Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 14092Fiche technique23730 caractères23730
Temps de lecture estimé : 13 mn
16/10/10
corrigé 12/06/21
Résumé:  Au cours d'un camp d'été, une jeune fille découvre comme par enchantement la polyandrie et en fait le panégyrique à son interlocuteur, un libraire anar... Le retour au quotidien est problématique.
Critères:  fhhh jeunes copains vacances pénétratio confession nostalgie -prememois -groupes
Auteur : Harry Hansen  (Un nomade...)            Envoi mini-message
L'Éden perdu

Depuis la rentrée Céline, une lycéenne, faisait souvent étape à la librairie. Me saluant d’un sourire enjoué, elle choisissait quelques ouvrages puis prenait place dans l’un des deux fauteuils de l’arrière boutique. Plus habitué au passage de contemporains qu’à la venue de la jeunesse, j’appréciais cette visiteuse silencieuse qui, passée une heure, rangeait avec précaution ses lectures sur les rayons. Est-ce en raison de la différence d’âge – elle pouvait être l’une de mes petites-filles – ou est-ce parce que j’appréhendais que, sa quête satisfaite, elle ne m’offrit plus sa présence, je ne me risquais pas à lui demander l’objet de ses recherches. Il lui arrivait de m’acheter un livre ou deux, toujours en rapport avec le programme de terminale. Une fin d’après-midi, d’une mine désappointée elle lança :


  • — Je ne trouverai jamais ce que je cherche.

Je lui demandai s’il était indiscret de m’enquérir de sa quête.


  • — Une histoire semblable à celle que je viens de vivre et dont il me faut connaître l’issue.

Sans doute étonnée de mon silence, elle ajouta :


  • — Une aventure singulière lors d’un camp de vacances.

Je répondis que les récits portant sur les camps de vacances étaient nombreux dans l’actualité :


  • — Club méditerranée, évasions dans les pays du Sud, retraites spirituelles ; il y a dix ans, camps à la ferme, camps de scouts, de naturistes, que sais-je encore ?
  • — Bref, des récits d’étés merveilleux où tout se termine au mieux, objecta-t-elle.
  • — J’ai discrètement observé, lui dis-je, que vos lectures portaient volontiers sur le tragique.
  • — Tragique, je ne sais pas, douloureux, imprévu et obsessionnel, assurément.

Sur ces mots, elle quitta l’échoppe. En viendrais-je à lui proposer des récits écrits par des rescapés de camps de concentration ?



Journée de pluie de novembre à ne pas mettre le nez dehors. Survint Céline qui, avant de parler, m’interrogea longuement du regard.



Après que j’eus fermé le magasin, nous nous installâmes au fond de la boutique. Une lampe à pied éclairait le visage de Céline, je restai dans la pénombre.



Considérant que nous étions plus nombreux que nécessaire, il indiqua au Père Berland qu’une petite chapelle située en altitude, à trois heures de marche, au sommet d’un chemin de croix, avait un urgent besoin de notre diligence. Cinq garçons, Arlette et moi, nous nous sommes portés volontaires. De bonne heure le lendemain, accompagnés de l’ecclésiastique et d’un berger guidant deux ânes chargés de notre ravitaillement ainsi que des outils, nous avons rejoint un site grandiose. Située au bas d’un pâturage, en amont d’une forêt de mélèzes, la chapelle avait perdu son toit et les murs se délitaient, la charpente les maintenant s’affaissant. Notre tâche consistait à désassembler les pierres des murs et les numéroter pour permettre une reconstruction ultérieure.


J’observais l’apparition d’un sourire pendant la description de l’emploi de son été.



Un bref instant, j’hésitai. Mais qu’avais-je à dissimuler ? Domptant ma pudeur, je bravai un jet froid qui me transperça. Je grelottai et tentai en vain de résister à cette onde boréale en me bouchonnant avec énergie. Étourdie et transie, j’eus l’impression de me défaire d’une partie de mon être alors qu’une jouissance physique, associée au détachement de ma raison, m’emporta. Combien de temps restai-je immobile, tétanisée, je ne saurais le préciser.


S’avisant de mon visage qui s’embrumait, de l’espèce d’hébétude qui m’avait saisie, Antoine m’arracha des flots et m’entoura de mon carré-éponge et, en sculptant délicatement mes formes, me frictionna avec ardeur. Une douce chaleur parcourut mon corps, comme jamais auparavant, et obscurcit ma conscience. L’envie me prit de me blottir contre lui. Entre cette impression d’un fol bien-être et le moment où, étendue sur l’herbe, je ressentis l’étreinte d’Antoine - mon sauveur - je ne garde pas de souvenir précis. Mon corps sut mystérieusement ouvrir son jardin secret pour accueillir une lance d’amour. Trop empressé, Antoine fit rapidement son "affaire".


Mentalement anesthésiée mais parfaitement apaisée, j’acceptai l’hommage de chacun. Dolente, les cuisses entrouvertes, je fis signe à Philippe d’accomplir son œuvre d’homme. Il me besogna laborieusement sans réellement éveiller mes sens encore endormis. Fut-ce la vue d’une verge fine et longue, fièrement dressée, ou le regard quémandeur d’Éric qui exprimèrent son besoin de m’honorer à son tour ? Il m’interrogea du regard pour savoir si, à lui aussi, je permis d’être admis dans ma chatte. Avec douceur, il se glissa dans mon fourreau qui accueillit, non plus une navette, mais un bel archet. Fiché en moi, il caressa mes seins, pourlécha mes aréoles, offrit à mes lèvres des baisers enfiévrés et chuchota :



La fantaisie mise dans sa découverte du corps de la femme, sa recherche de mon assentiment, ses rires joyeux et la délicatesse dans son exploration de mon intimité débondèrent mon sexe qui sut accompagner ses cavalcades. Nous nous offrîmes l’un l’autre un majestueux orgasme. Revenus tous deux à terre, Éric me suggéra :



Ni ma tête ni mon cœur ni mon sexe ne se faisaient une fête de reprendre une partie de jambes en l’air mais que pouvais-je faire d’autre sinon d’y consentir ? Tout occupé à manier son mandrin, Serge ne remarqua pas mon indifférence et, hilare, se retira de ma chounette. Jacques, le plus maigrelet et timide des cinq compagnons, était bien membré ; ses coups de boutoir résonnèrent bruyamment et me valurent des jaillissements d’un plaisir fait de douleurs indolores et d’intenses éclairs jouissifs, partagés m’a-t-il semblé.


Ces passes terminées, allongée sur l’herbe, nimbée par les seuls rayons d’un soleil couchant, je me sentis rompue. J’avais été piégée par ce côté vif et immédiat de l’acte sexuel qui m’étourdit ; je flottai dans un autre monde. Survint Éric, tout souriant, qui m’aida à me remettre d’aplomb ; il toiletta mon entrejambe englué de foutre et planta un petit bouquet de pâquerettes dans mon sexe.



Il s’étendit à mon côté, la tête contre mon sein et guida ma main sur son diablotin qui, incontinent, se raffermit.


Ayant endossé une longue chemise de coton je fis quelques pas, laissant les garçons préparer le dîner. Une atmosphère de bonhomie factice camouflait la gêne des garçons. Nous restâmes longtemps silencieux et ce fut Philippe qui entreprit de dissiper le malaise :



Je me devais de répondre à ce mea culpa un peu théâtral. Mes compagnons avaient assurément manqué de la courtoisie la plus élémentaire mais, ayant manqué moi aussi de retenue, je ne pouvais leur reprocher leur effronterie. Comment leur dire ce que leur exploit avait éveillé en moi ? Un rien étonnée qu’on ait pu me soupçonner d’être une Marie couche-toi-là, je répondis :



Ce fut à l’attentionné Éric que je tendis la main. Il faisait nuit lorsque la cinquième gambade s’acheva. J’eus le sentiment d’avoir gravi des montagnes, ébranlé la virilité des garçons en m’imposant comme ordonnatrice de nos ébats, connu des jouissances nouvelles et de m’être libérée de la chape de petite provinciale bien sage.



Je restai silencieux.



En raison de nos choix de liberté, nous nous défendions de la tentation amoureuse. C’est d’une absence d’inclination sincère et spontanée dont souffrait Philippe. Je lui appris que la tendresse, si momentanée soit-elle, pouvait suppléer les élans du cœur et qu’elle avait sa place dans notre camaraderie vagabonde.


Avec Éric, le lutin, nous jouions des sonates. Avec une joie partagée, nous nous accordions sur le ton, le rythme et l’interprétation et parvenions à un dialogue harmonieux. Son archet éveillait en moi les plus exquises voluptés et mon violon – notre caisse de résonance – délectait les sens de mon petit archer ! Notre petite musique avait besoin d’intimité, aussi quittions-nous souvent les alentours de la bergerie pour nous étendre, à la lisière de la forêt, sur un carré de mousse.



Les garçons, félicités de l’ouvrage accompli, reçurent les instructions du travail à venir. Incommodée par le regard de l’abbé pointant obstinément le haut de ma tenue, je réalisai que les pointes de mes seins bombaient outrageusement sous ma marinière. L’assistante semblait, elle, fascinée par la boursouflure déformant le bermuda d’Éric. Prétextant d’un document à quérir, je gagnai la bergerie pour revêtir un caraco.



Me prenant à part, l’abbé me demanda si les garçons me respectaient.



Par devers moi, je riais en songeant que c’était Céline qui invitait ses compagnons à se coucher à ses côtés. L’inquisition n’était pas terminée.



Mes propos ne cachaient pas mon animosité ; j’étais mal, mon corps tout endolori, victime de la rupture de la montée de la sève qui consacre l’union des corps. Ce curé cauteleux m’avait infligé le blues. Deux jours durant, mon sexe resta indifférent, sourd et muet. Cette panne n’inquiéta pas que moi. Ce fut Antoine qui, sous un soleil dardant, me dévêtit et me poussa sous l’onde glaciale de la douche. Comme au premier jour, une partie de moi-même se détacha et, m’abandonnant à cette thérapeutique violente, offrande de la nature, je me délestai de la paralysie entravant ma sensualité. L’apprenti Esculapen Antoine, m’en donna, sans plus attendre, la preuve après avoir consenti à une complaisante gamahuche sur ma petite clochette. À nouveau fille d’Aphrodite, je réclamai mon dû à chacun.


Je vous dévoile ma vie, peut-être aussi mes turpitudes, et vous restez semblable à un sphinx. En plus de mon incapacité à éprouver de la joie, vous m’exposez à l’angoisse.


J’étais perplexe face à ce déballage. S’agissait-il d’une confession sincère ou d’une fanfaronnade visant à m’offusquer ? Je sentais, toutefois, mon interlocutrice torturée ; j’avais à l’apaiser.


  • — Vous m’avez fait remarquer que je ne vous comprenais pas, c’est vrai. Dans vos manières je vois un paradoxe. D’une part vous préserviez notre patrimoine culturel, de l’autre vous vilipendiez notre patrimoine social, humain. En effet, vos amis et vous avez travaillé à reconstruire une chapelle à l’identique, à vous aligner sur les codes du passé, alors que dans vos relations interpersonnelles vous avez cru abolir toutes les limites, ce qui, je l’affirme, vous a conduit à un délire sexuel. Conformisme d’une part et déni des normes de l’autre.



J’espérais que vous m’indiqueriez un récit décrivant la trajectoire d’une femme qui sut fuir sa gourmandise du sexe. Sur vos rayons je n’ai trouvé qu’un ouvrage rappelant que les grandes prêtresses et les prostituées sacrées finissaient emmurées, un sort guère plaisant. Alors, vous qui êtes entiché de culture classique, faites-moi part d’un mot rassurant afin que nous nous quittions en bons amis.




XXX