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n° 14095Fiche technique8746 caractères8746
Temps de lecture estimé : 6 mn
16/10/10
corrigé 12/06/21
Résumé:  Une rencontre entre collègues.
Critères:  fh collègues travail école amour -amourcach
Auteur : Philominicuir            Envoi mini-message

Collection : Confessions
Rencontres collègues

Les aventures de Minon, à Cochons-sur-Marne



Il faisait beau et clair en cette journée d’automne du mardi 20 octobre 2010 sur Cochons-sur-Marne (ainsi que plaisamment Léon Bloy nommait la cité de L. Située à une trentaine de kilomètres à l’est de la capitale où il séjourna durant quatre ans, de 1900 à 1904). Les tâches auxquelles je ne pouvais me soustraire s’en trouvaient ainsi quelque peu allégées. Et c’est d’humeur légère que le numéro 26 de l’autobus me conduisit vers le lycée autrefois appelé V. D. Et, désormais, plus correctement nommé Léon Bloy en souvenir du grand écrivain chrétien qui sut immortaliser la cité où Jeanne d’Arc en personne, procéda au miracle de la résurrection d’un enfant mort depuis trois jours, en 1430.


L’air était doux, les collègues sympathiques comme à l’ordinaire. Mes cours sur Homère et Beckett étaient là, tout prêt à être enseignés à une jeunesse avide de savoirs.


Après deux belles heures passées à enseigner Choderlos de Laclos à ma classe favorite, la sonnerie annonçant le quart d’heure de récréation retentit. Je m’apprêtai à sortir, afin de boire un café et fumer une cigarette bien méritée, lorsqu’un collègue (F.) qui officiait dans la salle face à celle que j’occupais fit irruption, ferma la porte à clef, me prit violemment dans ses bras sans que j’eus le temps de protester. Alors que je cédais à ses baisers torrides, d’une main experte, il déboutonna mon jean et introduisit ses doigts entre mes cuisses. Je sentis un jet chaud d’humeurs inonder ma petite culotte qu’il malaxait. Ma main s’aperçut vite qu’il bandait « comme un âne » – pour employer un cliché. La deuxième sonnerie retentit, plus que cinq minutes avant de me remettre à Homère et à mes élèves hellénistes. Il disparut. Non sans m’avoir remis deux feuillets de papier griffonnés. J’étais bouleversée. Je filais dans la salle des professeurs afin d’ingurgiter un café et de m’apaiser. Je sentais mon sexe couler encore. Cela ne se voyait certes pas, mais je croyais que tout le monde s’apercevait de ce qui se jouait sous mes sages atours.


Homère, ce jour-là, dut subir quelques déconvenues ! J’avais la tête ailleurs (comme on dit si bien, si mal). J’avais hâte de lire ses mots, un peu honte de ce qui s’était passé, de m’être laissée faire comme une adolescente alors qu’en même temps les désirs m’envahissaient.

Je livre le contenu de sa lettre dont je ne pris connaissance que plus tard :


Chère collègue,


Si aux jeux du désir les dés sont pipés et si les non dupes errent, eh bien permets-moi d’être cet errant, cet éternel berné.


Il y a fort longtemps déjà que je t’ai remarquée (autrement que comme une des plus intelligentes et intéressantes collègues). Il y a fort longtemps que j’ai pris la résolution de commettre ce quasi « attentat » auquel je ne sais comment tu réagiras. J’ai fou désir de ce corps que tu sembles aimer à ne pas exposer. Mais beaucoup de signes te trahissent : ta bouche, la présence sensible, gorgée de sève de tout ton être, tes rires sonores si délicieux, si vivants… Tu n’es certes pas comme cette collègue de maths (Y.) qui l’autre jour, lors d’une réunion, sut, sans le savoir, en toute « innocence » – peut-être – livrer aux regards sa charmante petite culotte blanche qui lui collait au sexe. Durant cette courte scène (« Le temps d’un sein nu entre deux chemises » — comme dit l’autre) je fus pris d’une érection (eh oui, les collègues ont parfois « la tête ailleurs ») en pensant à toi soudain devenue indécente dans ma rêverie et alors si toi-même.


Je sais que tu n’es pas seulement cette intellectuelle férue de lettres classiques, de vieux grimoires dont tu aimes à souffler la poussière. Je sais d’un savoir éprouvé dans ma chair qu’une vie nocturne, inapaisée, inassouvissable (pour citer ce beau mot qui donne le titre à un roman extraordinaire de Witkiewicz – L’inassouvissement — que tu dois connaître), taraude tes nuits, hante tes journées. Je sais d’un savoir pressenti que tu es capable de t’abandonner aux jeux érotiques les plus passionnés, offrant tes « guenilles » (le mot est de Bataille dans Madame Edwarda) aux caresses, aux regards, à la bouche et au sexe de ceux que tu aimes.


Tu ne liras ces mots qu’après la scène qui se déroulera dans la fulgurance, l’imprévu, la violence. L’échec, les remords… Qu’en résultera-t-il, je ne veux rien anticiper. C’est au présent de mes désirs que je te veux.


F



Que dire après ces mots ? Il n’avait pas tort, il avait si bien vu. Oui, je suis celle-là qui n’ose pas toujours s’avouer ses désirs les plus « nocturnes » (il sait trouver les mots qui vont droit là où ça touche juste, le bougre !). Cette longue journée du 20 octobre 2010 fut professionnellement difficile. Je retournais chez moi où m’attendait mon ami de l’heure, je lui offris mon corps comme jamais jusqu’alors je ne l’avais fait. Il fut surpris de mes ardeurs, en fut presque terrifié, jaloux. Je pensais à l’autre, à la scène vécue en milieu de matinée. Je pensais à ses mots sous lesquels je devinais des abîmes de sensualité.


Les mois passèrent. Nous échangeâmes quantité de mails de plus en plus fous. Lorsque nous nous croisions, il demeurait distant, nous bavardions comme si deux vies nous séparaient. Je me brouillais avec mon ami. J’étais seule, désorientée, seule ma tâche et la soif de mes élèves avides de savoirs m’empêchait de sombrer.


Un jour il me demanda (toujours par écrit) de venir au lycée, vêtue autrement que dans ce vieux jean poussiéreux – comme il disait – que je revêtais comme les moines leurs robes de bure. Je cédai comme par automatisme à ses désirs, fouillant et retournant en tous sens ma garde-robe si peu fournie. J’enfilai une robe – aux genoux. Il me déshabilla du regard. Les autres collègues s’amusèrent :



Je me sentis nue, alors que j’étais tout à fait décente. Je pensai à ces mots de Bataille qu’il aimait à citer en se les appliquant : « Je pense comme une fille retire sa robe ».


Je me sentis exposée d’autant qu’entre mes cuisses mes « guenilles » ne cessaient de mouiller ma petite culotte déjà toute trempée. J’avais autant désir de la montrer que j’avais crainte qu’on la voie.


Enfin, nous nous rencontrâmes. Il avait exigé que je porte la jupe la plus courte possible, les seins nus, une petite culotte blanche, des bottines. Je ne pus répondre que très imparfaitement à ses exigences. Je ne suis pas une « putain » (selon un terme dont il aimait m’affubler). Cependant je me comportai en cette « fille publique » qui allait – certes non vénalement ! – se livrer aux assauts d’un quasi inconnu.


Arrivée chez lui, il me banda les yeux et commença ses folles caresses. Nos bouches se dévorèrent comme celles de bêtes affamées qui n’entendent rien d’autre que leur faim, leur soif, impossibles à rassasier, à étancher. Faim qui se nourrit d’elle-même, qui croît au fur et à mesure qu’elle devrait trouver satisfaction. Nos caresses firent de nos corps comme des instruments enregistrant les secousses de la terre. J’avais peur qu’il me déchire la peau afin de se repaître de mes entrailles. Je ne pouvais lui offrir que mes « guenilles ». Il mordit en elles à pleine dents, me faisant crier de douleur et de plaisir. Je sais que si je n’avais pas été contrainte de mettre un terme à ces étreintes nous aurions pu sombrer dans la douleur et les plus violents excès.


Pour satisfaire ses dernières volontés, je dus rentrer chez moi, nue sous cette jupe trop courte. Je mourais de honte, d’envie aussi de rafraîchir mon petit « minon », autre nom pour désigner mon sexe et qu’il avait trouvé – jusqu’où va se fourvoyer l’érudition – chez Béroalde de Verville, dans Le moyen de parvenir, très certainement un des textes les plus obscènes de la prose française. Je serrais tellement fort les jambes que les lèvres de mon « minon » collées l’une à l’autre s’excitèrent au point de me faire jouir.