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Temps de lecture estimé : 9 mn
31/08/06
Résumé:  Valentin est un garçon qui ne recherche que l'amour. Il veut être constamment aimé. Dans ce récit, l'aventure ne va pas lui arriver, mais c'est lui qui la provoquera...
Critères:  fh cérébral voir init
Auteur : M.D.  (Je ne suis rien, ni personne)            Envoi mini-message
Bienveillant Valentin

Richard pénétra dans le grand bâtiment lugubre. Il demanda à l’accueil Valentin Delmat, et prit la direction qu’on lui indiquait. Un frisson parcourait la nuque de Richard au fur et à mesure qu’il traversait les couloirs blancs comme de la poudre. Il ressentait le malaise immense des pauvres patients qui ont la terrible malchance d’être handicapés mentaux. Oui, handicapés de l’esprit, mais cela ne voulait pas dire qu’ils étaient bêtes. Oh que non ! À travers ses locaux de verre, toute leur honte, tout leur désarroi et toute leur colère jaillissaient. Et Richard ressentait ces douleurs, comme des piques dans son dos. Il n’aimait pas cet endroit.

Valentin s’élança vers Richard et sauta dans ses bras.



La dame qui était là fit un sourire à Valentin et lui dit à lundi. Main dans la main, Richard et Valentin firent le trajet inverse. Juste avant la porte d’entrée, Valentin lâcha soudainement la main de Richard et partit dans une autre direction.



Richard poussa un juron. C’était une des principales raisons pour lesquelles son frère avait placé Valentin dans cet établissement. Un gamin totalement imprévisible, qui pouvait se barrer n’importe où et à n’importe quel moment.



La voix de Richard s’étrangla.

Elle avait, juste au-dessus du front, un bandeau rouge et jaune. Des petites boucles d’oreilles bleu marine scintillaient au niveau de ses lèvres. Ses grands yeux gris apportaient à son doux visage une indescriptible beauté.



La jeune femme, dont les bras retenaient un Valentin câlin, s’interrompit dans sa phrase lorsque ses yeux se posèrent sur Richard. À ce moment-là, le petit Valentin n’existait plus. Ni ce qu’il y avait autour.



Richard ne savait plus très bien comment parler, comme si cette faculté l’avait quitté comme ça, sur un coup de tête.



Sa voix était toute faible, toute douce. Elle et Richard évitaient maintenant de croiser leurs regards. Il s’empressa de reprendre Valentin, de dire un au revoir inaudible, et de s’enfuir avec son neveu. Dans la voiture, il mit un temps avant de mettre le contact, le temps de bien se rendre compte de ce qui s’était passé. Mais jamais de sa vie Richard ne se rendra vraiment compte, non jamais.


Richard retrouva Valentin le mardi de la semaine suivante. Son frère lui avait dit que son fils avait un secret très important pour lui.



La dénommée Anne-Sophie hantait l’esprit de Richard depuis ce fameux moment, aussi sentit-il en lui monter une sourde excitation. Ses mains tenant le petit objet tremblaient comme des feuilles mortes prêtes à s’enfuir de leur branche. C’était un morceau de papier plié. Et, à l’intérieur, un numéro de téléphone.

Il a remercié Valentin toute la soirée et s’est amusé avec lui comme un petit fou. Le soir même, n’y tenant pas plus, il l’appela et lui donna rendez-vous dans un bar, le vendredi soir. Sa voix s’était faite toute petite lorsqu’il lui avait dit qui il était. Sa très belle voix…


Devant le bar, Richard était impatient. Il attendait ses yeux, ses cheveux bruns, souples et volants, les petites tâches de rousseur qui constellaient ses joues roses, ses bras emplis de volupté.

C’est un sourire éclatant qui le salua. Celui-là il ne le connaissait pas. Mais c’était tout aussi charmant que le reste. Elle dit son nom, Valentin a dû faire le faux jeton. Elle était parfaitement habillée. Très joli et très coquet. Elle n’avait pas mis de parfum, son odeur naturelle n’en avait pas besoin.

Il commanda un whisky et elle juste un café. Il se sentait un peu honteux, comme d’être considéré comme un alcoolique, mais ça c’était à chaque fois. Il la regardait, il n’en pouvait plus de s’émerveiller du gris électrisant de ses prunelles.



Elle sourit et garda elle aussi le silence.

Il observait les gens du bar. Il s’amusait à deviner quelles étaient leurs vies, leurs sentiments, leurs destins…

Elle pensa à son travail, qu’elle prenait très à cœur.

Il prit sa main, la caressa, l’observa, prit sa deuxième, regarda tous les contours, tous les plis, toutes les lignes, les fit danser devant ses yeux, les joignit, Anne-Sophie ne put s’empêcher de rire à cet étrange manège.

Puis il prit un de ses doigts dans sa bouche.

Elle se raidit soudain. C’était fort inhabituel, devant des tas de gens en plus. Puis elle sentit mieux le contact des lèvres de Richard. Et elle se calma et ferma les yeux pour mieux se rendre compte de la sensation. Il prit l’extrémité d’un autre doigt et en fit de même. Elle ne disait rien, elle sentait juste des ondes prendre naissance à ses doigts et se propager le long de son bras, jusqu’à son épaule. Et, au fur et à mesure que Richard continuait, les ondes allaient de plus en plus loin dans son corps. Son front s’échauffait, son entrejambe, puis ses seins qui se gonflaient très légèrement.


Richard s’arrêta soudainement. Il finit d’une traite son verre et observa au loin une belle plante qui venait de rentrer dans le bar.

Pourquoi il s’est arrêté, celui-là, se demanda Anne-Sophie. Elle sentit en elle une vague d’orgueil lui vriller les tympans et glissa son pied sur celui de Richard, en dessous de la table.


Il détourna son attention et regarda le fond de son verre. Le stratagème avait fonctionné. Anne-Sophie continua à glisser son pied électrifié le long de sa jambe. Il ferma les paupières et expira plus fort. Il reprit les mains d’Anne-Sophie pour les regarder, encore et encore, alors qu’elle continuait à caresser sa jambe.

Elle monta son pied plus haut, à hauteur du genou. Plus c’était haut, plus c’était tendu. Mais le massage impeccable détendait la jambe de Richard.

À travers les doigts d’Anne-Sophie, qu’il tenait comme un éventail, il regarda plus en détail son décolleté. Elle le remarqua aussitôt et sentit un peu plus de chaleur dans sa poitrine. Elle aimait cela, qu’on regarde ses seins. Si, en outre, les yeux sont aussi brûlants que ceux de Richard, le plaisir en est décuplé.

Puis il se remit à dévorer son index droit, tout en contemplant, l’œil hypnotisé, et cette fois sans aucune retenue, son cou et sa gorge. Les traits du visage devenaient un peu plus durs, un peu plus crispés, il était terriblement excité.

Elle le comprit bien mieux lorsque son pied atteignit l’entrejambe. C’était aussi dur que de la pierre. Elle aussi sentit les ondes effroyables de plaisir aller et venir allègrement dans tout son corps transi. Son sexe devenait brûlant et humide. Elle posa sa main libre sur ses seins et les caressa doucement devant son regard ivre de folie. Elle ferma les yeux et se mit à gémir.

Il prit maintenant dans sa bouche trois de ses doigts qui dégoulinaient de sa bave abondante, causée par l’excitation.

Sous la table, le pied se mit à produire un mouvement lascif sur le sexe gonflé au plus haut point.


Soudain, en lui, tout se raidit. Il lâcha les doigts, se redressa. Elle interrompit la caresse de son pied. Tout s’arrêta. Il était affreusement gêné, nerveux. Mélancolique tout d’un coup. Toujours sans dire un seul mot. Ce trait de caractère très étrange. Ce changement brusque d’humeur, comme si un autre avait pris place dans son esprit. Mais non, toujours le même esprit, dérangé à jamais, car jamais de même nature. Au lieu d’en ressentir un dégoût, une angoisse ou, pire, une fatigue, Anne-Sophie en était émerveillée. Son amour pour lui ne fit que s’accroître encore plus. Le jeu érotique auquel ils jouaient s’était arrêté tout net et elle n’en éprouvait aucune frustration.


Plus tard, ils marchaient au bord des quais, regardant dans l’eau trouble les lumières de la ville sous la nuit noire. Ils adoraient cela, sentir l’autre à côté, marchant tout près. Ils ne se tenaient pas le bras, il n’y avait aucun contact physique entre eux. Mais, au niveau de leur esprit, de leur imagination, ils s’aimaient éperdument, au bord d’un gouffre immense, enlacés, se contemplant l’un l’autre, à se détruire les corps, à se déchirer, sous des hurlements de plaisirs, dans des ténèbres faites de sang et de chair. Ces images, ces impressions, ces sensations se scellaient par le silence qu’ils s’étaient imposé.

Dans la rue, certaines filles qui les croisaient attardaient leur regard sur Richard, et Anne-Sophie en ressentait à chaque fois une bouffée de possession qui ne lui ressemblait pas. Même les rêves qu’elle faisait à ce moment précis, tandis qu’elle marchait au bord du fleuve, elle ne les avait jamais faits auparavant. Elle ne se reconnaissait plus. Elle n’était plus elle-même.


Elle eut soudain peur. Peur de lui, peur de ce qu’elle était en train de faire à cause de lui. Elle se sentit ensorcelée par cette créature fantastique dont elle était tombée amoureuse à la première seconde. Cette chevelure noire, cette démarche impérieuse comme si le monde se trouvait à ses pieds, ces gestes délicats et imprécis, vagues et minutieux, et ces yeux qui semblaient s’enflammer dans des danses diaboliques, sous l’éclatante lumière bleu-vert des océans énervés. Richard n’était pas un simple homme. Peut-être était-ce un vampire qui prendra cette nuit tout son sang. Oui, peut-être. Ce serait tellement, oh, tellement horrible…


Ils arrivèrent à l’appartement d’Anne-Sophie. Elle le dévêtit de son manteau noir. Mais ils n’allèrent pas dans le salon. Dans le hall d’entrée, ils s’échangèrent des regards de braise. Elle était folle de ses yeux royaux et tristes tout à la fois, il était fou de ce gris fabuleux, couleur magique et merveilleuse. Ils avaient de plus en plus de mal à respirer, leur attirance mutuelle ne les fera pas résister longtemps.

Puis, n’y pouvant plus, il la prit et lui offrit un baiser dur et ferme. Elle l’accepta pleinement, les mains à la limite de déchirer sa nuque, tandis que celles de Richard exploraient son buste, son dos, ses seins. Il était brusque, sans aucune délicatesse. Lui aussi était ensorcelé. Son esprit l’avait quitté depuis bien longtemps. Il dévora son cou, sans enfoncer ses crocs dans la chair tendre et fraîche, comme l’avait désiré Anne-Sophie de toutes les forces de son âme.

Mords-moi, lui cria-t-elle à l’aide de son esprit. Tue-moi lentement, de ton venin sensuel et voluptueux.

Il la plaqua sur la porte d’entrée, de tout son grand corps solide. Il sentit la sourde chaleur au bas-ventre de la jeune femme collée à son sexe.


Il s’interrompit.

Nouveau changement dans l’esprit de Richard.



Il avait entièrement rompu le charme. Mais sa voix était bouleversante.

Elle lui indiqua le chemin. Il la posa sur le grand lit, assise en face de lui.

Il s’approcha d’elle. Les gestes tout tremblants. Une expression indéfinissable dans les yeux. Il enleva son haut. En tâchant de faire attention, comme s’il ne voulait pas lui faire mal.

Il était monstre avide de chair, il est maintenant enfant craintif et halluciné.

Anne-Sophie ne dit rien. Le laisse faire, la bouche close, mais les yeux brillants, scintillants de mille feux, posés sur lui, sur son visage pur. Elle se laisse faire, intérieurement bouleversée par cette créature sans nom, sans origine, seule.

Il enleva son soutien-gorge. Il la regardait, elle, son visage, ses bras délicats, ses lignes, ses seins, les tétons sombres de désir pour lui.

Richard était profondément ému. Il sentait son parfum naturel qui l’enivrait de plaisir. Il la regarda longtemps, longtemps. Parfois il approchait la main mais la retirait, de peur de commettre une profanation.



Elle déboutonna son jean, le retira. Lentement. Il découvrit ses jambes. Deux objets de désir, à la peau douce mue par une conscience qui voulait enfin de lui, qui se laissait enfin s’offrir à lui. Alors qu’il attendait depuis si longtemps.

Puis elle retira le dernier sous-vêtement. Là, son expression changea.


Il recula, l’œil méfiant, pas du tout assuré.

Elle resta stupéfaite devant sa réaction. Puis décida d’agir. Elle s’approcha de lui. Il se déroba mais la main d’Anne-Sophie prit avec force le bras de Richard. Elle glissa jusqu’au poignet. Le gris plongé dans le bleu-vert, elle mena sa main vers elle, vers son intimité dévoilée.

La main tremblait terriblement. Plus elle se rapprochait, plus elle était incontrôlable. Mais elle utilisa la pleine puissance de son regard pour le calmer, le dissuader. Elle sourit, l’œil tendre et assuré.

Les doigts touchèrent les lèvres. Il ressentit aussitôt un dégoût profond. C’était chaud, humide et gluant, comme toucher une langue, ou l’intérieur d’une lèvre. Mais, guidé par la main décidée, il enfonça son index un peu plus profond dans l’intimité. De plus en plus, la dévoreuse mangeait son doigt. Un soudain sentiment d’horreur emplit Richard mais elle était ferme, très ferme. Le doigt s’enfonça encore plus. Il le bougea un peu. Un doigt qui gigote dans un trou gluant, il n’y a rien de plus ridicule. Puis elle retira un peu le doigt, le renfonça, le retira, le renfonça, tout ça dans un mouvement accéléré.


Puis elle lâcha la main, le doigt continua tout seul.

Il pénétra un deuxième doigt qui suivit le premier. La tête d’Anne-Sophie bascula en arrière. L’effet s’accomplissait.

Elle s’allongea, enivrée par le plaisir effroyable, les yeux fermés, la bouche entrouverte. La poitrine offerte. Les jambes écartées. Les bras qui se perdent dans les draps du lit.

Et lui, maître d’elle, ayant réussi à vaincre sa peur, regardant pour la première fois une femme jouir grâce à lui. Un corps de femme, rien que pour lui, rien qu’a lui.

Enfin. Enfin. Enfin.

Il retira ses doigts et reprit sa contemplation. Sa poitrine qui se soulève, son visage déformé par les sensations.



Il l’aima, durant toute la nuit.

Deux amants fous l’un de l’autre.


À son réveil, elle était là, infiniment belle, dans le lit, un sourire aux lèvres.