n° 13338 | Fiche technique | 10678 caractères | 10678Temps de lecture estimé : 7 mn | 21/06/09 |
Critères: nonéro portrait | ||||
Auteur : Zébulon Envoi mini-message |
Maman est assise au bord de mon lit et me lit une histoire. C’est ma préférée, Mickey et les pirates, avec Pat Hibulaire. Il est très méchant Pat Hibulaire mais Mickey est plus fort que lui et il lui joue un bon tour à la fin. J’aime bien les images, elles font peur. Quand on arrive à la page où Pat Hibulaire tient Mickey prisonnier et qu’il le menace avec son sabre, Maman me prend dans ses bras pour me rassurer. Moi je me blottis contre elle, j’aime bien sentir sa chaleur et je regarde l’image par-dessus le bras qu’elle a passé autour de mon cou.
Maman reste à la maison aujourd’hui pour me garder parce que je suis malade. C’est bien quand je suis malade, Maman me fait des gâteaux. Je n’aime pas les médicaments ni le thermomètre, mais j’aime bien les gâteaux que Maman me fait quand je suis malade. Des fois ça fait un peu mal d’être malade mais Maman me console. Elle me prend dans ses bras, elle me parle tout bas et elle me fait plein de bisous. Je voudrais bien être tout le temps malade, toute ma vie, pour que Maman soit toujours avec moi, pour qu’elle me prenne tout le temps dans ses bras. Il ne peut rien m’arriver quand Maman est là.
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La porte s’ouvre, enfin ! La silhouette de Papa se dessine dans l’entrebâillement.
Tu parles, ça fait une éternité que je tourne dans mon lit en attendant la permission de me lever ! Je ne peux pas contenir mon excitation.
Je bondis de mon lit et je dévale l’escalier. J’arrive dans le salon, mes yeux regardent de tous les côtés, cherchant l’objet de mon désir. Rien ! Maman me sourit. Je m’avance vers elle, et je le vois ! Il est là, il était derrière le sapin ! Oh oui, il est encore plus beau que dans mes rêves ! Rouge, brillant, avec une selle confortable et des garde-boue. Il y a même une sonnette ! Merci Père Noël, c’est le plus beau jour de ma vie !
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Le poignard glacé qui s’enfonce dans mon cœur.
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Tout le monde me regarde. Je voudrais disparaître, devenir invisible. Arrêtez de me regarder ! Je sens le liquide chaud tout le long de mon pantalon, il y en a même dans ma chaussure. Ce n’est pas de ma faute, je n’ai pas voulu déranger Maman parce qu’elle m’avait dit de me taire, que c’était important la discussion qu’elle avait avec le monsieur. Elle m’a fait boire trop de Coca. Ça ne sent pas bon maintenant. Maman renifle, et se retourne vers moi. Elle voit la traînée jaune sur mon pantalon blanc. Ce n’est pas ma faute, Maman, je n’ai pas voulu te déranger. Je pleure, j’ai honte.
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Le soleil brille, le vent est juste comme il faut. Je suis très concentré, il ne faut pas que je déçoive Papa. Je tiens fermement la barre d’une main et l’écoute de grand-voile de l’autre. Papa tient l’écoute de foc. Je regarde constamment la girouette en haut du mât pour bien diriger le dériveur en fonction du vent, comme il me l’a appris. C’est la première fois qu’il me laisse barrer. Je suis un grand maintenant, je barre comme Papa. Il me regarde, il est fier de moi.
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Le sourire d’Isabelle.
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Mamie m’attend sur le seuil de la porte. Elle prend mon cartable et me fait un gros poutou. Elle sent bon Mamie. Elle sent comme les gâteaux qu’elle me prépare pour le goûter. Des fois elle sent la cannelle, d’autres fois le chocolat ou la fraise. J’adore les gâteaux de Mamie. C’est le paradis chez Mamie après l’école.
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Bon sang, courage, allez vas-y ! Si je reste là à attendre, le slow va se terminer et ce sera foutu. Il est déjà onze heures, je dois rentrer avant minuit, je n’ai plus de temps à perdre. Personne ne l’a encore invitée, c’est maintenant ou jamais !
Je mets mes mains sur sa taille, il ne faut pas l’effaroucher. Je fais attention à bien être en rythme avec la musique et à ne pas lui marcher sur les pieds. Je me rapproche doucement d’elle, l’air de rien. Mes mains glissent vers son dos, je l’enserre maintenant. Oh, je sens ses seins contre ma poitrine ! C’est tout doux. Allez, vas-y, lance toi ! J’approche mes lèvres des siennes. Elle me regarde. Je sens le rouge me monter aux joues, je transpire. Plus qu’un centimètre, j’avance mon visage. Elle colle ses lèvres sur les miennes, elle ouvre sa bouche. Je sens sa langue dans ma bouche ! Je bande ! Il ne faut pas qu’elle s’en rende compte, je décolle mon bassin du sien. Que c’est bon son corps contre le mien, sa langue sur la mienne !
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Le rire d’Anna.
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Des filles sortent en pleurs, d’autres sautent au cou de leur copain ou de leurs parents. Les mecs sont moins expressifs. J’ai une grosse boule dans le ventre. Il faut que je rentre dans ce hall moi aussi, il faut que j’affronte mon destin. Je joue des coudes pour arriver aux tableaux d’affichage. À gauche les listes de reçus, au milieu le repêchage, à droite les recalés. La boule durcit dans mon ventre quand je m’approche des tableaux de gauche. Je bouscule ceux qui sont devant moi pour mieux voir. Je cherche mon nom. Mais pourquoi y a-t-il autant de noms sur cette liste ? Ce n’est pas bon signe, ils ne vont pas le filer à autant de monde. Pousse-toi, machin, ma lettre est devant toi, tu m’empêches de voir. J’y suis ! Mon nom est sur cette putain de liste ! Putain, je l’ai ! À moi les études ! Samba, fiesta, oupla oupla !
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Elle m’a souri ! C’est à moi qu’elle a souri ! La vie est belle !
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Il fait chaud sous cette tente, incroyablement chaud. Et c’est tout petit, on arrive à peine à se tourner. Mais ce n’est pas grave, elle est venue, elle est là. Elle a dit oui. Et maintenant elle enlève son T-shirt. Elle a un joli soutien-gorge en dentelle. Elle retire sa jupe. Elle me regarde. Je me déshabille à mon tour. Elle dégrafe son soutien-gorge, ses seins apparaissent. Que c’est beau des seins ! Je me débarrasse de mon caleçon pour l’encourager à continuer. Je bande à éclater. Elle s’allonge, fait glisser sa culotte le long de ses jambes et me la jette. Je vois son sexe, enfin ! Putain que c’est bandant ! Je m’allonge entre ses cuisses. Elle attrape ma verge d’une main et la guide. C’est tout mouillé. J’appuie mon bassin. Je sens ses chairs s’écarter sans résistance, je m’enfonce dans sa chaude douceur. C’est trop bon. Je pénètre une femme, enfin ! La jouissance arrive, je ne peux pas la retenir, j’explose de plaisir.
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Un ange ! C’est un ange qui vient de faire son apparition, déclenchant un coup de tonnerre dans mon cœur. C’est donc elle Isabelle, la fille dont on m’a tant parlé. Elle est encore plus belle que je l’imaginais. Je suis amoureux. Quoiqu’il arrive, qu’elle m’aime ou pas, je serai toujours amoureux de cette femme.
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Le poignard glacé qui s’enfonce dans mon cœur. C’est un cancer, monsieur, taux de survie à cinq ans nul.
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Nous marchons main dans la main. La chaleur écrasante de la journée a laissé place à la douce fraîcheur du soir. Nous avons passé l’après-midi à faire l’amour passionnément dans notre chambre d’hôtel. La chaude lumière du soleil couchant baigne Florence d’une atmosphère romantique. Isabelle m’aime. Rien ne peut être plus beau au monde que cet instant.
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J’ai froid, j’ai terriblement froid en moi. Je ne sens plus mon corps. Il doit commencer à pleuvoir, j’entends le bruit des gouttes sur les parapluies qui s’ouvrent mais je ne sens rien. Tout est vide, désespérément vide, et gris. Papa se tient devant moi. On dirait un vieillard. Je n’avais jamais remarqué qu’il était devenu vieux. Je le regarde s’avancer d’un pas mal assuré. C’est mon tour, je le suis. Je prends la rose qu’on me tend. Encore un pas. Je la jette au fond du trou. Plus rien ne sera comme avant. Maman je t’aime.
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La tension accumulée pendant la dernière heure, au terme d’une nuit blanche ponctuée de moments d’inquiétude, se libère d’un coup en un tsunami d’émotions auquel rien ne peut résister. Je pleure, je pleure sans pouvoir me contrôler, je pleure sans honte. Je n’ai jamais rien vécu d’aussi intense, un moment qui restera gravé dans ma mémoire à tout jamais. Je ne vois plus rien à travers mes larmes. Je flotte sur un nuage de bonheur pur.
Il me semble que quelqu’un a parlé.
Je passe les essuie-glaces sur mes yeux et m’empare de l’objet que je vois maintenant.
J’actionne la paire de ciseaux. C’est dur, j’appuie un peu plus. Le cordon finit par céder.
Je n’ai jamais été aussi heureux de ma vie. Tu es belle Anna ! Je t’aime, ma fille.
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Une femme sur la route.
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