n° 11380 | Fiche technique | 16278 caractères | 16278Temps de lecture estimé : 10 mn | 10/05/07 |
Résumé: Il n'y a pas d'âge pour découvrir. | ||||
Critères: fagée voyage nonéro portrait | ||||
Auteur : Luce |
Cinquante-cinq berges, rendez-vous compte, j’ai cinquante-cinq berges. Divorcée d’un mari volage, des enfants à l’étranger, une bonne retraite que j’ai voulu prendre à la campagne, près de la mer, mais de grands moments de solitude difficiles à gérer, surtout en hiver. J’ai rencontré ma première nouvelle amie au cours d’un petit voyage organisé par le club où je me suis inscrite « pour voir », au moment où je me suis installée dans cette petite bourgade. C’était sympa, le but était d’aller faire des courses dans les ventas du Pays Basque espagnol. Le temps était magnifique en cette fin d’automne, le paysage allait être sûrement grandiose, la journée s’annonçait bien agréable. Tout a basculé au moment de la montée dans le bus. Ces messieurs-dames avaient leurs affinités et se réservaient mutuellement les places. Rien à dire, j’étais nouvelle dans le groupe et je savais rester « à ma place ». Je me retrouvais donc au fond du bus, heureuse tout de même d’être près d’une vitre, je pourrais au moins admirer le paysage.
Une femme d’une soixantaine d’années, que je connaissais de vue, au visage maquillé à outrance, mais souriant, voulait s’asseoir à côté de moi.
Après s’être mise à l’aise, elle s’enfonça dans son siège et se plongea dans la lecture de ce qui me sembla être une publicité d’une agence de voyages connue. Le paysage monotone de l’autoroute me rendait un peu morose, je décidai donc de m’intéresser de plus près à ma voisine qui ne disait mot. Était-elle nouvelle comme moi dans le groupe ? Sûrement pas, car elle semblait connaître du monde, elle devait volontairement se mettre à part, à moins que ce ne soient les autres qui la boudent ? Le brouhaha qui régnait dans le bus ne permettait pas d’entendre la musique ambiante, sauf lorsque le morceau était connu et qu’une dizaine d’entre eux se mettaient à chanter dans une époustouflante cacophonie les tubes de Mike Brant ou de Luis Mariano. Ces chauffeurs ont vraiment de gros talents de DJ, comme dit mon petit-fils, ils connaissent leurs clients !
Je me mis donc à observer attentivement ma voisine. Son visage était relativement agréable. Sans son maquillage un peu forcé et la teinture brune de ses cheveux courts, cela aurait été certainement différent, tout comme moi d’ailleurs ! Par contre son chemisier ne pouvait cacher sa poitrine vraiment avantageuse. Elle portait une jupe un peu serrée et ses jambes croisées gainées de nylon beige bien galbées montraient qu’elle avait sans doute l’habitude d’entretenir son corps. Mais ce qui me marqua le plus dans mon observation, ce fut sa capacité à se concentrer sur sa lecture, car ce n’était vraiment pas l’endroit ni le moment ; bien souvent, je remarquai également qu’elle souriait lors du passage sur certaines pages.
Je me lassai également de cette observation et réussis à m’assoupir au moment où la chorale commençait à s’essouffler et à réclamer un arrêt casse-croûte. Le chauffeur, sans doute habitué de la chose et ayant prévu l’endroit de la halte, se gara sur la place d’un petit village et ouvrit la soute à bagages. Comme par magie, des paniers à victuailles surgirent et les gens s’installèrent tout autour du petit lavoir qui se trouvait au milieu de la place. Tout était prévu, mais moi, évidemment, je me retrouvai comme deux ronds de flan, n’étant pas habituée à ces agapes.
Assises à une petite table, chacune regardait sa tasse. Il allait bien falloir engager la conversation !
Tout le monde ayant retrouvé sa place, le voyage reprit. Notre conversation également ; petit à petit, quelques confidences sont venues : notre ancienne vie active, nos familles, etc. Mais je sentais bien qu’elle aurait bien voulu en savoir plus sur d’autres sujets. Je n’avais aucune intention de me prêter à ce petit jeu-là, je la sentais bien plus « branchée sur la chose » que moi. Oh, je ne suis pas coincée à ce point-là, mais c’est un domaine trop personnel. Elle n’a pas insisté, malgré quelques petites remarques sur les hommes présents, dont aucun ne semblait lui convenir pour lui servir de « casse-croûte ». Comme le bruit s’était calmé après cette pause, notre conversation s’arrêta et elle reprit son catalogue pendant que je me tournai vers la vitre pour admirer les vertes collines environnantes. Décidément, elle avait envie de parler.
J’ai pu avoir la paix jusqu’à l’arrivée sur les lieux. Après les consignes précises du chauffeur sur l’heure du départ, toute la troupe s’éparpilla dans la seule rue où se trouvait une cinquantaine de magasins qui vendaient tous exactement la même chose et qui était déjà noire de monde. Je me décidai à suivre ma voisine, persuadée qu’elle ne suivrait pas cette meute bruyante. Me voyant plantée au milieu d’une dizaine de bus, elle s’approcha gentiment.
Nous quittâmes la rue principale, et à travers un dédale de petites rues qu’elle connaissait comme sa poche, nous nous retrouvâmes devant la porte grande ouverte d’une sympathique auberge. Elle s’avança à l’intérieur, et dans un espagnol parfait, commanda deux repas pour quatorze heures.
En effet, le premier magasin d’habillement dans lequel nous entrâmes n’était pas tout à fait consacré à des vêtements de nos âges : robes courtes, jupettes, hauts à fines bretelles, etc. Je ne me sentais pas tout à fait dans mon élément, mais je la laissai faire sans mot dire. Elle arriva à la caisse avec un tas de ces vêtements légers et courts. L’hiver arrivait, je ne comprenais pas. En quittant le magasin, elle me glissa quelques mots à l’oreille.
La boutique suivante, ce fut pire encore pour moi : de la lingerie fine. Mes modestes soutiens-gorges et mes ridicules culottes de coton me firent un peu honte lorsque mes yeux se posèrent sur ces paniers de dentelles de toutes les couleurs et sur ces mannequins magnifiques. Je fus sidérée par la quantité qu’elle acheta.
Aucune réponse ne put sortir de ma bouche. Ma pruderie en avait pris un sacré coup et je savais qu’elle avait raison. Elle avait assez de force de caractère pour assumer. Je ne connaissais rien de sa vie, mais je sentis qu’elle avait une revanche à prendre et que cette revanche commençait par là, par l’embellissement de ses appas physiques. Dans mon esprit, cela signifiait qu’elle désirait attirer dans ses filets des hommes ou pourquoi pas des femmes. Cela ne me disait rien qui vaille, ce n’était vraiment pas pour moi, il fallait que je laisse tomber cette femme au plus vite, tout cela me gênait au plus haut point.
Ces achats terminés, il était l’heure d’aller déjeuner. Nous fîmes un détour par la place pour déposer les courses dans le bus. Le chauffeur, qui semblait au courant de ce que contenaient les multiples poches lui fit quelques remarques qu’il trouva drôles, se permettant même de lui mettre la main aux fesses pendant qu’elle était penchée dans la soute. Elle n’eut aucune réaction ! Il fallait que j’aie des éclaircissements au cours du repas, car là, je ne comprenais plus rien à cette femme, ou plutôt si, elle devait être plutôt volage et aimer sacrément la bagatelle !
Suzon semblait satisfaite de ses achats de la matinée et elle m’en fit largement part durant le repas.
Le repas prit fin sans que je m’en rende compte. Mon trouble était immense, cette femme m’avait envoûtée. Moi aussi, j’aimais faire l’amour, moi aussi j’en étais privée, moi non plus je ne voulais pas d’aventure avec des hommes du cru, moi aussi j’avais les moyens de m’offrir un voyage… J’ai passé l’après-midi comme un zombie, nous avons fini nos courses et pris le chemin du retour. Elle n’était pas à côté de moi, j’en ai éprouvé un peu de tranquillité, la conversation n’a pas duré et je me suis endormie.
À l’arrivée, après avoir récupéré mes affaires, je me dirigeai vers ma voiture.
* * * * *
Le soir, à la maison, confortablement installée sur mon canapé, en robe de chambre sur ma sage chemise de nuit en coton imprimé, je me mis à penser à l’attitude de Suzon et à feuilleter son catalogue. Des endroits de rêve, baignés de soleil, des visites extraordinaires. Et elle se payait ces voyages uniquement dans le but de se faire baiser. Et si c’était elle qui avait raison ? Ici les mecs de notre âge n’étaient pas du tout intéressants et les jeunes ne nous regardaient même pas. Du moins moi, car je ne faisais rien pour cela ! Petit à petit, j’ouvrais les yeux et je me demandai si je n’allais pas tenter une aventure de ce genre. Bon, dans ma tête, cela pourrait passer, mais mon corps suivrait-il ? Il y avait belle lurette qu’il n’avait pas servi, je n’y prêtais plus attention et ne faisais rien pour le mettre en valeur. J’étais même plutôt tentée de le cacher sous des vêtements affreux, de me regarder le moins possible dans le miroir de la salle de bains, de penser à autre chose au moment du bain ou de la douche.
Perdue dans mes pensées, je ne m’étais pas rendue compte de mes gestes. Ma robe de chambre était ouverte, ma chemise de nuit remontée sur mes cuisses que je caressais doucement. « Tiens, elles ne sont pas si flasques que ça, même si je ne fais pas de sport ! » J’évitai d’aller plus haut vers mon sexe. Je m’aventurai à déboutonner le col de ma chemise de nuit. Mes seins n’ont pas giclé, bien sûr. Ma main s’est glissée sous le doux tissu pour constater ce que je savais déjà : il fallait aller loin pour rencontrer un téton qui lui, par contre présentait quelques velléités de redressement. Mais à y bien réfléchir, le genre de soutien-gorge pigeonnant qu’avait acheté Suzon devait redonner un certain galbe, mou, mais trompe-l’œil. C’est après que cela devait se gâter, si le mec défaisait l’agrafe. Mais était-ce important ? Ce qui était sûr, c’est que la douceur était au rendez-vous, ma peau était toujours aussi satinée et mes tétins granuleux réagissaient sans même que j’y touche, chose que j’ai toujours laissé faire aux hommes, même si parfois ils sont un peu brutes avec de si mignonnes choses !
Ma tête tournait un peu. Des bouffées de chaleur m’envahissaient. J’étais tout simplement en train de faire l’inventaire de mon corps. Pourquoi ? Savoir s’il pouvait encore me donner du bonheur, savoir s’il pouvait plaire ? J’avais de drôles d’idées tout d’un coup. Suzon m’avait remué les sens à un point que je n’aurais jamais imaginé, seulement en évoquant ses frasques que je sentais hors du commun. Serais-je capable, moi aussi, de faire comme elle ? Ce n’était pas l’envie qui me manquait. J’étais sûre que notre prochaine rencontre allait être riche en enseignements, j’avais des tonnes de questions !