n° 11598 | Fiche technique | 9755 caractères | 9755 1679 Temps de lecture estimé : 7 mn |
02/08/07 |
Résumé: Deuxième série de mes petites histoires matinales, écrites durant la nuit et envoyées au petit matin à un ami très cher. | ||||
Critères: #poésie grp amour cérébral | ||||
Auteur : Louise Gabriel (Le plaisir des mots) Envoi mini-message |
Collection : Mes petites histoires matinales |
J’ai invité quelques amis connaisseurs de chair fraîche et alanguie, de chair chaude et permissive, des amoureux de plats délicats et exotiques, des esthètes de la cuisse ferme, de la fesse ronde, des prédateurs pourvus d’une langue humide et douce, d’une belle queue rigide et veloutée, une vraie bénédiction pour corps affamé.
J’ai dressé une table royale, une grande nappe blanche, un boutis de velours pour plus de confort, un gros édredon de soie pour la légèreté de la plume d’oie, quelques fleurs pour les senteurs de printemps.
Je t’ai installé le plus confortablement du monde, comme un nouveau-né vautré dans la tendresse des tissus, avec un joli coussin pour ta tête et une belle écharpe de soie pourpre pour te bander les yeux.
Je te veux mets délicieux, savoureux, aveugle pour ne pas savoir mais juste sentir jusqu’au plus profond de toi l’imperceptible caresse.
Tu es donc là, couché, paisible ; seule une veine de ton cou palpite un peu plus fort, un peu plus vite, trahissant le désir et la légère angoisse mêlés. Nous sommes tous là, autour de toi, à contempler nos futures agapes, à finir notre coupe de champagne. La musique est forte, entêtante, ensorcelante… Les envies tactiles font leur chemin dans les cerveaux.
Je ne m’approche pas, je suis un peu loin, pour embrasser du regard toute la scène, pour voir le tableau devenir vivant.
Les mains se délient, elles veulent toucher, émouvoir ton corps offert à leurs yeux, à leurs doigts, elles n’y tiennent plus. Il aura suffi d’un, plus impatient, pour que le ballet incessant des mains entame sa danse sur ta peau. Et le premier contact est somptueux, lorsque qu’on a longtemps attendu, lorsque qu’on a entendu des sons de voix multiples, à ne plus savoir à qui elles appartiennent, d’où elles viennent. Le frisson de surprise et d’émoi qui te parcourt est si beau à voir.
Nous n’aurons besoin ni de couteau ni de fourchette pour te dévorer, nos langues, nos bouches seront bien suffisantes.
Ils te lèchent les pieds, les mollets, le torse, les bras, les mains, ils t’embrassent à pleine bouche, ils sucent avec délectation la moindre parcelle de ton corps.
Pour connaître l’ivresse des sens, je verse doucement du champagne bien frais sur ta peau bouillante des succions passées ; j’aime le tressaillement que provoque la fraîcheur des bulles et la ruée des langues avides sur le liquide ruisselant.
Tu bandes à n’en plus finir ton désir érigé, victorieux, suppliant. Nous sommes un, deux puis trois à sucer avec délice ta belle queue, les langues s’enroulent autour d’elle, elles s’embrassent autour de ton membre turgescent, elles vont et viennent dans un ballet qui ne cessera pas de si tôt.
Tu te tortilles en tous sens, tu perds la tête, tu nais ailleurs, tu deviens sensation, tu t’envoles, tu t’enroules et te déroules sous la caresse multiple.
Les doigts deviennent audacieux, tes fesses se montrent, se donnent, elles veulent plus et plus encore, elles veulent appartenir, elles veulent s’évanouir dans les plaisirs de la pénétration, des pénétrations répétées. Mais ils vont prendre leur temps, ils vont les faire hurler de désir, ils vont te faire connaître le trouble d’être à supplier d’aller plus loin, plus vite… Ils vont lécher avec lenteur, sucer avec saveur le goût suave de ton cul. À plusieurs langues réunies, ils vont créer au fond de toi le gouffre du désir inassouvi.
Hurle que tu veux être possédé, là, tout de suite, sans plus attendre une seconde !
Ils finissent par accéder à ta supplique. Ils glissent en toi, avec vigueur pour certains, avec plus de douceur pour d’autres. Ils ne laissent jamais très longtemps ton beau cul en paix, ils veulent t’émouvoir, ils veulent se perdre en toi, ils veulent jouir en toi sur toi. Leur sperme se répand sur tes fesses, sur le bas de tes reins, d’autres s’empressent de goûter, de lécher, de boire, la bouche grande ouverte.
Tu gémis comme une prière lancinante celle du plaisir, de la douce extase. Tu n’es plus qu’une immensité, un champ brûlant et charnel.
Tu es terriblement beau à cet instant-là, ravagé de trop de caresses insistantes.
Et, chacun notre tour, nous allons sucer ta queue encore, et encore faire durer ce moment, allonger les minutes à n’en plus finir, étirer nos langues, agrandir nos bouches, te faire jouir à ton tour, goûter ton sperme jusqu’à la dernière goutte, profiter de ce si agréable repas jusqu’à la dernière miette, lécher une ultime fois le bout de ta queue pour te faire revenir sur terre dans toutes les douceurs possibles, sur les ailes des fées de Noël.
Je retire ton bandeau, ils sont déjà repartis vers d’autres aventures, nos compagnons de table, l’esprit calme et repu.
Il te restera le souvenir sublime de la caresse multiple, toi qui pratiques le don de la caresse experte.
Tu te retrouves dans l’unique réception de la multiplicité, dans le doux sentiment de naître différent sous d’autre mains avides du suave de ta peau, se donner à se perdre totalement, devenir jaillissement, volcanique et féerique.
J’aime t’imaginer dans cette situation-là, dans l’abandon, le don de soi, pour trouver les chemins des désirs exaspérants, le trouble si émouvant de s’offrir pour, finalement, prendre !
Je t’avais convié à une petite ballade un peu différente, se remplir les yeux de l’émotion d’un autre, mais tu n’as pu venir. Ton amour te réclamait toute ton attention et il ne faut jamais négliger, oublier ne serait-ce qu’un instant ce besoin-là.
Je me suis donc pliée de bonne grâce à cette exigence. Il n’y a rien à redire, à contester, à exiger face à votre amour, bien au contraire. Je suis donc partie seule. Qu’importe ! Il m’arrive souvent d’aller contempler les tableaux de génie du trait sans personne.
Cette exposition avait tout de même un petit rien différent. Les dessins érotiques de Rodin ont une saveur bien particulière : les couleurs des aquarelles, la fulgurance du trait… Il a dû désirer vraiment certains de ses modèles. Cela ne parle que d’animalité, de moiteurs, d’indécence, finalement de ce qui me parle le mieux. On pourrait sentir la chaleur qu’il devait faire dans son atelier au moment où il a fait ses esquisses.
Je suis donc arrivée d’assez bonne heure, comme à mon habitude ; j’aime le matin et il faisait un soleil magnifique ce jour-là. Peu de monde à l’entrée, le bonheur, juste quelques touristes presque là par hasard. Je serai tranquille pour m’attarder tout le temps nécessaire.
J’aime ces endroits ou l’on chuchote comme dans une église. Il y a du recueillement lorsque l’on promène ses yeux sur le génie de certains. C’est un endroit assez petit, éclairé juste ce qui est nécessaire. Je commence à doucement caresser du regard ces couleurs fondues, ces corps lascifs dans des positions parfois improbables.
Je finis par sentir presque inconsciemment une présence, un corps qui glisse au même rythme que le mien, il est juste derrière moi. Je sens son regard qui passe de mon dos au tableau.
Les saveurs décrites par Rodin sont, je dois dire, mille fois inspirantes.
Mais je ne me retournerai pas, je vais continuer mon chemin au cœur des toiles, imperturbable, continuer à imaginer son œil, son insistance, à sentir son souffle se rapprocher encore un peu plus, mais ne pas croiser son regard qui ne parle que de désir, rester encore dans le rêve, dans la perception du désir.
Et, comme à l’habitude, mon imagination va te faire naître, te donner vie où tu ne peux pas être. L’envie d’un autre, qui suffira à me donner envie de toi.
Je te sens arriver là, pas tout à fait par hasard. Je perçois ta chaleur, ton odeur, tu t’approches encore un peu plus, tu bandes. Même sous la forme d’un ange, ta queue a belle vigueur, elle est là compressée sur le rebondi de mes fesses.
Tu vas continuer à me câliner les épaules, la nuque, te pencher si près que ton souffle devient brûlant, avancer dans mes pas sans jamais te détacher de mon corps.
Cette sensation que tu t’es glissé au cœur de moi…
Tu rayonnes à l’intérieur de ma chair, tu es en moi et tu ondules à plaisir dans les plus petits recoins.
Et les esquisses prennent une texture bien étonnante. Elles deviennent mouvantes, vivantes, toutes ces Femmes qui ont crié le besoin d’appartenir. Tout devient un somptueux ballet de couleurs, de corps, qui dansent autour de moi.
Je pourrais accepter, là, tout de suite, de me faire posséder par ta jolie queue qui réclame un peu plus de chaleur, un peu de moiteur, me laisser déshabiller au vu de tous pour profiter de plus près de la douceur indécente de tes mains.
Mais la promenade doit se poursuivre. Aller encore voir ce tableau-là, puis le suivant, et encore un autre, laisser le désir devenir insupportable, vide, gouffre gigantesque.
Sentir ma peau se muer en une immensité océane, mon esprit, mer déchaînée un jour de tempête.
Ma promenade touche à sa fin, peut-être recommencer encore une fois le chemin à l’envers, pour prolonger le songe, pour continuer à sentir ce regard appuyé qui ne m’a pas quitté une seule seconde.
Perpétuer le réel et l’irréel, prendre si grand plaisir à être avec toi alors qu’il s’agit d’un autre qui désire, qui chavire.
Parce que, lorsque je me retournerai, le regard suffira pour qu’il bascule, pour qu’il me suive sans question, sans même une main tendue.
Parce que la danse qui a précédé n’autorise plus rien d’autre que la folie d’un corps à corps, sans un seul mot, dans le silence des couleurs.
Alors, rêve de t’appartenir, de sentir une fois encore la saveur de tes doigts, de goûter le parfum de ta queue, de caresser les rondeurs de tes fesses, d’admirer le vacillement de tes yeux, la musique de ton abandon lorsque tu jouis ou la réalité de la rigidité du désir.
Seuls les anges présents ce jour la connaissent la vérité !
J’ai aimé t’emmener avec moi en balade un matin où tu dormais encore…