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Temps de lecture estimé : 20 mn
31/12/09
Résumé:  Du cul, encore du cul, plus que je n'en ai jamais eu. Mais pour la bonne cause.
Critères:  fh voyage voiture exhib noculotte pénétratio aventure -occasion -nature
Auteur : Annie-Aime  (Je m'éclate à inventer ces loufoqueries.)      Envoi mini-message
Sara, ma perle d'Ethiopie

Connaissez-vous l’Éthiopie ? Un grand et beau pays, riche d’histoire et de culture plus que de ressources. J’y fis un séjour dont je ne me souviens pas sans émotion ni quelque honte. En même temps je frétille aussi. Une humidité importune mouille ma culotte quand je me remémore cet épisode de mon existence.


C’était il y a quelques années. L’année pendant laquelle mon mari fut opéré d’une hernie discale. Il se retapait doucement lorsqu’on lui offrit l’opportunité d’une mission en Éthiopie. Calendrier oblige, le boulot imposa d’abréger la convalescence. Imaginez notre appréhension. L’employeur m’invita à accompagner mon conjoint et le cas échéant à jouer la garde-malade.


Nous débarquâmes à Addis-Abeba au cours du printemps. Mon conjoint, mon ex maintenant, plastronnait et jouait de la canne pendant que je me coltinais les bagages. Naturellement, les manutentions m’étaient dévolues. C’était ma part. En revanche, dans le cadre professionnel j’encombrais plutôt. Au premier rendez-vous, je basculai dans la classe des auxiliaires inopportunes sinon inutiles.


C’est vrai que tous les trois on faisait délégation. Le troisième larron se prénommait Jean-Luc, un collègue de Daniel, son binôme éthiopien, un jeune métis de mère Amhara (l’ethnie dominante) et de père Italien. Bel homme au demeurant, le cheveu de jais, l’œil de braise et profilé comme un dieu du stade, mince, bien proportionné. Et sympa avec ça, sans compter qu’il était francophone. Durant le peu de temps que je restai avec eux, il m’apprit mille choses et sut les conter avec humour, on se marrait bien. Je quittai l’équipe avec regret.


Donc, je me retrouvais en chômage partiel et traînais mon désœuvrement au bord de la piscine de l’hôtel Hilton, laquelle soit dit en passant est alimentée en eau de source géothermale. L’eau était délicieuse mais enfin une piscine, si bien soit-elle, ça ne fait pas tout. On se lasse.


Je me repentais d’avoir si souvent séché les cours d’anglais au lycée. L’isolement linguistique, ça existe. J’en témoigne. Par bonheur, je fis connaissance d’Anna et Jim, un couple de Danois en vacances. Nous sympathisâmes. J’aurais probablement sympathisé avec quiconque pourvu qu’il parle Français. N’empêche ! Mes Danois étaient super. Dès lors mon séjour prit les couleurs de l’arc-en-ciel.


Je ne lâchais plus mes amis polyglottes. Je m’accrochais. Nous arpentions ensemble les musées, les églises, les châteaux et le moindre site qui avait de l’intérêt. Nous parcourrions les marchés, débusquions ensemble la bonne affaire et prospections de concert les gargotes pour nous restaurer.


Une complication imprévue mit un terme à notre amitié.


C’était la veille du week-end, mon mari et moi-même avions invité son binôme et mes amis Danois. Nous terminâmes la soirée dans la boîte de nuit, au sous-sol de l’hôtel. L’attitude d’Anna m’apparut d’emblée ambiguë. Je compris que la péronnelle draguait Jean-Luc. La haine ! Ô rage, ô désespoir ! Cette contrariété me gâcha la soirée. C’était débile et tout ce qu’on voudra mais l’irritation me bouffait les neurones. Le mari de la donzelle ne semblait pas en prendre ombrage. Á croire qu’il n’entendait pas sa nana roucouler. Et pour comble, ce cocu – en puissance au moins, s’il ne l’était déjà – abandonna très tôt la place, en même temps que mon ex. Lui arguait son handicap et l’autre je ne sais plus. Nous restâmes tous les trois, le beau gosse, la pintade et moi. L’impudente crut bon de négocier.



Il était à moi ! D’où je tenais ça, moi ? J’en sais trop rien. L’évidence m’était apparue d’un coup. Pas besoin d’acte notarié. Pas besoin d’enregistrement. C’était inscrit en lettre de feu dans mes tripes. J’étais prête à me battre.


J’aurais pardonné sur le champ si seulement elle m’avait souhaité « bonne chance ». Et dans ce cas, peut-être que je le lui aurais laissé. Va savoir ! Le gars était beau gosse, sympa et on s’entendait bien. Je ne peux pas nier qu’il me plaisait mais de là à en faire un fromage, comme on dit. Et puis il y avait mon époux, lequel du reste devait m’attendre pour son massage. Rien n’était joué ! Sauf que la vipère voulut la guerre.



Par Toutatis ! La Valkyrie allait apprendre à me connaître. J’allais lui montrer qu’une fille de Vercingétorix valait bien celles d’Éric-le-Rouge. Je sais, il était Norvégien pas Danois mais vu d’Addis-Abeba c’est pareil et du reste on s’en fout. Je sortis le grand jeu. Pour moi l’issue ne faisait aucun doute. D’ailleurs la suite me donna raison. La pimbêche rendit les armes et s’éclipsa pendant que Jean-Luc me roulait une pelle du « feu de Dieu ».



Nous fîmes l’amour dans sa vieille guimbarde sur la banquette arrière. J’avais refusé de le suivre chez lui, au diable Vauvert, pour des raisons d’horloge. Tu parles ! À l’aube on se mignardait encore. Mon corps rompu, assouvi, relâchait dans les bras virils. Je goûtais la plénitude. Un bonheur rare que je n’avais pas connu depuis longtemps. Daniel et moi ne faisions plus l’amour depuis des lustres, principalement en raison de ses problèmes de santé récurrents.


Quand les premiers rayons du soleil enflammèrent la ligne d’horizon, je me rhabillai et regagnai mes pénates clopin-clopant tandis que Jean-Luc évacuait sa carriole.



Profil bas ! Mauvais moment à passer. Me sentis-je coupable ? Bien sûr. Avais-je des remords ? Pas sûr. Aurais-je réécrit ma destinée si d’aventure un ange miséricordieux m’en avait donné le pouvoir ? Autant de questions qui bruissaient sous mon crâne tandis que je m’alanguissais sous la douche.


Après déjeuner, j’abandonnai Daniel et partit retrouver Jean-Luc. Nous escaladâmes les collines d’Entoto culminant à 3200 m, et visitâmes les deux églises sises sur ces sommets. Celle dédiée à l’archange Raguel et l’église Sainte-Marie où Ménélik II fut couronné en 1882. Derrière la dernière se dressaient les modestes bâtisses décrépies qui étaient autrefois occupées par l’empereur. Jean-Luc y dénicha un endroit. Nous y fîmes l’amour. Ce fut rapide mais j’en retirai, malgré tout, une certaine jubilation. J’y perdis ma culotte souillée.


Notre bonheur était contagieux. Les gens nous souriaient. Ils montaient. Nous descendions en gambadant d’humeur folâtre, bras dessus, bras dessous, parmi les étals à touristes, sur le chemin du retour vers le parking. Parfois mon compagnon imposait une halte. Il m’embrassait, glissait sa main sous mon top, caressant mes seins ou bien sous ma jupe, explorant mes fesses, sans se soucier aucunement de discrétion.



Aucun interdit, aucune morale, ne bridaient mon appétit lubrique. Je me comportais comme ces minettes délurées en vacances au soleil, et me sentais comme elles, libre de toute contingence. Jean-Luc m’aurait-il foutue à poil au milieu de tous ces gens, que je l’aurais probablement laissé faire. Ajoutez à cela de vagues penchants exhibitionnistes dont je n’avais pas trop conscience, du moins avant ce séjour en Éthiopie.


Résultat : mon désir se nourrissait de ces provocations outrancières auxquelles il m’assujettissait. Je ne me rebellai point quand il dégrafa l’attache et fit rouler la jupe sur mes hanches. Il me pénétra d’un coup, sauvagement, adossée à la voiture. Ce fut violent, bestial, inachevé.


Il se retira avant d’avoir conclu et me fourra dans son tacot. Je récupérai ma jupe in extremis et l’enfilai tandis qu’il démarrait précipitamment. Je me souviens de la précipitation, et tout autant aussi, de ces hommes qui rappliquaient. Des hommes sans visage et bientôt des silhouettes. Je me demande ce qu’ils auraient fait si nous n’avions pas fui. Cette situation illustre l’un de mes pires cauchemars, intense et récurrent. Je frémis de trouille rétrospective à cette évocation. Et mouille aussi.


En semaine, je ne vis plus mon amant que le soir. Sans Anna et Jim, mes journées étaient singulièrement dépourvues de charme. Ils me manquaient mais impossible de nous rabibocher, la brouille était définitive. Par bonheur, un projet de déplacement prenait forme. J’intriguai pour en être.




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Le chauffeur régla la climatisation. La chaîne diffusait en sourdine une musique locale. Le bruit du moteur était à peine perceptible. Le confort du gros 4X4 en imposait. Nous avions loué ce modèle au prix fort dans le souci de ménager mon cher et tendre handicapé. Ce dernier occupait la place du passager avant tandis que Jean-Luc avait pris place à ma gauche sur la banquette arrière.


Le véhicule avalait l’asphalte et doublait avec une facilité déconcertante. Nous longions des colonnes interminables de camions, de marque FIAT, un modèle ancien, tous identiques, tous vides, la remorque bizarrement arrimée sur le plateau. « Pour économiser les pneumatiques » m’avait-on expliqué.



Nous fîmes halte à Nazzareth, pour nous dégourdir les jambes et boire un café. Jean-Luc manigança un aparté. Il me conduisit à l’arrière du resto, dans un recoin discret. Ce fut aussi bref que d’ordinaire. Je m’habituai à ces étreintes fugaces autant qu’impromptues, dérobées à la va-vite, commises à la sauvette, entre deux portes, de-ci de-là. Il n’y avait que la première fois qui dérogea à la règle, cette fameuse nuit où je découchai et que nous passâmes à baiser jusqu’à l’aube dans l’inconfort du véhicule.


Á Nazzareth, comme sur les collines d’Entoto et comme dans la plupart des lieux où nous fîmes l’amour, notre étreinte fut précipitée mais j’aimai malgré tout. J’aimai cette insouciance exubérante. J’aimais cette luxure débridée. J’utilisai ma culotte pour éponger chez lui et chez moi les excès de sécrétions vaginales autant que séminales, et m’en débarrassai. Rançon payée à l’improvisation ? Même pas ! Car rien n’était plus prévisible et habituel. N’empêche que ma collection de lingerie fine diminuait considérablement. M’en foutais ! J’en avais assez. Ça ne me déplaisait pas du tout d’aller cul nu. D’autant que Jean-Luc adorait me savoir vulnérable. Voyez ! C’était l’unanimité.


Après Nazzareth le bitume laissa place à une piste caillouteuse accrochée à flanc de montagnes. Parfois, une percée ou la configuration du relief permettaient d’apercevoir au loin les lacets de la piste, laquelle zébrait les coteaux escarpés telle une cicatrice. Cette entaille n’était pas figée. Des mouvements perceptibles boursouflaient la balafre. Une image ! Une impression ! En fait des véhicules articulés défilaient à petite allure mais à cette distance ils nous semblaient comme des colonnes de fourmis laborieuses ramenant leur récolte au bercail.


À un moment donné Daniel se plaignit du dos. Il rabattit le dossier de son siège et s’allongea, tournant l’échine de telle façon que je pus oindre un gel antalgique autant qu’anti-inflammatoire. La manœuvre avait aussi pour effet de me rapprocher de Jean-Luc. Ce diable d’homme ne résista pas au plaisir de caresser mes fesses, opportunément à portée. Je laissai faire.


Mon tort fut de permettre qu’il reprenne son tripotage quand je me rassis à son côté. Il eut alors beau jeu de flatter l’intérieur de mes cuisses puis mon sexe. Ma résistance fondit définitivement quand il s’empara de mon clito. Il le roula entre son pouce et l’index. Je m’ouvris et m’offris à la caresse. En retour, il se fit plus entreprenant. J’étouffai dans ma gorge ces petits cris que la surprise m’arracha quand ses doigts pénétrèrent mon vagin.


Le chauffeur s’aperçut de notre manège. Je vis son agitation au travers du voile qui brouillait ma vue. L’indiscrétion ne m’importunait pas. Au contraire, cela pimentait mon plaisir. En revanche je me souciais de ne pas alerter mon conjoint. En vain semble-t-il. Comment comprit-il ce qui se tramait dans son dos ? Mystère.



Il nous tournait le dos. Nous le pensions hors jeu. Imaginez la surprise ! Au regard du réveil inopiné autant que de la générosité. Quid de la générosité ? Le propos ne valait-il pas absolution ? Jean-Luc resta coi, moi de même. Et comme deux gamins pris en faute, chacun se tassa dans son coin. Enfin façon de parler vu que moi je n’avais plus de coin, juste un milieu.


Quant au chauffeur, le pauvre n’avait rien compris et coulait toujours des œillades furtives vers son rétroviseur. Qu’avait-il vu au juste ? Sans doute pas grand-chose. Dommage ! Pour lui ou pour moi ?


Ne soyez pas dupe. Cette façon de focaliser ma gouaille sur le chauffeur était un dérivatif. Pendant ce temps je ne pensais pas à Daniel ni à Jean-Luc. Daniel et Jean-Luc, Daniel autant que Jean-Luc. Un casse tête ! Deux sujets de migraine ! Le mélo ou la tentation ? Niet ! Ni l’un, ni l’autre. Pourquoi pas la distraction ? Ben oui, le chauffeur me distrayait sans risque car de lui je me contrefichais comme de l’an 40, juste une récréation qui me parut inoffensive. Je n’avais pas prévu que je me prendrais au jeu.


De prime abord, il n’y avait pas grand-chose, juste ce questionnement sur ce que le gaillard avait entraperçu, quelques réflexions grivoises, un peu d’introspection mais il n’en fallut pas plus pour rameuter la bête qui nichait dans mon bas-ventre. Á décharge, faut dire que l’état d’alerte régnait sur le territoire depuis que Jean-Luc avait sonné le tocsin.


Au feu ! D’accord, c’est pas marrant ! N’empêche ! J’avais des idées pyromanes. On est toutes un peu salopes à certain moment. Et moi, c’était mon moment, j’avais envie d’aérer le minou. Au diable la morale judéo-chrétienne ! Disons-le tout net, il m’amusait d’allumer le bonhomme. Allez-y ! Je mérite toutes les insultes. Salope ! Je l’ai déjà dit. Garce ! Pute ! Et alors ! Je revendique. Je le suis. Je l’étais mais n’assumais pas tout à fait. J’avais en plus besoin de jouer l’hypocrite.


Plus pervers, tu meurs ! Ma stratégie était loin d’être brillante parce que je ne contrôlais rien, ni le degré de mon audace, ni le retour d’information. Mes yeux restaient clos pour que l’on me croie endormie ou à tout le moins somnolente, et sauf à me dénoncer, mes actions étaient nécessairement progressives et d’une certaine manière irréversibles. Mon taux d’adrénaline grimpait avec ma témérité. Ma jouissance suivait la même courbe. Je mouillais et mouillais encore, pendant que je montrais à voir. C’était dur, très dur d’être privée de la vue. Plus d’une fois je fus tentée d’entrouvrir mes paupières. J’imaginais son œil torve, rivé sur le rétroviseur, j’imaginais la concupiscence… Peut-être se touchait-il ? Moi, j’avais envie de me toucher, de refermer mes cuisses, de les serrer, de bouger mes jambes… Ma raison se brouillait. Mes muscles s’ankylosaient. L’immobilité devenait pénible. Je rompis le simulacre, réajustai ma tenue, levai les yeux et croisai le regard du chauffeur dans le rétro. Sa pupille brillait de convoitise mais il y avait plus, une lueur de connivence. Le sagouin n’était pas dupe de ma comédie. Je le lus dans son regard et m’oubliai dans l’abîme de ses yeux hypnotiques plus qu’il n’était raisonnable.


La belle inconscience ! On sous-estime les anonymes, les sans grades puis le pétard vous pète à la gueule. J’avais la révélation d’un homme, peut-être sensible, en tout cas perspicace. Cette complicité invraisemblable distillait chez moi un poison sournois, pendant que ma libido faisait pâture de la nouvelle conjoncture.


Nous approchions d’Awash, une ville de quelque importance. Jean-Luc imposa un arrêt. Nous nous garâmes au plus près. Les véhicules ne pouvaient aller plus loin. C’était un quartier dédié aux boutiques de pièces détachées automobiles, adossé aux remparts de la vieille ville, dont une porte ouvrait juste en face de nous.



Daniel préféra rester dans l’habitacle. Je descendis. Le chauffeur me rejoignit à l’arrière du véhicule. Je ne le vis pas approcher sans appréhension. J’avais peur et honte à la fois. Il souriait. Il avait de grands yeux d’un vert très pâle, lumineux. On ne voyait qu’eux dans l’ovale sombre de son visage. Nous restâmes un moment interminable à nous regarder, immobiles. Quelque chose indéfinissable mais incontestable passait entre nous. J’avais l’impression qu’il attendait une initiative de ma part mais j’en étais incapable. Je fus presque soulagée quand il avança la main. Il caressa mon sein à travers le tissu. Je laissai faire, consciente que mon consentement tacite signifiait plus que cela. Il essaya de communiquer mais je ne compris pas grand-chose. Nous fîmes appel à Daniel.



Subterfuge astucieux. Le bougre ne manquait pas d’humour et déroulait le tapis rouge. N’importe ! Quel dilemme ! Il y a tout un monde entre caresser un fantasme et passer aux actes. Probable que je tergiversais trop. Il prit ma main et m’entraîna à sa suite. Je ne regimbai pas, heureuse qu’il me force la main. J’allai vers mon destin et suivis l’anonyme, le sans grade que j’avais allumé. Mais était-il encore anonyme ? Maintenant qu’il avait une âme et même un prénom. « My name is Henok » m’avait-il dit avec force gestes si bien que même un gamin de maternelle aurait compris.


Nous n’allions pas loin. Au premier croisement, il bifurqua sur la droite et s’arrêta à l’entrée de la première boutique. L’homme en poste derrière son comptoir vint l’étreindre. Ils se connaissaient. Des amis ? De la famille ? Je n’ai jamais su. Deux autres, affalés dans les transats firent de même puis il y eut conciliabule, mais pas plus d’une minute ou deux et à nouveau des accolades. Personne ne semblait faire attention à moi. J’aurais pu les croire indifférents s’ils ne m’avaient pas lancé des œillades de temps à autre. Mais à aucun moment je ne fus présentée. Je n’étais plus très sûre d’avoir pris la bonne décision. Je fouettais sec.


Foin des tergiversations ! Henok me guida vers l’intérieur jusque dans l’arrière boutique. Une lampe nue dispensait une lumière fantomatique. Face à nous, la caverne d’Ali Baba, pour les mécanos en tous cas, il y avait un bric-à-brac d’échappements, de pare-chocs, de pneumatiques, de batteries, de chromes et autres trucs de ce genre. Mon énergumène me dévêtit, ôtant ma robe par le haut. Il m’examina d’un air gourmand, caressa mon sein d’un doigt dolent, redressa une mèche de cheveux. J’attendais bras ballants, à la fois anxieuse et résolue. Il se décida et d’un geste explicite, m’invita à prendre position sur une pile de pneus, tout en défouraillant. La vue du sexe arrogant, énorme, ranima mes craintes. Pourquoi donc m’étais-je embarquée dans cette aventure ? Folle ! Folle ! Folle ! J’obéis néanmoins. Il me pénétra en levrette, d’un seul coup, brutal. Un gémissement m’échappa. Ce n’était d’ailleurs pas tant la douleur que la surprise. Son bide frappait mes fesses. Ses cuisses tapaient les miennes. Ce ne fut pas long. De longues giclées puissantes, chaudes, interminables éclaboussèrent le fond de mon vagin. C’était bien ma veine, un éjaculateur précoce. J’étais désappointée.


Et souillée. Le sperme abondant s’écoulait et poissait mes cuisses. En outre, le contact du caoutchouc des pneumatiques n’allait pas sans séquelle. Des salissures grasses ornaient mon ventre et mes seins. Mes décorations amusèrent mon amant. Il caressa mes seins, mon ventre et rit de ma mésaventure. Pendant ce temps son pénis reprit le garde-à-vous. Il était gros et poisseux dans ma main. Je le masturbai doucement. Pourquoi ? Une pulsion ? La curiosité ? Je ne me souviens plus. Le membre grossit et durcit encore. Je le sentis palpiter avec plus de nervosité dans ma paume et pressentis l’intention du bonhomme. Je comprenais mieux sa queue que son sabir.


Henok empoigna mes fesses, me souleva de terre, m’adossa sur un espace miraculeusement libre et me pénétra à nouveau. D’emblée, il me défonça comme un forcené. Mes râles scandaient le rythme de ses coups de reins. Je m’agrippai à sa tignasse et nouai mes cuisses autour de ses hanches. Un moment il ralentit le rythme et téta mes seins, mordillant les tétons à me faire mal. Pourtant je ne me dérobai pas et tendis au contraire le suivant quand il en eut fini avec le premier.


Bientôt, je sentis chez moi les prémices de l’orgasme. Mes muscles vaginaux se contractaient autour de son membre, de manière totalement autonome sans qu’il me soit même nécessaire de me forcer. Des frémissements au niveau du périnée annonçaient pareillement ma prochaine jouissance. La fièvre attisait ma folie. Je lançai mon bassin à l’assaut de son membre avec encore plus d’ardeur en retour de ses bourrades. Le choc de nos pubis résonnait et scandait notre bestialité. Le déchaînement des sens ne connut bientôt plus de limites que celles de mes forces. Je transpirais, bavais, haletais et projetais mon sexe pour dévorer le sien. L’orgasme me terrassa avant lui. Des vagues de spasmes irradiaient tout mon corps depuis mon bas-ventre. Les muscles pelviens et vaginaux aussi bien que l’utérus tous ensemble communiaient pour le grand frisson, divin et dévastateur à la fois, pouffant des ondes de feu porteuses de félicité, de manière erratique.


Depuis mon nirvâna, je le sentis se raidir. Il planta son sexe une dernière fois puis cracha sa semence au plus profond de mes entrailles. Il se répandit en jets puissants, gras et abondants dans mon ventre.


Sur ces entrefaites, un type entra avec une bassine fumante, du savon et des serviettes. J’étais en train de récupérer dans les bras de mon partenaire, les miens autour de son cou, ma tête sur son épaule, mes cuisses toujours bloquées en ciseaux sur ses hanches, guettant les derniers spasmes de bonheur. Pas vraiment des spasmes, plutôt des ondes, chaque fois un peu plus faibles et un peu plus imprévisibles. C’était comme si tout d’un coup une vague sensuelle, voluptueuse, née je ne sais où, s’échouait mollement. Je goûtais l’euphorie et rechignais à relâcher ma prise, puis me décidai enfin et laissai échapper sa verge encore mi-bandée. Je mis pied à terre et procédai à ma toilette.



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Daniel avait relevé le dossier de son siège et mâchouillait consciencieusement des feuilles de khat. Jean-Luc faisait de même, triant les jeunes pousses sur le rameau qu’il tenait d’une main. Ce dernier fit la distribution.


Le principe actif du khat est contenu dans les feuilles que l’on mâche des heures durant, pour en extraire un jus qui se mélange à la salive. Les feuilles naissantes sont les plus savoureuses. L’effet n’est pas immédiat, il n’est au mieux ressenti qu’après un certain temps. Il se manifeste par une euphorie et une excitation qui favorisent la méditation et le recueillement, puis une phase d’abattement s’ensuit. Dans tous les cas, la drogue affecte vos facultés et vos aptitudes. À Djibouti et au Yémen, la consommation de khat n’est pas loin d’être une plaie nationale.


Peu après Awash, dans le périmètre du volcan Fontale, la piste traversa une vallée de laves noires à peine refroidies. Qui donc s’en aperçut ? Pas Daniel ni Jean-Luc, lesquels ruminaient machinalement et, sous emprise, débattaient d’utopies parfaitement oiseuses avec le plus grand des sérieux.


Moi je ne touchais plus à leur saloperie. Le jus au goût âpre me donnait des nausées. En revanche Henok ne résistait pas à brouter quelques feuilles de temps en temps, ce qui m’inquiétait assez…


De part et d’autre de la piste damée, des millions de lames dardaient leurs pointes acérées. De ci, de là, des fumerolles dressaient leur panache. Par endroit des cavités formaient des bassins remplis de liquides aux couleurs ambrées, sur lesquels flottait une brume éthérée. Les bordures des bassins étaient irisées de jaune, de vert ou de violet. Ce paysage produisait une impression glauque, menaçante. Les chaudrons de l’enfer !



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Nous arrivâmes à l’hôtel dans la soirée. Le lendemain, il fut convenu que je gardais le véhicule. Je voulais faire du tourisme, aller à Harar, la ville de Rimbaud, une curiosité culturelle, un cas unique ; voir aussi la vallée des Merveilles, située un peu plus loin. Henri de Monfreid, le célèbre aventurier et écrivain français y avait autrefois résidé avec sa famille.


Harar n’était qu’à une petite centaine de kilomètres au Sud-est de Dire Dawa. La piste commençait par une succession d’épingles à cheveux jusqu’au col escarpé d’Engado, puis sur le plateau harari la route bordée d’eucalyptus longeait des terres fertiles et marécageuses, plantées de khat (Catha edulis), de sorgho et de millet, et constellées de petites huttes aux toits de chaume enfumés. Par une malignité de la nature, on tombait à l’improviste sur le lac d’Alem Maya, à un détour de la piste. Des populations d’oies sauvages, d’ibis et de flamants roses peuplaient les eaux claires dans lesquelles se reflétait le paysage verdoyant des collines environnantes.


Je décrétai un arrêt pipi. Henok gara le véhicule entre les gerbes de paille dans un champ de céréales fraîchement moissonnées qui bordait la rive du lac. Je vidai ma vessie à trois pas du rivage face à une faune qui ne sembla pas dérangée par ma présence. Mon compagnon profita de la halte pour renouveler ses assiduités. Il frétillait depuis le départ, pimentant sa cour de son sabir que je ne comprenais toujours pas. J’eus pitié. Je cédai, faisant taire mes réticences. Et Dieu sait que j’en avais. N’avais-je pas passé des heures à m’apprêter ? Sans parler du jean qui fut aussi difficile à ôter qu’il l’avait été à enfiler.


Il me prit en levrette, agrippant mes hanches et contrebalançant la poussée impulsée quand il enfouissait son sexe dans le mien. Au début, je subissais l’assaut passivement, puis je voulus ma part de la fête. Ne dit-on pas que l’appétit vient en mangeant ? Je frétillai et ondulai en même temps que je contractai mes muscles vaginaux pour mieux le sentir dans mon ventre. Le moment vint où le désir enflamma mes sens. Je perdis la tête et fonçai en quête du graal, triturai ses bourses, caressai mes seins, le clito ou n’importe quoi qui assouvissait ce besoin physique, frénétique, quasi épileptique que j’avais de nous rudoyer, de le violenter, de m’étriller. L’explosion fut presque simultanée chez lui et chez moi. Je braillai sans retenue tandis que les spasmes orgasmiques répandaient l’allégresse avant la plénitude. Le trop plein de sperme et de cyprine suintait et poissait mes cuisses. Ma vulve recracha le pénis flaccide tandis que je m’affalais contre le capot de la voiture sur lequel j’avais pris appui.

Pris-je l’initiative ? Me le demanda-t-il ? Je ne me souviens plus. Quoi qu’il en soit, le phallus était glorieux quand j’en eus fini, comme neuf, bien propret et plus raide que jamais. Lui de son côté n’était pas en reste, lapant, aspirant et récurant mon intimité dans ses moindres recoins. La bête à deux dos s’agitait sur ce foutu lit de paille que nous avions étendu sur le sol. C’était très inconfortable. Qui s’en plaignit ? Pas lui et moi pas trop mais je réclamai malgré tout la place à l’étage quand j’en eus assez de l’enfer du rez-de-chaussée.


Le comble était qu’après ce grand nettoyage nous remîmes le couvert et, chose rare par ici, en tous cas pour moi, nous le fîmes à la façon des missionnaires. Je ne connais pas la valeur historique de cette expression mais elle est de nos jours assez courante en sexologie pour que tout un chacun voie ce que je veux dire. L’animal vida à nouveau ses burettes. Il n’en finissait pas de cracher. Sa semence était abondante, épaisse et chaude, très chaude au fond de mon vagin. Il largua un bon tombereau. Toute sa boîte de kleenex y passa quand j’entrepris de nettoyer.



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Chouette journée ! Je trouvai un prof francophone qui accepta de jouer le Cicérone mais par-dessus tout, j’eus la révélation. La révélation des révélations. Certains diront une hallucination. Croyez ce que vous voulez. C’était à la mission catholique pendant que je me recueillais à la petite « cathédrale » et priais comme je le fais tous les jours depuis des années. L’évidence surgit tel un éclair fulgurant dans le ciel. Ma journée était bénie de Dieu. J’en ressortis transfigurée, illuminée.


L’illumination m’apporta l’amour. Un immense amour. Ce jour-là, j’aimai passionnément, Henok et pas un autre, plus que je n’aimerai jamais un autre homme. Mon sentiment était intense, profond, irrépressible.


Au retour, j’imposai une halte dans ce champ que nous connaissions près du lac.


La paillasse du matin n’était plus si déplaisante. Je la trouvai douillette. Douillette et poétique ! Une couche nuptiale ! Des heures durant, nous fîmes l’amour sous la voûte stellaire. Dix fois il voulut quitter, montrant sa montre, dix fois j’ignorai l’alerte, reprenant l’offensive. Je le pressurai jusqu’à la dernière goutte, me gavant de sa semence, emplissant mon vagin jusqu’à la gueule, faisant moisson de spermatozoïdes à foison pour dénicher et piéger l’unique, le facétieux, l’élu, celui qui séduisit et féconda mon ovule.


Je ne sais d’où je tenais ma conviction. Je n’ose invoquer notre Seigneur mais je savais que l’élu, cet avorton, ce noyau insignifiant pourvu d’un flagelle ridicule, était quelque part dans mon ventre. L’embryon tant espéré n’était plus qu’une question de jours, d’heures peut-être.


Il était tard, très tard quand nous arrivâmes à l’hôtel. Daniel s’inquiétait.



J’ignorai son tourment et contai mon allégresse.



Comment lui dire ma certitude ? Comment expliquer cette flamme que je portais en mon ventre ?


Fallait-il avouer ? Car il ne savait pas tout. Avouer mon écart ? Avouer que le géniteur n’était pas celui auquel il pensait ? Fallait-il dire cette passion folle qui me jetait dans des bras inconnus ? Cet élan qui me poussait vers Henok ?




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Les vicissitudes de la vie n’épargnèrent pas notre couple. Sara avait un peu plus de quatre ans quand nous nous séparâmes, Daniel et moi. Nous continuons à nous voir souvent, ne serait-ce que pour coordonner l’éducation de la petite.


Je ne sais si j’aurai un jour d’autres enfants. Je l’espère et prie encore le ciel tous les jours.