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Temps de lecture estimé : 13 mn
12/04/08
Résumé:  Un Irlandais en quête de romantisme trouve l'amour à Paris.
Critères:  hh hbi jeunes amour fellation hsodo mélo -coupfoudr -hhomo
Auteur : Skyways  (Skyways, la tête toujours dans les étoiles)      Envoi mini-message

Série : A Trip To Nowhere

Chapitre 01 / 03
I've Waited For You So Long

Mon histoire commence en Irlande, dans un petit village au nord du Dublin. Je suis né un 8 avril 1985 ; à peine quinze ans plus tard, je sus que je devais me barrer d’ici le plus vite possible. J’ai toujours été un rêveur, un romantique et bien que mon pays soit peuplé de légendes et de mystères, c’était à Paris que je me voyais faire ma vie.


À l’époque, je me disais que l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts n’attendait que moi, alors pendant toute ma scolarité, je me suis efforcé d’apprendre le français au point de le parler sans dévoiler mon léger accent. À 19 ans, je m’envolai pour la capitale de l’amour. Je devais vivre chez un couple qui avait l’habitude d’héberger des étudiants étrangers pendant toute la durée de leur scolarité. Monsieur et Madame Jones. Je les avais choisis pour leur nom, croyant bêtement qu’ils venaient de chez moi.


Ils vinrent me chercher à l’aéroport et c’est à ce moment que ma vie bascula. Daniel et Lise, un couple tout ce qu’il y a de plus français. Devant mon air perplexe, Lise me dit que leur nom venait de l’arrière-grand-père de Daniel, un Anglais qui, comme moi, avait décidé de faire sa vie ici. Apparemment, ma nouvelle famille ne parlait pas un mot d’anglais et pourtant, au moment où j’ai croisé son regard à lui, tous les mots du monde m’ont paru dérisoires. Ses yeux étaient couleur chartreuse, comme l’alcool que mon père appréciait de boire. Des yeux qui scrutèrent les miens, banalement bleus. Je crois que je l’ai tout de suite aimé.


Je ne connaissais que très peu de choses sur l’amour, il est vrai. J’avais eu une petite copine au pays et j’avais découvert bien vite que je n’avais aucun désir pour elle. Je n’en avais jamais parlé à personne, on m’aurait pris pour un fou. Mais ici, ici j’étais libre !


Arrivés à leur immense maison, ils me firent visiter ; le salon, la cuisine, la salle de bain, ma chambre située juste à côté de la leur.



La semaine qui passa fut grandiose, ils me firent tout découvrir, de la tour Eiffel au Musée du Louvre en passant par le Trocadéro. Tout était beau mais pourtant mes yeux ne pouvaient le quitter lui. C’était lui la plus grande merveille de Paris, avec ses cheveux noisette qui lui tombaient sur le visage, avec son sourire digne des plus grandes stars d’Hollywood, et ses yeux, ses yeux.


À mon tour, je leur fis découvrir mon univers, les tableaux que j’avais peints, la musique que j’écoutais, les livres que je lisais… Ma vie me parut insipide par rapport à la leur : Lise travaillait dans une agence de mannequins, pas en tant que modèle certes, mais cela ne l’empêchait pas d’être très belle. Encore aujourd’hui je ne comprends pas pourquoi je ne l’ai jamais jalousée. Après tout, elle avait tout ce que je désirais. Lui. Je me rendis à l’évidence, un peu plus chaque jour je tombai amoureux de lui, lui le photographe parisien qui avait réussi à capturer mon cœur.


Très vite je m’habituai à ma nouvelle vie : l’école, les voir s’embrasser devant moi, les fameux croissants chauds du matin, leurs gémissements qui filtraient à travers les murs, les pleurs lorsque j’avais le mal du pays, ses pleurs à elle lorsqu’il lui faisait l’amour. Je ne calculais plus le nombre de fois où je me masturbais en les entendant, une main glissant sur ma virilité, deux doigts de l’autre fourrés dans mon anus. Malgré tout, mes plaisirs solitaires me laissaient toujours sur ma faim, surtout lorsque je le voyais le matin, assis dans la cuisine, les cheveux en bataille et l’œil brillant.


Mon souvenir le plus marquant le concernant fut pendant mes premières vacances scolaires. Je me sentais horriblement seul pendant le froid hiver parisien ; aussi j’eus l’impression que Daniel restait plus souvent à la maison.



C’est à ce moment-là que de fantasme, il est devenu meilleur ami. Je lui ai dit que j’étais homosexuel et que comme tous les hommes j’avais des besoins. Il avait deviné, il m’a dit un sourire aux lèvres. Je me rappelle avoir rougi, de peur qu’il ait intercepté les regards amoureux que je lui lançais souvent. Étrangement, c’est lui qui m’a initié aux boîtes gays, sans jamais se rendre compte de mes sentiments. J’en ai bavé à cette époque, tandis que lui disait qu’il fallait que j’évite de ramener des hommes à la maison. Idiot, idiot, le seul homme que je voulais était déjà chez moi.


J’ai perdu ma virginité dans une backroom, imaginant que c’était sa queue qui était en moi, que c’étaient ses mains qui agrippaient mes hanches, que c’était ses lèvres qui me cajolaient. Je ne me rappelle même pas de la tête de mon amant.


C’est à peu près à cette époque que les disputes entre Lise et Daniel ont commencé. Il rentrait souvent tard, l’odeur d’alcool parfumant ses vêtements et Lise l’attendait de pied ferme, attendait encore plus ses explications. Ils faisaient de moins en moins l’amour, les larmes de passions devinrent amères. Je lisais le désespoir dans ses yeux à lui alors que j’essayais vainement de lui sortir les vers du nez, de le comprendre. Il me repoussait à chaque fois, n’imaginant même pas les dégâts qu’il causait à mon cœur. Des fois il ne rentrait pas à la maison pendant des jours. Étrangement, c’était Lise qui me consolait, comme un petit enfant.



Et c’était vrai, il revenait, un peu plus perdu à chaque fois.


On a vécu presque deux ans comme ça, jusqu’au jour où je n’ai plus supporté la situation. J’ai déménagé, c’était Lise qui m’avait trouvé un petit studio, à l’autre bout de Paris. Je me sentais sombrer dans le désespoir et ma seule consolation, c’était que j’étais enfin devenu le personnage romantique que je voulais être. Je n’aurais jamais cru souffrir autant. Je ne l’ai pas vu pendant presque deux ans, je ne l’ai oublié à aucune seconde.




* * *




J’avais à présent 23 ans et j’allais entamer ma quatrième année parisienne. J’avais changé, aussi bien physiquement que mentalement. Mon caractère s’est endurci, enfermant avec lui la sensibilité que je peignais dans mes tableaux. J’ai vite arrêté les Beaux-Arts, trop compliqués, trop abstraits dans une période où j’avais fatalement besoin de solidité. J’avais trouvé un petit boulot dans une librairie, rien de bien reluisant mais au moins j’avais de quoi vivre. J’essayais de rester accroché à la réalité, mais j’avais l’impression d’avoir tout perdu en l’ayant perdu lui.


Un jour, sur mon lieu de travail, je suis tombé sur un livre de photographies. Daniel Jones, le célèbre photographe, venait enfin de publier ses œuvres. Je savais que je n’aurais pas dû, mais j’ai regardé attentivement chacune de ses photographies, ne reconnaissant pas la marque de l’homme que j’aimais. Ses photos, bien que magnifiques, ne représentaient que des personnes tristes, la larme au bord de l’œil, le visage défiguré par la peine. Il avait l’habitude de prendre des photos de couples, des photos d’amoureux s’embrassant sous les lumières du Moulin Rouge.


Le cœur battant la chamade, je suis arrivé à la dernière page et c’est avec effroi que je me suis reconnu. Il avait pris cette photo de moi bien avant mon départ, sans que je m’en rende compte. J’avais le rouge aux joues, l’air essoufflé et je souriais comme un bienheureux. Des centaines de souvenirs rejaillirent de ma mémoire : ce jour-là, on avait un peu trop bu lui et moi, sans raisons apparentes. Sous l’effet de l’alcool on s’était mis à danser ; lui imitant les gens que l’on voyait dans les clubs et moi, tentant vainement de lui montrer des pas de danses traditionnelles. On avait ri comme des cons, juste comme ça.


J’avais tenté de l’oublier quelques heures dans les bras d’autres hommes mais rien n’y faisait, un goût d’inachevé pesait toujours sur moi. J’ai gardé l’album avec moi, de peur que quelqu’un ne m’arrache le seul souvenir que j’avais de lui.


Je n’ai pas vraiment le temps de me remettre. Deux semaines plus tard, alors que je rentre du travail, j’aperçois une silhouette à ma porte. C’est lui. Je m’en veux d’avoir oublié à quel point il était beau, à quel point ses yeux brillaient dans la nuit. Les quelques minutes qui suivirent nous mettent tous deux mal à l’aise et vraiment, la situation toute entière est grotesque. Je l’invite à entrer, à savoir, à prendre un verre. Lui, continue de me fixer, sans que je sache au juste pourquoi. Mon corps tout entier est engourdi, j’évite de le regarder au maximum de peur qu’il voie la triste réalité. Je l’aime encore.



Bravo, Douglas, belle entrée en matière.



Sa voix grave et la nouvelle qu’elle apporte me sort aussitôt de ma torpeur.



Je le regarde abasourdi et, contre ma volonté, j’ai une pensée pour Lise et j’espère qu’elle va bien, sincèrement.



Il semble étonné et rougit légèrement, comme un enfant qu’on vient de prendre en flagrant délit.



Il insiste, je cède, mais juste parce que c’est lui. Entre deux, il s’est levé, comme si la discussion qu’on allait avoir était cruciale. Il est trop près, je sens son souffle contre moi.



Un pas vers moi. Mon cœur s’accélère. Se pourrait-il que… ? Non, impossible, pas comme ça, pas après tant d’années. Ses lèvres sur les miennes. Ce n’est qu’un rêve, rien qu’un rêve. Sa langue qui entrouvre ma bouche. Un rêve au goût de chartreuse. Je tremble, de peur, d’amour, de plein de choses que je ne suis même pas capable de comprendre. Je le repousse doucement, encore sous le choc et le regarde, l’incompréhension aux yeux. Il prend ma main et la pose contre son cœur. Il bat très vite, peut-être aussi vite que le mien.



Je ne peux que hocher la tête, de manière presque désespérée. Moi non plus je n’avais rien vu, je le haïssais d’être aveugle et j’étais exactement comme lui. Les soirs où il ne rentrait pas, les fois où il ne supportait même pas ma main sur son épaule. Et Lise qui me consolait quand il n’était pas là.


Un soupir de soulagement sortit de ses lèvres gonflées par nos baisers. Ses yeux trouvèrent les miens et ses grands bras entourèrent ma taille tandis qu’il m’attirait à lui. Ma tête arrivait tout pile contre son torse et si j’arrivais à contrôler ma respiration, j’étais sûr de pouvoir entendre les battements de son cœur. Je me rendis soudain compte de la situation et mes yeux se remplirent de larmes. J’étais dans les bras de l’homme que j’aimais. J’avais tellement attendu, alors tant pis si j’étais un homme, tant pis si j’étais sensé cacher mes faiblesses. À ce moment-là j’aurais donné n’importe quoi pour que le monde s’arrête de tourner.


Il dut s’apercevoir de ma détresse, car ses doigts soulevèrent délicatement mon menton me forcèrent à reprendre contact avec lui. Ses yeux couleur de chartreuse étaient pleins d’incompréhension, de peur mais surtout - et merci mon dieu ! - pleins de désir. Il me désirait, il me voulait et avouons-le, j’étais prêt à lui offrir n’importe quoi.


Mes mains s’agrippèrent fébrilement à sa chemise, dégrafant un à un les boutons et révélant un peu plus chaque fois la peau lisse et dure de son torse. Les séances de musculation qu’il se forçait d’accomplir avaient porté ses fruits à en juger par les fines tablettes de chocolat qui ornaient son abdomen. Je sentais son souffle rauque dans mes cheveux, ses mains qui se resserraient imperceptiblement autour de moi. J’ai levé la tête vers lui et me suis noyé dans son baiser. J’aurais voulu l’embrasser sauvagement pour lui montrer à quel point je lui en voulais de m’avoir fait attendre mais ses lèvres contre les miennes me forcèrent à calmer mon ardeur. À aucun moment il n’accéléra le mouvement de sa langue et ses baisers restèrent doux et profonds.


Un gémissement m’échappa lorsque je sentis son pénis se durcir contre moi. Une faim perverse m’envahit tout entier et je me laissai tomber à genoux. J’ouvris sa ceinture avec des doigts tremblants tandis qu’il finissait le travail et retirait sa chemise. Je frottai ma joue contre son sexe durement comprimé par son caleçon et ronronnai de plaisir. Je l’avais déjà vu nu lorsque qu’il sortait de la salle de bain en ayant oublié de prendre une serviette et à chaque fois je me disais que la nature l’avait gâté au plus haut point. Le caleçon prit le même chemin que le jean, libérant par la même occasion son sexe palpitant. Une traînée salée s’échappait déjà de son méat et c’est avec délice que je la léchai. Il grogna de plaisir, son corps tout entier se tendant vers moi. J’oubliai soudain toutes mes inhibitions et pris tout ce que je pouvais de son sexe dans ma bouche. Ses plaintes et ses murmures d’encouragement me permirent de faire de mon mieux. Je gardais son gland en bouche et suçais vigoureusement, ma langue s’immisçant tout autour. J’appréciais de le sentir peser contre ma langue, de sentir son goût sur mes papilles, de me dire que d’une certaine façon, il était mien. À ce moment-là, je l’avais à ma merci. Quand le bout de son pénis prit une couleur pourpre, je me dis que cela devait être douloureux, que la passion était déjà peut-être trop forte pour lui.


Apparemment pas puisque, assez rapidement, deux solides mains s’accrochèrent à mes épaules et me forcèrent à me relever. Sa bouche emprisonna la mienne et cette fois, la violence avait remplacé la douceur. Même en m’aimant, il avait le don de me meurtrir et le pire dans tout ça, c’est que c’était pour cette raison que je l’aimais. Il avait accaparé mon être tout entier au point de me rendre fou. L’amant lointain que je n’étais jamais sensé avoir.


Sa langue glissa sur ma joue, but mes dernières larmes et effaça des années de souffrances. Il me mordit le lobe de l’oreille :



Ses mains glissèrent le long de mon dos, de mes hanches osseuses, s’attardèrent sur mes fesses et finalement agrippèrent l’arrière de mes cuisses. Tandis qu’il me soulevait, mes bras s’enroulèrent autour de son cou et le contact de son corps contre mon corps me fit perdre la tête. La porte à gauche ; ma chambre. Je ne me rappelle même plus comment on a fini sur mon lit, moi allongé de tout mon long et lui au-dessus de moi, nos deux pénis se frottant l’un contre l’autre, nos souffles irréguliers partageant le même air, ses lèvres mordillant ma nuque. Plus petit, on m’avait appris que l’homosexualité était un péché, que l’amour entre hommes était interdit, mais lorsque sa bouche reprit encore la mienne et que son pénis s’immisça entre mes chairs, j’aurais voulu dire à l’humanité toute entière qu’ils n’avaient rien compris du tout, que c’est cette nuit dans ses bras que je suis né et qu’il était hors de question que l’un de nous aille en enfer. Pas pour l’instant en tout cas.


La douleur entre mes jambes était lancinante, même Daniel grinçait des dents.



Ce n’était pas une question. Alors silencieusement, je me suis tortillé pour pouvoir récupérer le tube de lubrifiant qui était dans ma table à chevet et le lui ai tendu.



Un simple jeu de regard. Il avait compris. Son pénis lubrifié glissa profondément en moi et je sus qu’on ne faisait qu’un. Je ne savais plus où il commençait et où je m’arrêtais. Des plaintes doucereuses s’enflaient de nos deux gorges, ses mouvements se firent plus rapides, plus précis. Dès qu’il touchait ce point si sensible en moi, je voyais des étoiles filantes et chacune d’entre elles avait réalisé mon rêve. Il me fit jouir sans même toucher à ma virilité, un orgasme qui me coupa le souffle par sa brutalité et par sa force. Quelques secondes plus tard, son torrent brûlant s’écoulait en moi. Il prononçait des mots incompréhensibles, sa tête nichée dans mon cou. Il pleurait à présent, ses faibles sanglots résonnaient en moi.



Cette fois aucune animosité, aucune rancœur. Je voulais juste qu’il le sache.



On a dû se rendre compte tous les deux de notre mièvrerie, étant donné le fou rire qui nous prit en même temps. Des sourires, des larmes, des gloussements, on a tout partagé cette nuit-là. Il m’a refait deux fois l’amour, toujours avec la même douceur, comme s’il faisait l’amour à une femme. « Je lui apprendrais tout ce qu’il faut savoir », me suis-je dit, « je lui apprendrais à bien m’aimer. »


Je me suis endormi tout contre lui, ma tête sur son torse, ma main posée sur son bas-ventre, la sienne sur mes fesses. La tension sexuelle avait laissé place à une vague de tendresse. Tout au long de la nuit, je l’ai senti me toucher : un baiser sur mon front, une caresse dans mes cheveux, son souffle tout près du mien. Des mots d’amour murmurés tendrement à mon oreille, des mots qu’il essayait de prononcer en anglais avec son petit accent français que je trouvais adorable.


Le matin me retrouva seul, il était parti. Mon sourire ne quitta jamais mon visage, tout allait bien. Je savais qu’il allait revenir, il revenait toujours. Mes lèvres avaient encore le goût des siennes.