n° 10784 | Fiche technique | 19435 caractères | 19435 3492 Temps de lecture estimé : 14 mn |
19/09/06 |
Résumé: Un homme se promène sous la pluie et sa femme lui revient en mémoire. | ||||
Critères: #nonérotique #policier amour revede fellation | ||||
Auteur : Macapi Envoi mini-message |
Il pleut. Pourtant il fait chaud. C’est encore l’été, pas encore l’automne. J’aime ce genre de journées où le ciel combat le calendrier en annonçant trop tôt la prochaine saison. C’est le genre de jour gris que la majorité des gens n’aiment pas. Trop gris, déprimant, autant de qualificatifs et d’excuses pour ne pas sortir de chez soi. Autant de raisons pour me faire sortir, à la rencontre de la folie quotidienne, de ces quelques rares amoureux de la pluie.
En ce dimanche de fin du mois d’août, je suis sorti de mon appartement vers huit heures, assez tôt pour ne rencontrer dans les rues que le silence ou quelques lève-tôt. Il n’y avait alors qu’un faible crachin qui tombait. Je me suis plu à lever la tête vers ce ciel qui m’a semblé très prometteur pour mes projets. Effectivement, ce jour-là j’avais prévu de faire l’amour sous la pluie, rien que ça !
Je ne suis pas du genre voyeur, et les seins des filles au travers d’un tee-shirt mouillé ne me tentent pas, enfin pas trop, je suis un homme quand même. Ce que je recherche, ce n’est pas une fille qui fait exprès de porter du blanc un jour de pluie, ce n’est pas non plus la femme de mauvaise humeur parce que ses cheveux sont trempés, même juste par quelques gouttes. Non, je recherche celle qui jouit de la pluie comme d’autres jouissent du soleil.
Je suis donc sorti de chez moi, sans parapluie bien sûr. Parce que le but est de sentir l’eau couler sur mon corps, de brouiller ma vue d’un surplus vite chassé d’une main à peine refroidie. Et aussi parce qu’un parapluie empêche de voir loin dans la rue, concentré que l’on est par le maintien de l’horrible objet dans sa position verticale malgré le vent.
J’avais enfilé une paire de jeans et un tee-shirt. J’étais ainsi assuré de pouvoir braver les éléments suffisamment longtemps… Mais qui me verrait de tout façon ?
La rue semblait déserte pour le moment. Je jette un coup d’oeil dans une vitrine et mon reflet me confirme que je suis encore en forme. Mon corps légèrement musclé ne présente pas les rondeurs superflues de la trentaine, je pouvais en remercier les heures de natation que je continue à faire chaque semaine. Mes cheveux bruns et mes yeux bleus avaient attiré les jolies femmes à l’occasion.
Friand de nouvelles expériences, je me dirige vers le quai, un peu en contrebas. Il y a longtemps qu’aucun pêcheur ne l’a utilisé. D’après ce que j’en sais, il serait plutôt devenu une sorte de sanctuaire pour ados en manque de romantisme à la tombée de la nuit. Rien ne me laissait présager de ce que j’y trouverais en plein jour.
Je ne croise personne dans la petite rue qui descend lentement vers l’eau. J’aurais quand même voulu nourrir mon regard d’une ou deux charmantes visions. Il y a trop longtemps que je n’ai pas frôlé un corps de femme, il me semble que toute ma peau réclame qu’on la touche.
Au loin, une église sonne l’heure, il doit être neuf heures maintenant. Pourquoi le temps passe-t-il aussi lentement lorsqu’on attend ? Pourquoi faut-il que je me mette toujours dans des situations impossibles ? J’aurais tout aussi bien pu prendre ma voiture et me rendre au centre commercial pour y attendre les clientes du dimanche. Mais non, il me fallait de l’exceptionnel, de l’imprévu, des surprises, des émotions. Combien de temps allais-je l’attendre encore, cette émotion sous forme de vision céleste d’une grande beauté qui marcherait vers moi sous le déluge… Ou, finalement, est-ce au café du coin où j’irai me réfugier une fois bien transi que je trouverai ma perle ?
Il faut dire que j’avais perdu ma dernière perle lors d’un accident de bateau. Il y avait eu une tempête, elle avait bêtement glissé sur le pont et avait été projetée par-dessus bord. Je n’avais pas pu la rattraper. Je n’avais pas pu la retrouver. Je l’avais perdue pour toujours. Elle était morte. Par ma faute. Je n’avais pas été là pour elle. C’était un jour de tempête et il pleuvait. Depuis, je sors sous la pluie à la recherche de celle qui l’aura bravée, de celle qui sera plus forte qu’elle, de celle qui ne se fera pas enlever par cette eau que j’aime et que je déteste tout à la fois. Je veux me venger de la pluie en trouvant ce que la pluie a à m’offrir. Je serai plus fort que cette eau qui mouille mon corps.
Je marche donc le long du quai désert en regardant au loin la mer uniformément grise, mais pourtant parcourue de mille nuances. Je ne voulais pas voir ces nuances. Je voulais me noyer dans mon désespoir. Cette mer maudite m’avait enlevé Hélène. Nous étions faits l’un pour l’autre. Hélène et Martin, le même nombre de lettres dans nos prénoms, le même amour des promenades en bateau, le même amour des manifestations violentes de la nature, vents ou orages. Mais cette masse sombre me nargue à présent et semble me ramener à mon triste sort, avec un genre de sourire le temps d’une éclaircie sans raison.
Je marche toujours et rien ni personne ne trouble mon champ de vision. Je chasse mes idées noires en même temps que l’eau sur mon visage. Je redécouvre l’espace d’un instant le plaisir de pencher la tête en arrière sous les attaques furieuses et piquantes des gouttelettes qui tombent dru. C’est un plaisir presque sexuel, un peu comme des cheveux de femme qui fouettent mes joues au passage, alors qu’un corps déchaîné s’active sur mon bas-ventre. Pur plaisir… Mais tout ceci est loin, si loin. Il y a tellement longtemps que je n’ai pas senti le parfum d’une femme, je donnerais beaucoup pour que ma promenade d’aujourd’hui porte ses fruits !
Il me semble maintenant que ça fait plus d’une heure que je marche, et pourtant non, l’église n’a pas sonné l’heure suivante. Mes jambes se fatiguent et mon esprit se lasse de cette attente. J’ai fait le tour du quai, je suis remonté vers le village, puis je suis redescendu par l’autre route, pour varier un peu, pour faire passer le temps, pour retarder le plus possible l’instant où j’abandonnerai tout espoir.
Je ferme brièvement les yeux et je la vois, Hélène, comme si c’était hier. Elle riait aux éclats à cet endroit même, en me regardant dans les yeux après m’avoir embrassé de sa bouche fraîche. Non, décidément, je n’arrive pas à l’oublier. Elle était si magnifique, si merveilleuse, elle est irremplaçable.
J’ai songé à quitter ce village et à partir loin, loin de la mer, loin de mes souvenirs, mais je sentais confusément que ça ne servirait à rien. Partout je la verrais, dans la moindre ondée, dans le plus fort orage, dans la goutte de rosée au petit matin dans le désert. Alors inutile de fuir, c’est ici que je devrai affronter la réalité, ici que je devrai me faire une raison, ici que je trouverai sa remplaçante, ou alors à jamais je demeurerai célibataire. Autant me jeter à l’eau tout de suite, au sens propre. Quel miracle amènera une femme dans ce village perdu où je connais chaque représentante par coeur ?
Un dernier aller-retour au bout du quai avant de repartir vers mon appartement. Histoire d’être absolument sûr qu’aucune âme vivante ou morte ne se cachait parmi les flots. Histoire de me donner bonne conscience et de croire que je fais tout mon possible pour guérir. Oui, vraiment.
Un coup de vent et je sens le froid qui m’agrippe. Je voudrais me laisser tomber, continuer à marcher après le bout du quai, juste pour voir s’il y a quelque chose après, juste pour voir si la mer veut de moi, juste pour savoir si Hélène est quelque part à m’attendre. Mais j’hésite, comme d’habitude.
Mes pas monotones me ramènent presque malgré moi à mon appartement. Je ne pense plus à rien, je refuse de me laisser aller à mon sentiment d’échec. J’essaie de me concentrer sur un futur que j’imagine avec une femme sensuelle. Elle me prendrait dans ses bras et ne voudrait plus me lâcher. Elle me grifferait le dos en m’enlevant ma chemise, pressée de sentir nos deux peaux qui s’électrisent. Je l’imagine grande, mince, des yeux brillants, une bouche gourmande. Je la vois qui se colle à moi comme pour se confondre avec moi. Je la sens qui colle son bassin contre le mien pour sentir mon érection vibrante. J’accroche sa nuque pour plaquer cette bouche contre la mienne dans un baiser qui ne termine que lorsque l’excitation devient trop forte. Elle a les cheveux plaqués sur la tête par la pluie, comme moi. Ses vêtements sont détrempés. Le plaisir de se déshabiller dans des bruits de succion, les vêtements sur la peau, en est décuplé. Mon bassin s’active sur son corps, je la vois, elle me regarde, elle est là, je pourrais presque la toucher. Une larme coule de mes yeux. Encore une fois, un rêve éveillé est venu me hanter. C’est toujours ainsi après un pèlerinage vers la mer, vers Hélène.
Je monte l’escalier qui mène à mon triste logis. D’une main molle, j’ouvre la porte. J’aurais voulu rester là-bas, tout oublier, en finir une fois pour toutes. Pourquoi aucune perle rare ne s’était présentée pour remplacer l’irremplaçable ? Pourquoi chaque fois c’est pareil ? Et pourquoi je restais avec une piteuse érection qui ne servirait à rien, sinon à vider la boîte de mouchoirs à côté du lit.
C’est une femme qui a parlé. Mais de quoi ? Je suis sorti m’acheter des cigarettes, je suis revenu avec une érection, triste et seul. Et voila qu’une femme inconnue, mais qui semble me connaître mieux que moi-même, me parle d’une promenade. Qui serait assez fou pour aller se promener sous la pluie ?
Hélène ? Certainement pas. Hélène n’est plus là. Et puis, cette femme ne lui ressemble pas du tout, ce n’est pas mon Hélène, voluptueuse et sensuelle, de laquelle je ne pouvais décrocher le regard. Cette inconnue est à coup sûr une imposture. Mais que me veut-elle ? Qu’est-ce que je fais ici ? Est-ce que je ne me suis pas trompé d’appartement par hasard ? Tout ça me donne mal à la tête !
Mais non, je ne la crois pas. C’est quoi cette histoire d’amnésie ? Je deviens fou… Je ne comprends plus rien. Hélène, où es-tu ? Il faut que je sorte d’ici, que je retourne là-bas, sur le quai, là seulement je pourrai comprendre. Tout me paraissait tellement clair tout à l’heure. Pourquoi soudain cette femme qui prétend être Hélène me raconte toutes ces histoires ? Non, décidément, il y a quelque chose de pas normal dans tout ça. Je ne veux pas croire que mon Hélène soit cette fade chose qui me regarde d’un air condescendant.
Le téléphone sonne alors.
Je demande :
Je sors de l’appartement. Il pleut. L’église au loin sonne onze heures. Je remarque soudain que mes vêtements sont mouillés. Je ne suis pourtant pas sorti ce matin… c’est étrange. Tant pis, je marcherai trempé. Et puis non, je commence à avoir froid, autant rentrer me changer. Mais pourquoi Hélène m’a-t-elle laissé sortir dans cette tenue ?
Non, ce n’est pas possible, qu’est-ce qui est arrivé à mon Hélène ? Elle a changé, ce n’est plus la même. C’est comme si elle avait vieilli tout d’un coup. Dans mon souvenir, elle était belle, mais là, devant moi, je n’avais qu’une femme un peu fanée.
Je ne savais pas quoi faire, je me sentais désemparé. J’avais une femme et elle s’appelait Hélène. Mais je me souvenais d’une autre Hélène qui ne lui ressemblait pas du tout. J’ai mal à la tête. Et maintenant elle semble vouloir faire l’amour avec moi. Mais qu’est-ce que je fais ici ?
Elle s’approche de moi en me regardant par en dessous. Elle commence à se déshabiller lentement, découvrant son soutien-gorge puis sa poitrine. Je commence à bander légèrement. Elle se penche en avant, défait le haut de mon pantalon, écarte mon slip et commence à me sucer. Mon membre prend de la vigueur. J’apprécie sa langue qui me titille le bout du gland juste avant que sa bouche ne m’engloutisse complètement. Elle effectue quelques va-et-vient tout en continuant de faire aller sa langue le long du frein. Je sens le plaisir monter en moi. Je ferme les yeux. Je revois Hélène qui me suçait dans notre lit. Elle avait une technique unique qui consistait à caler le gland contre son palais pendant que sa langue se promenait sur toute la longueur de mon pénis en pressant fort comme une main qui voudrait le comprimer. Et pendant ce temps elle maintenait la base serrée entre ses doigts et de temps en temps caressait mes bourses pour augmenter mon plaisir. Rien à voir avec ces va-et-vient vulgaires ! Je me retire rapidement, me rajuste et regarde la femme accroupie à mes pieds.
Je venais de me rappeler que j’avais une photo d’Hélène dans mon livre préféré. Je suis certain de pouvoir enfin résoudre ce quiproquo. Je vais donc chercher ladite photo et la brandis devant sa figure qui se décompose. Parce qu’effectivement, ce n’était pas elle, l’Hélène de mon coeur, de mes souvenirs, celle qui savait faire jaillir le meilleur de moi-même.
Et je reprends :
Je ressors précipitamment de l’appartement en claquant la porte. Mes vêtements sont mouillés. Ce n’est pas grave, il pleut. Je descends vers le quai. Je repense à cette journée où Hélène est morte, sur ce bateau. Elle était si belle dans son petit bikini rouge qui mettait bien en valeur la rondeur de ses seins. Je sens encore la douceur de sa peau contre la mienne. Je m’étais approché par-derrière et l’avait serrée fort contre moi. Je l’avais embrassée dans le cou et elle avait eu ce petit rire entre chatouillement et plaisir.
Pendant ce temps, Julie rappelle Chantal.
La pluie s’arrête peu à peu. J’ai froid. Je me suis assis au bout du quai et je regarde la mer. Mes pensées sont confuses. Je ne sais plus exactement ce qui s’est passé depuis ce matin, mais j’ai l’impression de passer à côté de quelque chose d’important. Je me souviens de la mort d’Hélène, mais il me semble lui avoir parlé il n’y a pas si longtemps. Et il me semble avoir rencontré une femme dans mon appartement. Qui cela pouvait-il bien être ?
Oui, c’est bien elle, celle qui hante toutes mes pensées, la femme parfaite, mon Hélène chérie.
Je comprends de moins en moins. Si Hélène n’est pas morte, pourquoi n’est-elle pas dans mon appartement ? Pourquoi est-ce que je suis à ce point confus ?
Mon Hélène est là devant moi, bien vivante, et elle ne veut plus de moi. Un grand vide m’envahit. Je n’ose pas bouger, de peur que cette image d’elle s’efface à tout jamais. Je la regarde. Elle me tourne le dos et s’en va. Je me relève, un peu chancelant. Je constate que je suis à nouveau en érection. Quoi d’étonnant avec cette apparition venue du ciel pour torturer ma conscience. Je voudrais la rejoindre. Déjà elle a disparu. Elle est sûrement repartie au paradis, après m’avoir rendu une dernière visite. Je voudrais la rejoindre, être au paradis avec elle. Là seulement ma vie aura un sens. Je pourrais la toucher, la retrouver. Elle ne me repousserait pas. Elle m’attend, j’en suis sûr. Elle est venue me chercher. Je sens sa main posée sur mon pénis qui me tire vers le lit. Je la suis, je suis tout à elle. J’ai tellement envie d’elle. Hélène, mon amour, j’arrive. Mes vêtements sont mouillés. Ce n’est pas grave, là où je vais il y a encore plus d’eau, je ne risque rien. Je vais seulement la rejoindre. Je vais lui faire l’amour pour l’éternité. Elle saura alors qu’elle n’aurait jamais dû me quitter et nous retournerons ensemble dans notre appartement.
Le lendemain matin, Hélène téléphone à Julie.