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Temps de lecture estimé : 20 mn
08/02/05
Résumé:  Dans la série des Sept péchés capitaux, voici l'envie...
Critères:  h fh hplusag frousses bizarre campagne collection amour cérébral revede
Auteur : Jeff            Envoi mini-message

Collection : Les Sept péchés capitaux
L'envie



Non, je ne suis pas le fameux curé de Cucugnan…

Non. Je suis juste un excellent ami d’un jeune et sympathique curé d’une paroisse du Lubéron, non loin de Cucugnan… Est-ce le lieu ? Est-ce le climat ? Je ne sais pas. Par contre, ce que je sais, c’est que cet ami qui connaît ma passion pour les portraits érotiques de femmes et d’hommes, m’a donné, dernièrement, quelques indications pour illustrer cette série sur les sept péchés capitaux. Des indications recueillies par ses soins au cours de discussions privées avec les intéressés.

Les péchés capitaux sont ceux, qui selon les textes religieux, vous envoient directement aux Enfers sans passer par la case du Purgatoire et vous bannissent à tout jamais du Paradis, puisque ce Paradis, vous êtes censés l’avoir un peu trop connu sur Terre.

Ainsi, cette série, illustre-t-elle l’avarice, la colère, l’envie, la gourmandise, la luxure, l’orgueil et la paresse… à travers des portraits et des histoires de femmes et d’hommes qui peuplent notre France profonde, des femmes et des hommes, comme vous, comme moi.


Cette série ne se veut surtout pas "moralisatrice".



L’envie.


Adrien ne va à la ville qu’une fois par mois. C’est devenu un rituel pour lui comme pour ses copains. Il prend l’autobus du matin et rentre par celui du soir. Selon un rite bien établi, il va une fois en Avignon, une fois à Carpentras et une fois par trimestre, c’est la cerise sur le gâteau, il va à Marseille. Mais là, il y passe deux jours.

Le reste du temps, Adrien reste chez lui, au village.

Ses copains du Cercle des Républicains Vertueux, seul et unique lieu de rencontres enfumé et convivial du village, le traitent de "simplet". Pour eux ce n’est pas un méchant, Adrien. Non ! Ils le connaissent et savent qu’il ne ferait pas de mal à une mouche, enfin une abeille, car Adrien est apiculteur.

Mais pour eux, il est "bizarre".

Il faut dire qu’à trente-cinq ans, bientôt trente-six, il est pas marié et personne ne lui connaît ni fiancée, ni conquêtes. Alors, pour sûr, cela leur paraît étrange un mec qui n’a ni fille ni femme… et les langues vont bon train, mais dans son dos, car Adrien est costaud et lorsqu’ils étaient tous mômes, plus d’un a déjà pris une frottée de sa part. Alors depuis, il inspire le respect, même si les commérages s’allongent quand il n’est pas là, dans les parages, ou surtout quand on le voit monter dans l’autobus de 7H00.

Quand il va à la ville, Adrien prétexte toujours, la vente de sa production.

Mais personne n’est dupe.

Jamais on ne le voit partir, chargé de cartons ou d’échantillons. Il est seulement chargé d’une vieille sacoche de cuir, plate comme une limande, usée par l’âge, tenant avec des bouts de ficelle. Le soir, à son retour, la sacoche est largement ventrue et personne ne sait ce qu’elle peut contenir. Mais Adrien la serre contre sa large poitrine, de peur que la poignée ne rende l’âme sous son poids. Bien entendu, tous lui ont maintes fois posé des questions sur son contenu, mais Adrien fait semblant de ne pas comprendre, de ne pas entendre, et ces soirs-là, il traverse le village sans faire une sacro-sainte halte au Cercle, se dépêchant de rentrer chez lui, rasant les murs des vieilles maisons.

Si les copains d’Adrien pouvaient alors le voir, là, déballant le contenu de son précieux chargement, ils en resteraient babas, verts de jalousie.

Oh, c’est même certain, beaucoup rigoleraient aussi et se moqueraient de lui.

Mais Adrien, lui, s’en fiche.

Sur la table de la cuisine, unique table de sa modeste demeure, d’un coup d’avant-bras, il pousse les affaires qui y sont étalées en permanence et ouvre sa précieuse sacoche.

Alors, il sort son contenu, minutieusement, avec gourmandise. Il pose en un tas presque parfait les différentes revues qu’il vient d’acquérir à la ville.

Quand le sac est vide, il l’expédie dans un coin de la cuisine et du plat de la main, commence à caresser la couverture des magazines flambants neufs.

Il en prend un, généralement le premier, et le porte d’abord à son nez. Il en respire l’odeur. Puis il en estime le poids. Il fait jouer rapidement les pages entre ses doigts. Enfin, il tire à lui une chaise un peu bancale et se décide à s’asseoir.

Devant lui, méticuleusement, il pose la revue, l’ouvre avec délicatesse et commence à la feuilleter. De temps en temps, avec application, il mouille son index avec le bout de sa langue et tourne les pages. Au fil de son survol des pages, car Adrien ne lit pas les textes, il ne s’arrête que sur les photographies.

Les grandes, celles qui font toute la page, en quadrichromie ou les plus petites, en couleurs ou en noir et blanc. Toutes. Il les scrute toutes. Il n’en n’oublie aucune. De temps en temps, il glisse la main sur une page. Il suit du doigt le galbe d’une jambe. Il remonte sur un ventre et, exceptionnellement, il passe un doigt tremblotant sur la naissance d’un sein.

Quand il a fini avec l’une, il attaque aussi méticuleusement la suivante, ainsi jusqu’à la fin de sa récolte du jour.

Souvent, quand il termine, il est tard.

Il en a oublié de dîner, tant il était absorbé par la contemplation des illustrations. Il s’est attardé sur certaines ou, reconnaissant d’autres, il passe alors rapidement à la suivante. C’est un scrutateur assidu qui feuillette, page après page des dizaines de revues par mois, par trimestre.

Au cours de cette scrupuleuse lecture, Adrien sent entre ses jambes l’excitation monter. Son sexe se tend, se développe. Il attend souvent un long moment pour calmer son envie de se caresser. D’abord, à travers la toile de son pantalon. D’une main, il presse juste son sexe raidi par l’excitation, le désir, tandis que de l’autre il continue à tourner les pages glacées de la revue. Ensuite, quand son sexe lui fait trop mal, il ouvre sa braguette, fiévreusement, en sort son membre en érection et, d’une main ferme, il se masturbe.

Mais il attend toujours la fin de la pile avant de faire aboutir sa jouissance.

Ce n’est que lorsqu’il referme le dernier journal qu’il a acheté, qu’il avance ses fesses sur la paille de la vieille chaise, appuie ses épaules en haut du dossier, étale ses grandes jambes et là, sur son sexe rouge et irrité, sa main entame un va-et-vient effréné qui se termine par une éjaculation, dans ses doigts.

Pour atteindre cette extase suprême, Adrien a fermé les yeux et a revu, dans sa tête, toutes les filles qui viennent de défiler devant ses yeux, sous ses mains, sous ses doigts.

Ensuite, Adrien se lève, va se laver les main, "se rembraille" et va ranger sa pile de revues.

Demain, il travaillera dessus et, après un dernier regard sur la première couverture du nouveau tas, il va se coucher.

Voilà quel est le secret d’Adrien, enfin une partie de ce secret : Adrien achète des revues pour se masturber et fantasmer à la vue des photographies.

Si ses copains du cercle le savaient, Adrien est certain qu’ils en feraient des gorges chaudes et que moqueries et railleries viendraient ternir une belle amitié.

Pourtant, il sait bien qu’il n’est pas le seul à utiliser ce type de support pour fantasmer ou se masturber… Le Paul, par exemple, lui, il s’est abonné à un journal porno qui arrive tous les mois dans sa boîte aux lettres et après ils regardent tous ensemble les annonces et matent les filles à poils… et tous de rigoler, grassement… Et le Claude, c’est pareil !

Oui, Adrien sait que beaucoup de mecs sont aussi des adeptes du papier glacé… à défaut d’autre chose !

Mais aucun ne comprendrait que lui, Adrien, qui sait pertinemment qu’on le traite de "simplet" dans son dos, puisse acheter des revues de… mode !

Et oui ! Adrien aime regarder les jolis minois et les sublimes corps des mannequins qui présentent la mode… qu’elles soient habillées ou non !

Il devient brûlant de désir lorsqu’il feuillette ces pages où elles étalent leurs corps plus ou moins dénudés… au point de collectionner les pages des plus belles, des plus désirables, des plus tentantes.

Et la nuit, quand Adrien rêve, il se voit à la place des photographes, face à ces corps de nymphettes ou de femmes-enfants ou de femmes, plus ou moins dénudées… Il est là ! Parmi elles… rectifiant le pli d’une robe, le décolleté d’un soutien-gorge pigeonnant, une mèche de cheveux qui vient cacher une épaule… Il touche, palpe, tâte, admire, soupèse, caresse, ajuste, respire… et il devient jaloux des photographes et de tous ceux qui gravitent dans cet univers… Pour lui tout seul, il voudrait que cet univers lui appartienne. À lui et à lui seulement. Et le matin, lorsqu’il se réveille, l’érection matinale lui fait mal, et son premier geste est d’aller jeter un œil sur la collection feuilletée la veille.


Cette passion, cette obsession d’envie et de désir de contempler les mannequins, ne date pas d’hier ! Oh non, elle remonte loin… en atteste le nombre impressionnant de classeurs qu’il remplit méticuleusement de photographies découpées avec soin, collées avec précautions, annotées avec application, qui garnissent des étagères et des étagères…

Cela a commencé comme un jeu…

Un jeu d’enfant, innocent aux yeux de sa mère, veuve de guerre, qui cousait et brodait pour les dames du village et de la ville durant des heures et des heures, assise à la table de la cuisine, reproduisant les modèles que les clientes lui apportaient. Elles lui laissaient de lourdes revues de mode. Sa mère trouvait alors plus pratique de déchirer la page portant le modèle commandé et laissait alors à l’enfant, qui se nichait sous la table, le reste de la revue.

Adrien, sagement, armé d’une paire de ciseaux, découpait les modèles qui lui plaisaient.

Des femmes portant jupes à volants, puis jupettes et chemisier… quelque fois, le catalogue ou la revue ne comportait que des soutiens-gorge, des culottes, des bas. Il sélectionnait alors les plus décolletés, les bas qui montaient le plus haut ou qui montraient le ventre et le pubis. Et le soir, avant de s’endormir, quand sa mère, de sa table de labeur, lui disait d’éteindre, il contemplait longuement toutes les pages, une par une et, en s’endormant, il s’imaginait qu’elles allaient venir, là, à côté, pour montrer leurs corps.

Ainsi, au fil du temps a-t-il connu ses premiers émois de garçon, ses premiers réveils humides, ses premières masturbations.

Les modèles, reproduits en noir et blanc au début, se colorièrent au fil du temps, se dévêtirent aussi de plus en plus… et Adrien taillait toujours, coupait toujours, collait toujours…

Souvent sa mère oubliait que son fils silencieux restait sous la table, d’où pendait et s’étalait largement son ouvrage, les lés de tissus débordant, et elle recevait ses clientes pour les essayages, Adrien retenait alors sa respiration et épiait toute la scène, sans en perdre une miette.

Au début, les dames riaient quand, quelques fois, elles découvraient ce garnement d’Adrien qui les observait durant ces moments où elles étaient en petite tenue. Puis, au fur et à mesure, elles en oubliaient toute la présence.

Et Adrien dévorait des yeux les jambes nues, les cuisses charnues, légèrement marquées par le froid de l’hiver, ou grenées d’une peau d’orange, ou bronzées par le soleil d’été. Il fixait avec ardeur l’entrejambe des clientes de sa mère desquels des poils noirs, bruns, blonds ou roux s’échappaient et folâtraient sur le tissu des culottes ou des gaines. Il apercevait des fesses, des rondes, des flasques, des mafflues, des à la peau brune, ou celles à la peau blanche et délicate comme une opaline. De temps en temps, en se tordant le cou, il pouvait avoir une vue en contre-plongée sur des soutiens-gorge ou, ravissement suprême, sur des seins libérés de leurs carcans. Des qui étaient gros, avec des gros bouts bruns, ou des petits, pointus ou des flasques qui pendaient lamentablement… Et ces soirs là, Adrien tout en compulsant nerveusement ses collections, cherchait à faire des rapprochements entre le réel et le papier glacé… et son petit bout de tige, qui d’ordinaire pendait entre ses jambes, se redressait et seule sa main savait soulager cette tension qui l’exaspérait.

Voilà, c’était un jeu ! Un simple jeu de gamin, innocent… mais qui était devenu, années après années, sa raison de vivre, sa passion de tous les jours.

Bien entendu, avec l’âge, les boutons, puis les premiers poils de barbe, il n’avait plus était question d’aller se planquer sous la table. Mais il avait continué à collectionner les photographies des modèles, les publicités.

Plus tard, alors qu’il faisait son service dans la marine nationale, à Toulon, il avait à plusieurs reprises abordé des femmes qui vendaient leurs charmes, rue du Canon dans la vieille ville, dans les bars à matelots. Mais chaque fois, il avait était déçu. Aucune ne correspondait aux images de ses collections. Il sortait plus souvent de ces rencontrer épisodiques et rapides plus insatisfait que lorsqu’il y était entré.

Plus tard, en Avignon, à Carpentras ou à Marseille, il avait bien essayé de s’approcher de filles de son âge, mais chaque fois c’était pareil. Elles le regardaient, le toisaient et tournaient la tête avec un air de dédain comme s’il avait été un monstre. Et pour se consoler, il arpentait les trottoirs des quartiers chauds, repérait une femme qui attendait le client, passait une fois, puis deux, et trois fois devant elle, jusqu’à ce qu’elle l’apostrophe… Alors, il la suivait… sachant souvent par avance qu’il allait sortir de là frustré, n’ayant qu’une hâte, celle de rejoindre son chez-lui pour aller retrouver ses images et se caresser en les contemplant.

Voilà pourquoi, Adrien allait une fois par mois à la ville. Voilà pourquoi, de temps en temps, il allait même jusqu’à y passer deux jours.


Il y a quelques temps, de cela, alors qu’Adrien était en train de taper le carton au Cercle, le maire qui était au comptoir en train de siroter un verre, l’a interpellé.



Adrien lève la tête, bougonnant qu’il n’est pas à la disposition du maire et que demain il doit préparer la transhumance de ses abeilles et que s’il veut lui parler c’est maintenant…

Ainsi, après la partie de carte qu’Adrien et son équipier ont perdue, le maire l’attire dehors, en le tirant pas la manche et, sur le ton de la confidence, en s’approchant de la fontaine qui est au centre de la place lui confie, sous le sceau du secret, qu’une équipe de Paris lui a demandé l’autorisation de venir faire des photos de modes dans la carrière d’ocre rouge et jaune. Mais que, comme cette carrière lui appartient, à lui Adrien, c’est donc à lui de donner son accord.

Adrien n’a retenu de cette conversation que les mots "photographies de mode". Pour le reste, il laisse faire le maire.

Adrien rentre chez lui, excité, la tête pleine de photographies, d’images, de rêves et… enfin d’espoir.

Ce soir, il ouvre tous ses classeurs, y recherche fébrilement les images de mannequins posant dans des décors naturels, sélectionne plus particulièrement les images réalisées sur des fonds rouges et jaunes.

Il créé un nouveau classeur et passe de longues heures à en contempler les pages découpées, quelques fois un peu jaunies, racornies.

En fermant les yeux, il imagine les filles se déshabillant devant lui, nues, posant d’abord sur la terre rouge, puis jaune. Elles appuient un corps gracile à même les anciens fronts de taille, se couvrent d’une fine pellicule de poussière d’ocre. Il est obligé d’aller les épousseter. Sa main frôle les jeunes cuisses, les ventres légèrement bombés, les toisons pubiennes, qu’il ébouriffe d’un petit revers de main. Il passe la main sur la pointe d’un sein qui se redresse sous la chaleur de sa paume. Elles rient. Elles acceptent ses caresses. C’est un jeu, c’est un rêve…

Son sexe se dresse. Il a mal. Depuis plus de cinq ans maintenant, il n’a pas touché de vraie fille, ni couché avec. Pourtant, il ne passe plus que des soirées à se masturber, son unique et vrai plaisir. Aussi, n’attend-t-il pas, ce soir-là, d’avoir tout compulsé, tout reluqué pour s’adonner à ses gestes favoris. Il se caresse d’abord doucement puis, au fur et à mesure que l’excitation monte dans son ventre, que ses muscles du ventre lui font mal, sa main accélère, de plus en plus vite jusqu’à ce que ses doigts soient recouverts de son sperme et qu’il obtienne l’impression de s’être totalement vidé.

Il en sera ainsi de tous les autres soirs, dans les semaines qui le séparent de cette journée dans laquelle il met tant d’espoir de voir, enfin, ses envies, ses désirs, ses fantasmes assouvis.


Quelques semaines plus tard, Adrien est sur le pied de guerre. Aujourd’hui est le grand jour. Comme convenu, il attend l’équipe à l’entrée du village, loin des yeux curieux de ses habitants.

Lorsque la caravane arrive avec près d’une heure de retard, il monte dans la voiture de tête pour les guider vers sa carrière d’ocre. Il lui ouvre le cadenas de la barrière qui en barre l’entrée, la soulève et a attend que le minibus qui ferme la marche la passe et s’arrête pour l’attendre.

Consciencieusement, il referme la barrière, boucle le cadenas et le rejoint.

Il monte à bord, et n’en croit pas ses yeux. Là, devant lui, sagement assises, cinq jeunes femmes, toutes belles et désirables.



Adrien, un peu déçu, se tourne vers elles et leur adresse juste un petit salut de la main, luttant pour ne pas les dévisager, pour ne pas les "manger" des yeux.



Adrien se tourne vers lui…



Adrien, en se tenant comme il peut tant le chemin défoncé fait tanguer et rouler l’engin, trouve la première place qui tombe sous ses fesses. Il s’installe – ou plutôt – s’y laisse choir, juste à côté d’une jolie rousse, aux lèvres rouges et pulpeuse, au maquillage des yeux vert émeraude, en accord avec son regard, au nez légèrement en trompette. Les mains croisées sous les seins, qui sont ainsi mis en valeur, en semblent avoir doublé de volume. Adrien lui jette un rapide coup d’œil. Il n’ose la fixer. Contre sa cuisse, il sent la chaleur de la sienne qui frotte contre son pantalon.

Immédiatement, une érection se déploie dans son entrejambe. Et plus son sexe se tend, se gonfle d’envie, plus il a l’impression que le sang reflue de son visage. Ses mains se mettent à trembler.

La fille lui adresse alors un magnifique sourire.



Et tout d’un coup, dans la cabine, c’est la cacophonie. Toutes crient leur prénom. Adrien, tourne la tête dans tous les sens. Il aperçois des boucles brunes, blondes, châtains qui volètent dans l’air, sous les trépidations du mauvais chemin. Puis, le calme revient, les ornières s’améliorent, jusqu’à ce qu’une, plus profonde jette Adrien et Irina l’un contre l’autre. Choc des fronts. Regards complices. Contact d’une peau fraîche, satinée, douce qui sent la poudre et le parfum. En se frottant la tête, chacun, dans un geste rapide, Adrien et Irina éclatent de rire.

Enfin les chaos se terminent, le ronflement du moteur se tait. Ils sont arrivés. Telle une volée de moineaux, les cinq mannequins s’échappent de leur siège et, sans prêter attention à l’homme qui les accompagne, elles filent vers le camping-car qui est déjà garé à quelques mètres, alors que des techniciens installent, sous les ordres d’un chef opérateur, des projecteurs, des flashes, des écrans.

Adrien, les bras ballants, appuie sa grande carcasse contre la carrosserie du minibus, ne quittant pas des yeux le camping car, où il voit des ombres bouger derrières les rideaux tirés.

Son ventre lui fait mal. Il a une furieuse envie de s’éloigner, de s’isoler pour se soulager, mais il ne veut ni bouger ni s’éloigner, car il a trop peur de perdre une miette du spectacle qui se déroule, là, devant lui.

Perdu dans ses pensées, les mains dans les larges poches de son pantalon, posées à travers le tissu du vêtement, sur son sexe, il le compresse tant bien que mal. Il ne se masturbe pas, juste il le tient. Et la chaleur de sa main le soulage, lui fait du bien.

Une voix le fait sursauter.



C’est Emilio, le régisseur qui l’apostrophe. Adrien se redresse et traverse rapidement l’espace qui le sépare du camping-car, après s’être emparé du lourd jerrican.

Il se présente devant la porte, entrouverte, frappe deux coups légers, puis deux plus forts. Personne ne lui répond. Personne ne semble l’avoir entendu, tant le babillage qui s’en échappe est fort.

Adrien respire un grand coup, re-toque à la porte et l’entrouvre légèrement.



Devant lui, le spectacle le laisse… halluciné.

Les cinq mannequins sont pour certaines à moitiés nues, d’autres sont nues. Il n’a jamais vu autant de seins, de fesses, de ventres, en une seule fois, dans un espace aussi restreint. Adrien a du mal, tout à coup, à respirer. Il ne sait que faire, quoi regarder, qui regarder. Irina, dans son coin, le dos nu, lui tourne le dos.

Son entrée passe inaperçue. Les filles ne le remarquent même pas, elles semblent toutes occupées à faire leurs raccords de maquillage.

Adrien reste là, le jerrican à la main, ne sachant que faire. Sa main se met à trembler. Et dès qu’il semble accrocher un regard, qu’il a l’impression qu’il est trop indiscret, il baisse les yeux, rougit, blêmit, a des bouffées de sueurs qui montent au front, sur les tempes.

Une coiffeuse, tire fortement sur la tignasse d’une africaine aux cheveux crépus, les seins pointés en avant, les aréoles violettes, le mamelon proéminent, les jambes croisées, laissant voir son intimité brune, aux lèvres presque charbonneuses à la fente rosâtre, le regarde, pas gênée, en riant. Enfin, la jeune coiffeuse le voit et lui désigne un coin de table où poser le récipient. Rapidement, Adrien s’exécute et tourne les talons. À peine sorti, il respire un grand coup, comme s’il venait d’oublier, durant un instant de faire fonctionner ses poumons. Entre ses jambes, contre son ventre, son sexe est droit, raide et le lance. Il lui faut trouver un coin pour s’isoler.

Profitant de la confusion qui règne dans la carrière, il s’éloigne de quelques pas, disparaît derrière les buissons et là, caché de tous, il ouvre son pantalon et soulage ses envies, son excitation. Au fur et à mesure que sa main caresse sa hampe, il revoit les quelques images, il imagine la douceur des peaux, leur chaleur, leur soyeux. Il recompose la scène qui vient de se dérouler devant ses yeux.

Alors qu’il est sur le point de jouir, les yeux fermés, à travers ses doigts, il sent une nouvelle chaleur, plus douce, plus tendre. Adrien, surpris, ouvre les yeux.

Agenouillée devant son sexe, Irina, la petite rousse, a empoigné son sexe et a joint ses mains aux siennes pour l’aider à se soulager. Elle le regarde avec de grands yeux vert clair, lui sourit et une main sur les lèvres, signe international pour demander le silence, elle s’active sur sa hampe.

Adrien, à ce contact et cette découverte, a un spasme de plaisir. Il sent qu’il va éclater, son sexe se durcit encore plus que d’habitude et il ressent déjà les premières contractions.

Dans une sorte d’état second, il voit la jeune femme se hausser, porter ses lèvres à son sexe et l’avaler. Doucement, lentement. La chaleur, l’humidité de la bouche, le pulpeux des lèvres, la dureté de la langue qui en fait le tour, avec précaution, avec application… Tous ces gestes, toutes ces sensations font fermer les yeux à Adrien, malgré sa volonté de graver dans sa mémoire cet instant, tant attendu, tant espéré.

De sa main un peu gauche, il ose caresser les cheveux, raides et collants de produits d’apprêt. D’un geste rapide, le jeune mannequin lui enlève la main de sa coiffure, et la dirige vers sa poitrine qu’il sent s’appuyer contre sa cuisse. Sous ses doigts, à travers le léger tissu d’une sorte de maillot de bain – thème de la collection qui est photographié dans cette carrière – il touche la peau douce, satinée, chaude et palpitante. De ses doigts malhabiles, qu’il bouge avec nervosité, il arrive au téton dont il va exciter la pointe, qu’il fait rouler entre ses doigts.

Mais c’en est trop ! Adrien jouit dans la bouche qui le suce, l’absorbe, l’avale. De longs soubresauts secouent son membre et loin de calmer ou d’atténuer sa raideur, il reste raide et prêt à recommencer.

Irina continue à le lécher, usant de sa langue, de ses lèvres, de ses dents.

Elle joue avec son sexe, gourmande, patiente. Quand elle estime que le membre est de nouveau sur le point d’exploser une seconde fois, Adrien la sent se relever. Elle lui entoure le cou, vient plaquer ses lèvres, ses seins et son pubis contre son corps. Elle s’accroche à lui en l’embrassant fougueusement, profondément. Jamais Adrien, même dans ses rêves les plus fantasmagoriques n’a imaginé pouvoir ressentir une telle sensation. Alors, elle se pend à son cou et Adrien l’aide à enserrer sa taille avec ses longues jambes au galbe parfait. Les deux mains sous les fesses, il a l’impression de porter un poids plume, tant elle est légère et c’est elle qui s’installe, à califourchon sur son sexe, le guidant en elle par de petits coups de hanches.

Adrien est passé au-delà d’un état second. Instinctivement, de ses mains, il palpe et empoigne ses fesses, les écartes pour mieux la pénétrer. Il est en elle ! Loin. C’est chaud, c’est doux, c’est humide. Il est au paradis !

Jamais encore il n’avait ressenti ni cette sensation, ni cette excitation avec d’autres femmes.

Doucement, tandis que la respiration d’Irina s’accélère et suit le rythme de ses hanches, de son ventre, Adrien continue à se laisser faire, comme envoûté.

Par de complexes mouvements du bassin, la jeune modèle fait monter son plaisir et celui de son partenaire et la bouche toujours collée à la sienne, grogne son plaisir.

Adrien n’en peut plus. Il explose une seconde fois !

Dans sa tête, les yeux fermés, il voit une énorme lumière blanche qui éclate. Sa violence, sa soudaineté le fait chanceler, lui strie le cerveau… alors qu’Irina lui laboure le dos de ses ongles et se colle encore plus à lui pour ne plus bouger.

Avant qu’il ne puisse reprendre ses esprits, la jeune femme descend, lui pose un rapide baiser sur les lèvre et se sauve, en laissant là, un Adrien hébété, le sexe mou, sorti de son pantalon, le souffle court, se demandant encore s’il n’a pas simplement rêvé !


Il faut toute la journée de travail pour qu’Adrien récupère un peu de sang froid, retrouve un semblant de vie. Et lui faut aussi toute cette journée, passée au grand air pour se calmer. Au soir venu, lorsque le minibus le dépose au carrefour, Irina, à côté de qui il a fait le voyage de retour, le gratifie d’un rapide baiser sur les lèvres sous les applaudissement des autres filles et leurs quolibets sympathiques.

En rentrant chez lui, Adrien, épuisé, est tout bêtement heureux. Heureux de cette expérience. Mais il ne prend pas le temps de s’interroger sur son bonheur. À peine la porte fermée, il se précipite déjà sur sa collection, cherche une photo d’un mannequin qui pourrait ressembler à Irina… n’en trouve pas.

Seules quelques illustrations peuvent représenter des filles qui pourraient lui ressembler, mais ce n’est pas Irina… et pour la première fois depuis… Adrien ne sait même pas… il n’a pas envie de se caresser en regardant les photos.

Un peu déçu, un peu frustré, il va se coucher en repensant à cette journée exceptionnelle qu’il vient de vivre. Et passe une nuit peuplée d’Irina à qui il fait l’amour dans la garrigue.


Épilogue.

Durant quelques semaines, Adrien n’a plus touché ses collections d’images. Ses nuits, il les a passé à refaire et refaire l’amour à Irina. Les réveils du matin étaient encore plus pénibles qu’autrefois.

Au Cercle, la nouvelle des prises de vues dans la carrière d’ocre s’était répandue comme une traînée de poudre et tous les copains avaient essayé de tirer les vers du nez d’Adrien qui n’avait rien su raconter. Seul son copain Pascal, berger de son état et qui le connaît assez bien, avait fait remarquer aux autres que chaque fois que le sujet était abordé, Adrien avait les yeux qui partaient dans la vague. Et de conclure :



Et tous se moquaient de lui, le raillaient alors qu’Adrien devenait rouge, blême, qu’il bafouillait et baissait les yeux.


Adrien avait très bien compris la situation. Il était vraiment tombé amoureux de cette fille. Oui, mais comment la revoir ? Comment la contacter ? Lui, pauvre apiculteur du Lubéron, comment se faire accepter d’une beauté pareille ?

C’est ainsi qu’il s’en était ouvert au jeune curé, un jour ou ce dernier venait lui chercher du miel. Le jeune curé qui connaissait bien Adrien, mais pas du tout ses penchants ni ses pratiques sexuelles, fut assez étonné de l’histoire qu’il venait d’entendre et surtout de la demande d’Adrien.



Le curé, parce qu’il était conscient de l’importance de sa mission, a su remuer "ciel" et terre. Un matin, il revient chez Adrien.



Est de lui expliquer la situation. Irina est Australienne, lui explique-t-il, et elle est repartir vivre à Sydney.



Adrien semble tout à coup foudroyé, abattu, atterré.

Le jeune curé laisse un long silence s’installer, gêné par cette conversation, ne sachant comment la continuer. Puis il reprend, après avoir pris une grande aspiration.



Quelques jours après cette curieuse conversation, les villageois levaient le nez, pour respirer et découvrir une forte odeur de brûlé. Une épaisse fumée noire et âcre envahissait la place, rentrant jusque dans la salle du Cercle des Républicains Vertueux.

C’était Adrien qui brûlait ses collection de photographies, heureux de se débarrasser de cet encombrant passé.

Dans trois jours, il part pour Sydney, à la surprise et la consternation générale de tous les village.

Son copain Pascal, lors d’une dernière tournée d’adieux, au comptoir du cercle lui dit en lui donnant une accolade :



Et tous lèvent leur verre à la santé d’Adrien, de l’Australienne et du petit qui allait naître, là-bas, de l’autre côté de la terre…