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22/06/10
Résumé:  Alchimie et amour au temps des cathédrales.
Critères:  f fh hplusag amour fmast fellation pénétratio historique fantastiqu
Auteur : LouVilneau  (Plaisir de mêler le sexe à l'Histoire...)            Envoi mini-message
Cathédrale

Comme tous les matins, Clémence s’est levée fatiguée. Encore et toujours le même cauchemar : Arnaud et Jehan sur cette estrade qui bascule dans la Somme. Hurlements de la foule et ses propres cris qui la font sursauter. Même éveillée, le cauchemar continue. « Pourquoi les avoir quittés ? Je ne serais pas là, seule, à attendre désespérément le moment de les rejoindre… »


Comme tous les matins, dès l’aube, elle s’est levée pour ranimer le feu afin de nourrir les compagnons maçons et tailleurs de pierre qui logent chez elle avant qu’ils ne partent sur le chantier de la cathédrale. Ils sont six qui occupent deux chambres au premier étage de cette belle maison, qui lui reste d’Arnaud, son défunt mari.


En cet an de grâce 1223, Clémence a trente-trois ans. Depuis presque deux ans, elle survit à cet accident, à cette déchirure qui a brisé sa vie. Arnaud, son mari et leur fils, Jehan, arrachés à son amour. Bien sûr, elle vit à l’aise : Arnaud qui faisait commerce de la waide, était riche. Il lui a laissé cette maison, toute en pierre dans le quartier Saint-Germain où vivent les bourgeois d’Amiens et une belle réserve de pièces d’or et d’argent qui lui permettront de se nourrir toute sa vie, et même au-delà…


Ce matin-là donc, Clémence termine les rangements et le ménage avant d’aller au port du Don pour faire son marché. Il lui faudra aussi aller au moulin pour chercher la farine du sac de blé qu’elle y a laissé.

Un appel depuis la rue la fait sursauter :



À la porte, elle voit s’encadrer la silhouette d’un homme assez petit, mais bien charpenté, qui pénètre dans la maison.



Le sourire doux de Gaspard désamorce la colère montante de Clémence.



Est-ce le besoin de rompre la solitude dans laquelle elle se complaît depuis trop longtemps ou bien le rayonnement paisible qui semble émaner de la personnalité de cet homme, mais il lui est pénible de le voir s’en aller.



Ces quelques mots impressionnent fortement Clémence. Elle découvre qu’elle a devant elle non seulement un sculpteur, mais aussi un savant et un philosophe.


Pour la première fois, elle le regarde. À peine plus grand qu’elle, il a une longue chevelure châtain qui lui descend sur les épaules. Ses moustaches, extraordinaires, sont d’une longueur telle qu’elles lui tombent sur la poitrine. Ses yeux enfin, assurés, clairvoyants, mais remplis de bonté.

Cet homme qui paraît avoir quarante ans, rayonne de douceur autant que de sagesse. Sans réfléchir, Clémence dit alors :



Après avoir gravi la rude échelle de meunier qui conduit à l’étage, les voici dans la vaste pièce située sur la rue et éclairée d’une grande fenêtre. Comme elle le craignait, la vue du grand lit fait resurgir tous ces souvenirs douloureux qu’elle tient pourtant à garder au fond de son cœur. D’un regard, Gaspard tarit ses larmes ; cet homme est rassurant, sa simple présence est réconfortante.




—oooOooo—



En ce matin de la Saint-Barnabé, le soleil a déjà chassé les brumes de la nuit. En marchant dans les rues étroites, Clémence et Gaspard devisent tranquillement. Au port du Don, des grandes barques à fond plat sont amarrées côte à côte. Elles débordent de légumes divers que des hommes présentent et vendent à des matrones encombrées de paniers. Ça crie, ça marchande, des éclats de rire fusent au milieu des grognements de refus.



Et Clémence de se lancer dans un marchandage, mettant en concurrence les hortillons. Elle remplit son panier d’aubergines, de panais, de navets, de salades. Elle trouve même un gros melon d’eau et des cerises.



Ainsi devisant, ils finissent leurs emplettes.



—oooOooo—



La nuit est tombée depuis longtemps mais, sur sa paillasse, dans un coin de la cuisine, Clémence n’arrive pas à trouver le sommeil. L’arrivée de Gaspard la préoccupe. Elle ne veut pas oublier Arnaud et Jehan. Or ce matin, pour la première fois, ils ont quitté son esprit pendant plus d’une heure. Elle est partagée, mais le plaisir qu’elle a éprouvé à côtoyer cet homme, ce n’est pas un péché quand même !


Il faut qu’elle dorme, il y a de l’ouvrage demain ! Elle se concentre sur le travail du lendemain et, progressivement, plonge dans un demi-sommeil. Le souvenir de Gaspard lui traverse l’esprit et, rien qu’à ce souvenir, son corps se détend de bien-être. Elle n’a pas vraiment conscience de ses mains qui caressent son corps au travers de sa longue chemise de nuit. C’est quand elles atteignent sa poitrine qu’elle réagit. Cette sensation anormale la réveille ; voilà bien longtemps que ces masses de chair stérile ne lui faisaient plus aucun effet. Elle les touchait pourtant lors de sa toilette quotidienne, il lui arrivait même certains jours de se pincer les tétons sans autre résultat qu’une brûlure intense et douloureuse.


Ce soir c’est différent. Elle éprouve une émotion qui se propage dans son ventre, ses seins ont repris vie. Légères, ses mains effleurent le tissu et, sous les infimes vibrations, sa peau se hérisse. Sous ses doigts, les mamelons deviennent durs, granuleux et les tétins se dressent repoussant la fine étoffe. Clémence se laisse aller à prolonger par des effleurements, puis des petits pincements, cet émoi qui électrise tout son corps. Elle rêve : ce ne sont plus ses mains, ce sont celles de Gaspard qui la caressent.


Elle ne veut plus penser ; elle se laisse aller à ce bienheureux trouble qu’elle ne connaissait plus depuis si longtemps.


Son ventre appelle, réclame. C’est une exigence qui dépasse sa volonté. Une main part se coller à son sexe, ses deux cuisses se referment dessus, comme un étau. Elle bascule sur le côté, en position fœtale, agitée de soubresauts, la respiration haletante. Convulsivement, son bassin bascule venant frotter son sexe sur la main raidie au travers de la chemise. Elle tremble, elle gémit, elle n’est plus que sensations violentes qui la font délirer.


La violence de l’orgasme la laisse épuisée, l’esprit vide ; elle s’endort. Des sanglots irrépressibles viennent la secouer pendant un moment sans lui faire reprendre conscience.


Et puis, plus tard, c’est cette hantise, ce rêve affreux qui la ramène le fameux jour, au bord de l’eau : elle entend encore les cris qui ont succédé à cet énorme craquement ; elle revoit le corps de Jehan, broyé entre les rondins de l’estrade démantibulée et qui flotte dans un nuage de sang que le fleuve dilue lentement. Elle ressent à nouveau ce vide soudain en elle ; sa vie, son amour, tous ses espoirs qui lui échappent… Et Arnaud ? où est Arnaud ? Elle sait, dans son rêve, que lui aussi va lui manquer… définitivement ! Alors, telle une bête blessée, elle se met à hurler. Hurler sa détresse, hurler sa désespérance, hurler à la mort qui lui a tout pris.



Une voix grave, mais apaisante, la fait émerger de son cauchemar. À genoux à côté d’elle, Gaspard lui caresse le visage, répétant doucement sa litanie. Elle ouvre les yeux pour se noyer dans la bienveillance du regard bleu profond de l’homme. Elle réalise la situation ; ses paupières se chargent de larmes qui se mettent à ruisseler sur ses joues. Gaspard se penche et, après avoir passé un bras derrière ses épaules, il la soulève pour la bercer, comme un bébé.



Bien que calmée, Clémence a toujours en tête les images horribles de la catastrophe. En parler lui semble au-dessus de ses forces et pourtant les premiers mots se forment sur ses lèvres :



Secouée de sanglots, Clémence s’arrête. Elle soulève la tête à la recherche du regard de Gaspard, en quête de soutien ; un sourire bienveillant lui donne la force de continuer.



Gaspard continue de la bercer, murmurant des mots sans importance, mais rassurants et apaisants. Au bout d’un petit moment, il la repose doucement sur sa couche et se relève. Il va chercher un gobelet sur une étagère et y verse un peu de vin d’un flacon qui restait sur la table à manger.

D’un petit sac de cuir, pendu à sa ceinture, il tire une fiole remplie d’un liquide doré. Précautionneusement, il en fait tomber trois gouttes dans le vin et présente le gobelet à Clémence.



Subjuguée, elle vide la timbale. Peu à peu, toutes ses angoisses s’éteignent. Ses yeux se ferment et elle s’endort calmement.



—oooOooo—



Son réveil est paisible. L’esprit très clair, dégagé instantanément des brumes du sommeil, elle ressent un vide. Elle s’interroge : quelque chose lui manque… Ça y est, elle a trouvé ! elle n’a plus ce nœud, cette tension perpétuelle là, au-dessus du nombril qui lui tordait habituellement l’estomac. Elle se sent libérée, délivrée de cette angoisse qui l’oppressait depuis l’accident. Mais elle n’a pas le temps de s’attarder à penser ; comme tous les matins, il faut se lever, ranimer le feu, préparer la nourriture des compagnons et aussi de… Son cœur saute dans sa poitrine, une douce chaleur l’envahit, ses lèvres sourient. La simple évocation de Gaspard la réjouit.


Elle se reprend, se morigène : « Allons, ma fille, ce n’est guère le moment de rêvasser, il y a de l’ouvrage qui t’attend ». Ses muscles ont recouvré la mémoire des gestes habituels. L’esprit occupé par toutes ces tâches, elle ne réalise pas vraiment que ce matin, elle exécute tout cela facilement et joyeusement.


Éclairée seulement par deux hauts vasistas, la cuisine est une pièce sombre, pourtant ce matin elle paraît lumineuse à Clémence ; la couleur des objets qu’elle manipule lui semble plus chaude, plus riante. Elle chantonne et, brusquement, s’en rend compte. Tout en continuant machinalement son travail, elle s’étonne de cette gaîté singulière.


Pour la deuxième fois de la matinée, le nom de Gaspard lui revient à l’esprit et, comme la première fois, son corps réagit. Ses joues rosissent, ses mains s’ouvrent inconsciemment, ses lèvres sourient et son esprit se met à vagabonder : « Elle va lui porter son déjeuner dans sa chambre. Peut-être va-t-il la toucher ? Non mais, elle devient folle, elle agit comme une gamine amoureuse. Bien sûr qu’elle va lui porter son repas, mais… il n’est pas question qu’il la touche ! »


Tout est prêt sur la table pour les compagnons qui, nus, s’ébrouent dans la cour autour du puits pour leur toilette matinale. Sur un plateau, elle dispose une écuelle de soupe fumante avec une cuillère, une grande tranche de pain et un beau morceau de poitrine de porc, du beurre dans un gobelet bas et un couteau, puis elle monte l’ensemble dans la chambre de Gaspard.


Elle trouve celui-ci sous la fenêtre penché sur un grand cadre rempli de plâtre fin immaculé. Il a noué sa moustache qui devait le gêner à l’arrière de sa tête, ce qui la fait sourire. À l’aide d’une grande règle, d’un stylet et d’un compas, Gaspard dessine le plan d’un portail de la future cathédrale. Concentré dans son travail, il n’a pas pris conscience de la présence de Clémence ; aussi sursaute-t-il légèrement quand elle lui dit :



Le visage de Gaspard, concentré jusque là, s’éclaire d’un sourire. Avec précautions, il dépose ses instruments sur un tabouret, se retourne et la regarde. Sous ce regard, Clémence fond, son cœur se calme, tous ses muscles vibrant d’excitation se détendent ; en revanche, son corps se remet à lui envoyer des signaux disparus depuis bien longtemps : ses seins sont gonflés et tendus, son sexe est humide, son ventre réclame.


Ce flot de sensations oubliées la laisse pantelante. Elle dépose son plateau sur la table et s’assoit pour masquer son trouble.



Déjà souriant, Gaspard se met à rire franchement. Ses yeux parcourent le corps de Clémence dont les formes se laissent facilement deviner sous la fine étoffe de la chemise de nuit qu’elle porte encore.



Il regarde le plateau, puis se retourne vers elle :




—oooOooo—



En ces derniers jours du printemps et malgré l’heure matinale, l’air est tiède et la journée s’annonce chaude. Dans la cour derrière la cuisine, Clémence, nue, fait sa toilette. Après s’être mouillé, puis savonné tout le corps, elle se rince à l’aide d’un linge qu’elle trempe dans l’eau fraîche qu’elle vient de puiser. Sous les premiers rayons du soleil, elle a l’impression de vivre une renaissance.


Elle sent sa chair ferme sous une peau bien souple. Ses seins, haut plantés, sont encore bien pleins et, particulièrement ce matin, ils pointent orgueilleusement leurs tétons érigés par l’eau froide. Son ventre, arrondi par sa grossesse, ne s’est pas affaissé et rayonne glorieusement au-dessus de deux cuisses musclées par les travaux ménagers. Des jambes fines achèvent de construire une silhouette élégante et équilibrée, rare pour une femme de cet âge, somme toute assez avancé.


Ce matin, Clémence prend conscience de tout cela : son corps n’est pas mort… C’est même le contraire ; au moment où elle passe le linge sur son entrejambe, elle le découvre bien vivant et avide de retrouver tous ces plaisirs qu’elle s’était forcée à oublier, à éteindre en elle.

Elle est troublée par l’afflux de sensations nouvelles. Sa main s’attarde sur ses lèvres intimes. Plus curieux que les autres doigts, son majeur s’insinue, découvre des nymphes gonflées et sensibles et se dirige vers le centre de son excitation autour duquel il tourne, il tourne lentement.


Tremblante, les jambes coupée par l’agitation qui l’envahit, elle doit appuyer ses fesses sur la margelle du puits pour ne pas s’écrouler. Le corps stabilisé, elle s’enhardit et se décide à masser directement le clitoris. L’effet est extraordinaire, tout à coup son corps explose, elle ne peut retenir un cri qui résonne clair au milieu du chant des oiseaux. Pantelante, elle s’adosse au montant du treuil pour reprendre sa respiration. Jamais encore, elle n’avait joui si vite et avec une telle intensité !



—oooOooo—



Après avoir découpé deux larges tranches de pain qu’il a disposées sur la table à manger, Gaspard s’est assis attendant que Clémence serve les fèves au lard qui mijotent doucement sur le feu. Elle en verse une large louche sur chaque « pain tranchoir » qui sert d’assiette. Dans une écuelle, un fromage crémeux, très odorant et dans un panier, des fruits, viennent compléter le menu du déjeuner.


Ils commencent à manger en silence. Pourtant toujours sûre de la qualité de sa cuisine, Clémence ne lâche pas Gaspard des yeux, anxieuse de ses réactions, cherchant à anticiper ses désirs. Elle se précipite presque pour lui donner un gobelet, quand il exprime le besoin de boire. Il la regarde en souriant :



Elle lui tend son gobelet dans lequel elle a versé quelques gorgées de vin. De son sac de ceinture, il tire la petite fiole et fait couler deux gouttes du liquide doré qui se mêlent instantanément au vin.



Doucement, elle prend une petite gorgée de vin. Déjà, dans sa bouche, elle en ressent la puissance, c’est comme si elle buvait un rayon de soleil ! Au fur et à mesure qu’elle l’absorbe, elle perçoit les bienfaits de l’Élixir qui circule en elle, c’est un nouveau corps qui vient remplacer sa vieille carcasse usagée. L’œil pétillant et le sourire aux lèvres, Gaspard suit la transformation de Clémence.




—oooOooo—



Ils sont tout en haut de l’immense échafaudage qui soutient le gabarit de bois sur lequel va s’appuyer la première voûte de la future nef. À la place de cet échafaudage s’élèvera la façade ouest avec ses deux tours et ses trois portails. Quatre énormes colonnes de pierre qui supporteront la voûte, commencent à monter le long du gabarit.


Ils sont les seuls à cette hauteur. À travers l’entrecroisement des poutres, ils distinguent au sol, environ 80 coudées (44 m) plus bas, les ouvriers qui s’activent sur le chantier, tels des fourmis. Gaspard explique à Constance le plan du futur édifice.



Jusque là, Clémence n’avait regardé que le chantier au travers de la forêt de bois constituant le gabarit. Son regard s’élève vers l’horizon devenu très lointain. Un instant, elle s’identifie à un oiseau, tout en haut du ciel.

Elle tourne lentement sur elle-même et se trouve soudain face au vide. Le vertige la saisit, elle titube et serait sans doute tombée si Gaspard ne l’avait rattrapée. Dans le mouvement, il la plaque contre lui et ses mains pressent sa poitrine. Troublée, elle se laisse aller, les yeux fermés ; ce n’est pas cet instant-là qu’elle avait imaginé, mais il est là, tout contre elle et elle veut en profiter !


Sous l’érection des mamelons, les mains de Gaspard se font douces. Tendrement, il dégage le corsage de la ceinture et passe ses deux mains en dessous. Le contact de cette peau tendre et chaude, en plein ciel provoque en lui une réaction qu’elle ne peut pas ne pas percevoir dans le bas de son dos. Sous les caresses, des spasmes parcourent le corps de Clémence qui est pressée contre son sexe bandé. Ils goûtent tous deux ce corps-à-corps excitant.


Fermement, elle se retourne et s’agenouille à ses pieds. Relevant la chemise, elle dénoue le cordon qui maintient les braies de Gaspard et dégage le sexe de celui-ci. Une belle colonne de chair surmonte les bourses bien rebondies. À cause de l’érection, le gland assez large a repoussé le prépuce ; il attire irrésistiblement la bouche de Clémence qui commence par lécher délicatement la petite goutte de pré sperme qui couronne le méat. Elle le prend ensuite entre ses lèvres dans un baiser voluptueux ; sa langue le palpe avec délice procurant à Gaspard un trouble délicieux.


Doucement, les lèvres avancent sur la hampe, puis reculent dans un mouvement de succion. Toujours lents, les va-et-vient se font de plus en plus amples au fur et à mesure que la bouche de Clémence se fait au volume du sexe, jusqu’au moment où son nez et ses lèvres plongent dans la toison de Gaspard. Il est parcouru par un grand frisson et doit s’accrocher au garde-fou pour garder son équilibre.



Clémence ne répond pas, elle continue. Avec le réveil de son corps, ses menstrues sont revenues, et pourtant c’est devenu pour elle une nécessité de faire l’amour à Gaspard. Faute de pouvoir lui offrir son corps, elle le fera avec sa bouche. Jusqu’au bout ! Sous sa langue, le pénis frémit, des ondes le parcourent. Au dessus d’elle, elle entend le grognement étouffé de Gaspard qui se retient de toute sa volonté.


Elle aspire de toutes ses forces, sa langue s’affole et, tout à coup, sa bouche se remplit de crème acre et sucrée. Pour la première fois de sa vie, elle avale cette liqueur. Tendrement, du bout des lèvres et d’une langue légère, elle continue sa caresse sur le sexe qui lentement perd sa fermeté.

Doucement, Gaspard la relève, la presse contre lui et l’embrasse avec passion. Il n’est pas besoin de mots, ils se sont compris.


C’est un long moment de tendresse silencieuse, seuls, en plein ciel, dans la brise légère qui les rafraîchit de l’ardeur d’un soleil de milieu d’après-midi. Puis, après s’être rajustés en riant, ils redescendent lentement jusqu’au chantier.



—oooOooo—



À partir de ce moment-là, Gaspard prend Clémence comme assistante. À la maison, quand il travaille sur ses plans, elle l’entoure de petits soins, lui montant ses repas lorsqu’il est très occupé ou des gâteaux. Parfois, elle s’assoit à côté de lui et lui tresse sa moustache pour la lier derrière sa tête ; elle aime le voir ainsi. Quand il va sur le chantier, elle porte ses instruments et l’aide à accueillir les premiers imaigiers qui arrivent pour commencer les sculptures qui vont orner les porches et toute la façade.


Au bout d’une semaine, après le bain rituel de purification aux vieux thermes romains, Clémence se sent redevenue une jeune femme, pleine de vitalité. Durant toutes ces journées, elle a rêvé de Gaspard en elle. Aujourd’hui, ce soir même, elle va pouvoir réaliser son rêve. Elle ne sait pas trop encore comment, mais elle est sûre qu’elle va le faire !


Pourtant bien remplie, comme toutes les autres, la journée lui semble longue ; chaque instant s’étire et dure une éternité. Le soir venu, le repas des compagnons n’en finit pas ; elle a l’impression qu’ils le font exprès. Il y en a toujours un qui a une nouvelle anecdote à raconter ; c’est infernal !

Enfin, ils se décident à monter. Mais pourquoi mettent-ils tant de temps à se coucher ? Et à s’endormir ?


Clémence a déjà tout rangé, fait la vaisselle, balayé, préparé la bouilloire et le petit bois pour l’allumage du feu le lendemain matin, quand elle commence à entendre des ronflements. C’est le moment ! Son cœur s’emballe et ses entrailles se tordent. Elle se déshabille et enfile une fine chemise de soie, presque transparente, – le dernier cadeau d’Arnaud – elle retire sa coiffe et brosse longuement ses cheveux jusqu’à ce qu’ils deviennent brillants. Ce rituel la calme ; elle respire profondément, lisse sa chemise en se caressant les seins, le ventre et les hanches, puis se décide à monter lentement.


Elle se sent légère. Ses pieds effleurent les marches sans faire le moindre bruit. Elle est tout contre la porte de Gaspard et colle son oreille au battant, espérant découvrir ce qu’il fait. Rien ! Mis à part les ronflements en provenance des autres chambres : rien, pas un bruit.


Très lentement, elle actionne l’ouverture de la porte et entrouvre celle-ci. La lumière de la lune éclaire la pièce et elle aperçoit Gaspard couché nu sur le lit. Elle se glisse dans l’ouverture et referme silencieusement, puis elle s’approche.



Il a murmuré et pourtant ça a sonné comme un coup de tonnerre. Elle sursaute et bégaye :



Il lui tend la main.



Elle est dans un rêve, subjuguée par le rayonnement de cet homme. Elle ne pense même pas que la dernière fois qu’elle a été sur ce lit, c’était avec Arnaud… Elle se couche, prend la tête de Gaspard dans ses mains et l’embrasse avec enthousiasme. Dans ce baiser, elle veut tout lui dévoiler : son abandon, son désir, son amour.

Tendrement, il la serre contre lui ; il lui caresse la nuque, le dos, puis les reins. Convulsivement, elle vient coller son bassin contre lui et enserre sa cuisse entre ses jambes.



Il remonte la chemise sur ses jambes. Sans effort, il l’assoit et fait passer le vêtement par-dessus sa tête, puis il la rallonge sur le dos, nue. Elle a fermé les yeux et attend, ça lui est tellement doux d’obéir.

Pendant un instant, il admire ce corps offert ; ces bras fins, mais musclés, ces épaules rondes, ces seins gonflés et fermes dont les pointes sont tendues vers lui. Le ventre douillet se soulève doucement au rythme de la respiration calmée de Clémence qui s’est abandonnée totalement à la volonté de Gaspard ; au sommet des cuisses élancées, la toison brille avec éclat sous la lumière de la lune.


Il est à genoux à côté d’elle et il balaie lentement tout son corps, de la tête aux pieds, avec ses deux mains, sans la toucher. Des mains, provient une chaleur qui parcourt tout son être et qui la remplit d’énergie. Toute sa peau semble érotisée ; elle sursaute de plaisir quand les mains reviennent effleurer ses épaules et descendent caresser ses bras. Après avoir glissé sur ses mains à elle, Gaspard remonte le long de ses flancs jusqu’à ses seins dont il caresse les côtés. Sous le contact, ils durcissent brusquement et se tendent vers le ciel. Dominée par la volonté de Gaspard, Clémence ne bouge plus, elle flotte, elle dérive sur un océan de sensations. Elle se laisse faire, vit pleinement chaque instant sans avoir rien à espérer d’autre. Elle est heureuse !


Tendrement Gaspard câline cette magnifique poitrine, puis il se penche pour, du bout de la langue, venir titiller les mamelons. L’intensité de la sensation est telle que Clémence se met à geindre doucement : elle s’envole, elle plane. Ce n’est pas un orgasme violent, celui qui tord les tripes et qu’elle attend aussi ; non, c’est doux, délicat, délicieux, du bonheur à l’état pur.


Plongée dans cet état, l’enchaînement de tous les plaisirs qu’elle a ressentis ensuite lui semblera bien nébuleux. Quelques images, cependant, resteront gravées dans sa mémoire : les pointes de la longue moustache venant balayer son ventre et ses cuisses en lui donnant des frissons incoercibles, la langue de Gaspard sur son clitoris l’entraînant au-delà du ciel, dans cet espace où le corps n’est plus que volupté violente et plaisir délirant. Finalement, et par-dessus tout, ce sentiment de plénitude, cette impression d’être enfin complète quand Gaspard l’a pénétrée. L’orgasme qui l’a prise longuement, résonne encore dans tout son corps.



—oooOooo—



Depuis, Gaspard et Clémence ne se sont plus quittés. Elle l’a suivi quand, après les douze années nécessaires à l’achèvement de son ouvrage, il a quitté Amiens. L’Histoire n’a gardé aucune trace de leurs pérégrinations, mais on peut être sûrs qu’ils ont vécus longtemps, très longtemps. Peut-être vivent-ils encore heureux et cachés dans un coin reculé de la planète…


Du passage de Gaspard à Amiens seule subsiste la statue du prophète Nahum, à l’angle nord du portail central dit « du Beau-Dieu ». Est-ce Gaspard lui-même, ou l’un de ses compagnons imaigiers qui l’a sculptée ? la chronique n’en parle pas. Mais personne ne pourra nier qu’il s’agit bien de Gaspard et de sa moustache !


http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Amiens_cathedral_010.JPG