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n° 09149Fiche technique8795 caractères8795
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23/05/05
Résumé:  A tous les hommes qui ne sont pas des Apollons, à toutes les femmes qui ne sont pas fatales...
Critères:  h fplusag collègues handicap complexe travail cérébral voir noculotte hmast nopéné init exercice
Auteur : Mieline  (Mon deuxième texte...)            Envoi mini-message

Concours : Les préliminaires
Un baiser en guise de préliminaires - Version 1


A tous les hommes qui ne sont pas des Apollons, à toutes les femmes qui ne sont pas fatales…


Un accident vasculaire à la naissance, avec hémiplégie à droite… et mon cauchemar commençait : kiné, hôpital, apprentissage de la marche avec appareillage…

Les parents qui vous surprotègent le plus souvent et qui parfois perdent patience ou craquent.

Prise de conscience vers trois ans que je n’étais pas un petit garçon comme les autres à cause de cette méchante jambe qui ne voulait pas marcher et qui en plus me faisait mal…

Et le regard des autres… À l’école déjà, les « copains » qui vous bousculent. C’est si facile de vous faire perdre l’équilibre, c’est si rigolo de vous regarder tomber…


A l’adolescence, les filles… Entre celles qui ne vous voient même pas, et la pitié de celles qui ne voient que votre démarche claudicante, qui ne voient, de l’homme que vous êtes en train de devenir, que cette jambe handicapée, et qui ne voudront jamais de vous…

Solitaire, introverti, je traînais toujours cette honte de mon corps, ce corps qui me trahissait par cette jambe inerte et difforme. Ce corps traître qui se mettait à désirer… qui ne résistait pas à la vue d’un décolleté un peu osé… car si ma jambe était paralysée, mon imagination, elle, était au rendez-vous… et mon sexe, au garde-à-vous… mais quelle fille voudrait de moi ?


A force de travail sur moi-même, autant physique que psychologique, j’étais cependant arrivé, à l’âge adulte, à mener ce qu’on peut appeler une vie « normale », au moins en apparence.

J’avais un travail, une voiture (adaptée), un petit deux-pièces, bref j’étais autonome.

Sexuellement, j’avais fini par recourir au service de quelques professionnelles.

Les rémunérer me déculpabilisait un peu. Certes j’étais handicapé, mais je payais pour le plaisir qu’elles m’offraient. Mais c’était, comment dire… cher d’abord… mon petit salaire, à un poste d’employé de bureau dans l’Administration, un de ces postes réservés aux handicapés, ne me permettait pas de recourir souvent aux coûteux services de ces dames… Et, si mon corps en sortait repu, mon ego restait frustré ; il y avait quelque chose d’impersonnel, d’artificiel, dans ses plaisirs vénaux, qui me laissait un goût amer… Mais, handicapé, pouvais-je être aimé, désiré, pour moi-même, pour ce que j’étais « à l’intérieur »…


Puis il y eut Simone, une collègue. Une femme mariée, et délaissée. Plus âgée que moi d’une bonne dizaine d’années. On partageait le même bureau ; huit heures par jour, cinq jours par semaine. Au fil des mois, je m’étais attaché à elle. Un matin, elle arriva les yeux rougis.

Son couple allait à vau-l’eau, elle n’avait pas dormi de la nuit. Son mari la trompait à nouveau. Elle restait, « pour les enfants ». Je l’ai serrée contre moi, j’ai senti son corps se relâcher dans mes bras, sa tête s’appuyer sur mon épaule. Son contact et son abandon ont ému mon sexe qui commença à réagir dans mon pantalon. L’a-t-elle ressenti ? Elle a relevé la tête vers moi, j’ai croisé ses yeux humides et son âme perdue… J’ai vu ses lèvres s’entrouvrir, je crois qu’elle allait dire quelque chose, mais je ne lui en ai pas laissé le temps… j’ai pris sa bouche, c’était mon premier « vrai » baiser. Cette seule caresse que les prostituées ne vendaient pas. Elle hésita peut-être une seconde, puis s’abandonna.

Je connaissais enfin le contact d’une langue sur la mienne. J’en avais le vertige. Nos lèvres qui s’unissaient et c’étaient nos corps qui fusionnaient. Je ne savais plus où était la limite entre sa bouche et la mienne, entre sa chair et la mienne… Le temps s’était arrêté. C’était à la fois un délice et une torture pour mon corps en fièvre. Enfin, il nous fallut… respirer. Nos bouches se séparèrent. Je relâchai un peu mon étreinte mais elle ne recula pas. Au contraire, elle reposa sa tête sur mon épaule. Je lui caressai un moment les cheveux. Puis je lui relevai la tête, je voulais retrouver ses traits, son regard, sa bouche… Mais son visage était baigné de larmes. Je lui essuyai les yeux, les joues, d’une main maladroite. Je déposai mille baisers sur sa peau rougie. J’aurais voulu lui parler, trouver les mots, mais ils ne venaient pas. Elle ne dit rien non plus.


Au bout d’un moment, elle s’écarta doucement :

« Je vais préparer du café, hein… ».

Je ne trouvai rien d’autre à lui répondre qu’un :

« D’accord, si tu veux ».

Je retournai m’asseoir à ma place pendant qu’elle s’affairait autour de la cafetière du bureau.

Je ne pouvais pas la quitter des yeux. Pour la première fois depuis des mois je regardais la femme en elle. Elle n’avait pas un corps de rêve, c’est vrai, mais un corps de femme mûre, des hanches arrondies par deux maternités, une poitrine généreuse dont elle avait peut-être honte tant elle semblait l’avoir engoncée de force dans son soutien-gorge. Un pull et un pantalon classiques ne la mettaient pas en valeur.

Elle me tendit une tasse de café. Je lui pris la main et voulu l’asseoir sur mes genoux mais elle résista et se dégagea :

« Non… non, s’il te plaît… ».

Je n’insistai pas et la laissai aller s’asseoir à son bureau, face au mien.

Je ne savais plus que penser… Son « non » était-il sincère ? Ou n’était-ce qu’un réflexe de pudeur qui ne demandait qu’à être transgressé ? Son regard m’évitait, elle gardait les yeux baissés sur son café.

Avais-je été trop loin déjà ? Abusé d’elle, profité de son désarroi ? Regrettait-elle déjà ce baiser à peine volé ?

« Excuse-moi, Simone, je n’aurai peut-être pas dû, mais c’était merveilleux ».

« … le coursier ne va pas tarder à nous apporter le courrier » dit-elle sans lever les yeux de sa tasse.

Je redescendis sur terre. Ainsi, c’était ce qui la gênait, qu’on la surprenne dans ce bureau, en train de m’embrasser. Elle avait raison. Comment allions-nous gérer la situation maintenant ?

Mon téléphone retentit… un usager mécontent… il fallait se remettre au boulot.


La matinée s’éternisa. Enfin, ce fut l’heure d’aller à la cantine. Comme d’habitude, non… un peu plus rapidement peut-être, un peu plus tôt aussi, elle rangea son bureau, se leva, articula nerveusement ces paroles rituelles : « Bon appétit Ludo, à tout à l’heure ».

Elle mangeait avec sa copine Martine, du service du personnel.

Je m’installai à une distance qui me sembla respectueuse mais me permettait toutefois de les observer de loin. Elle m’avait vu arriver, avait rougi et baissé les yeux sur son assiette.

Martine avait dû lui demander ce qu’elle avait. Je vis Simone se pencher vers sa collègue, rougir à nouveau en lui répondant, et Martine sourire avec indulgence.

Que lui avait-elle dit ? Lui avait-elle confié que le handicapé du deuxième étage l’avait embrassée ?


Repenser à ce baiser me mettait dans tous mes états. Et la regarder manger… ses gestes… ces mains qui tenaient fermement son couvert, ses doigts qui pressaient légèrement le couteau pour découper la viande, ses lèvres qui s’arrondissaient autour de la fourchette, et se refermaient pour que sa mâchoire puisse se livrer pudiquement à son travail de mastication.

Et derrière ses lèvres closes, j’imaginais, je ressentais, le mouvement de sa langue. Cette langue qui était dans ma bouche il y a quelques heures encore, qui léchait la mienne, que j’aspirais goulûment…


Mon sexe, durci, écrasé dans mon jean trop serré, me faisait délicieusement souffrir. Elle but. Une goutte d’eau perla sur ses lèvres, elle la lapa d’un coup de langue… et dans mon esprit enflammé c’était une goutte de mon sperme qui lui avait éclaboussé les lèvres et qu’elle savourait… Bon sang, cela devenait insupportable… Je quittai la table sans avoir fini mon repas, abandonnant mon plateau au lieu d’aller le déposer sur le plateau roulant comme c’était la coutume.


J’allai tout droit aux toilettes des hommes. Je me branlai très vite. Dans ma tête se bousculaient mon baiser du matin avec Simone, qui était surtout mon premier baiser, et des images de ma première fois avec cette prostituée que je n’avais jamais revue, dont j’avais même oublié le prénom, faux sans doute de toutes façons, mais dont la chatte épilée resterait à jamais gravée dans ma mémoire, et la secrétaire médicale du cabinet où je faisais ma kiné, une salope qui ne portait rien sous sa blouse. J’avais aperçu son intimité luisante la fois où elle s’était baissée devant moi pour ramasser un papier qu’elle avait laissé tomber, à dessein peut-être, et moi, timide et complexé, qui n’avais rien osé… Et encore Simone, sa bouche, ses lèvres, ohh… Je sentis mon sperme monter dans ma queue. Les spasmes du plaisir ébranlèrent tout mon être.


Enfin soulagé, je rejoignis mon bureau et je pus affronter la présence de Simone un peu plus sereinement ; mais c’était décidé, je n’en resterais pas là avec elle. Ce premier baiser ne serait qu’un préliminaire à tous les plaisirs qui nous attendaient. Bon, ce n’était pas gagné d’avance, mais qu’avais-je à y perdre ?