t’es installée chez Cédric et Aline et vous vous êtes sautées dessus ? »


« Denis, voyons ! D’abord on avait notre accord à toutes les deux qui tenait toujours. Non. On était contentes d’avoir ce mois ensemble. Nous bossions toute la journée. Elle chez Leclerc, moi dans un cabinet d’avocat. Et on se retrouvait le soir. On voyait souvent des amis, ou on allait au ciné, au resto. Bref, c’était un mois de juillet classique. »


« Et rien entre vous ? »


« Non. À part Aline qui avait des tenues toujours plus affriolantes et qui avait tendance à se balader très déshabillée dans l’appart ou à s’introduire dans mon lit le matin, il n’était question de rien d’autre. »


« Et dans le lit, il ne se passait rien ? »


« Ben non. On faisait les folles, on se battait, Aline essayait parfois de m’embrasser mais toujours par plaisanterie. »


« Et toi, ça ne te faisait rien de voir ta copine nue ou d’être avec elle dans un lit ? »


« Pas plus qu’avec une bonne copine je t’assure. Du moins c’est ce que je croyais. En fait ces jeux devenaient de jour en jour moins innocents. Et j’avais de plus en plus tendance à les provoquer moi aussi. Quand ce n’était pas elle qui venait dans mon lit, c’était moi qui venais dans le sien, et le soir parfois on se faisait des vrais câlins. Et puis voilà, un matin, à force de se chercher, on a fini par s’embrasser pour de vrai. Ça a été hyper violent. Parce que nous avions accumulé beaucoup de frustrations elle et moi. Elle en se découvrant attirée par moi mais en se privant de me le montrer pour préserver notre amitié. Moi en ayant été passionnément amoureuse d’une fille et du jour au lendemain et en ne faisant plus l’amour qu’avec un garçon, tout en luttant contre des attirances homosexuelles. Bref, on vivait chacune sous un brasier. »


« Ça a du être chaud ce matin là ?… »


« Oui et non. Parce qu’on ne savait pas comment se satisfaire tellement on était excitées. On s’embrassait, on se touchait, on se masturbait l’une l’autre mais il fallait absolument jouir et éteindre vite le feu. Par ailleurs, on ne pouvait pas ne pas aller au boulot. En revanche quelle longue journée. Interminable ! Pour elle comme pour moi, ça n’a jamais passé aussi lentement. Puis on s’est enfin retrouvées. Mais tout était à refaire. On était de nouveau deux bonnes copines. Dévorées par le désir. Mais deux bonnes copines. Nous étions nerveuses. On s’est ouvert une bouteille et l’alcool nous a un peu détendues. Je suis venue près d’elle. Elle avait son pantalon noir en soie et un petit top rose. Nous nous sommes regardées longtemps. Et nos bouches se sont retrouvées pour un long, intense baiser. J’avais glissé mes mains sous son top, les siennes allaient dans l’échancrure de mon chemisier blanc dont elle défit les boutons. Nous étions calmes et profondément excitées. Profondément décidées à nous aimer. Aline avait un peu peur. Elle mit ses mains sur mes épaules pour que je me défasse de mon chemisier dont elle accompagna la chute en caressant mes bras. Elle m’enlaça, je me laissai faire, me caressa les seins à travers mon soutien-gorge triangle en dentelle. Elle avait des yeux affolés. De peur et de désir. Elle défit l’attache, regarda un moment mes seins sans oser les toucher. Puis elle approcha sa bouche, je tremblais, et les embrassa l’un après l’autre. J’avais envie qu’on aille dans sa chambre. Je lui pris la main et la conduisis jusqu’à son grand lit que nous n’avions pas eu le temps de refaire depuis le matin. Il y avait encore nos pyjamas, et je croyais sentir, stagnantes, les odeurs de l’amour. Je l’ai embrassée, légèrement sur la pointe des pieds car elle est un peu plus grande. Je lui ai enlevé son top et nous avons frotté nos bustes l’un contre l’autre en tombant sur le lit. Amoureuses et nous embrassant. Je la laissai faire la suite. Elle défit un à un les boutons de mon jeans, le fit glisser le long de mes jambes que je levais et ensuite les fesses. Elle me caressa la cheville, les mollets, les cuisses, les hanches, passant sur mon shorty en dentelle trempé. Je la contemplai. Sa bouche tendre, ses lèvres pulpeuses entrouvertes, son regard vitreux. J’écartai les jambes et m’abandonnai à mon amie intime. Qui, une fois que j’eus les yeux fermés, osa se rendre au bord de mon intérieur, m’ôta mon shorty et y posa la bouche. Elle ne fit d’abord rien que rester la bouche collée à mon sexe. Rien que ça pouvait suffire à mon bonheur. Puis je sentis qu’elle sortait sa langue, qui lécha le pourtour de ma vulve, s’infiltra, langue douce et peu active encore, qui assista le bourgeonnement de mon clitoris qu’elle lécha et prit dans sa bouche, j’eus deux orgasmes coup sur coup sans qu’elle daigne écarter sa bouche ni ne puisse me reposer de jouir. Enfin elle releva la tête, j’étais totalement anéantie, elle me toisa, adorable, et vint se blottir contre moi, m’embrassant dans le cou, mains sur mes seins, attendant que je récupère. Jamais je n’avais été aussi bien. Même avec Séverine. J’avais envie d’elle mais je savais que je pouvais attendre. Comme si j’avais la promesse de passer toute ma vie entre ses jambes. Un peu plus tard, j’eus envie de ne plus attendre et la voir offerte moi aussi. J’avais déjà eu l’occasion d’apprécier sa nudité mais à la dérobée. Là non seulement j’avais le droit mais il était souhaité par elle que je défasse les boutons du pantalon que dans mon ivresse je n’avais songé à lui ôter. Quel bonheur de découvrir la culotte en soie blanche, de la caresser, de sentir la demoiselle derrière impatiente, juvénile, infiniment tendre en ses chairs offertes, petites peaux relâchées qui protègent une cavité humide et claire. Là, une petite vulve s’ouvre sur un couloir menant à l’intérieur de son corps. Une glotte se dresse à côté, ferme et légèrement arrondie en son sommet. On peut la balancer avec un doigt. Le mouvement est décroissant. Il y a différentes épaisseurs comme une pâte feuilletée. L’intérieur reste mystère et tendresse puissante, éveil. À mesure que s’esquissait dans ma tête le poème de son sexe, mon amante s’impatientait, remuait des fesses, réclamait en des soubresauts infiniment désirables de sa fente humide que la caresse de ma langue s’ajoutât à celle de mes yeux. Alors, amoureuse, je la satisfis. Et nous fûmes heureuses. »


J’étais, on peut se l’imaginer, hors de moi parce que son discours me sortait de moi, m’excitant et m’attristant à la fois. Et hors de moi parce qu’autant d’amour de Mathilde pour Aline signifiait autant d’amour qu’elle ne me donnerait plus. Elle n’habiterait plus jamais en moi. Je venais concrètement de la perdre. Mais une amoureuse était née sous mes yeux. Je levai les yeux vers je ne sais quoi, de l’oxygène sans doute, restai fort, suffisamment illusionné par elle pour la laisser partir vers ses heures chaudes.