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Temps de lecture estimé : 10 mn
16/03/08
Résumé:  Entre un ex pour qui elle éprouve une passion folle et une amie vierge en mal d'amour, Charlotte a un peu de mal à y voir clair !
Critères:  jeunes copains piscine revede nonéro -amiamour
Auteur : Lilas  (Charlotte a bien du mal à gérer ses relations amoureuses !)      Envoi mini-message

Série : L'odyssée de Charlotte

Chapitre 01
Tentation

Derrière la verrière, les ombres s’allongeaient lentement. Je me trouvais chez Pauline, ma meilleure amie. Son père possédait une petite piscine privée, couverte, ce qui était un avantage certain ! On était le 23 août, et la chaleur, dehors, était accablante depuis des jours. Pauline et moi nous retrouvions donc tous les jours au bord de la piscine, fraîche et bleue comme un lac de montagne.


Pauline avait beau se plaindre qu’appartenir à la haute bourgeoisie de la ville était un calvaire de tous les jours, et qu’on la considérait continuellement comme une fille à papa, j’étais loin de partager son avis, surtout en ces jours brûlants ! Limite si, en croisant son père ce matin, près du hammam, je n’étais pas tombée à ses pieds pour lui baiser les orteils !



J’étouffai un fou rire en l’observant, cette « fille à papa » si cul-cul la praline, même pas fichue de s’offrir une crème Dior hors de prix pour dégonfler ses cernes (conséquence de nuits plutôt mouvementées) ! Non, il fallait toujours qu’elle fasse comme tout le monde. Et c’est sans doute pour cette raison qu’elle était mon amie, après tout.


Je sortis de l’eau, et m’assis sur le rebord mouillé pour lui parler.



Elle poussa un soupir à s’en fendre l’âme. Sans bouger d’un iota. D’un geste, j’ôtai mes lunettes de plongée, souriant dans le vide.



Je l’appelais May depuis l’enfance. Allez savoir pourquoi. Peut-être parce que lorsque j’étais petite, j’avais entendu son nom de famille, Mailland. Mon père m’avait alors appris qu’il existait un rosier appelé « Mme Meilland », et je l’ai trouvé magnifique. Depuis lors, Pauline était devenue May.


Ça lui plaisait bien. En prenant un autre nom, elle avait l’impression d’endosser une autre personnalité. Elle pouvait être différente avec moi, changer d’identité. Elle qui a toujours mal vécu le fait d’être la fille « de », se lâchait complètement en ma présence. Enfin, « lâcher » est un grand mot, dans la mesure où May complexait à mort sur son physique, étant d’une pudeur et d’une timidité presque maladive. Étonnant, pour quelqu’un de sa position sociale !


Quand on connaissait bien May, on ne s’étonnait plus que moi, jeune femme banale et quelconque, fusse si importante à ses yeux. Elle aimait se mêler aux autres, s’immerger dans la normalité, dans la banalité presque. Sa famille – surtout sa mère – lui demandait constamment de tenir sa place, de s’habiller comme ci ou de parler comme ça. J’étais pour elle une grosse bouffée d’oxygène. Inutile d’ajouter que sa mère ne pouvait pas me voir en peinture. Mais, chance, elle était en croisière sur leur yacht, au large de Chypre.



Je revins sur terre. Machinalement, mon doigt traça un cœur avec les gouttes qui constellaient le dallage luisant sur lequel j’étais assise.



May me fit l’honneur d’ôter l’espace d’une seconde une carotte de son œil droit, et me considéra avec un brin d’amusement.



D’un geste vif, May lança ses deux tranches de carottes dans l’eau, où elles firent un petit « plif » comique, et piocha deux tranches de concombres, cette fois, dans un bol rempli de glaçons. Tout en les appliquant sur ses yeux, elle eut un sourire narquois.



Brusquement nerveuse, je me levai, et marchai jusqu’à la paroi de la verrière, regardant le crépuscule nimber d’or rouge les magnifiques peupliers du jardin de May. Il était 20 h 30, on était vendredi, et je ne savais toujours pas quoi faire de mon week-end. J’étais célibataire depuis trois mois, et cela commençait à me peser.


Je me retournai et m’élançai dans la piscine. Le choc me coupa la respiration, et je revins à la surface haletante. L’onde soyeuse était comme un voile autour de mon corps. En faisant la planche, je croisai les deux morceaux de carottes de May qui flottaient à côté de mon oreille.



Quand nous fûmes lasses de passer notre temps à ne rien faire, nous décidâmes d’aller nous rhabiller. Sur le chemin de la salle de bain, je croisai le père de May… à moitié nu. Il portait une serviette et n’était vêtu en tout et pour tout que d’un slip de bain rouge. Qui moulait fortement son anatomie, assez impressionnante d’ailleurs pour un homme de 48 ans !



Je lui souris poliment, luttant pour ne pas baisser les yeux, et entrai dans la salle de bain. Il me suivit du regard. En refermant la porte, je réfléchis furieusement. Il était curieux que je croise constamment le père de Pauline lorsque j’étais en bikini. Je ne l’avais jamais beaucoup aimé – à part quand il me prêtait sa piscine par temps de canicule. Quelque chose en lui ne me mettait pas à l’aise, même si je n’aurais pas su dire quoi exactement…


May me rejoignit quelques minutes plus tard.



Je haussai les épaules. Ce soir, Pauline avait rendez-vous avec un type qu’elle avait rencontré au club de golf la semaine d’avant. Comme elle me faisait toujours passer avant ses pseudo conquêtes masculines, j’avais décidé de me mettre en retrait, pour une fois. À 22 ans, il serait bon que May quitte enfin son éternelle enveloppe de pureté…


Quant à moi, cela faisait bien longtemps que je ne l’étais plus, pure. J’avais 23 ans depuis deux mois, et je me sentais plus seule que jamais…


Tout en nous douchant, l’une dans la douche, et l’autre dans le jacuzzi, nous discutions de choses et d’autres. Mon portable émit soudain un son qui me fit battre le cœur. Avant même de voir « Vincent » clignoter sur l’écran de mon téléphone, je savais que c’était lui.



Vincent était le seul homme que je connaissais pour l’instant à posséder un timbre de voix aussi bas. Un véritable vibrato qui faisait danser la gigue à mon cœur.



Sa voix suave révélait des accents sensuels impossibles à ignorer. Tous deux savions ce que ça voulait dire. J’eus un instant d’hésitation.



Je confirmai donc ma venue, tout en sachant que ce n’était pas bien. Pas bien du tout.


Pauline se séchait avec application, un sourire sur son visage constellé de taches de rousseur. Je raccrochai et croisai son regard goguenard.



Trente minutes après, j’arrivais dans la rue de Vincent et commençais à chercher une place. Je ruminais en silence. Je devinais ce qui allait se passer, et pourtant j’étais là, présente à l’appel comme une bonne petite pouliche bien élevée. J’étais sortie avec Vincent six mois auparavant, et notre relation n’avait duré que trois semaines. Elle avait été si intense que j’en étais sortie toute groggy. Jusque-là, jamais je n’avais connu un tel déferlement de passion et de fougue pour quelqu’un… et je m’étais attachée très vite. Jusqu’au jour où le bel oiseau était tombé de son nid. Il avait paniqué en voyant l’affection que je lui portais, et m’avait vite renvoyé à ma vie plate et sans saveur, un peu de son sperme encore collé entre mes cuisses, puisque nous avions fait l’amour une heure avant qu’il ne me jette.


Autant vous dire que je l’avais très mal pris. Pendant deux mois, je n’avais pas donné de nouvelles, pour oublier. Puis j’ai rencontré quelqu’un d’autre, et j’ai renoué contact avec Vincent, pensant – à tort – que mon attirance pour lui était révolue. Nous étions devenus amis, petit à petit, et quand j’ai quitté mon petit copain, il m’a félicitée en m’affirmant que c’était un gros nul.


Tout naturellement, nous nous sommes revus. Un peu, au début, puis souvent. On ne faisait que parler, voir des films, sortir boire un verre, mais il y avait son regard… Seigneur, le regard qu’un homme peut vous jeter lorsque tout son corps vous désire ! Parfois, il me jouait un peu de piano, ou me faisait écouter des titres qu’il avait aimés, tout en me touchant de temps en temps, familièrement, et je rentrais mon désir si fort que mon ventre était tout tendu.


De plus en plus troublée, j’avais espacé nos rencontres, afin de garder la tête froide, et rester maîtresse de mes émotions. Mais il m’appelait, souvent tard le soir, et on parlait pendant des heures.


Arrivée devant sa porte, je pris la résolution de ne pas rentrer, finalement. J’allais rebrousser chemin, et commençais à inventer un prétexte quelconque à mon absence, quand sa porte s’ouvrit toute grande. Il apparut, en jean et tee-shirt, le téléphone collé à l’oreille.



Il se pencha vers moi et posa un baiser un peu trop près de ma bouche, comme par inadvertance. Je ne pipai pas un mot.



Puis il me regarda, profondément. Un de ces regards qui vous atteignent jusqu’à l’os.



Il s’évapora dans la cage d’escalier, et j’entrai dans son appartement, les jambes flageolantes. J’attendis pendant un instant, puis fis quelques pas dans son salon. Je finis par m’asseoir devant son piano, et jouai une petite mélodie en évitant de penser que je n’avais rien à faire ici.



J’eus un tel sursaut que je faillis tomber de mon siège, et me retournai vers lui. Il m’observa curieusement.



Il reposa le téléphone sur son socle, et se retourna vers moi.



Il parut étonné.



Il me servit, prit un verre de jus de fruits pour lui, et vint s’asseoir en face de moi sur le canapé. Je regrettai aussitôt d’avoir choisi l’alcool, malgré mon besoin de réconfort. Lui allait rester maître de lui, et moi, pompette, j’offrirais une maigre résistance, si ce soir lui plaisait l’envie de mettre en pratique l’attirance indéniable qui régnait entre nous…


J’avalai une grande rasade pour fuir mes pensées, priant pour qu’il ne se rende pas compte du terrain glissant sur lequel elles étaient en train de s’aventurer… Il se leva et mit de la musique, tout en ouvrant quelques fenêtres sur son ordinateur portable.



Je faillis m’étouffer.



Il resta deux secondes parfaitement immobile, les yeux fixés sur son écran, avant de se retourner vers moi et de me regarder d’un drôle d’air.



Je frissonnai. J’avais passé une robe toute simple, en coton, mais elle me collait déjà à la peau à cause de la transpiration. Pourtant, mes mains étaient froides.



En effet, sa simple vue m’avait coupé l’appétit. Je connaissais bien ces symptômes. Il y a six mois, sa façon de se servir de moi m’avait fait mal, mais je le connaissais depuis trop peu de temps pour être tombée amoureuse de lui. Je n’avais pas mis longtemps à me remettre de cette rupture. Alors qu’aujourd’hui, alors que nous étions sensés devenir amis…


Je me levai et allai me coller contre son ventilateur. Je surpris son regard bleu posé sur moi, furtif. Je me traitai d’idiote, à fantasmer aussi librement sur un « gamin ». En effet, il avait plus de trois ans de moins que moi, ce qui n’était pas tant que ça au bout du compte, mais ça me permettait de freiner un peu le cours de mon inclinaison pour lui. Un peu…


Il choisit enfin un film et le fit basculer sur sa télévision. Ensuite, il me rejoignit et nous nous assîmes l’un à côté de l’autre sur le canapé…