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n° 11231Fiche technique14746 caractères14746
Temps de lecture estimé : 9 mn
17/03/07
Résumé:  Un homme ne trompe pas sa femme.
Critères:  fh extracon collègues fellation préservati pénétratio exercice
Auteur : NonHomologue            Envoi mini-message
Myriam

Myriam a des cheveux noirs, sombres, et les yeux clairs. Myriam fixe les gens dans les yeux et dit ce qu’elle pense. Myriam prend ses décisions rapidement. Myriam apprécie la contradiction. Myriam est franche et entière.


Je croise Myriam depuis quelques années au boulot, mais suite à une de ces réorganisations des services où tout le monde est promu et personne n’est augmenté, nous sommes amenés à travailler régulièrement ensemble depuis quelques mois.


Et un matin, Myriam est arrivée au bureau avec les cheveux courts. Fini le banal carré qu’elle portait depuis toujours. Elle a débarqué la nuque dégagée et les oreilles nues, le port toujours altier, le tailleur impeccable, le pas conquérant, superbe…


Et il y eut cette réunion, ce matin, à propos de je ne sais plus quoi, avec je ne sais plus qui. Je me souviens juste qu’on manquait de place, que j’étais assis un peu derrière elle, qu’elle portait un parfum délicat, et que je n’ai pas quitté sa nuque des yeux. Je m’imaginais la parcourir du bout des doigts, la sentir, l’embrasser du bout des lèvres, y caresser mes joues, lui chatouiller les lobes d’oreille, l’humer à pleins poumons…


Nous nous entendions bien. Nous n’étions pas au même étage, nous n’avions pas le même groupe de collègues pour aller à la cantine, nous ne faisions pas les pauses aux mêmes horaires. Mais nous étions souvent en réunion ensemble. Et souvent sur la même longueur d’onde. Quand l’un commençait une phrase, l’autre avait souvent compris où il voulait en venir. À nous deux, nous avancions plus vite que tous les autres. Nous passions notre temps à expliquer aux autres ce que nous avions compris, analysé, imaginé. Lors de l’évaluation annuelle, j’ai eu des félicitations comme jamais en 8 ans de boîte. Elle aussi ai-je appris. Nous étions Starky et Hutch, Bonnie and Clyde, Montaigne et la Boétie, Gainsbourg et Birkin, Pierre et Marie Curie… Quand l’un avançait un truc, l’autre anticipait la suite, et nous avions deux coups d’avance sur tous les autres. Grisant… Étonnamment, nous ne nous rencontrions jamais seuls. Dans deux services différents, nous nous voyions toujours en réunions, on s’envoyait des mails avec plein de monde en copie, on s’appelait peu…


Et puis il y eut cette soirée: nous devions boucler une réponse à un appel d’offre. Alain la voulait sur son bureau pour huit heures le lendemain matin. Alain, que tout le monde appelait - Alain, qui ne mettait jamais ses titres lorsqu’il signait, Alain relisait toujours les gros dossiers le matin à huit heures. Nous avions treize heures devant nous. Nous avions été désignés tous les deux pour boucler cette affaire qui avait occupé pas mal de monde. On y était depuis le matin, j’avais passé la matinée à intégrer différentes contributions pendant qu’elle reprenait les chiffres. Nous avions reçu au cours de l’après-midi divers retours, par mail, fax, ou coups de fils. Nous tentions de masquer les incohérences, relier les divergences, faire émerger une orientation claire. C’était un boulot dingue, une grande tension, mais nous avancions bien, nous étions bons, et tout cela était assez excitant.


Vers vingt-deux heures, nous nous sommes fait livrer deux pizzas, et nous nous sommes posés en salle de réunion, choisie parce qu’elle possède de confortables sièges inclinables, pour relire le tout, un stylo dans une main, une part de pizza dans l’autre.


Vers vingt trois heures, nous avons conclu que c’était bon. J’ai fait un tirage, mis sous enveloppe fermée, qu’elle a glissé sous la porte du bureau d’Alain. Nous avons passé les brouillons à la déchiqueteuse. Finir si tôt, c’était plutôt rare sur ce type de bouclage. Nous étions plutôt fiers de nous.





Et là, je n’ai pas répondu :



Elle ne m’a alors pas demandé, un sourire en coin.



Je ne me suis donc pas penché sur elle, je n’ai pas posé délicatement un premier baiser léger sur ses lèvres, il ne fut pas suivi d’un deuxième, tout aussi délicat, ni d’un troisième, plus appuyé, puis d’autres, de plus en plus forts ; nos langues ne se sont pas invitées à ce mélange rose, nos respirations ne sont pas devenues plus saccadées, nos corps ne se sont pas rapprochés, touchés, collés. Je ne me suis pas régalé de son parfum, respirable là à volonté, mêlé à sa transpiration qu’aucun déodorant ne pouvait retenir après une telle journée. Je n’ai pas passé une main dans ses cheveux courts, ni plaqué une autre sur ses fesses.


Elle ne m’a donc pas pris la main, dégagé sa bouche, repris sa respiration et dit :



Nous ne sommes pas allés chez elle, par les rues fraîches sur nos joues brûlantes. Nous ne nous sommes pas tenus par la main, les doigts serrés à s’en faire mal, comme deux adolescents, ou plutôt comme deux adultes s’agrippant à une remontée d’adolescence, remontée plus forte encore que les souvenirs si l’on sait qu’elle mènera à des choses qu’on osait pas vraiment faire, adolescents.


Nous n’avons pas marché, indifférents à une rencontre importune, une connaissance qui se serait étonnée de ce geste d’intimité. Nous n’avons pas marché, sans se regarder, sans dire un mot, en se raccrochant à cinq doigts crispés et une paume transpirante.



Elle n’a pas, arrivée chez elle, remercié la baby-sitter. Et nous ne nous sommes pas jetés l’un sur l’autre, bouche contre bouche, langue contre peau, lèvres contre lobes d’oreille. Nous ne nous sommes pas déshabillés l’un l’autre. Je ne me suis pas retrouvé nu sur son lit sans trop savoir comment j’y étais arrivé.


Je n’ai pas senti le monde s’arrêter, la ville se taire et le temps suspendre son vol, mon sexe impatient accueilli dans le sien. Nous ne nous sommes pas arrêtés là, de longues minutes, immobiles et silencieux, en se regardant droit dans les yeux, à écouter nos cœurs battre, notre sang pulser et nos sexes piaffer.


Elle ne s’est pas contorsionnée dans un geste un peu ridicule, pour fouiller sa table de chevet. Elle ne m’a pas dit :



En essayant d’attraper un préservatif. Je n’ai pas enfilé ce bout de plastique qui me rappelait les années d’étudiant. Je ne me suis pas dit que j’étais au seuil des plus belles heures de ma vie.


Je ne lui ai pas attrapé les seins. Je ne lui ai pas léché les seins, sucé les seins, gobé ses tétons, aspiré ses tétons. Je n’ai pas senti sa main plaquer ma tête contre son buste. Je ne l’ai pas entendue gémir, m’inciter à continuer, plus fort et encore. Je ne l’ai pas tétée comme un désespéré, comme pour aller chercher chaque goutte de plaisir, à faire changer ses seins de couleur. Je ne les ai pas pétris d’une main, pincés de l’autre. Je ne les ai pas contemplés pendant qu’elle ondulait de plaisir.


Et surtout, je ne me suis pas retrouvé sans avoir compris comment, le sexe enfoui au fond d’elle, elle en train de jouir, et moi la rejoignant en un instant.


Nous ne nous sommes pas affalés, pantelants, emmêlés, reprenant notre souffle, comme des navigateurs voient s’éloigner la tempête qu’ils viennent de traverser…


Je n’ai pas eu à retirer mon préservatif, à faire discrètement un nœud, et à le laisser tomber sur la pile de vêtements en boule, en me disant qu’il ne fallait pas l’oublier et marcher dessus au sortir du lit.


Elle n’a pas profité de ces instants de répit pour fumer une clope. Je ne l’ai donc pas regardée avec deux yeux pleins de reproches, et elle ne m’a donc pas répondu :



Nous ne sommes pas partis d’un grand éclat de rire, pas plus que nous n’avons roulé dans les bras l’un de l’autre, manquant de tomber du lit. Je ne lui ai pas picoré les lèvres en disant :



Et elle ne m’a pas attrapé le sexe en guise de représailles. Elle ne m’a pas dit :



Et elle n’a pas enfilé sur mon sexe un deuxième préservatif, avant de le prendre en bouche. Elle ne l’a pas léché, sucé, aspiré, avec calme et méthode, en rythme, le plus naturellement du monde. Je ne me suis pas émerveillé de ce plaisir toujours renouvelé, de la magie de ces instants hors du temps, de mon bonheur qui irradiait depuis mon bas-ventre.


Je ne l’ai pas interrompue, attrapée par les hanches et invitée à se retourner. Je ne me suis pas arrêté un instant, contemplant ces courbes parfaites, de la nuque étroite aux épaules larges, des hanches fines aux fesses blanches et fortes. Je ne me suis pas vu, homme parmi les hommes, vibrant du même désir que l’homme de Cro-Magnon, prisonnier consentant de mon instinct sexuel.


Elle n’a pas attrapé ma verge, ne l’a pas placée à l’entrée de sa fente, n’en a pas joué, ne l’a pas fait courir le long de ses grandes lèvres humides, agacé son clito ronronnant avec. Je n’ai pas avancé mon bassin, elle n’a pas poussé vers moi ses fesses. Nous n’avons pas commencé un long va-et-vient, rituel millénaire de l’invocation du plaisir. Je n’ai pas senti peu à peu ce plaisir déborder de ma verge pour envahir mon dos par des vagues de frissons - je ne me suis pas dit : respire, attend encore un peu. Je n’ai pas senti l’onde envahir mon torse, ma nuque. Je ne me suis pas allongé sur elle, chaque parcelle de ma peau cherchant sa peau à elle, je ne l’ai pas recouverte, comme un taureau, comme un chien, je n’ai pas joui en un râle rauque et égoïste. Je n’étais pas indifférent à tout, au monde, à son plaisir à elle comme à son absence et, paradoxalement, tellement reconnaissant de ce moment inestimable. Je ne l’ai pas couverte de baiser, lentement, en reprenant mon souffle. Elle ne passait pas sa main dans mes cheveux.


Il n’y eut pas de deuxième clope et de deuxième préservatif, jeté cette fois dans la poubelle.


Elle n’a pas fouillé encore une fois dans sa table de chevet pour en sortir un troisième préservatif et me dire :



Je n’ai donc pas eu à lui répondre, sacrifiant mon orgueil à mon honnêteté :



Elle ne m’a pas allongé sur le dos, ne m’a pas collé la tête sous un coussin et ne s’est pas assise sur mes cuisses. Elle n’a pas commencé à jouer avec ma verge molle en chantant une comptine enfantine :



Elle n’a pas profité de cette mollesse pour caresser son clitoris de mon gland, doucement, en surface, puis plus fort, en appuyant. Je n’étais pas stupéfait de la finesse des sensations que peut donner cela, je ne sentais pas distinctement son bouton passer au contact de mon méat, elle n’y ajoutait pas des caresses des doigts autour de la base du gland. Ma verge ne se remit pas à durcir, elle ne m’enfila pas de troisième préservatif avant d’introduire le petit bâton en elle.


Et elle ne me dit pas, d’un petit air malicieux :



Alors, je ne sentis pas son vagin enserrer puis relâcher, enserrer puis relâcher, enserrer puis relâcher… Je n’ai pas vu le petit air mutin disparaître de son visage, remplacé par un air de plus en plus concentré. Je n’ai pas attrapé les draps à pleine main. Je n’ai pas fermé les yeux, je ne les ai pas rouverts, je n’ai pas vu ses yeux clos, elle ne se mordait pas la lèvre inférieure, ses mains ne sont pas venues se plaquer à pleine paume sur mon bas-ventre, elle n’a pas commencé à remuer du bassin, doucement, puis de plus en plus vite, elle ne s’est pas mise à tressauter, à me chevaucher en gémissant, à cavaler en me griffant, et elle ne s’est pas enfoncée au plus profond, immobile et gémissante, toujours en se mordant la lèvre, orgasme presque silencieux et bouleversant.


Je n’avais pas le sexe douloureux. Nous ne nous sommes pas endormis.


Je ne me suis pas réveillé vers trois heures du matin. Je n’ai pas rassemblé mes affaires. Je ne me suis pas dit que je sentais le parfum, la femme et le sperme. Je ne suis pas allé prendre une douche. Je n’ai pas pleuré sous la douche, pleuré à gros sanglots comme on pleure à six ans, qu’on pleure parce que les émotions débordent. Je ne lui ai pas dit :



En partant.


Je n’ai pas eu la bonne idée d’aller faire un tour dans un bar enfumé.


Quand je suis rentré chez moi ce soir-là, je sentais la clope et la transpiration, comme après chaque longue soirée de boulot avec des collègues fumeurs. Ma femme a l’habitude. Elle râle en disant :



Je hausse les épaules :



Le lendemain au bureau, je n’ai pas reçu un mail direct et gordien.



Je n’ai donc pas passé la journée à me demander quoi répondre, ni la journée suivante, ni celle d’après, ni celles qui suivaient, jusqu’à ce que mon silence vaille réponse.



Comme rien de cela ne s’est passé, que j’ai inventé tout ce que je viens de vous raconter après le bouclage du dossier, comme tout n’est qu’affabulations, je n’ai pas de remords, à peine des regrets…


À moins que ce ne soit l’inverse…