n° 10709 | Fiche technique | 77884 caractères | 77884Temps de lecture estimé : 49 mn | 26/08/06 |
Résumé: Florence et Jennifer. Jennifer et Luc... Vous vous dites que ça fait beaucoup pour une seule femme, n'est-ce pas ? Laissons ces personnes se reposer un peu... | ||||
Critères: hh couleurs prost grossexe anniversai amour volupté trans fellation hdanus hsodo | ||||
Auteur : Frédichounet Envoi mini-message |
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Le type qui écrit notre histoire m’attaque en me disant que je suis un personnage-clé de nos aventures à tous. Y dit aussi que "Y va s’faire ma peau, que je le veuille ou pas", que c’est mon tour, et "qu’y fait c’qu’il veut". Point. Je commence par refuser, parce que, hein, un type comme lui, j’m’en fous un p’tit peu, et puis d’abord, y sait même pas raconter les histoires ! Et y m’répond : "T’as pas le droit de faire ça à Stéviana !" Y m’fait chier. Excusez-moi d’être grossier, svp. Y m’dit encore qu’il vient de raconter les prémices des amours passionnées de Jennifer et Luc, et qu’il peut plus avancer notre histoire à tous sans "passer" par moi. Y m’supplie : "S’te plaît ?" Je commence à fléchir. "Qu’est-ce qu’il a dans les yeux c’type ?" Et il ajoute : "Tu veux que j’t’envoie Jennifer ?" Et là, je cède. Parce que moi, j’en ai un peu marre de chialer à tout bout de champ à cause d’elle.
Une experte pour tirer des larmes de quelqu’un celle-là ! Une fille adorable.
On a "plouffé" et j’ai perdu : c’est à moi de vous raconter le repas de vendredi soir. Vous savez, le premier que j’ai pris avec Jennifer. Ça n’allait pas être le dernier, parce qu’elle est plus jamais sortie de ma vie. Mais n’anticipons pas, comme disait Luc.
Donc… si vous vous en fichez, y a qu’à "sauter" la partie entre les étoiles qui suit… mais ça s’rait dommage, parce que vous allez y apprendre comment j’ai sauvé la vie de Luc, et plein d’autres choses aussi.
*****
Quand ils sont arrivés, tous les deux, je les ai vus tout de suite, dans le miroir qui me faisait face. Il l’a conduite à "notre" table, celle qu’on partage quand on dîne ensemble, quelquefois. J’ai vu Luc remuer les lèvres, mais ils étaient trop loin pour que j’entende. Par contre, j’ai bien distingué ce qu’a répondu le top-model. Elle a fait : "Une, deux", a sauté au cou de Luc, et lui a fait un grand "smack" sur les lèvres.
Elle avait l’air heureuse : le sourire n’avait pas quitté son visage depuis qu’ils étaient arrivés. Luc, quant à lui, avait l’air "allumé grave". Il lui a répondu, et ça j’l’ai bien entendu :
Il s’est pointé.
Je l’ai suivi à la table… enfin, j’devrais plutôt dire : "J’ai flageolé des guiboles derrière lui jusqu’à la table !" Cette fille m’intimidait : avec elle je n’allais sûrement pas fanfaronner… vraiment pas !
Elle s’est appuyée sur la table, s’est penchée vers moi, m’a posé un bisou léger et tout frais sur la joue gauche… et "hop !" elle s’est emparée de moi et m’a mis dans sa poche, d’un seul coup !
Jennifer lui a mis une grande claque sur l’épaule.
Luc nous regardait tour à tour, un sourire béat accroché au visage. Il avait l’air de s’en ficher, d’avoir été "oublié de nous" quelques instants.
Geneviève s’est appuyée sur le comptoir et a demandé à la cantonade, avec la voix pincée qu’elle prend parfois, et qui porte Luc à l’hilarité, à chaque fois :
Mais quand elle lui a mis une nouvelle claque, en s’exclamant :
Je n’ai pas pu m’en empêcher, et j’ai littéralement explosé de rire, pleurant et me tenant les côtes. Ils me regardaient, tous les deux, avec des yeux tellement exorbités, que je me suis plié sur la table : j’avais trop mal au ventre. Et bientôt le fou-rire a gagné tout le monde dans le bar, clients et patrons réunis.
Et bon… Tout ce petit monde s’est calmé progressivement, et Geneviève a pris le reste de la commande. Pendant qu’elle la préparait, j’ai vu la jeune fille en face de moi devenir sérieuse, tout à coup. C’était moi qu’elle regardait. Je me suis dit, dans un éclair : "Aïe… je sens qu’ça va être dur, là !"
J’ai juste incliné la tête, une fois, en déglutissant difficilement.
Il y a eu une pause, parce que la patronne posait nos verres sur la table. Elle nous a regardé avec cet air très maternel qu’elle n’avait que pour Luc et moi. Son expression n’a pas changé quand elle s’est arrêtée un instant sur Jennifer. Elle semblait "adoptée", elle aussi.
J’ai tiré la chaise à côté de moi et je l’ai regardée y prendre place, s’arrêter une seconde et passer son bras autour de moi.
J’ai pris une grande aspiration.
"On marchait, tous les deux, au bord des falaises d’Étretat, où j’étais en vacances avec mes parents. Luc y habitait dans l’auberge que tenaient Geneviève et Raymond. Bref. On cherchait le sentier qui nous permettrait de descendre jusqu’à la plage, nos serviettes sur l’épaule. Et puis, c’t’imbécile a fait une chose stupide : il s’est mis à marcher au bord du gouffre, les bras tendus dans une parodie de figure d’équilibriste. Moi je savais qu’au fond, sur la plage en contrebas, des rochers la déchiquetaient. La panique s’est emparée de moi, et je ne pouvais même plus faire le geste de le tirer de force en sécurité : j’aurais pu faire une fausse manœuvre et précipiter ce que je redoutais. Il m’a regardé une seconde, et est retourné surveiller ses pas. Et il m’a dit : "T’inquiète, ça fait des millénaires qu’elle est là, c’te falaise !" Ce n’était pas tant la falaise qui m’inquiétait que le vent qui soufflait en rafales et pouvait le jeter n’importe quand contre les rochers, à vingt ou trente mètres plus bas. Mais c’est bien elle qui a cédé : elle s’est effritée sous son pas suivant. Moi, j’appréhendais tellement sa chute, à cause de la panique, ou peut-être grâce à elle, que j’avais déjà plongé et saisi son poignet avant qu’il disparaisse. Je m’en rendais pas compte, mais je serrais son poignet comme un désespéré, lui faisant mal. Dans un cri de rage je l’ai tiré à moi."
C’est elle qui a continué :
Elle a marqué une petite pause avant de continuer :
Des restes de cette ancienne rage poussaient Geneviève à accélérer sa conclusion.
J’ai vu Jennifer se raidir sur sa chaise et tourner la tête vers moi. Elle m’a regardé méchamment. Elle savait. Elle a ouvert la bouche et je me suis dit : "Mon compte est bon !" mais elle l’a refermée sans rien dire. Un sourire rusé s’est étiré sur sa bouche, tandis que l’expression de ses yeux ne changeait pas. J’ai compris que très prochainement, dès qu’elle en aurait l’occasion, elle allait s’occuper de mon cas.
Mais elle s’est adoucie et a pris ma main dans les siennes, comme pour effacer la menace qu’elle m’avait adressée.
Mais j’ai continué, et malgré moi :
Luc a éclaté de rire et Jennifer a pouffé et s’est penchée sur la table.
Jennifer a éclaté de rire. Ça faisait un moment que je la voyais se retenir. Et sur ces entrefaites nos assiettes ont été prêtes, Geneviève est allée nous les chercher, et nous a laissés "entre jeunes".
Y avait escalope à la crème et aux morilles accompagnées de pommes de terre rissolées, et j’peux vous affirmer qu’on s’est vraiment régalé… tant par la bouche que par les oreilles. Si bien que j’ai passé une des meilleures soirées de mon existence. Et mes vis-à-vis aussi, apparemment.
On s’est quittés, ce soir-là, après qu’ils nous aient dit "au revoir", et Jennifer a fait ce que je lui ai toujours vu faire pour nous quitter : elle nous a enlacés les uns après les autres. Moi, un peu plus longtemps que les autres. Elle m’a étreint très fort cette fois-là, en me murmurant :
Puis, elle m’a fait la même bise légère que pour me dire bonjour et ils sont partis.
Le lendemain, quand Geneviève m’a appelé pour me dire que Jennifer invitait tous le monde pour le soir, je me suis dit : "C’est ce soir, ma fête !" je ne sais pas pourquoi. Quand "la famille" m’a vu partir vers la cuisine, ils ont pris mon air pour de la résignation, et c’en était : je savais déjà ce qu’elle allait me dire. Mais je me suis trompé… un peu. Elle a beaucoup facilité les choses :
Donc je leur ai tout dit, après leur avoir déclaré que jamais plus je ne les appellerais madame et monsieur.
Bon. Le type qui vous raconte (mal) tout ça me dit que ça serait bien, maintenant, de laisser la parole à Stéviana, pour la suite. Y dit que ça sera plus "fun" ! Elle va vous parler de moi un peu, d’elle beaucoup, et rassurez-vous… va y avoir du sexe !
*****
Stéviana, c’est mon nom "d’artiste", enfin devrais-je dire mon nom de scène. Je l’ai choisi et ne veux pas en avoir d’autre. Mon métier c’est prostituée. Cela en a toujours été ainsi. Du pays d’où je viens, c’est : soit vous naissez dans la "bonne famille", celle des riches, et de leur absence de problème, genre se demander ce qu’on va manger au prochain repas, soit les autres : ceux qui regardent leurs enfants maigrir à vue d’œil !
Moi, je suis née du mauvais côté. Et quand j’ai vu ma sœur souffrir de la faim, je me suis dit qu’il n’y avait pas trente-six solutions. Mais j’ai souffert, et je n’ai pas seulement pleuré la première fois que j’ai vendu mon corps à un inconnu, mais pendant de long mois, à chaque fois. J’ai souffert, bien que j’ai débuté dans le métier en tant qu’homme, certes un peu efféminé, mais un homme quand même. Et j’ai dû économiser pour m’acheter mes premières doses d’hormones femelles, et longtemps, parce qu’il était hors de question que je m’injecte de la merde dans les veines. De toute façon, je m’étais toujours sentie femme, bien avant que mes seins s’arrondissent, et que ma verge ne se rabougrisse… un peu.
Mais laissez-moi commencer par le commencement. Je suis Brésilienne d’origine, et ça a été vraiment dur d’apprendre votre si belle langue. C’est pour ça que j’attache tant d’importance à "m’exprimer" aussi rigoureusement. C’est Samuel qui m’a appris les rudiments du français. Ensemble, nous avons constaté une intelligence que je ne soupçonnais même pas (enfin, c’est lui qui le dit), et je me suis "prise au jeu". J’ai dévoré presque tous vos classiques, ouvrant un dictionnaire chaque fois que c’était nécessaire. Maintenant, je suis capable d’engloutir un bouquin de cinq cent pages en quelques heures seulement. Il n’en fut pas toujours ainsi…
J’ai débarqué un matin d’un cargo sur lequel j’étais passagère clandestine, parce que j’avais dû fuir de mon pays : quelques macs commençaient à un peu trop s’intéresser à moi. Il était hors de question que je les laisse mettre la main sur moi : je ne travaillais que pour ma sœur… rien que pour elle !
Je vous passe la traversée, ma "découverte", et l’enchaînement de mâles en rut sur mon corps, parce que j’espère de tout mon cœur que cela ne vous intéresse pas.
J’ai repris mon travail ici, dans votre si beau pays, parce que je ne savais rien faire d’autre à l’époque. Cela aussi n’a pas été facile. J’ai dû prendre contact avec des "collègues" pour me faire expliquer le montant des prestations et "tutti quanti". Donc j’ai appris les gros mots aussi, ceux qui excitent le client, pour qu’il termine son affaire plus vite. Et Samuel s’est pointé dans ma rue, enfin celle où je travaillais.
Je faisais ma pause clope, ce soir-là, un peu plus tôt que d’habitude : le dernier client était si bien monté qu’il m’avait fait mal. Mais c’était de ma faute, parce que j’avais pris peur et que je m’étais crispée. Bref, il a arpenté la rue dans ma direction, en évitant toutes mes copines, et il s’est arrêté à quelques pas de moi. Il a fait mine d’avancer, mais finalement n’a pas bougé : il n’osait pas, alors c’est moi qui ai marché vers lui, en jetant un mégot à peine fumé. Comme toujours, j’ai choisi mes mots, et je lui ai sorti les phrases apprises par cœur :
Comme il n’a pas répondu, mais n’a pas fait mine de partir non plus, j’ai pris son bras et je l’ai entraîné à l’intérieur de l’hôtel. Je sentais son biceps sous mes doigts, et je peux vous dire que : "c’était pas du flan !" pour parler comme lui. Je suis même allée jusqu’à le palper plus "sensuellement", chose que je ne faisais jamais. Certes, j’avais déjà remarqué sa carrure, mais j’avais pensé alors que ça devait être de l’embonpoint… je n’allais pas être au bout de mes surprises.
Je vous fais grâce du passage à la réception, la montée des marches, l’arrivée dans la chambre. Je lâche mon sac dans l’entrée (oui, je sais : je suis passée au présent, mais ça épuise, le passé… surtout le mien), je fais trois pas en direction du lit et me retourne. Il me suit à petits pas, regardant tout ce qui compose cette pièce, mais sans donner l’impression d’être dégoûté par le linoléum qui se décolle par endroits, ou le papier peint qui se cloque par paquets entiers. Assise sur le lit, je le vois s’arrêter à trois mètres de moi et ne plus bouger. Moi, ça fait déjà un moment qu’une idée me trotte dans la tête : je veux voir son corps.
Alors je me relève, mes yeux plantés dans les siens, et fais les trois pas qui me séparent de lui, la démarche féline. Ben oui, pour le moment ce n’est qu’un client comme un autre… même si j’ai envie de voir son corps ! C’est qu’il s’est fait beau, le bonhomme, pour venir me voir. C’est la première fois que je vois un complet veston de ma vie, alors, vous pensez si je me régale… même si je trouve le temps un peu long quand même. Mais enfin, me voilà en train de tirer sur les pans de sa chemise, et je peux vous dire que ça valait le coup d’attendre. Il y a quelque chose qui cloche chez lui, outre le fait qu’il n’a pas prononcé un mot depuis que je le "connais" : sa carrure ne va pas avec son habit. A-t-on jamais vu un manuel (ou un Monsieur Univers) en complet veston, hormis pour un mariage ou un truc de ce genre ? Je ne le crois pas. Mais surtout, qu’est-ce qu’un type comme lui fait dans cette chambre miteuse, en compagnie de quelqu’un comme moi ? Mystère et boule de gomme !
Enfin bref. Je ne vais pas rester cent sept ans plantée là, à admirer ses pectoraux et ses tablettes de chocolat ! L’heure tourne, et le temps c’est de l’argent. Lui ne m’a pas quittée des yeux (j’espère qu’il n’a pas vu que son corps me plaisait, parce que, quand ils voient ça, certains prennent des libertés…), mais je suis rassurée, parce que son léger sourire n’est pas vicelard (oups : argot !), mais amusé, je crois… ou flatté. Bon, on est pas là pour ça non plus, alors son fute y a droit aussi (merde, je me mets à parler comme lui ; mais si vous croyez qu’c’est facile de rester stoïque face à un corps pareil… pour un peu, j’en mouillerais, oui ! ce qui ne ferait pas sérieux, pour toute pute qui se respecte), et je découvre un charmant petit caleçon… plein à craquer, genre le clou du spectacle !
Alors… profonde déglutition… petite pensée : "Ma fille, reprends-toi !" et je descends le sous-vêtement. Lui, il est déjà en érection complète, et je me demande bien ce qui le met dans cet état, parce qu’à part mes regards (un peu… hum) allumés, je n’ai encore rien fait de sexuel, avec lui. Et ça, pour être en érection… je me dis que celui qui m’a fait mal, tout à l’heure, peut aller se rhabiller !
Quoi, je m’emballe ? J’ai oublié mon français correct ? Ben quoi, c’est correct ce que je dis, non ? J’pourrais m’lâcher beaucoup plus qu’ça, si j’voulais ! Parce que j’ai lu quelques "San-Antonio" aussi ! NA ! Et puis, je suis une grande fille, donc je fais ce que je veux, et si quelqu’un m’emmerde, je lui montre comment je "danse" bien la Capoeira, ok ?
Reprenons, voulez-vous… Euh, j’en étais à sa queue. De par mon métier, vous vous doutez bien que j’en ai vu un sacré paquet, et celle-ci est… belle… grosse et assez longue, mais belle. Et j’oublie que je ne dois pas montrer qu’elle me plaît… et c’est vrai… sinon, mon cœur ne s’emballerait pas comme ça, si ? Et là, j’oublie tout : j’oublie cette chambre où je gagne ma vie et celle de ma sœur, j’oublie que je ne connais personne, à part mes rapports de "collègue" avec les "copines", j’oublie le complet veston… tout.
Enfin presque. Je vais quand même piocher un préservatif sous mon string (brésilien, bien sûr), parce que faut quand même pas déconner. Dans un éclair, je me souviens des quelques garçons que j’ai connus avant de me mettre à tapiner. Il a toujours été hors de question de tricher avec cette merde qu’est le sida ! Et c’est pas un apollon (très… très) bien monté qui va me faire changer d’avis. Point.
Mais, à peine ai-je saisi la merveille que le coup part… en plein dans la gueule ! Ben oui : j’m’étais agenouillée… pour la voir de plus près. Je me dis : " Ma fille, y a pas trente-six solutions… soit il était vraiment excité, soit il est éjaculateur précoce, soit il est puceau !" Je me relève et lui fais face, les joues dégoulinantes, et si je m’attendais à un air déçu et gêné, moi je ne le suis pas, déçue, mais il y a autre chose aussi… de la peur ! Et de ça, je n’en veux pas. Alors je lui montre le même visage que lui. Et c’est vrai que je suis gênée avec ma face profanée… C’est vrai que je suis déçue aussi, parce que je n’ai pas eu le temps de m’occuper de sa queue, qu’elle est déjà toute molle ! En revanche, je n’ai pas peur, parce qu’il ne semble pas devenir violent à cause de ce qui vient de se passer. Je lui montre mon pouce et je lui demande : "First ?" parce que j’ai quelques notions d’anglais aussi. Dans ma tête, je suis en train de me dire : "Pourvu que ça soit ça !" Il ne semble pas comprendre, dans un premier temps, et il me fait "oui" de la tête, en rougissant. Il la laisse dirigée vers le bas, et n’ose plus me regarder.
C’est la première fois que je "tiens" un puceau de ma vie, alors je lui relève la tête d’un doigt sous le menton et lui souris, comme pour lui dire : "Ce n’est pas grave", ou "Je trouve ça charmant". Il me sourit en retour, un peu peiné, alors j’accentue mon sourire, lui caresse l’épaule, et lui montre qu’il doit m’attendre. Il comprend.
Dans la salle de bains, face à moi-même, je me dis : "Bon, ma fille (je m’interpelle toujours ainsi, vous avez remarqué ?), c’est bien beau tout ça, mais… et l’argent ?" En même temps je fais couler l’eau. Ça commence à coller par endroits. Enfin je trouve le tiède… et je fais une deuxième chose idiote, après celle d’être tombée amoureuse de sa bite : je recueille un peu de sperme à peu près frais et le goûte. Il est bon. Exactement comme je m’y attendais. Je me lave le visage en me traitant de : "connasse et inconsciente", et retour dans la partie chambre.
Je remarque tout de suite deux choses : il est assis sur le lit et a sorti son portefeuille. Je m’assieds à côté de lui et tout de suite, il me dit : "Combien" et fait, avec le doigt pointé vers son bracelet-montre, un tour de celui-ci dans le sens des aiguilles. Moi, je me dis : "Tiens, il est pas muet, finalement, et il a trouvé une façon honorable de se sortir d’une situation embarrassante", et je lui réponds :
Il me montre deux tours de cadran et me demande :
Et là, ça mérite réflexion, parce que ça fait trop de "choses pour la première fois" : d’abord, je palpe son muscle, ensuite, je tombe sur un puceau qui m’explose à la tronche, je "tombe amoureuse" de sa queue, je goûte à son sperme (ben oui, j’allais pas aller en recueillir au fond d’un préservatif !)… et enfin ça : les autres, enfin ceux qui étaient allés jusqu’à une heure, s’étaient contentés de ça ! Mais je fais "oui" de la tête. Il sourit, sort six billets de cinq cent francs flambant neufs de son portefeuille, et me demande :
Et comme je ne saurais pas lui expliquer que trois heures avec lui nous porteraient à plus d’une heure du matin, ce qui est sacré pour moi parce que c’est l’heure à laquelle j’arrête, je décide de laisser tomber, et lui souris. Je suis heureuse… vraiment, parce qu’en une nuit, je vais pouvoir payer mon loyer et envoyer un gros supplément à ma petite sœur !
Oui, ok, je suis heureuse. Mais qu’est-ce que je vais faire de lui pendant trois longues heures ? C’est que c’est long trois heures ! Mais bon : je ne peux pas me permettre de refuser une telle somme, parce que, si vous saviez ce que l’autre Thénardier me prend pour un mois de loyer, plus ce que je me suis fixé à envoyer à Angela chaque semaine, sans compter ce qu’il me faut pour vivre… !
Je me lève et, devant lui, chose que je ne fais jamais avec les autres, je range les trois mille francs, avec le peu qui y est déjà, dans ma petite caisse. Et quand je me retourne, il est debout lui aussi. Il me regarde avec des yeux attendris, et pas du tout "propriétaires" de ma personne. J’apprécie, parce que si vous saviez combien l’ont, ce regard, une fois qu’ils ont payé.
Comme on a le temps maintenant, je me joue un mambo dans ma tête et, tout en commençant à danser sur cet air langoureux, je promène mes mains le long de mon corps, par-dessus ma robe, mes yeux plantés dans les siens, ma bouche entrouverte. Ça a l’air de lui plaire. Je ne fais que de petits pas, me concentrant sur mon déhanché, les gestes de mes bras, l’expression de mon visage. J’ai toujours aimé danser, et ça me manquait, figurez-vous ! Surtout que je vois (!) son désir de moi augmenter. Et là, je me dis :
"Il veut que ce soit inoubliable, ma fille, alors, et je sais que tu en a envie, fais en sorte que ça le soit… parce que s’il revient, c’est le jackpot !"
Quand je fais mine de relever ma robe, sans la détacher derrière, il me fait : "Stop, please", une main levée. Il réduit la distance entre nous, lentement, sans donner l’impression de se ruer sur moi. Il saisit mes mains en douceur, les remonte au niveau de ma taille, devant moi, mais ne s’y attarde pas. Un sourire très doux, renforcé par l’expression de ses yeux, se dessine sur son visage un peu viril, ses sourcils fournis, le noir de ses iris. Il n’a pas l’air d’être timide, bien que ce soit sa première fois, comme s’il avait décidé que c’était une bonne idée, finalement. Je me noie dans sa douceur, et je sens à peine ses mains remonter le long de mes bras, les suivre en une caresse effleurante. Quand elles arrivent à mes épaules, il fait un petit pas en avant et me coule à l’intérieur de son corps. Et là, contre son torse de mastodonte, je me sens fondre… Encore un truc à classer dans les premières fois, parce que c’est la première fois qu’un client me prend ainsi contre lui à ce stade de la passe. Je le classe volontiers là, parce que ce n’est pas sexuel : ses bras entourent mes épaules, et non ma taille. Il ne me serre pas, non plus. Il me laisse le choix de rester dans ses bras ou pas.
Et si vous croyez que c’est facile, même pour quelqu’un comme moi, de ne pas craquer, face à un inconnu qui se comporte comme si j’étais sa petite amie, alors que je ne suis qu’une pute… Je tente de me rappeler, dans l’océan de ma confusion, la dernière fois que quelqu’un m’a prise dans ses bras, juste pour du réconfort… C’était Angela, ma petite sœur, parce qu’elle ne savait pas comment me montrer sa gratitude autrement… il y a maintenant presque trois ans ! Trois ans que je ne lui ai pas dit que je l’aimais, parce qu’elle se sentait coupable de m’avoir poussée sur le trottoir… trois ans que je n’ai pas vu son visage. Alors je pleure, mais pas seulement pour ça : aussi parce que je n’en vois pas la fin, parce que je ne parviens pas à économiser assez pour la ramener vers moi, parce que je ne veux pas qu’elle soit poussée aussi à faire la même bêtise que moi !
Et c’est bon de ne pas se dire que l’homme qui vous tient n’attend que du sexe de vous, uniquement parce que vous êtes payée pour ça. Alors j’éloigne ma tête de ses muscles et je le regarde, les yeux baignés de larmes, le cœur rempli de peurs. Je lui demande (oh ! comme je hais de ne pouvoir le lui formuler plus… humainement !) :
Visiblement, il n’aime pas me voir pleurer : ça rend ses yeux tout humides aussi. Mais il me fait "non" de la tête, et comme je ne l’ai pas non plus, je me laisse glisser le long de son corps. Je vous ai dit qu’il ne me retenait pas vraiment contre lui, et il ne le fait pas plus quand je m’agenouille, que je glisse sa queue toute molle entre mes dix doigts, et que je la prends dans ma bouche, là, à presque cinq mètres du lit. Je le regarde, en "machouillant gentiment" sa queue qui n’est plus tout à fait molle. Il secoue la tête, les yeux un peu désespérés, mais ne me retient pas plus. Les sexes circoncis, je connais déjà et j’aime sentir son gland directement sur ma langue, sans qu’un quelconque prépuce ne gêne la caresse. Je sais qu’il va aller loin, au fond de ma gorge, peut-être provoquer un réflexe de haut-le-cœur, mais je la laisse glisser quand même, en "allumant" mon regard toujours rivé à ses yeux plus vraiment ouverts, un peu fous. Et, quand je la laisse ressortir, je dois écarter les mâchoires, pour que mes dents ne le blessent pas. Je regarde son sexe, couvert de ma salive, luire dans la semi-obscurité des soixante watts de l’ampoule nue du plafond, et je ne peux empêcher ma langue d’aller le lécher, comme si elle l’avait décidé d’elle-même. Maintenant je la pompe, prisonnière de mes lèvres, de plus en plus vite : je VEUX sa semence, je l’avalerai… je le boirai, lui. Et tant pis si une pute ne doit pas faire ça !
Et tant pis… si je tombe amoureuse de lui, parce que ça n’a plus d’importance… parce que je sais que c’est inutile, illusoire de croire que, ma sœur, je la reverrai un jour !
Et quand j’accueille son orgasme au fond de ma gorge, je l’accompagne, le fête, le prolonge… Je le rends vraiment fou parce que je ne le reverrai probablement plus jamais. L’instinct seul m’a poussée à agir ainsi, parce que pour ma clarté d’esprit… elle est morte quand je me suis laissée glisser à ses pieds comme une vulgaire esclave qui quémanderait la clémence de son maître.
Et je pleure à nouveau. De toute façon, je n’avais pas vraiment cessé de pleurer pendant la fellation. Je pleure parce que tout cela est vrai : ma sœur, jamais je ne la reverrai… Je suis seule, toute seule dans un pays inconnu, sans aucun ami… Le mien, de pays, m’est tellement interdit qu’il est carrément sur une autre planète… Je m’avilis de la pire des façons pour maintenir deux paumées dans une vie injuste, inutile… tellement, mais alors tellement condamnées que c’en est presque comique !
Je sens ses énormes battoirs se glisser sous mes aisselles et me remettre debout. Je n’ai plus la force d’ouvrir les yeux. Il y a si longtemps maintenant que je me comporte comme une femme forte, déterminée, inflexible, que j’avais oublié combien il était bon de s’abandonner à un chagrin tel que celui-là… impitoyable, à vous foudroyer sur place !
Et puis je sens sa langue lécher mes joues. Il a pris ma tête entre ses deux mains, sans vraiment m’y obliger, et me lèche en murmurant des mots que je ne comprends pas, qui ont l’air si doux que ce ne peut être que des mots de réconfort. J’aime son haleine. Il lèche aussi ce qui est de lui et qui a coulé du coin de ma bouche. Et il lèche mes lèvres aussi, et là, je me dis : "Ne le laisse pas faire ça, même s’il ne sait peut-être pas qu’on ne fait pas ça avec une prostituée". Mais j’entrouvre la bouche et intercepte sa langue, parce qu’une petite voix, dans ma tête, me dit : "À quoi bon, de toute façon… Aime-le toi aussi. C’est peut-être le dernier qui va se comporter comme ça avec toi… Aime-le, parce que c’est probablement la dernière personne de qui tu recevras de l’amour !"
Alors je lui demande de l’amour, de tout mon corps, en enroulant mes bras autour de ses épaules. Et c’est bon de sentir une montagne de muscles vous envelopper de douceur, jouer avec votre langue, la caresser, et caresser aussi le creux de vos reins, votre dos, effleurer vos fesses, mais le faire timidement, comme s’il ne savait pas qu’il les a achetées, avec le reste. Et je l’embrasse aussi, même si je sens son corps s’éloigner de moi. Je comprends où il veut en venir quand je sens son corps fléchir. Et comme je ne peux pas arrêter de l’embrasser, je l’accompagne. Je continue même lorsque je suis dans ses bras, survolant le sol, en ayant l’impression que je ne pèse plus rien.
Il me laisse glisser dans le lit mais reste collé à mes lèvres, et il continue de m’embrasser un moment. Je sens ses mains se promener sur mon corps, par-dessus ma robe. C’est une robe-fourreau très pratique. Très près du corps, elle épouse mes formes en me marquant à la taille. Elle peut se retirer de trois façons : en glissant vers le bas, ou vers le haut, ou encore en utilisant la fermeture éclair, dans le dos. D’abord, il cesse le baiser et se met à genoux à côté de moi. Son regard, planté dans le mien, est si doux, attentif, calme. Il choisit la dernière option et la fait descendre, très lentement, après que je me sois lovée plus étroitement contre lui, pour l’aider. Puis il remonte ses mains et saisit le haut du vêtement qu’il commence à faire descendre, à la même vitesse que la tirette quelque temps plus tôt. Il ne force pas quand il sent que la robe ne descend pas plus bas que le haut de mes seins, mais il effeuille mes bras, l’un après l’autre, jusqu’à pouvoir dénuder ma poitrine menue, qu’il a l’air d’aimer. Mes seins, c’est la partie de mon corps que je préfère, juste avant mon visage, parce qu’ils sont si féminins, si ronds et fermes, qu’ils font, du haut de moi, une vraie poitrine de femme. Et je suis si heureuse de voir qu’il les aime aussi, qu’il les caresse dans un effleurement, qu’il les embrasse comme il embrasse ma bouche.
Je ne peux empêcher mon corps de frissonner quand ma robe glisse le long de mes cuisses, passe mes genoux et continue sa course vers mes pieds, et au-delà. Je tremble parce que j’ai peur, soudain. Peur qu’il s’enfuie comme d’autres l’ont fait avant lui. Parce que lui, il pourrait me tuer s’il n’acceptait pas mon pénis. Je me suis raidie, mais lui continue, encore et encore, d’aimer mon corps, de me le montrer avec ses yeux, de m’embrasser de sa langue, de ses lèvres, de ses doigts. J’ai l’impression d’avoir affaire à un expert en caresses et pas du tout à un puceau, comme si moi seule existait pour lui. Il rend si longtemps hommage à mon corps que j’ai la sensation que les trois heures sont écoulées depuis longtemps, quand il laisse ses baisers éveiller mon ventre, et descendre encore, jusqu’à prendre mon pénis, à travers mon string, sans aucune hésitation d’aucune sorte. Comme s’il se fichait de savoir à quel sexe j’appartiens. Mais quand, dans un geste d’impatience, il se débarrasse de mon slip et prend ma verge en bouche, je crie, parce que c’est si doux que je crois partir alors que je ne suis même pas en érection. Il aspire même, en une caresse vorace, mes couilles, leur rend hommage, et les aime comme il a aimé tout ce qu’il a embrassé jusqu’à présent.
Contre toute attente, il me réconcilie avec cette partie de moi qui me fait si honte, qui est tellement peu moi.
Mon pénis, qui n’en est plus un, parce que ça devient une bite, il le suce, le choie, l’aspire, lui rend son caractère d’homme. Il me tétanise en à peine une minute… peut-être moins. Et il avale tout. Et moi je deviens folle ! Parce que c’est tellement fort ! Je ne peux même pas hurler, parce que la surprise m’a vidé les poumons. Les étoiles qui tournent, dans ma tête, jamais je ne les avais vues. Elles sont le résultat de sa caresse, mais aussi de mon désespoir, de mon abandon… de mon acceptation de lui. De lui en entier.
Longtemps après que j’aie récupéré, je suis là, dans ses bras. Il me caresse le dos, moi allongée, la tête posée sur ses pectoraux. J’ai juste conscience des mots qu’il laisse couler de sa gorge, dans un murmure. Des mots auxquels je ne comprends rien, mais qui chatouillent mes tympans, qui prolongent la volupté. Parfois je crois qu’il chante, tant j’aime les intonations de sa voix. Les douceurs prennent naissance dans ses poumons. Je le sais parce que je peux les entendre, à travers sa peau. Oh, comme j’aimerais qu’il chante pour moi !
Et il le fait. Il chante une vieille chanson du vieux Louis… Louis Armstrong. Elle devient, instantanément, ma chanson préférée :
You are so beautiful… to me
You are so beautiful… to me
Can’t you see
Everything I hope for
You’re everything I need…
Je ne sais pas s’il a chanté ça pour moi, ou si ça lui est venu comme ça, mais quelle importance ? Il chante bien, et ces mots-là je les comprends. Et je suis heureuse, comme a pu l’être celle pour qui Louis a chanté. Parce que ne vous y trompez pas : toute femme rêve un jour d’entendre ces mots prononcés par quelqu’un qui l’aime, elle, d’une voix aussi sincère. Et si l’une d’entre elle vous dit que ce n’est pas vrai… elle ment.
Vous devez vous dire que ce n’est pas très plausible, une pute qui tombe amoureuse d’un client, hein ? Ne mentez pas, je le sais ! Mais je vous rassure tout de suite : ce n’est pas ça. Il y a plusieurs raisons à mon comportement : toutes les "premières fois" de ce soir m’ont conduite à agir, presque "malgré moi", comme je l’ai fait. Ensuite, j’ai craqué, et ça, c’est arrivé je ne sais comment. Peut-être à cause de son comportement à lui, ce qui me conduit à la troisième raison. Je ne sais pas non plus si je pourrais agir autrement… parce que ce n’est pas moi qui "conduis", c’est lui. Il a décidé presque tout seul que ce serait trois heures, m’a arrêtée quand j’ai voulu lui faire un strip-tease, m’a prise dans ses bras. Bon, j’vais pas vous refaire le film, mais il a presque tout fait tout seul, non ?
Mais le plus important, c’est qu’à chaque fois il m’a laissé le choix. Et maintenant, je l’ai encore, de rester comme ça, de profiter de son giron, de son réconfort, sans me soucier du temps qui tourne parce qu’il m’a payée pour du sexe. Il a l’air de s’en ficher, lui, alors qu’il suffirait qu’il regarde son bracelet-montre posé sur la table basse. Moi aussi, je m’en fiche un petit peu, des minutes qui s’égrènent, mais, pour être tout à fait honnête avec vous, c’est bien moi qui lui demande de m’embrasser encore. C’est encore moi qui, pendant le baiser, roule sur le dos et l’entraîne avec moi, l’accueille entre mes cuisses ouvertes, frotte nos verges l’une à l’autre. C’est moi qui l’étreins en gémissant, moi qui me fais un abri dans lequel rien ne pourra m’atteindre, avec sa masse. Moi qui lèche sa langue, ses lèvres, son visage. Je pleure un petit peu, mais rien que pour moi. J’ai décidé que ça serait un moment pour moi, comme une égoïste… mais j’ai le droit, n’est-ce pas ?
Oubliés, les trois mille francs au fond de ma petite caisse. J’ai envie de lui. Je sais qu’il me fera l’amour, lui ! Il ne se contentera pas de m’enculer en ne pensant qu’à lui-même. Alors, avec mes mains, je caresse son dos et vais chercher son cul, en écarte les globes pour taquiner un moment son anus, passer un doigt autour de la corolle, aller le fouiller d’une phalange. Il a l’air d’aimer, parce que son baiser se fait plus "cochon", et il gémit un peu, dans ma bouche. Mes deux mains font le tour de son bassin en le caressant et, après avoir creusé le ventre, je les faufile entre nous. Il m’aide un peu en se décollant de moi, mais il continue de m’embrasser. Appuyé sur les coudes, il peut laisser ses mains caresser mes tempes, mes longs cheveux, mes joues. Sa verge, contre la mienne, a retrouvé toute sa superbe. Je les prends toutes deux entre mes dix doigts et les masturbe ensemble un court instant, avant de le pousser, mais gentiment, à descendre un peu. Je regrette un peu qu’il doive arrêter de m’embrasser, mais maintenant je le veux en moi. Je n’en peux plus d’attente. Je veux qu’il me prenne comme ça, à la missionnaire, parce que c’est comme ça qu’un amoureux aime sa fiancée. Je sais que je n’aurai pas mal, parce que je suis déjà ouverte pour lui. Je suis prête parce que je n’ai jamais espéré quelqu’un comme je l’attends, lui !
Mes lèvres, mes yeux, les ailes de mon nez qui palpitent, tout cela l’appelle tellement qu’il ne peut faire autrement que de remonter. Le feulement d’une lionne accueillant l’assaut de son roi, répond à la pénétration, et meurt dans sa bouche. Et oui, je n’ai pas mal. Je commence à ressentir LA sensation alors qu’il n’est même pas enfoncé complètement en moi. Déjà, je ne peux m’empêcher de crier, alors qu’il commence à peine à aller et venir en moi, sans attendre que sa queue soit entièrement en moi. Oh ! comme je l’aime, d’avoir compris que c’était maintenant, tout de suite. Que ça n’allait pas durer. Je ne sens la dureté de mon pénis que lorsqu’il le prend dans une main. C’est un magicien, mon homme ! Comment peut-il me masturber aussi tendrement, et me besogner comme il le fait en même temps ?
C’est moi qui pousse mon corps contre sa bite pour qu’il me prenne à fond, parce que je sens que ça s’allume de partout, en moi. Jamais les murs de cette chambre n’avaient contenu mes cris de jouissance à moi. Encore un "truc" à classer dans les premières ! Dans un absurde éclair de lucidité, je me rends compte que je ne connais pas son nom, parce que je voudrais le crier maintenant. Je voudrais lui crier que je l’aime, pour tout ce que je ne connaissais pas de moi, et qu’il est en train de me révéler. J’ai explosé bien avant que lui ne le fasse, mais il me rejoint bien vite. Moi, de toute façon, je vois encore des étoiles danser dans ma tête, quand son sperme se répand en moi, tandis qu’il coulisse encore une ou deux fois dans ce conduit qui, je le sais maintenant, a été fait pour lui. Que tous les clients ont préparé pour sa venue à lui… pour qu’il me fête comme il l’a fait ce soir !
Je me suis endormie. Et quand je me suis réveillée, en plein milieu de la nuit, il n’était plus là. Je n’ai pas pleuré, parce que j’étais furieuse contre moi ! Mais qu’est-ce qui m’avait pris ? Je m’étais laissée aller à croire que ça avait été de l’amour ? ÇA ? Alors qu’il n’avait fait que payer une pute ! J’avais été folle, oui ! Et puis quoi d’autre encore ? Revenir le lendemain, m’arracher à cet enfer à bord d’une limousine blanche, comme dans "Pretty Woman"… M’épouser ? Mais reprends-toi, espèce de connasse ! T’es qu’un mec qui se prend pour une femme… une pute, de surcroît !
Ah ça oui, j’étais vraiment furieuse… mais pas seulement contre moi. De quel droit s’était-il permis de se comporter ainsi avec moi ? Il n’avait pas le droit de me faire ça, de me mettre mon foutu nez dans la merde de mon existence, de me faire prendre conscience que je fonçais dans le mur en entraînant ma sœur avec moi!
Heureusement qu’il n’allait pas revenir ! Il avait pas intérêt ! Parce que ses doux sourires, j’allais les lui enfoncer dans la gueule à coups de pied, oui ! Non mais, il allait apprendre à jouer avec la sensibilité des gens !
Une semaine plus tard, il est revenu. Je n’ai pas pu lui casser la gueule parce qu’il souriait trop. Et puis, il tenait deux ou trois bouquins dans sa main gauche. Ça a éveillé ma curiosité. Il m’a fait une bise légère sur la joue droite, après m’avoir dit : "Bonjour", puis a pris ma main et nous a entraînés à l’intérieur. Je n’avais pas pu placer une seule parole.
Dans la chambre, il s’est dirigé vers la commode où était rangée ma caisse, et il l’a sortie de son tiroir. Puis il a mis la main dans sa poche. Avec un sourire amusé, il m’a mis en éventail dix billets de cinq cent francs, devant les yeux.
Ça m’a collé un vertige inimaginable ! Cinq heures ! Il voulait s’enfermer dans cette chambre miteuse, avec moi, pendant cinq heures ! Il a rangé les billets et, après avoir remis la caisse à sa place, est allé s’asseoir sur le lit. Il a tapoté la place à côté de lui, une lueur d’invite au fond des yeux. Les bras ballants le long du corps, je suis allée m’asseoir à la place désignée, comme une bonne petite fille obéissante. Je me sentais hébétée… perdue. Je fixais ce qu’il tenait dans ses mains : un petit livre pas très épais, avec une couverture illustrée d’un dessin naïf aux couleurs criardes. Avant de commencer, il a attiré mon attention en tapotant mon épaule. Je l’ai regardé et il m’a dit, tout en posant sa main ouverte sur son torse : "Samuel, Sa… muel" !
J’ai répété ce qu’il m’avait dit… et j’ai compris ! Et comme je pouvais lire la même lueur d’invite que tout à l’heure, j’ai répondu, de la même façon que lui : "Stéviana". J’étais tellement abasourdie que j’avais failli lui donner mon vrai prénom, celui du garçon que j’étais, il y a longtemps.
Et la lecture a commencé. Patiemment, il m’a dicté les syllabes, en me les désignant du doigt, me faisant répéter à chaque fois, reformant les mots pour que je les répète aussi. Et on est arrivé au mot "Fin". Ça faisait un peu moins de trois heures qu’on était dessus. Un livre d’à peine trente pages ! Il restait plus de deux heures ! Il ne donnait pas l’impression de vouloir s’arrêter, puisqu’il a pris le second livre. Il voulait me tuer, ou quoi ? Je n’avais rien compris du précédent… pas un traître mot !
Et là, les choses sérieuses commençaient, parce que ce livre, il ne faisait pas trente pages, ni même cent, mais trois cent cinquante, au bas mot… et en petits caractères !
Savait-il qu’il m’avait payée pour coucher avec moi ? Il n’en donnait pas l’impression ! Il a continué, après que je lui aie offert de l’eau. C’était un "méchant livre", qui m’a tiré des gouttes de sueur grosses comme le pouce, au moins. Dans le temps qui nous restait, on a pu en lire à peine quatre pages, et encore !
Il est parti, mais avant il m’a dit quelque chose : "Samuel… France, et Stéviana ?" m’a-t-il demandé, en insistant sur la question. Quand j’ai enfin compris, je lui ai répondu : "Brazil". Il m’a fait une autre bise légère sur la joue droite, et m’a dit : "Au revoir", en me caressant la joue gauche et en me souriant.
Plus tard, seule dans mon lit, je me suis demandé pourquoi il n’avait pas voulu coucher avec moi ? Se pouvait-il qu’il ne "m’aime" plus ? Et puis, je me suis dit : "Toi non plus, ma fille… tu n’as rien fait pour !" Se pouvait-il que ce soit si simple que ça ? Je me suis promis de le vérifier dès la prochaine fois.
Mais le jeudi suivant, une semaine plus tard, il est arrivé en voiture, est descendu du véhicule, en a fait le tour, m’a invitée à y prendre place, et est retourné s’asseoir côté conducteur. Là, il a pris un gros livre sur le tableau de bord et l’a ouvert au mot "anniversaire". C’est le premier mot de votre langue que j’ai compris, parce que la traduction du mot suivait, en portugais, ainsi qu’une petite définition. Puis il a tapoté son thorax. Je l’ai vu chercher un autre mot, ensuite, et il a caressé ma joue, puis m’a montré du doigt ce qu’il avait trouvé : "invitée". Le dictionnaire était vraiment complet : les verbes à l’infinitif étaient suivis de leur participe passé, et de leurs variations. Et j’ai compris qu’il allait m’emmener, pour ce soir. Que j’étais son invitée.
Il m’a conduite chez lui et, passée la porte d’entrée, je n’ai plus pu faire un pas : son hall était plus grand que ma chambre !
Ça avait l’air de l’amuser, que j’ouvre de grands yeux devant l’enfilade du couloir qui s’étendait en face de moi. Il faisait au moins trente mètres de long… sans exagérer ! De nombreuses portes s’ouvraient sur de mystérieuses pièces qui, je m’en doutais, devaient être encore plus grandes que ce hall. Il a eu un petit rire, m’a pris la main et m’a entraînée à sa suite en direction de la première pièce sur notre droite. Il était inutile que j’espère pouvoir la mesurer : elle était plongée dans la pénombre. Seul un coin d’une grande table était éclairé par de nombreuses bougies. Deux couverts étaient mis, avec tout le nécessaire : des fourchettes que je n’avais jamais vues se disputaient la place avec des verres tout aussi… "incongrus" : ben oui : on allait être combien à s’asseoir dans ces fauteuils ? Y en avait beaucoup trop ! Et je ne vous parle même pas des couteaux… des cuillères, petites et grandes !
Je vous passe le repas, en vous disant juste que je ne sais pas ce que j’ai mangé… mais c’était bon ! Un peu trop riche pour moi, qui n’étais pas habituée, mais succulent. Ah oui, encore une chose : c’est Samuel qui a fait le service, en transférant les assiettes à travers un passe-plat qui devait mener à une cuisine invisible… Mais, suis-je étourdie… autre chose : il n’a pas arrêté de me parler. Il m’a littéralement saoulée de phrases dont il détachait chaque mot de celui qui le suivait, s’emportant parfois, mais revenant à une diction plus soignée, plus articulée. J’en ai reconnu certains, pour les avoir déjà prononcés, mais j’ai rien compris quand même !
J’ai eu l’occasion de vérifier ma théorie selon laquelle je devais montrer que j’en avais envie, pour qu’il "ose" m’aimer. Et c’est exactement ça qui s’est produit. Cela s’est passé dans la pièce suivante après le salon dans lequel nous avions dîné. Il m’y a conduite, toujours en me tenant par la main. Il m’y a fait entrer et a réglé la lumière en tournant un bouton contre le mur. Ce que je pouvais voir de la pièce m’a poussée à augmenter l’intensité d’éclairage. Elle était IMMENSE ! C’était une bibliothèque : un nombre faramineux de livres couvrait deux pans de la pièce, en angle. Devant les étagères, deux canapés, un blanc et un noir, se faisaient face, séparés par une table basse posée sur un tapis. Et en même temps, c’était… un lieu à vivre, ou à se détendre… je ne sais pas comment l’appeler : un billard trônait au centre de la partie droite de la salle. Y avait pas de trou dans la table. Un bar formait l’angle opposé à la bibliothèque. Avec tabourets… et tout l’toutim ! C’est moi, maintenant, qui me demandais ce que je faisais là !
Mais il m’a tendu la main, ainsi qu’un petit sourire. J’ai glissé ma main dans la sienne après avoir tamisé la lumière, et il m’a entraînée vers le canapé blanc. Il m’a invitée à m’y asseoir et j’ai à peine osé poser mes fesses dessus. Lui s’est assis aussi, mais à une distance "respectable" de moi. Il n’avait pas lâché ma main, et je n’en avais pas envie non plus. Il a recommencé à parler et je me suis dit : "Ma fille, si tu ne l’arrêtes pas maintenant, tu ne le pourras plus !" J’avais trop envie de lui. Deux semaines que je n’avais pas senti ses lèvres sur moi, ni ses mains. Il m’avait manqué à un tel point… je m’en rendais compte maintenant : parce que pas une fois il n’avait quitté mes pensées, même pendant que d’autres faisaient ce pour quoi ils m’avaient payée. J’en aurais pleuré, tellement je le désirais !
Oubliés mon métier, ma vie, ma sœur ! Oublié le lieu où je me trouvais : je ne voyais que lui. Lui avec ses lèvres qui remuaient sur des sons que je n’entendais même pas. Des expirations que je voulais boire… une bouche que je voulais dévorer !
Alors j’ai laissé glisser mes fesses sur le cuir, vers lui, puis j’ai posé ma main sur ses lèvres, pour qu’il se taise. Ça commençait à couler. Il m’a regardée et j’ai juste secoué la tête. Il a semblé émerger tout à coup… et il a compris. Il a ouvert la bouche mais n’a pu prononcer une parole de plus, parce que y en avait marre là ! Et s’il fallait que je le viole, je le ferais !
Je me suis jetée sur lui et lui ai fait ravaler les paroles qu’il avait préparées. Des gémissements et des grognements s’échappaient de ma gorge. J’ai déchiré sa chemise de mes griffes, faisant sauter plusieurs boutons qui sont allés rouler on ne sait où. Je pleurais de frustration. Pourquoi est-ce qu’on était pas encore à poil ? Mon pénis bandait à me faire mal, formant une petite bosse improbable sous une jupe plutôt courte. Je sentais que ça allait venir, déjà, sans que les hormones femelles ne puissent rien y changer. Enfin, je sentais sa langue contre la mienne. Ça provoquait de nombreux soubresauts dans mon ventre. Qu’il me prenne… mais qu’il me prenne vite !
Mais sa langue ne bougeait pas. Il me l’offrait, et moi je tournais comme une folle autour, je la harcelais, mais lui ne bougeait pas. Et j’ai soudain réalisé ce à quoi ça ressemblait : une pute était en train de violer un client… un homme qui lui avait seulement montré que cette espèce d’homme pouvait exister, était capable d’aimer… de respecter même quelqu’un comme elle. Un homme qui lui avait prouvé qu’elle comptait pour lui, parce qu’il l’avait invitée à fêter son anniversaire… elle, et personne d’autre !
Je croyais avoir touché le fond lorsque j’ai pleuré dans ses bras la première fois, mais je m’étais trompée parce que, là, les sanglots m’ont fait mal. Physiquement. Mais il a été très doux quand il a caressé mes cheveux, qu’il baisé mon front et mes joues, et mes lèvres. Il m’a encore murmuré des mots faits pour calmer, en me berçant au creux de ses bras, et quand j’ai été à peu près tranquillisée il m’a rassise doucement et, toujours en me parlant doucement, il a repoussé ma tête et caressé mes joues en me souriant. Il semblait si calme, lui, alors que quelques minutes plus tôt une panthère avait fondu sur lui pour le dévorer. Il ne semblait pas m’en vouloir. Deux traits de larmes parcouraient ses joues, mais ils semblaient secs : comme s’il avait pleuré il y a longtemps. Avec des gestes très lents, comme s’il ne voulait pas m’effrayer, il a retiré sa chemise, enfin ce qu’il en restait. Une longue estafilade courait sur son pectoral gauche. Elle se terminait par une goutte de sang. C’était moi qui lui avais fait ça ! Il a suivi mon regard et a semblé s’en rendre compte au moment où ses yeux l’ont découverte. Une honte sans bornes m’habitait.
Il s’est mis debout devant moi, sans un mot, m’a souri, puis il m’a prise dans ses bras. Une nouvelle fois je me suis retrouvée survolant le sol, et c’est ainsi qu’il m’a portée jusqu’à sa chambre où, sans allumer la lumière, il m’a étendue sur son lit.
Là, avec son amour, il a tué la panthère, parce que plus jamais je n’ai agi comme ça avec lui. Ses seules armes ont été ses caresses, ses baisers, sa queue si belle et tellement faite pour moi. Normalement, c’était pour lui la seconde fois qu’il faisait l’amour, et pourtant il m’a démontré à moi, une professionnelle du sexe, que l’amour pouvait se passer de sexe : c’était comme si deux corps trouvaient leur raison d’être dans la communion ainsi créée. C’était sa façon bien à lui de m’aimer, et il a toujours agi ainsi dès lors que je montrais que je le désirais.
Il a pris soin de moi comme jamais personne ne l’avait fait avant lui. Comme jamais personne ne le fera plus. Cela fait maintenant six ans que l’on se voit tous les jeudis. Il n’en a jamais manqué aucun. Maintenant, non seulement je suis capable de comprendre ce qu’il me dit, mais je parle avec lui, et je comprends aussi ce que je raconte… Les petites fautes résiduelles nous font bien rire, l’un et l’autre. Il les corrige toujours, et je continue d’apprendre mes leçons. Le "méchant livre" que l’on a déchiffré ensemble après le petit livre pour enfant, il me l’a offert. Son titre c’est : "Voyage au centre de la terre", de Jules Verne, et il ne fait pas trois cent cinquante pages, mais presque cinq cent vingt. Il m’a aussi offert le dictionnaire qui me permet de chercher les mots qui me gênent. Il y en a de moins en moins.
Oui… des jeudis, il n’en a manqué aucun… mais moi, oui. Parce qu’une fois, une seule fois, j’ai fait une bêtise : j’ai pris un client ce soir-là. Samuel était en retard, et je m’étais dit qu’il ne viendrait pas. Et effectivement, je ne l’ai pas vu. Mais, une semaine plus tard, il est revenu, et j’ai vu que quelque chose n’allait pas. Disparu son enthousiasme, envolée sa joie de me voir. Il avait l’air si triste que j’ai eu peur. Une peur sans nom, immense, infiniment plus grande que lorsque j’avais fui de mon pays.
Dans ma chambre, j’ai éclaté en sanglots et il a voulu me prendre dans ses bras, encore une fois, pour me consoler, mais je l’ai repoussé en secouant la tête et en envoyant des larmes en tout sens. J’ai pris le dictionnaire et j’ai cherché les mots les uns après les autres. Voilà ce que je lui ai dit, à peu près :
Oh, bien sûr, ma phrase n’a pas ressemblé à ça, à l’époque, parce que les verbes étaient mal accordés, et j’ai dû faire beaucoup de gestes, et j’ai pleuré encore plus, parce que je risquais ma vie.
Je lui demandais pardon, et il a compris, je crois, parce qu’il m’a étreinte dans une panique qui m’a presque fait mal.
Cette nuit-là, il a dormi chez moi après que j’aie tenu à changer les draps. Elle a été pour lui, cette nuit-là, parce que c’est moi qui lui ai fait l’amour. Tendrement, pendant de longues heures, je l’ai masturbé au creux de mes mains, de ma bouche… au creux de mon cul, aussi. Même quand il s’est cru incapable de le faire encore une fois, je suis parvenue à le ranimer, pour lui donner du plaisir.
Et comme cette nuit avait été la sienne, j’ai refusé son argent.
Je ne cesse de lui dire que je l’aime, et ça me fait mal qu’il me force à accepter son argent. Il le fait parce que je lui ai parlé de ma sœur. En fait, je lui ai tout raconté de ma vie. Lui m’en a raconté un peu, de la sienne, parce qu’il est tellement mystérieux… presque taciturne. Lui ne m’a jamais dit qu’il m’aimait, mais je le sais parce que son corps parle pour lui, parce qu’il suffit que je le regarde d’une certaine façon, ou que je me blottisse dans ses bras, mon corps frissonnant à ce simple contact, pour qu’il fasse de moi la femme que je rêve d’être. Mais en même temps il aime cette partie de moi qui révèle qu’à l’origine j’étais un homme. Il m’emmène dans des orgasmes toujours plus forts, par mon sexe ou mon anus. Mais parfois je vois passer une ombre dans son regard.
C’est la seule "ombre" dans notre relation. Je crois comprendre qu’il supporte de moins en moins de savoir que je vends mon corps à d’autres hommes. Il ne m’a jamais rien dit à ce propos, mais ça serait logique, n’est-ce pas ?
Et moi, je ne peux pas arrêter, parce que leur argent, ou même le sien, j’en ai besoin, et pas seulement pour ma sœur. J’en ai besoin parce que je ne sais pas s’il continuerait à venir me voir, sans ça. Je sais que c’est absurde, ne me prenez pas pour une cruche, mais la part de doute existe, et ce serait une erreur de la négliger.
Bientôt, cela fera sept ans que l’on se connaît, et il m’emmènera fêter son anniversaire chez lui. Je le sais parce qu’il a toujours fait comme ça, à chacun de ceux-ci. Je l’attends avec impatience parce que, en fait d’anniversaire, c’est moi qui reçois un cadeau : celui d’avoir le droit de passer la nuit dans ses bras, dans son lit… chez lui. Je m’endormirai dans ses bras, et c’est ce que je préfère.
*****
(encore une fois et pour conclure) :
Le jour où j’ai rencontré Stéviana est celui au cours duquel j’ai enterré mon père. Je crois qu’il s’est laissé mourir parce qu’il en avait marre de ne plus voir ma mère : celle-ci était morte trois ans auparavant, emportée par un cancer. En fait, je suis presque sûr que mon père voulait la rejoindre, parce qu’il a choisi pour mourir le jour anniversaire de naissance de son épouse. Je me suis retrouvé orphelin, mais ce n’était pas une surprise : ça faisait presque un an que mon père me préparait à sa disparition. Il a été très franc avec moi, comme toujours, et m’a expliqué qu’il était temps qu’il s’en aille, que j’étais grand et que j’avais prouvé que j’étais quelqu’un en qui il pouvait avoir confiance. Par petites touches, il m’a légué toute sa fortune, ainsi que la maison que vous connaissez, qui se trouve en dehors d’un village proche de la ville où vit Luc.
Voilà, la dernière personne invitée aux obsèques venait de partir. C’était Luc, et il venait de me répéter qu’il était là si j’avais besoin de quoi que ce soit. Je l’avais remercié, en lui affirmant que tout allait bien, mais que le seul besoin que je ressentais, c’était d’être seul un moment, pour réfléchir.
Et j’avais erré dans ma voiture d’abord, puis à pied dans la grande ville voisine, à la recherche de je-ne-sais-quoi. J’adorais mon père, ainsi que ma mère d’ailleurs, et l’absence de larmes me désarçonnait beaucoup, parce que je me sentais si triste. C’est comme ça que je me suis retrouvé dans la rue de Stéviana. J’avais vu ses "collègues", mais dans une sorte de brouillard. Et j’ai vu cette femme qui était si belle, la peau brune, les lèvres bien ourlées, des yeux un peu tristes. Elle se tenait appuyée contre le mur et fumait une cigarette. Ce n’était pas la femme la plus belle que j’avais vue, mais elle se passait très bien du moindre maquillage. Elle a tourné la tête dans ma direction et m’a regardé d’un air intrigué d’abord, puis amusé.
Comme vous le savez maintenant, j’étais vierge… de toute expérience amoureuse. Mon père m’avait enseigné qu’il fallait se créer des opportunités pour que les choses fonctionnent, dans tous les domaines et, jusque-là, aucune femme ne m’avait donné envie de m’essayer aux choses de l’amour. Le fait que la première qui m’ait donné cette envie soit une prostituée n’avait aucune espèce d’importance.
C’est dans cet état d’esprit que je me suis retrouvé dans sa chambre, en sa compagnie. Elle était dans son territoire et il était logique qu’elle se sente à l’aise. En ce qui me concerne, mon érection quasi instantanée était le résultat de ce qui me trottait dans la tête : il allait se passer quelque chose de sexuel… avec la seule femme qui m’en donnait l’envie !
Mais je n’oubliais pas ce que ma mère m’avait appris, à savoir qu’il fallait respecter les femmes. Ce précepte était si ancré en moi qu’il avait dû jouer dans le déroulement des évènements suivants.
Je ne sais pas pourquoi je l’ai prise dans mes bras. Peut-être parce que j’avais besoin de réconfort… Mais pas seulement pour ça : aussi parce qu’elle s’est mise à danser. Et quand on danse, c’est qu’on est heureux, non ? Et là, l’horreur de ce que j’étais en train de faire m’est apparue : j’avais payé un être humain pour abuser de son corps ! N’allez pas y voir un jugement que je porterais sur les habitués des amours tarifées, mais plutôt un sentiment très personnel, qui découlerait de ce que ma mère m’avait enseigné.
En fait, j’étais sur le point de m’enfuir. Mais je ne le pouvais pas, parce que j’avais profané son visage quelques instants plus tôt. Le fait qu’elle n’ait pas l’air de m’en vouloir n’avait rien à voir. Je vous répète que c’était MA façon de voir. Et elle s’est mise à pleurer. Je sais maintenant qu’elle n’a pas compris ce que je disais à l’époque, mais je lui ai murmuré des mots doux, pour la réconforter.
Puis elle m’a dit un seul mot, sous la forme d’une question, et je n’ai pas compris tout de suite. Et quand j’ai fait "non" de la tête, je l’ai vue se laisser descendre le long de mon corps. Elle a pris mon sexe dans ses mains, puis dans sa bouche, en me regardant pour la première fois "amoureusement". Mais moi, je ne voulais pas… je ne voulais plus. Mais je ne pouvais pas le lui dire, et cela même si elle avait été à même de comprendre : parce qu’elle le voulait, que de ses yeux elle me suppliait de la laisser faire.
Comment aurais-je pu résister, alors qu’elle me suçait avec tout l’amour qui semblait l’habiter, maintenant ?
N’oubliez pas que j’étais puceau avant d’arriver dans cette chambre. Si j’étais à peu près en "terra cognita" en ce qui concerne les rapports humains, tout ce qu’elle faisait pour tirer de moi des "choses sexuelles" était du domaine de l’inconnu. J’étais entièrement entre ses mains.
Je ne peux le nier : elle m’a donné du plaisir… beaucoup. Mais quand elle a à nouveau pleuré, là, agenouillée devant moi, je suis immédiatement sorti de la torpeur dans lequel ce plaisir m’avait mis, et je l’ai aidée à se relever. Ça me fendait le cœur de voir sa détresse, et je croyais en être responsable. Alors j’ai essayé d’encore la consoler. J’ai baisé son front, ses joues et ses lèvres parce que mon sperme souillait à nouveau son si joli visage. Je ne voulais plus qu’elle me quitte pour aller le nettoyer, parce que je ne trouvais pas ça juste : c’était à moi de laver ce que j’avais sali.
Elle s’est emparée de ma langue… et de moi, par la même occasion. Elle m’a terrassé d’un seul baiser ! Et je l’ai aimée à cet instant… pour toujours !
C’est dans cet état d’esprit que je l’ai portée sur son lit et que je l’ai aimée. Elle vous a très bien raconté tout ça, et je n’ai pas à revenir dessus, parce que c’est vrai que je lui ai fait l’amour, même si j’étais un novice. Quelle importance cela a-t-il que j’ai découvert un pénis à la place d’une vulve ? Je l’ai aimée, et elle a montré qu’elle acceptait mon amour. Point.
Je l’ai calée dans mes bras et je l’ai bercée, en attendant qu’elle s’endorme. Le "contrat" disait trois heures et elles étaient passées, donc je suis rentré chez moi. Et j’ai réfléchi. Il ne m’a pas fallu longtemps pour me dire qu’il fallait qu’on parvienne à dialoguer l’un avec l’autre. Il fallait que je sache de quel pays elle était originaire, et pour ça il fallait que je la revoie et qu’elle accepte mes "leçons de français". J’ai pioché mon livre de chevet dans ma bibliothèque, et j’ai acheté le petit livre pour enfant le jeudi suivant, avant de la rejoindre.
Vous connaissez la suite !
Ce que vous ignorez, c’est que je lui ai réservé une surprise pour notre septième anniversaire : je vais la présenter à mes ami(e)s. Pourquoi maintenant ? Primo : parce que cela fait presque un mois que je connais Jennifer, et qu’elle est arrivée, avec ses manières bien à elle, à me tirer les vers du nez, et je lui ai tout raconté, absolument tout. Y compris ce "petit détail" qui fait de Stéviana une femme à part. Secundo : elle est la seule à savoir, en dehors des deux concernés, que la personne que j’aime existe, et ce n’est pas juste pour "mon frère", n’est-ce pas ?
C’est elle qui m’a conseillé de le révéler le plus vite possible, mais je préfère attendre ce jour particulier parce que j’ai une autre surprise pour mon amour…
*****
Que diriez-vous de laisser la parole à Jennifer, pour le prochain et dernier épisode ?
Le seul problème est qu’elle a tellement de choses à vous raconter…
Donc, pour alléger un peu son récit, qui risque d’être très (trop) long, si on faisait un petit résumé chronologique :
Voilà. J’espère que vous y voyez un peu plus clair !
Etes-vous prêt pour la dernière ligne droite ?
Si oui, passez à l’épisode intitulé : "Jennifer".
Fred.