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Temps de lecture estimé : 36 mn
29/08/09
Résumé:  De la maîtrise du feu dans le four à pain, et autres problèmes de chaleur intime.
Critères:  f fh fhh hplusag fplusag jeunes inconnu bain collection fsoumise fdomine voir fmast facial fellation cunnilingu préservati pénétratio double sandwich -occasion -fhh
Auteur : Olaf      Envoi mini-message
Dérhumage

Parfois, les voies du plaisir semblent désespérément impénétrables…


À quarante-deux ans, et un mariage raté derrière elle, Ariane réussissait par une habile et rigoureuse organisation de ses activités à surmonter les aléas d’une vie de maman divorcée. En d’autres termes, elle tenait le coup économiquement et socialement, alors que la motivation et la liberté manquaient pour le reste.


Voluptueusement plongée dans un bain chaud et parfumé, l’esprit détaché de son corps, elle flottait ce soir-là sans contrainte au-dessus d’elle-même, contemplant de haut les délicates circonvolutions de son majeur sur son clitoris. Rien de très surprenant, tant ces moments de détente faisaient partie intégrante de son système de survie. Sauf qu’à l’instant où une bouffée de chaleur embrasa ses reins, elle réalisa qu’aucun rêve érotique n’avait accompagné sa masturbation. Pas la moindre vision d’une fesse masculine musclée, pas le moindre clignement de paupières de la part d’un séduisant inconnu, aucun frôlement de main fortuit au moment de rendre la monnaie à un homme souriant, rien de ce qui alimentait habituellement la montée de son désir. Elle était en train de se caresser, abstraction faite de tout élément stimulant mâle.


Le choc de cette révélation faillit tout faire capoter. Se rattrapant des deux mains à son plaisir, elle arriva à se concentrer une nouvelle fois sur l’imminente délivrance. Son corps fit l’impasse sur la perturbation passagère, son clitoris répondit intensément à l’accélération des effleurements. Quelques minutes plus tard, un agréable orgasme la ballottait de contractions en tremblements, alors qu’un raz-de-marée inondait la salle de bain en témoignage de l’intensité du plaisir.


Ariane profita longuement de cette jubilation sensuelle. Elle ne put toutefois pas s’empêcher d’affronter la réalité. Aussi intense fût-il, son plaisir avait été solitaire au point de friser l’autisme. Jamais auparavant elle n’aurait pu imaginer se caresser sans laisser passer d’images masculines derrière ses paupières closes. Rien de cela aujourd’hui. La conclusion que les hommes ne feraient dorénavant plus partie de ses rituels érotiques s’imposa immédiatement. Or elle était depuis toujours intimement convaincue qu’après de trop nombreux mois sans baiser, elle risquait de perdre toute aptitude à baiser agréablement, si l’occasion s’en présentait à nouveau.


Ce fut l’illumination, la première et douloureuse illumination. Après plus de dix-huit mois de solitude, elle venait de franchir la barrière. Putain, si je ne réagis pas, je vais me retrouver vieille avant d’avoir été vraiment heureuse !


oooOOOooo


Malgré une intense cogitation, elle ne trouva pas de solution satisfaisante à cette question au cours des jours suivants. Elle imagina alors se changer les idées en rendant visite à son père qui retapait leur maison de famille dans une lointaine campagne. Il en était à la réfection du vieux four à pain. Comme le voulait la tradition de cette région, le four avait été construit en molasse. Un matériau qui donne une excellente chaleur, la conserve de manière durable et permet, à qui sait maîtriser le feu, la confection d’une quantité de gourmandises après la cuisson du pain.


De nombreux souvenirs gustatifs et sensuels remontèrent de sa mémoire lorsqu’elle pénétra dans le fournil pour embrasser son géniteur en pleins travaux de maçonnerie. Ce genre de four nécessite en effet de fréquentes remises à neuf. Un travail complexe détaillé dans un livre très ancien, dont son père s’était inspiré. Ariane y jeta un coup d’œil après avoir erré dans la vieille maison, comme elle aimait le faire lors de ses occasionnels retours aux sources. C’est alors que ce produisit la deuxième illumination. Apprenant qu’il fallait au minimum cinq jours de mise à feu à chaleur croissante pour dérhumer l’antique creuset, elle extrapola qu’une procédure similaire pourrait convenir au dérhumage de son foyer intime.


Cinq jours, à raison d’un à deux feux quotidiens, cela pouvait être jouable. À condition de bien planifier comment et entre quels bras s’embraser à chaleur croissante. C’est qu’il fallait être sûre d’arriver à tenir le rythme, mettre la main sur le bon bois, attiser la juste flamme. L’idée de tenter l’aventure, et surtout le défilement soudain dans son esprit en manque d’un grand nombre de possibilités de rencontres, la mirent en joie pour le reste du week-end. Jusqu’à devenir une sorte d’obsession, tant elle avait hâte de revenir du bon côté de la barrière.


Sa fille ne manqua pas de le relever d’un ton acerbe au cours du trajet de retour. Perdue dans ses pensées, Ariane était en effet restée trop longtemps silencieuse, envisageant notamment une première expérience entre les bras d’un jeune homme séduit d’un croisement de jambes à la terrasse d’un café. Mais elle se ravisa, craignant que ce premier feu dégageât une chaleur trop vive. Elle opta donc a priori pour un corps à corps plus conventionnel, se promettant plutôt de conclure son dérhumage dans l’incandescence de la fougue juvénile.


oooOOOooo


Les semaines passèrent sans qu’une première ouverture se présente. Elle fit certes quelques rencontres, trop pâles néanmoins à son goût pour se lancer. Comme souvent dans ce genre d’entreprise, le premier partenaire potentiel s’imposa au moment où elle s’y attendait le moins. Elle était même de fort méchante humeur ce mardi-là, lorsque le spécialiste se décida à venir mettre de l’ordre dans le bazar informatique qui s’était développé dans le système d’exploitation de son lieu de travail. Enfin, pas l’informaticien en titre, mais un remplaçant envoyé par la direction pour éviter un sanglant esclandre, tant elle était arrivée à accumuler de ressentiment contre tout ce qui ressemblait à un clavier ou un écran d’ordinateur.


L’homme était mignon, sympathique, et non dénué d’humour, ce qui l’apaisa. Il faisait même preuve d’une indéniable élégance dans l’assortiment des tons bleus de sa tenue. Seul défaut, il s’enticha immédiatement d’elle, et entama sa danse de séduction sitôt les bogues informatiques éliminés de la bécane. Sa manière de mettre en avant ses nombreuses qualités professionnelles, personnelles, puis sensuelles aurait en d’autres temps rebuté Ariane. Compte tenu de ses intensions du moment, il représentait le modèle rêvé du premier feu de dérhumage. L’évidence et l’amplitude de son impatience achevèrent de la convaincre. Elle répondit donc positivement à ses allusions, puis à ses avances, et finalement à son invitation à le rejoindre dans un endroit discret au cours de l’après-midi.


Elle ne jugea pas nécessaire de perdre du temps en vaines présentations et se laissa d’emblée prendre en mains du haut en bas. Il caressait bien, il sentait bon, sa peau était douce, il sut faire rapidement monter en elle les frémissements du désir. Lorsqu’il se montra trop pressant, elle lui fit néanmoins comprendre qu’elle n’attendait de lui qu’une mise en bouche. Il se montra respectueux et la laissa se soustraire à un échange pour lequel elle ne se sentait pas encore prête.


Elle prit alors tout son temps pour redécouvrir avec enthousiasme à quel point il était agréable de toucher à l’une des différences essentielles entre l’homme et la femme. Du bout des doigts d’abord, puis de la pointe de la langue, puis… Il ne lui laissa pas plus de temps. Se cabrant soudain, il perdit contenance et se vida entre ses lèvres. Elle reçut l’offrande sans sourciller. Il l’aida à se relever avant de s’excuser, non de la précocité de son épanchement, mais de devoir la quitter sur le champ. D’autres ordinateurs attendaient ses soins, probablement plus attentifs que ceux dont il l’avait gratifiée. Il ne restait plus à Ariane qu’à enfiler quatre autres perles sur son collier et elle serait de nouveau sur le bon chemin sexuel pour quelques mois.


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Satisfaite de ce premier succès, elle décida de s’offrir des fleurs pour fêter son renouveau. Trouvant un magasin non loin de là, elle fut accueillie par un homme dans la cinquantaine. Elle apprécia sa manière discrète de la dévisager pendant qu’elle choisissait ce qui lui ferait le plus plaisir.



À l’heure dite, elle trouva l’écriteau de fermeture placé bien en évidence sur la vitrine. Confiante, elle poussa malgré tout la porte et entra. Le magasin était vide, mais il y avait encore un peu de lumière dans une petite pièce située à l’arrière. Elle avança le cœur battant, impatiente de découvrir la surprise qui lui était réservée.


Ce qu’elle vit dépassa tout ce qu’elle aurait pu imaginer. Au fond, sur une table, trônait un somptueux bouquet. Les rouges et les ors des corolles se combinaient harmonieusement, alors qu’une odeur envoûtante s’en dégageait et flottait dans la pièce. Pour compléter le tableau, le diable d’homme avait tressé un ravissant lit de fougères, de fins branchages et de pétales au milieu de la pièce, en jouant sur les dégradés verts de manière très élaborée. Le tout bordé d’une rangée de bougies. Un vrai lit nuptial de fée, si l’on peut se fier à ce qu’en disent les contes.


La mise en scène toucha profondément Ariane, même si, objectivement, ce genre de couche ne sied pas vraiment à un postérieur humain. Malgré l’étrange désir que l’homme faisait monter en elle, elle s’imaginait mal allongée sur des branchages, cuisses écartées, profondément lutinée par un fleuriste romantique pendant que des épines de roses s’enfonçaient dans ses fesses.


Elle sentit soudain sa présence dans son dos, mais ne bougea pas. Conquise par son charme un peu désuet et la douceur de ses attentions, elle lui laissa l’initiative. Il posa alors un très léger baiser sur sa nuque. Puis il se dirigea vers le centre de la pièce pour étendre une pièce de soie au centre du lit. Il prit enfin son visage entre ses mains et, plongeant ses yeux dans les siens, lui demanda de le laisser faire d’elle la plus belle et la plus odorante fleur de son éphémère bouquet. Ce qu’elle vit dans son regard acheva de la convaincre, elle lui fit signe de commencer sa cérémonie.


Il la déshabilla en prenant tout son temps pour la contempler au fur et à mesure qu’elle lui laissait dévoiler ses charmes. Il l’aida ensuite à s’allonger sur le drap de soie, avant de s’agenouiller à ses côtés. Elle observa une fois encore son visage avant de fermer les yeux et de s’en remettre à sa délicatesse. Ce fut alors une symphonie de caresses, de baisers, d’effleurements, d’attouchements et, par-dessus tout, de parfums. Tout avait été parfaitement calculé pour qu’à chaque mouvement de son corps quelques pétales se froissent et libèrent des senteurs raffinées. Il lui sembla même que certaines caresses n’étaient pas seulement offertes pour son seul plaisir, mais pour inciter à un mouvement particulier auquel correspondait une rangée de pétales habilement disposées.


Saoulée par les odeurs, excitée par la douceur et la précision de son doigté elle finit par perdre toute notion de la réalité et s’abandonna entièrement aux mains chaudes qui parcouraient librement son corps. Plus le temps passait, plus le fleuriste prenait de l’ascendant sur elle, se comportant comme s’il lisait dans ses pensées et percevait ses désirs les plus secrets. Il sut si bien éloigner tout reste d’inhibition, qu’elle accepta sans la moindre hésitation de s’ouvrir à lui lorsqu’il posa sa bouche sur son bas-ventre et s’appliqua à la faire jouir avec une exquise sensibilité.


Il attendit qu’elle s’apaisât avant de la recouvrir d’un autre drap de soie. Lorsque les dernières vagues furent estompées, il caressa son visage en murmurant de très douces et rassurantes paroles. Elle entendit entre autres que son corps était un fabuleux instrument sensuel, sur lequel il avait eu le plus vif plaisir à jouer leur mélodie du plaisir. Puisse le bouquet qu’il avait préparé lui rappeler encore longtemps ce qu’ils avaient partagé.


Il eut l’extrême délicatesse de se retirer avant de perturber la parfaite ordonnance de leur échange érotique. Deux feux au cours de la même journée, les choses se présentaient sous les meilleurs augures. Mais vu l’intensité du plaisir ressenti, elle allait devoir prêter une meilleure attention à la maîtrise de la chaleur. Il ne lui avait pas été donné souvent de vivre ce genre de partage sensuel.


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De retour chez elle, elle trouva sa fille d’humeur impatiente et maussade. Impatiente parce qu’elle attendait depuis au moins cinq minutes une réponse de sa mère à son quatorzième texto. Maussade parce qu’elle se méfiait bien que celle-ci allait lui refuser la prolongation de sortie nocturne à laquelle elle aspirait. La voyant affalée devant la télévision sous le poids de ses seize ans, Ariane se dit qu’une longue soirée de négociations allait commencer. Elle préféra s’occuper du bouquet avant d’entamer les hostilités.



Minuit fut long à venir. Vers deux heures du matin, en fait. Mais sans dégâts. À part quelques découvertes en matière de séduction de la part de la fille, et quelques illusions en moins de la part de la mère. Seule constatation importante avant de s’endormir enfin, Ariane n’avait plus aucun livre captivant à lire pour les nuits sans sommeil et les situations de crise.


Elle décida d’y remédier le lendemain, pendant sa pause de midi. Un libraire avait ouvert un magasin non loin de son lieu de travail. Elle vit là une bonne occasion de découvrir son échoppe, et constata avec bonheur que c’était exactement le genre d’endroit qu’elle aimait. Outre les nombreux rayonnages sur lesquels était exposé un vaste choix de littérature en tous genres, il y avait dans un coin une table basse et des chaises confortables. De l’autre côté se trouvait une sorte de sofa, qui donnait une touche de couleur lie de vin à l’arrangement du lieu. Le magasin était baigné d’une douce lumière naturelle coulant d’une verrière disposée au plafond. Bref, on en avait fait un lieu consacré à la découverte littéraire, dans une ambiance feutrée, où le temps s’écoulait plus lentement, pour mieux choisir, parcourir quelques pages, toucher les volumes du bout des doigts et, en somme, se faire plaisir.


Quant au libraire, il était mignon et agréablement maladroit, ce qui lui donnait un charme particulier. Ariane se dit qu’il ne manquerait pas d’offrir un très agréable troisième feu, à condition de prendre quelques initiatives avant d’arriver à ses fins.


Elle prit tout son temps pour découvrir l’assortiment, et finit par choisir deux livres qui lui semblaient correspondre à son humeur du moment. Elle chercha le libraire des yeux pour payer. En vain. Perdue dans ses pensées, elle n’avait pas remarqué sa disparition. Profitant de son absence, elle s’approcha de sa table de travail pour voir ce qu’il lisait. Le dernier recueil des nouvelles érotiques d’Olaf y était ouvert. Ils avaient apparemment les mêmes goûts.


Elle sourit en se demandant quels textes il avait lu pendant qu’elle choisissait des livres nettement plus sages. Avait-il souvent levé la tête et rempli ses rétines de ses formes entre deux paragraphes ? L’idée la troublait d’avoir peut-être donné corps à l’un ou l’autre de ses désirs secrets, exacerbés par la lecture. Elle posa directement la question au libraire dès qu’il réapparut.



L’homme protesta, ce n’était pas une fuite, juste quelque chose à régler dans son bureau. Mais il sentit que la bataille était perdue d’avance. Ariane venait de poser les yeux sur son entrejambe, découvrant la majestueuse bandaison qui avait commencé à le torturer alors qu’elle déambulait entre les rayons, tant ce qu’il voyait d’elle se superposait parfaitement à ce qu’il était en train de lire.


Son trouble, son inexpérience, de même que son apparente fragilité, contribuèrent à faire monter une très agréable envie entre les cuisses d’Ariane. Elle alla elle-même tourner la clé dans la serrure et inverser le panneau d’ouverture, avant de s’allonger sur le sofa. Sans oser lever les yeux sur elle, il chercha fébrilement le passage dont elle avait exigé la lecture. Se laissant guider par les descriptions de l’auteur, Ariane mima les gestes des protagonistes, se caressa lascivement, puis se déshabilla au même rythme que les amants de l’histoire. Lorsqu’elle fut entièrement nue, elle se cambra et écarta les jambes pour mieux s’offrir aux regards du libraire, qui se décida enfin à lever les yeux sur elle.


Elle se délecta du mélange d’admiration, de désir et d’incrédulité qu’elle put y découvrir. Malgré la valse hésitation qui se jouait entre eux, ce qu’elle vit dans les yeux du jeune homme lui donna envie de jouir pleinement de lui, maintenant. Elle renonça à attendre plus longtemps qu’il se décidât à la rejoindre et s’approcha de lui, nue. Il resta comme tétanisé. En désespoir de cause, elle lui offrit ses seins à pleines mains. Alors seulement, il posa ses lèvres sur ses mamelons durcis et s’empara de ses hanches pour rapprocher les fruits mûrs de sa bouche.


Lorsqu’elle en eu assez de le sentir arrimé à ses pointes sans la moindre imagination érotique, elle lui enjoignit de se déshabiller et de prendre sa place sur le sofa. Se souvenant des conseils qu’elle avait prodigués la veille encore à sa fille, elle prit un préservatif dans son sac et recouvrit elle-même l’objet de sa convoitise. Il la regarda faire comme un damné face aux feux de l’enfer, heureusement sans cesser de bander pour autant.


Ariane en profita pour s’installer à califourchon sur le membre tendu de son admirateur. Centimètre par centimètre elle l’enfila en elle, profitant les yeux fermés des douces sensations d’écartèlement dont elle avait presque perdu le souvenir. Que c’était bon de sentir la vie palpiter à nouveau en elle, la chaleur de la tige traverser la mince couche de latex pour irradier contre ses parois intimes. L’homme respira de plus en plus fort, jeta sur elle un regard halluciné. Il commença même à s’agiter de manière désordonnée entre ses cuisses. Elle tenta de calmer sa soudaine ardeur par la parole, dans l’espoir de faire durer le plaisir.



Échauffée par ce qu’elle imaginait le couple être en train de s’offrir, Ariane commença à faire basculer son bassin sur la tige plantée en elle. L’homme se décida à répondre à son impatience, et fit presque preuve de plus d’assurance. Sa queue se cabra même violemment dans la vulve accueillante lorsqu’elle pinça ses tétons entre ses lèvres, dans une tentative désespérée de déchaîner enfin une réaction virile salutaire. Elle ne put cependant en obtenir beaucoup plus. Estimant alors le moment venu d’en finir, elle abattit sa dernière carte érotique et se détacha du vit gonflé pour se placer à genou devant le sofa.


Ce fut la bonne décision. Mu enfin par une irrésistible envie, l’homme s’empara d’Ariane et s’enfonça profondément en elle d’un ample mouvement des reins. N’est malheureusement pas personnage d’Olaf qui veut. À part l’ébauche de fougue, tout manquait au grand timide pour faire vraiment vibrer Ariane. Ni l’élégance, ni l’autorité du geste viril, ni l’impérieuse force de l’animalité, ni surtout l’abandon aux pulsions les plus primitives n’étaient là pour mettre le feu à ses entrailles.


Ravagé par ce qu’elle lui offrait, il ne résista d’ailleurs pas longtemps à son animale séduction et commença à se vider. Ariane se délecta des intenses pulsations qui dilatèrent son intimité. L’homme éjacula interminablement, chaque saccade semblant lui retirer un peu plus de force vitale. Il finit à se point épuisé et déboussolé par ce qui lui était arrivé, qu’il fut incapable d’accompagner les caresses qu’Ariane dut se prodiguer pour soulager la tension accumulée pendant cette trop imparfaite conjonction.


Au moins eut-il l’élégance d’attendre la fin de son plaisir avant de se relever, et de découvrir avec horreur ce qui se déroulait devant la porte du magasin pendant qu’ils s’accouplaient à même le sol. Deux hommes et une femme, le nez collé à la vitrine, suivaient en effet les ébats du couple avec un intérêt non dissimulé, mâtiné d’une pointe de jalousie. Trouvant la librairie fermée à une heure inhabituelle, ils avaient pris leur mal en patience en savourant ce qui se tramait entre les piles de livres.


Le libraire rouge de honte courut se cacher dans son arrière-boutique. Ariane, enchantée d’avoir pu apporter un soutien efficace à une activité en déclin, prit tout son temps pour se rhabiller et quitta le magasin la tête haute, non sans mentionner à la cantonade le nom de quelques ouvrages qu’elle prétendit être à l’origine de leurs débordements sensuels. Une manière comme une autre de doper les ventes de son amant inexpérimenté, et de soutenir les activités littéraires d’Olaf, dont elle appréciait et le style et la vision des jeux de l’amour.


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La journée du jeudi s’annonça beaucoup moins radieuse. Elle avait prévu depuis longtemps d’emmener sa fille chez son père. Un exercice périlleux et à coup sûr épuisant pour les nerfs, tant son ex s’amusait à combiner la mauvaise foi et le harcèlement psychologique. Plus sereine que d’habitude, elle ne se laissa cependant pas entraîner dans les sempiternelles discussions contradictoires et démoralisantes, et reprit la route dès que sa fille fut installée.


De retour chez elle, elle prit le temps de lire un des ouvrages achetés la veille. Peu motivée pour faire de nouvelles rencontres, elle préféra rester seule et s’offrit une séance de cinéma, puis un verre dans un bar des environs. Après avoir décliné plusieurs offres plus ou moins directes, elle put enfin savourer le plaisir d’être accoudée tranquillement au comptoir et d’observer ce qui se passait entre les humains assis non loin.


Elle finit son verre étonnamment détendue, et rentra chez elle le cœur léger. Au moment de se déshabiller, son regard tomba sur le bouquet offert par le fleuriste romantique. Ses dernières paroles sur son corps et sa beauté lui revinrent à l’esprit. Elle s’arrêta devant le grand miroir de sa chambre à coucher et prit le temps de se contempler. Ainsi c’était ce corps que les hommes découvraient lorsqu’elle s’offrait à eux. Ces formes pleines qui avaient si délicieusement terrorisé le libraire, déstabilisé l’éjaculateur précoce et comblé le fleuriste, probablement en souvenir de très troublants instants d’amour.


Elle se trouva belle. Aucune vanité en cela, elle était simplement heureuse de ce corps épanoui dans lequel elle se sentait bien. Elle réalisait d’ailleurs peu à peu à quel point le désir d’un homme qui lui plaisait pouvait influencer sa manière de paraître, et surtout de bouger. Libre de rencontrer qui elle voulait, de la manière qui lui plaisait, elle répondait à cet intérêt par une sensualité très particulière de ses gestes. Une sensation qu’elle commençait seulement à découvrir, tant ce qu’elle avait vécu en couple en était éloigné.


Pourquoi se comporter si différemment suivant qu’on est avec l’homme qu’on aime ou l’amant qu’on désire. Est-il si difficile d’accepter que la séduction reste indispensable au sein du couple ? Est-il si incongru de provoquer périodiquement des retrouvailles érotiques avec son homme, et d’en profiter pour l’exciter en toute liberté, se comporter en vraie garce si l’envie est là, jusqu’à le rendre raide dingue. Très raide et un peu dingue… Quel mal, quel danger y aurait-il à re-jeter son dévolu sur l’homme aimé, le séduire dans un lieu improbable, pour mieux laisser la jouissance déborder par tous les pores, par tous les trous, le temps de s’apaiser mutuellement puis, les corps repus, inverser le strip-tease, remettre un à un les habits, cacher progressivement le désir, la moiteur, les giclures, les trop puissantes odeurs, remettre les attitudes de convenance, jusqu’à ne garder que la nudité du regard, toute petite fenêtre ouverte sur l’envie qu’on va préserver au fond de son ventre, jusqu’à la prochaine fois.


Quel sublime cadeau, pourtant, que ce regard qu’on lui offre entre deux portes, ce regard qui fait tressaillir sa douce queue, et lui rappelle qu’à cause de lui le four intime ne refroidira jamais complètement. Comme la molasse, la chair excitée régulièrement garde le souvenir de la chaleur. Il suffit alors parfois de ce regard de désir et de la liberté du corps pour mettre le feu aux poudres. Pourquoi s’acharne-t-on à éteindre la petite flamme entre deux incendies ? Est-il si dangereux de la garder allumée quelque part dans ses tripes, prête à foutre le feu à la baraque, même quand ce n’est pas le moment ?


Pourquoi n’était-elle pas arrivée à vivre avec l’homme qu’elle avait aimé, ce qu’elle s’autorisait à vivre depuis quelques jours avec des inconnus ? Elle laissa ces interrogations en suspens. Il restait deux perles à enfiler à son collier, peut-être l’une d’entre elles lui apporterait-elle un début de réponse. Mais elle était déjà fermement décidée à ne plus laisser son corps refroidir au point de rendre indispensable le lent dérhumage auquel elle s’astreignait.


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Elle travailla comme d’habitude tout le vendredi. L’informaticien remplaçant fit un bref passage dans son bureau, avec le secret espoir de la convaincre de le suivre pour un week-end sensuel. Elle refusa poliment, sans insister sur le fait qu’elle comptait sur des rencontres beaucoup plus enrichissantes avant le lendemain minuit.


Sur son chemin du retour, ralentie par les embouteillages, elle laissa son esprit flotter, le temps de passer en revue ce qu’il lui arrivait, et avec qui. Elle se demanda si le regard qu’elle portait sur les hommes n’était pas en train de changer, provoquant une réaction défensive chez bon nombre d’entre eux ou, à l’inverse, incitant ceux qui avaient tendance à surestimer leur pouvoir de séduction à prendre des postures de conquérants irrésistibles. Seuls quelques-uns accrochaient vraiment son intérêt et semblaient présenter des qualités sensuelles, viriles ou tout simplement d’écoute, correspondant à son attente. Encore fallait-il disposer d’assez de recul pour éviter les pièges tendus par les tricheurs, les saccageurs et autres handicapés relationnels. La capacité de dissimulation humaine est sans limite. Cela, Ariane le savait pour l’avoir vécu précédemment. Elle n’était toutefois plus prête à laisser cette triste évidence freiner ses envies et, à plus long terme, sa recherche d’équilibre du cœur et du corps.


Un conducteur peu respectueux la tira brusquement de sa rêverie et la força à mieux se concentrer sur la route. Elle parcourut encore quelques centaines de mètres en direction de son domicile puis, se ravisant, sa fille étant absente tout le week-end, elle préféra faire un crochet par le bord d’une rivière coulant non loin de là. Le bruit du courant lui procurait depuis toujours une intense sensation de bien-être et de calme, et l’idée de laisser l’eau fraîche glisser le long de son corps lui parut particulièrement agréable.


Elle parqua sa voiture près d’une anse de la rivière qu’elle savait généralement peu fréquentée. Un pêcheur s’y trouvait malheureusement déjà. Elle lui demanda s’il préférait qu’elle s’installe en amont ou en aval de lui. Il marmonna qu’elle n’avait qu’à descendre le lit de la rivière, ce qu’elle dut faire sur près de cent mètres avant de trouver un bon endroit. Elle ne réalisa pas tout de suite qu’elle s’était engagée dans un cul de sac et ne pourrait retourner à sa voiture sans revenir sur ses pas.


Heureuse de ce moment de liberté, elle se déshabilla, enfila un petit deux pièces et, après avoir habitué son corps à la fraîcheur de l’eau, s’allongea dans le lit de la rivière. C’est à ce moment qu’elle comprit la situation. Quelle conne elle était ! En suivant si naïvement la proposition de ce type, elle s’était elle-même précipitée dans un piège dont il allait être difficile de sortir. Cette perspective lui coupa l’envie de se baigner. Elle commença même franchement à paniquer en imaginant ce qui pouvait l’attendre. Son optimisme ne tarda toutefois pas à reprendre le dessus. Elle se faisait du cinéma, le type était certainement correct, il n’avait d’ailleurs que le poisson en tête. Quelque chose dans la manière qu’il avait eue de la regarder lui revint malgré tout en mémoire, et lui ôta définitivement toute illusion. Le gars devait attendre patiemment son retour…


Elle envisagea de continuer à descendre le long de la rivière, mais une cascade fermait cette issue. Il ne lui restait plus qu’à trouver rapidement une bonne solution pour convaincre ce tordu de la laisser tranquille. Elle se dit pour se rassurer que si son intention était de profiter d’une belle occasion de baiser, cela correspondait en fait assez exactement à ce qu’elle faisait avec des inconnus depuis le début de la semaine. Nonobstant quelques fioritures mises autour de ses aventures, elle avait en réalité consommé du mec. Or celui-ci n’était ni plus laid, ni a priori plus violent qu’un autre. Sauf qu’il profitait des circonstances pour s’imposer à elle, ce qui était révoltant et insupportable. Mais qui sait si dans un autre cadre, elle n’en n’aurait pas fait un feu très convenable. Les pêcheurs sont connus pour être patients.


Faisant taire sa rage d’être ainsi piégée, elle retrouva l’énergie que sa panique passagère avait inhibée. Tant qu’à faire, autant essayer d’attaquer la première et de s’en sortir par surprise. Elle remonta le courant jusqu’à l’endroit où se trouvait le pêcheur. Arrivée à sa hauteur, elle s’arrêta au milieu de la rivière, bien en vue et enleva le bas de son deux-pièces. Puis sans cesser de le regarder avec un air de défi, elle s’avança jusqu’au rivage, prête à profiter de la première occasion de lui glisser entre les doigts.



Le type planta sa canne entre deux pierres et commença à se déshabiller. Il tenta de la toucher au moment où elle rejoignait le bord de la rivière. Elle s’esquiva et alla d’un pas décidé fouiller dans les affaires qu’il avait déposées sur une souche.



Son instinct ne l’avait pas trompée, il était visiblement prêt à toute éventualité. C’est à ce moment qu’Ariane aperçut une deuxième canne de l’autre côté de la rivière. Le pêcheur n’était donc pas seul. Elle sentit ses genoux lâcher. Contre deux types en rut, elle n’avait plus aucune chance. Le cœur tapant à tout rompre dans sa poitrine, elle vit défiler ce qui l’attendait, et se prépara à se soumettre à la fatalité. Mon Dieu, épargne-moi la brutalité…, et donne-moi la force d’assumer le reste !


Elle se retint d’éclater en sanglots. La victoire serait trop belle pour ces salauds. Elle trouva la volonté de se redresser, et toisa le gars à moitié nu, qui n’osa plus avancer. Cette hésitation lui donna un peu de temps pour se calmer, et surtout envisager la situation sous un autre angle. À l’évidence, elle était ce qu’ils recherchaient, ce qui faisait d’elle la proie. Mais paradoxalement, elle n’avait cessé depuis quelques jours de rechercher ce qu’ils étaient, des tiges dressées, le besoin animal de conquérir, de baiser, de se répandre dans le ventre d’une femme. Si elle se refusait, ils la violeraient. Si elle se laissait faire, ils la prendraient et feraient d’elle leur jouet. Si elle trouvait le courage de s’offrir à eux de la manière qui lui convenait, peut-être arriverait-elle à garder l’initiative jusqu’à ce qu’ils soient vidés.


Elle renonça à fuir, et laissa le type s’approcher. Il s’avança sans chercher à s’emparer d’elle, la queue déjà bien gonflée, persuadé que sa virilité suffirait à la convaincre. Ariane s’agenouilla devant lui, et le prit entre ses mains. Elle s’efforça de décalotter le sexe tendu et cracha sur le bout avant d’enfiler le préservatif. Le gars apprécia, et l’encouragea. Elle lui adressa un regard dédaigneux avant de le glisser entre ses lèvres, comme elle l’avait fait avec l’informaticien.


Lorsqu’elle l’eut bien en bouche, elle sentit une main s’insinuer délicatement entre ses cuisses. Le second type s’était approché et commençait à découvrir le morceau de choix qui l’attendait. Entre deux succions, elle défourna le membre palpitant et jeta un coup d’œil sur le deuxième larron. Il était plus jeune que le premier, moins bien membré, mais le corps plus athlétique. En d’autres circonstances, un homme qu’elle aurait sans doute eu plaisir à accueillir en elle.


Objectivement les queues étaient belles, excitantes même. Le désir brut des deux hommes avait quelque chose de fascinant. Peu à peu, les gestes et les regards d’Ariane échauffèrent les types, qui se mirent à la caresser avec un respect qu’elle n’osait plus espérer. Le plus vieux palpa longuement ses seins sans chercher à lui ôter son soutien-gorge. Il arriva même à en faire durcir les pointes, alors que l’autre entourait sa taille d’un bras, pour lui faire sentir la vigueur de ses reins et de sa tige contre ses fesses.


Malgré leur avidité, ils ne semblaient pas vouloir faire usage de leur force. Voyant le pire s’éloigner, Ariane arriva à maîtriser la sensation de panique qui s’était emparée d’elle dans la rivière et se persuada d’entrer dans leur jeu. Elle commença par imposer la capote au deuxième type. Puis elle prit l’initiative, se détachant de l’un pour mieux s’emparer de l’autre ou inversement, les poussant à la prendre à quatre mains. La boule qui gonflait sa gorge disparut progressivement, faisant place à une nouvelle sensation, plus agréable, au fond de son ventre.


S’appliquant à éviter tout faux-pas, qui pourrait provoquer un éclat de violence, elle continua à les exciter, alternant encouragements et compliments salaces, gestes évocateurs et attouchement ciblés. Elle s’offrit ouvertement au plus vieux, pour mieux exciter l’envie du jeune. Puis, sentant que le dépit faisait remonter trop d’impatience en lui, elle inversa les rôles et laissa le plus jeune approcher un peu plus du plaisir ultime.


Elle n’avait pas choisi ces types, mais une fois le danger écarté, elle put faire abstraction de leur emprise et prit progressivement plaisir à les dominer, à canaliser leurs pulsions viriles. Le plus jeune se rendit compte en premier de la moiteur de son sexe. Il trempa profondément son doigt dans sa vulve entrouverte, puis enduisit sa rosette de la mouille qui y avait coulé. La croyant prête, il saisit ses hanches à pleines mains et appuya la pointe de sa queue contre son anus. L’autre en profita pour glisser sa large verge contre sa vulve. Elle sentit aux tremblements qui parcouraient leurs corps qu’ils approchaient déjà du point de non retour. Ariane chercha à éviter qu’ils s’emparent d’elle en même temps en s’ouvrant d’abord au plus âgé, tout en promettant une sortie de route mémorable à celui qu’elle recalait momentanément.


Ils lui firent confiance, au point d’en devenir prévenants si près de la jouissance. Ne lui avaient-ils pas promis la plus totale volupté ? Elle en était loin. Mais les attentions rudimentaires dont ils tentèrent de faire preuve lui firent du bien. Le plus jeune commença même à couvrir ses épaules de baisers, pendant que l’autre allait et venait en elle. Le premier, excité par ce qu’il voyait par-dessus l’épaule d’Ariane plaça à nouveau sa tige bandée entre ses fesses. La sensation était incroyablement troublante. Les mouvements de plus en plus vigoureux du premier pêcheur lui firent presque perdre le sens de la réalité. Elle s’abandonna. D’une poussée des fesses, elle fit glisser le membre en elle. L’homme s’enfonça d’un coup, puis s’immobilisa, avant de s’adapter aussi bien que possible au rythme de son partenaire.


Ariane eut de la peine à garder son souffle. Loin de se sentir douloureusement perforée, elle arriva progressivement à se détendre et à éprouver de nouvelles sensations sous le double va-et-vient. Rien à voir avec ce que lui aurait procuré un même échange entre les bras de partenaires désirés, mais elle n’en ressentait pas moins une certaine satisfaction à accueillir les deux hommes en elle, à les sentir à sa merci.


Les visages se crispèrent, une odeur aigre de sueur monta de leurs corps excités. Ariane vit sur les tempes des hommes les amples pulsations dont elle sentait le frémissement contre ses parois intimes. En acceptant qu’ils satisfassent en elle leur désir immature, elle avait inversé les rôles. Alors qu’ils s’imaginaient la dominer de leur virilité triomphante, ils étaient en train de s’en remettre à elle et d’accepter que l’intensité de leur jouissance dépende entièrement de son bon vouloir. Étrange ambivalence de la situation. L’abnégation qu’ils lui avaient imposée lui donnait maintenant les pleins pouvoirs.


Ils étaient si concentrés sur l’imminence de leur éjaculation qu’elle aurait pu les bousculer d’un simple mouvement des hanches. Elle n’en éprouva pas le besoin et accepta de les garder en elle. Le plus jeune craqua en premier, et se vida en grognant, sans cesser d’aller et venir entre ses fesses. L’autre le suivit de près. Tous deux eurent de la peine à conserver leur équilibre au moment de jouir. Ariane leur offrit l’appui nécessaire pour qu’ils puissent profiter de leur plaisir jusqu’au dernier spasme.


Après l’avoir gratifiée d’un regard reconnaissant, ils perdirent rapidement vigueur, et glissèrent mollement hors de son ventre. Elle se dégagea de leur étreinte et s’éloigna sans un mot, après avoir fait une toilette sommaire dans la rivière. Maintenant assis sans forces sur une pierre, le ventre encore parcouru de soubresauts, un filet de sperme dégoulinant de leur membre flasque, ils paraissaient franchement pathétiques. Pour compléter ce tableau, le soleil s’était couché pendant qu’ils s’accouplaient au bord de l’eau. Une lumière blafarde éclairait faiblement la petite plage. Toutes les couleurs vives qu’elle avait vues à son arrivée s’étaient effacées pour faire place à de tristes nuances de gris.


Ariane crut entendre comme des paroles d’excuse lorsqu’elle arriva à sa voiture. Pitoyable. Si ces atrophiés du bulbe avaient su faire preuve d’un minimum de sensibilité, ou s’étaient simplement donné la peine d’essayer de la séduire, elle aurait peut-être même trouvé plaisir à jouer avec eux. Mais là, elle avait eu si peur qu’elle se sentait vidée, dégoûtée de ces corps avachis. Où se cachait la force, l’impérieux désir qui justifiait leur attitude à leurs yeux ? Dans la même faille de leur personnalité que celle qui les empêchait d’offrir plus que leur belle rigidité ? Dans cette glacière émotionnelle qui conservait bien au frais la précocité, l’impuissance et toutes les autres faiblesses dont les mecs de cette semaine avaient abondamment su faire preuve ? Alors merde ! Plus qu’une dernière perle à enfiler, et aucun partenaire consistant en vue. Juste consistant, bordel, est-ce trop demander ?


oooOOOooo


Rentrant passablement perturbée de son aventure au bord de la rivière, Ariane se rendit compte sans y prêter réellement attention qu’Euterpe, sa petite chatte, ne semblait pas très en forme. Elle n’avait pas fini son écuelle, et avait dû gratter abondamment dans sa caisse, vu le sable projeté de tous les côtés dans la cuisine. Trop fatiguée pour se pencher sur la question, Ariane partit se ressourcer sous la douche, avant de se coucher et de sombrer dans un sommeil comateux. Non sans avoir adressé un petit clin d’œil complice au bouquet et au fleuriste, le seul en somme qui ait su jusque là lui offrir toute liberté de se donner et d’en jouir pleinement.


Le lendemain matin, Euterpe ne vint pas lui faire la fête comme à son habitude. Ariane la câlina, l’examina, mais ne lui trouva rien d’anormal. Elle partit faire des courses, en se disant qu’elle s’en occuperait plus en détail à son retour. Profitant de l’absence de sa fille pour le week-end, elle passa à son bureau mettre de l’ordre dans les innombrables dossiers en souffrance, dont elle put liquider l’essentiel avec une remarquable efficacité.


À son retour en fin d’après-midi, l’état de santé de sa chatte ne s’était pas amélioré et elle n’avait pas touché à sa nourriture. Elle la vit passer plusieurs fois du canapé à la caisse, l’air perturbée. Lorsqu’elle l’entendit gémir plaintivement, elle se décida à la suivre. De nombreuses taches de sang coloraient le sable. Pauvre chatte ! Elle se traita de tous les noms possibles, consciente de n’avoir pas prêté suffisamment d’attention à sa petite bête depuis plusieurs jours. Sans plus tarder, elle contacta le vétérinaire, qui accepta, avec une évidente mauvaise grâce, de la recevoir en urgence à 22 heures. Elle tenta de négocier un rendez-vous plus tôt, en arguant de la souffrance de la bête. Peine perdue, c’était son problème si elle avait attendu aussi longtemps avant de le consulter, en urgence qui plus est.


Elle arriva à l’heure dite assez retournée. Loin de la soulager de son sentiment de culpabilité, le vétérinaire, un homme qu’elle connaissait pourtant pour être charmant et très compétent en temps normal, la salua à peine. Il lui demanda sans préambule de sortir son animal de son panier. Elle crut bon de s’excuser pour le dérangement qu’elle lui causait avant de s’exécuter.


Malgré la situation tendue, elle commençait en effet à se demander si, peut-être, enfin, qui sait, cet homme ne pourrait pas présenter un potentiel d’embrasement intéressant ? Sans quoi, sa cinquième journée risquait de se terminer sans rencontre, et elle aurait lamentablement échoué. Quelle déception, si près du but. Pour cela, il fallait absolument retourner la situation.



Ce fut la phrase de trop. Le praticien la prit de haut.



Malgré sa peur de se faire renvoyer séance tenante du cabinet, elle ne put se contenir. Toutes les émotions de ces derniers jours dépassaient sa capacité de résistance. Elle continua de rire, alors même que des larmes commençaient à perler aux coins de ses yeux. Le vétérinaire réalisa enfin la situation et se radoucit. Dans un geste attentionné, fût-il totalement déplacé, il prit la main d’Ariane entre les siennes. Fichue pour fichue, elle se dit qu’il n’y avait plus de raison de se retenir.



Ariane sorti la chatte de son panier. Le vétérinaire, à nouveau plus amène, diagnostiqua une inflammation de la vessie, sans doute liée à un problème de stress. Un truc douloureux qui tend à la chronicité, mais sans danger.



Il acquiesça en souriant. Elle paya et promis de revenir en contrôle dès que possible.


Au moment de quitter le cabinet, elle croisa un homme assis sans animal dans la salle d’attente, le regard infiniment triste.



Le chagrin de l’homme pour la perte d’un animal, son regard triste face aux décombres de sa vie sentimentale, la situation dans laquelle elle se trouvait elle-même, a priori tout était biaisé, tout aurait dû pousser Ariane à prendre ses jambes à son cou, laissant à son désespoir une rencontre sans avenir. Pourtant quelque chose dans le regard de l’homme, au-delà de sa tristesse, la toucha. Profondément. Il n’était plus question de cinquième jour. C’était de toute façon un enfantillage, un prétexte pour se pousser à reprendre sa vie de femme en mains. Mais il y avait eu, lors du bref échange dans cette salle d’attente froide et impersonnelle, comme une étincelle dans les yeux de l’homme. Quelque chose qui avait réchauffé le cœur d’Ariane. Et après ce qu’elle venait de vivre, elle n’était plus disposée à laisser s’échapper un homme capable de la toucher si spontanément et en si peu de temps.


Elle s’assit et attendit la fin de la consultation. Quelques minutes plus tard, l’homme sortit, accompagné du vétérinaire. Ni l’un ni l’autre ne semblèrent surpris de la trouver encore là.



Flattée qu’il s’abandonne de manière si confiante à son étrange intuition, elle le fit entrer dans sa voiture. Elle ramena d’abord Euterpe à son domicile, sans proposer à l’homme de monter chez elle, pour ne pas créer d’inutile ambiguïté. Même si elle se sentait prête à une découverte pleine de sensualité, elle voulait commencer par explorer un tout autre registre.


Ils roulèrent presque une heure, passant progressivement de la ville à la campagne. Ils se sentaient bien ensemble, sans éprouver le besoin d’autre chose que ce simple côtoiement. Il réalisa où ils se trouvaient lorsqu’elle parqua sa voiture le long d’un mur d’enceinte. Étrange lieu de rencontre qu’un cimetière de village, même si d’une manière ou d’une autre les forces primitives qui caractérisaient un tel endroit pouvaient représenter un parfait antidote à leurs peines respectives.


Avant de sortir de la voiture, elle lui demanda s’il était toujours prêt à la suivre.



C’était exactement ce qu’elle avait voulu entreprendre avec lui. Ce qu’elle n’aurait osé espérer entendre de la part d’un partenaire aussi fortuit. Cette simple phrase abolit toute distance entre elle et lui. Ils ne parlèrent plus, se contentant de parcourir les travées du cimetière dans la nuit. Côte à côte, ils ressentaient à quel point un tel lieu, censé évoquer la douleur, la perte, la mort, le chagrin, pouvait regorger de manifestations de vie. Certes, chaque pierre tombale rappelait l’absence. Inversement, tout ce qui poussait là, tous les frémissements, les crissements, les sons, la nature qui reprenait ses droits en plongeant ses racines dans le sombre terreau où avaient séjourné les disparus, toutes ces manifestations incontrôlables contribuaient au triomphe de la vie.


Après l’avoir laissée un moment seule à ses pensées pour déchiffrer quelques épitaphes, il revint derrière elle et entoura sa taille de ses bras. Elle s’appuya contre lui pour mieux sentir son cœur battre dans son dos. Elle prit ses mains et les posa sur ses seins.



Elle lui proposa de se rendre dans un coin du cimetière, alors qu’elle prenait place exactement à l’opposé. Après s’être laissé le temps d’observer, d’entendre, de percevoir au plus profond d’elle-même ce qui se tramait dans les allées, elle commença à se déshabiller. Il fit de même et la laissa le contempler longuement. Puis elle s’anima à nouveau.



Alors il commença à s’offrir à elle, déposant sur le marbre froid des tombes tout ce qui devait retourner dans le royaume des morts. Il parla longuement, sans tricher, sans enjoliver, exprimant, souvent avec hésitation, ce qui pesait sur son cœur et son âme. Puis, une fois explorés les décombres de sa vie, il évoqua les rayons de lumière, les sons plus joyeux, les battements désordonnés du cœur, les espoirs et les bonheurs possibles. À chacun de ces cadeaux elle répondit par un pas dans sa direction. Il s’approcha d’elle au même rythme jusqu’à ce qu’ils se touchent enfin, au milieu d’une allée du cimetière.


Elle tendit la main pour caresser sa poitrine. Il la prit entre ses bras. Toute distance abolie entre eux, ils purent enfin s’abandonner à la force de leur désir. Lorsque leurs caresses les poussèrent à s’allonger pour mieux se mélanger, ils se couchèrent sur un petit carré d’herbe, prévu pour recevoir une tombe, une fois, prochainement. Ce que n’importe qui pourrait considérer comme un geste impie, un sacrilège intolérable, ils le vivaient comme une formidable explosion de vie, un colossal pied de nez à la mort. Laissant sous le sol ce qui ne participait plus au bouillonnement de la vie, et qui serait dans quelque temps dispersé aux quatre vents par une pelleteuse sans scrupules, ils célébrèrent en plein air la formidable puissance de la vie.


Elle s’ouvrit à lui, l’attirant de toutes ses forces au plus profond de sa féminité. Il s’y enfonça d’un coup de reins, sans cesser de contempler son visage. Les poumons remplis des enivrantes senteurs des fleurs qui décoraient les tombes, ils s’offrirent un tonitruant éclat de rire sensuel, célébrant à haute, très haute voix par moment même, l’indomptable puissance de la vie et du plaisir sur le passé douloureux et la mort.


Ils firent longuement l’amour, en se délectant de découvrir ensemble les caresses, les positions, les pénétrations les plus folles. À chaque nouvelle explosion de leur feu d’artifice, Ariane retrouvait en lui quelques gestes, quelques attitudes, quelques impatiences de l’un ou l’autre des hommes qu’elle avait rencontrés au cours de la semaine. Il se montra tour à tour généreusement égoïste, comme l’avait été l’informaticien remplaçant, tendrement attentif, à l’instar du fleuriste, délicieusement timide au moment où elle désira de toutes ses forces être possédée par son impérieuse virilité. Elle ressentit même en lui, mais sans crainte cette fois, le besoin primal d’asservir sa femelle, comme en avaient fait preuve les deux pêcheurs. Elle accepta cette pulsion comme étant partie du tout complexe que cet homme représentait et qui semblait si bien lui correspondre. Elle accepta son assaut, remettant à plus tard de lui apprendre à canaliser ses pulsions dans des jeux érotiques agréables à tous deux. Elle ne se priva pas pour autant de rebondir après cette apparente soumission pour profiter de tout ce qu’il avait d’agréable à lui offrir.


L’herbe de la concession inoccupée était pilée jusqu’aux racines lorsqu’un dernier cri de plaisir leur échappa. Ils s’effondrèrent à même le sol trempé de rosée, tendrement enlacés. Le chant des oiseaux les réveilla au petit matin. Ils eurent ainsi le temps de quitter dans la lumière du soleil levant, avant que n’arrivent les premiers visiteurs, le lieu qu’ils avaient si divinement profané.


Il paraît qu’ils ne se sont plus quittés depuis, sans qu’aucun mauvais sort ne leur ait été jeté par un dieu courroucé. Il paraît aussi qu’on peut voir, certaines nuits, des ombres s’ébattre dans les travées de ce cimetière, jouer à saute-mouton entre les pierres tombales, se bousculer contre les stèles funéraires. Bref, faire de leur éternité ce qu’elles n’avaient jamais osé faire de leur vivant. Il paraît. Mais ceux qui ne savent pas disent parfois des choses étranges. Les autres sont trop agréablement occupés pour s’en soucier.