n° 10431 | Fiche technique | 7029 caractères | 7029Temps de lecture estimé : 5 mn | 18/05/06 |
Résumé: Petite musique de fin de nuit... | ||||
Critères: fh amour volupté revede voir | ||||
Auteur : Armel (Libertin sentimental) Envoi mini-message |
Je distingue difficilement ton visage dans la pénombre. Le jour se lève à peine. Je sens déjà, au changement de ta respiration que ton réveil est tout proche.
Moi, cela fait plusieurs heures que je ne dors plus. J’ai divagué la nuit durant dans des songes éveillés, dans l’attente de ton retour. Là, j’écoute l’aube tout autant que le moindre de tes mouvements. À un moment, il me semble que tu as rêvé. Jamais de mots. Juste de courts gémissements, des pauses dans ton souffle suspendu aux images éthérées de ton sommeil…
La couette désordonnée a subi l’abandon de tes gestes inconscients. Elle ne couvre plus grand-chose, je le vois maintenant. Et j’en profite.
La lueur pâle d’un soleil lointain découpe le cadre de la vitre qui surplombe le lit. Elle s’empare d’une naissance de cuisse dénudée dans le creux d’un vallon de tissu multicolore. Des petits plis plus sombres marquent la jointure de l’arrière de tes genoux. Plus haut dans la vallée, un autre paysage souterrain prend forme lentement.
Aucun tracé rectiligne. Que des courbes. Une géométrie fluide et ronde. D’ailleurs, tout est rond dans cet univers, et il se perpétue en toi.
Le dos et les épaules sont soustraits à mon regard par un pan d’étoffe en pente douce. Pour l’instant…
J’attends encore. Je me demande si c’est bien le moment. Il règne un silence des premiers jours.
Je ne veux pas, ce matin, de ces gestes cent fois répétés. Je veux que tu m’emmènes ailleurs, que tu me montres autre chose. J’aimerais sentir mes angoisses se dissoudre dans tes bras, dans les replis de ton corps. J’aimerais découvrir tout ce que tu caches. Tout ce que nous n’avons pas encore partagé.
Ce creux de la cuisse que mon doigt parcourt doucement, je le connais déjà par cœur… Pourquoi pas, après tout ? J’ai l’impression de le trouver différent à chaque fois. Et ce matin, tout paraît plus étrange et irréel. Est-ce moi qui ai changé ? Ou bien est-ce toi qui es multiple ? Tout bien considéré, je m’en fous. Ce qui compte, c’est ce qui remonte le long de mon bras aux premières vibrations de ta chair. Je sais que cela vient de loin, de très loin, là, derrière ces cheveux aux reflets d’écorce de châtaigne.
Mon doigt s’arroge ensuite le droit d’explorer les deux extraordinaires arcs de cercle qui le guident vers un sillon bien plus profond, duveteux et tiède. Je n’ose pas encore. Je n’ai pas plus d’audace. Ce serait déplacé, presque hors de propos. La conversation est à peine entamée. Et j’ai tant de choses à te dire.
Mon voyage ne fait que commencer.
Il faut que je reparte. Ma main trace des cercles, ici, tout autour du double fruit mûr du bas de ton dos. Elle a soudain besoin de se coller à cette peau, à sa douceur particulière. Elle s’attarde à la naissance de la racine de la crête bosselée. Je pétris ensuite comme au ralenti la pâte moelleuse de tes flancs.
C’est au creux de tes reins que je trouve où reposer ma tête. Mon oreille se tend vers les résonances de ton intérieur. Mais je m’aperçois que c’est le mien qui m’envoie un message sourd et indéchiffrable, un mélange de bourdonnements et de pulsations, les pulsations de mon cœur. Et à cela viennent maintenant se mêler tous les effluves troublants que me réserve la proximité de ton entrejambe. J’y creuse mon nid. Je ne veux plus repartir d’ici.
Tu as dû percevoir dans ton sommeil cette pesanteur anormale. Tu remues, replies une jambe un peu plus haut. Je t’en prie, pas encore. Ne bouge plus. Attends… Mon immobilité te trompe. Te voilà repartie. Pas loin, tout près de mon désir.
Mon doigt se hasarde cette fois à l’entrée du défilé qui s’ouvre puis s’enfonce juste devant mes yeux. Alors qu’une fesse s’écarte légèrement de l’autre sous la pression de ma main libre, l’extrémité rencontre un peu plus loin les aspérités d’une fleur frémissante. Elle s’y arrête un instant, l’agace d’une légère pression et de caresses que la morale aurait beau jeu de réprouver. Mais je me sens si éloigné de tout ça… Cela ne me concerne pas, ne nous concerne pas…
Je dois aller au-delà. Je veux savoir. Il faut que j’éloigne le moindre doute.
C’est un coquillage à peine entrouvert qui m’attend au bout de cette excursion délicieusement indécente. Il semble fraîchement émerger de l’océan. Il s’en échappe une capiteuse exhalaison de luxure. Elle me tourne la tête. Un peu d’écume s’en écoule encore. Je ne peux m’empêcher d’en apprécier la saveur. Comme un enfant gourmand grisé par le bonheur de l’interdit transgressé. Dieu, que c’est bon ! S’il existe, d’ailleurs, il ne doit pas être né très loin d’ici.
Reste comme tu es là, ne change pas. Garde cette indécence ravageuse. Ta beauté en a les moyens. Je replonge à l’envi dans l’encre transparente de ton sexe ouvert. J’écris sur ta peau tendue des mots d’amour que tu ne pourras jamais lire, des mots qui luisent sous la lumière blafarde de l’aurore.
Cela ne me suffit plus. Je colle à la source ma bouche avide.
Cette fois, je vois que tes yeux s’ouvrent, cherchent à s’accrocher à des détails, des objets familiers de la pièce qui te ramènent doucement à la réalité. Tu me sens entre tes cuisses et te laisses aller au bonheur du plaisir qui t’envahit. Tu te cambres, soupires. Tu viens à ma rencontre.
Je ne sais si tu comprends comme c’est différent, ce matin, si tu comprends combien j’ai l’angoisse du néant et de l’oubli. Combien j’ai besoin de me réfugier au fond de ton ventre, d’y plonger, d’y retrouver la volonté de vivre… Comme je le fais à cet instant même, quand ma verge s’enfonce dans ses jardins humides et brûlants, quand mon corps, tout entier tendu à l’instar de la corde d’un arc prêt à se rompre, se forge un petit morceau d’éternité.
La houle de tes hanches ondulantes me prend au passage. Ton vagin m’attire vers l’œil de son cyclone tranquille en m’enserrant le vit, sans calcul, libéré, par la surprise, du conformisme écœurant de la lucidité. Et mes coups de bassin te font sursauter, gémir. Tes mains cherchent par tous les moyens à me faire éclater sur place, tes seins sont à cet instant d’une arrogance primitive et pure. Chaque fossette de ton dos devient la résurgence de mon ivresse.
L’amour sent, l’amour transpire, touche, parle, me jette contre les murs, avec ses visages multiples aux couleurs intangibles. La densité de tes cuisses nerveuses provoque la floraison de ma jouissance, sans fin, gorgée de foutre et d’éclairs lumineux, et tu pars aussi…
Mon bras emprisonne ta tête, ma bouche s’empare de ton mutisme…
Dis-moi, dis-moi, où t’en vas-tu dans ces moments-là ?