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Temps de lecture estimé : 31 mn
20/02/11
Résumé:  La vie n'est pas souvent rose mais rien n'est aussi noir qu'on le pense.
Critères:  fhh couleurs extracon fépilée jardin humilié(e) jalousie exhib fellation pénétratio humour -occasion -lieuxpubl
Auteur : Annie-Aime  (Divagations nocturnes et solitaires)      Envoi mini-message
Désir d'enfant

Deux ans qu’on trime pour avoir un bébé et toujours bernique. Paraît que les spermatozoïdes de mon homme sont trop paresseux. On envisage de changer de stratégie mais, jusqu’à nouvel ordre, le rituel en vigueur reste de rigueur : on met le paquet à chaque période d’ovulation.


Rectification : on mettait le paquet. Le passé est de rigueur car désormais Philippe n’a plus la pêche. Il bande mou depuis que le diagnostic est tombé. Je me pose des questions.


Quant aux méthodes de procréation médicalement assistée recommandées par le toubib, mon cher et tendre ne veut pas en entendre parler.


Est-il besoin d’ajouter que l’ambiance chez nous a quelque peu fraîchi, malgré les chaleurs de l’été. Et avec ça que mon homme s’absente plus qu’il ne devrait, de quoi attiser mes soupçons. Je deviens folle et foutrement jalouse car l’hypothèse d’une rivale fraye du chemin dans les lacis de mon cerveau mais je suis à mille lieues d’imaginer qu’il s’est embringué avec un charlatan.



Invoquer les pouvoirs occultes n’est pas vraiment dans mes habitudes mais je n’en suis pas moins superstitieuse. Je ne passe jamais sous une échelle ; je me signe toujours plusieurs fois dès lors qu’un chat noir a coupé ma route ; je lis mon horoscope à peu près tous les jours et fais provision de grattages si les conjonctions astrales me sont favorables. Autant dire que ma logique ne plairait pas à Descartes.


Ce brave homme serait même horrifié s’il découvrait le salmigondis qu’est devenue ma foi. Pour être sincère, je ne sais plus en quoi je crois. Peut-être en un grand marionnettiste mystérieux plutôt sourd et presque aveugle que je n’ose appeler Dieu, car je crains que ma religion ne soit plus très conforme au sens des sacrements que j’ai reçus. Peut-être aussi ne suis-je qu’une idiote trop crédule, prête à croire à tout et n’importe quoi.


Quoi qu’il en soit et quand bien même la jobardise de mon conjoint me laisserait-elle dubitative au regard de mon moi rationnel – ne me croyez-pas totalement dénuée de jugeote – j’ai malgré tout le sentiment que je dois accepter d’aller voir son exorciste car si je refusais, je m’en voudrais d’avoir laissé passer une chance, si minime soit-elle.


Il reste néanmoins que mes scrupules sont tenaces. Je comprends bien sûr que l’étape de la copulation est une phase décisive et de ce point de vue, je n’ai rien à dire. Ce qui me chagrine, c’est de faire ça en présence d’inconnus et dans des conditions de discrétion plutôt précaires.


Le comble : réponse urgente SVP. Philippe n’a pas osé me parler avant, il s’y est résolu quand il n’avait plus d’autre choix. Du coup, je suis sommée de dire oui ou non, séance tenante sans même avoir le temps de me faire à l’idée ; paraît qu’on nous attend, pour honorer la pleine lune.



Cet argument a chez moi un retentissement singulier car dans mon esprit, les nuits de lune ronde sont magiques entre toutes. Ce sont celles du loup-garou, celles de tous les mystères. Je vois un heureux présage au fait que mon cycle ovarien, présentement en pleine phase féconde, s’accoquine aussi parfaitement avec le cycle lunaire. Cette coïncidence m’apparaît tout à fait prometteuse.


Ai-je encore des hésitations ? Pas vraiment. Du reste, comment tergiverser alors que je sais que mon compagnon a déjà versé une somme rondelette. On ne peut plus reculer sinon les arrhes seraient perdues. Je me rends donc à ses raisons, sollicitant toutefois un petit délai, le temps de me faire une beauté parce que j’aime autant paraître à mon avantage, non pas tant pour son sorcier dont je n’ai rien à cirer, que pour honorer les forces obscures auxquelles on va demander de fertiliser mon ventre.


D’aucuns pourraient me chercher noise pour ce raccourci allégrement trompeur étant donné que c’est mon Chéri qui est stérile et pas moi mais outre que mon larron ne veut toujours pas l’admettre, je crois que le Très-Haut ne s’embarrasse pas de ce genre de subtilités et qu’il saura très bien trouver le moyen de m’engrosser si telle est sa volonté.



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Pour des raisons de confidentialité je ne souhaite pas donner plus de détails qu’il n’est nécessaire mais pour ceux qui voudraient malgré tout tenter de nous localiser, je sème quelques indices : disons que nous habitons sur une commune de la proche banlieue parisienne, un petit appartement, situé au troisième étage d’un immeuble adossé à un immense cimetière, non loin des voies SNCF.


Certes, l’environnement pourrait être plus agréable, aussi cherchons-nous un logement plus spacieux et mieux situé, afin d’accueillir dans de bonnes conditions notre future héritière – je préférerais en effet avoir une fille, les garçons sont trop cons.



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Le lieu de rendez-vous est à deux pâtés de maison, à l’orée d’un minuscule parc où je vais parfois faire du footing. Nous y allons à pied. Il fait clair malgré l’heure tardive ; la soirée est chaude et calme ; la circulation est fluide ; les piétons sont rares. C’est la saison estivale, les aoûtiens ont déserté nos rues ; ils sont en vacance.


Philippe rabâche sa leçon tout en pressant le pas ; il lui paraît important de montrer de la déférence envers le Maître. À commencer bien sûr par la ponctualité, mais de ce point de vue on est mal partis, par ma faute, semble-t-il.


Moi ? J’écoute distraitement, le cœur étreint par l’appréhension. L’espoir est là aussi, ainsi qu’une certaine exaltation ; l’aventure distille du piment.


Le marabout et sa troupe nous attendent à l’entrée du parc. Je reconnais le Chef à son air martial, c’est un grand Noir efflanqué, visage émacié, barbichette en pointe. Il est vêtu d’une longue tunique blanche en coton ce me semble, portée sur un pantalon genre pyjama, taillé dans le même tissu. Ses yeux perçants dardent des éclairs depuis le fond de leur orbite. Il semble irrité et coupe court aux présentations.



Il parle d’une voix pointue en agitant les mains ; il me regarde sans paraître me voir, comme si j’étais transparente, comme si je n’existais pas. Bien la peine que je me sois mise en frais !



Je ne sais plus très bien où j’en suis après ces simagrées.



Une pensée perfide flashe, je me demande si les collègues paient comme nous l’obole de trois cents euros, ce qui ferait au total un sacré rapport pour la séance. À moins qu’ils ne profitent de la session gratos ce qui me semble hautement probable.


Dans le même temps, les assistants du Maître, une jeune femme très belle et un jeune homme à l’allure athlétique, se détachent du groupe. Ils m’entraînent à leur suite ; moi et les autres, nous pénétrons dans le parc. Je regrette d’avoir opté pour des escarpins à talons, les aiguilles s’enfoncent dans le sable de l’allée, rendant la marche difficile.


Nous stoppons tous face à un banc posé en bordure d’une aire gazonnée. L’endroit est désert, presque silencieux. Les bruits de la circulation, au demeurant clairsemée, sont filtrés par le mur de la végétation alentour. La pénombre est un peu plus épaisse mais malgré tout on voit distinctement ; la clarté lunaire nous baigne d’une lumière irréelle, tout à fait de circonstance. Le Maître corne à nouveau, de sa voix nasillarde.



J’ai beau savoir que je dois en passer par là, je n’en ai pas moins des hésitations. En revanche, Philippe s’exécute sans réticence, de même que Zeinabou et Ameth. Je constate en outre avec surprise que les deux assistants font de même. Le maître quant à lui, attend, imperturbable.


Je suis la dernière. Le banc est recouvert de nos frusques. Ma gêne a disparu. Je lorgne les autres. La jeune assistante a un corps de gazelle, la gambette interminable et des petits seins haut-perchés. En revanche Zeinabou est faite pour porter la marmaille, la cuisse épaisse et la hanche large, le cul rebondi et la mamelle lourde.


J’imagine qu’en retour, elles me détaillent pareillement. Bof, j’ai deux ou trois kilos en trop mais pas question de régime en ce moment puisque je veux concevoir. J’essaie quand même de garder la ligne. Il y a aussi que j’ai un peu honte de ma chatte épilée, je ne peux me défaire de l’idée que cela dénonce ce goût pervers que j’éprouve pour les choses du sexe.


Les hommes alignent les barrettes de chocolat, ils sont beaux. Le mien n’a pas à rougir et pas grand-chose à envier aux deux autres si ce n’est question zizi. Tous pendouillent mais même ainsi, au repos, celui d’Ameth est impressionnant tandis que celui de mon homme paraît minuscule. Ça m’agace.


Le jeune assistant déroule des tapis, genre tapis de prière. Je le regarde faire. Les rayons de lune auréolent ses fesses bien rondes. La lumière joue sur les muscles de son dos ; ils se meuvent et roulent, pétant la santé, irradiant la force.


Probable que le jeune homme pressent qu’il est l’objet de mon attention car il se retourne soudain et piège mon regard. Il sourit, un sourire avenant, sympathique. Je pique un fard, baisse les yeux, lesquels tombent sur son sexe à demi-bandé qu’il me semble voir frémir. Une onde de chaleur inonde mon ventre.


La gazelle m’invite à m’allonger sur les tapis, dos au sol. Zeinabou fait de même, s’installant à mon côté, presqu’à me toucher. Elle prend ma main et la garde. C’est alors et alors seulement que le Maître sort de sa réserve. Il s’agenouille, genoux butant sur ma hanche, puis il entame une gesticulation genre imposition des mains, tantôt au-dessus de mon corps tantôt sur celui de ma comparse en mal d’enfant. C’est assez long. J’entends le mage psalmodier. Je n’ose pas bouger.


À un moment donné, sa pantomime se fait plus directe, il glisse sur mes cuisses, flatte mon pubis glabre, caresse mon ventre, effleure mes tétons. Ensuite, il fait de même avec Zeinabou. Puis il recommence et recommence encore, toujours psalmodiant ses litanies lancinantes. J’ai la curieuse sensation de flotter, ce n’est pas désagréable. Chez moi les frémissements du désir se font plus perceptibles. Je ne vois plus Zeinabou ni les autres, concentrée que je suis, à l’écoute de mon corps ou perdue dans mes rêveries, les yeux clos ou bien rivés sur ce relief qui trahit le désir du Maître. De temps en temps des interrogations naissent qui se résument toutes par une question simple : ai-je envie de baiser avec ce type ? Mes railleries mentales tiennent lieu de réponse mais en mon for intérieur, je sais qu’à cet instant je suis prête à me laisser embrocher par le premier venu.


Cela ne sera pas. Le Maître se redresse et nous invite à en faire autant. La gazelle distribue des pots d’un onguent gras et m’aide à m’oindre le corps. Seul mon visage est épargné. Il s’agit, dit-elle, d’une préparation à base de beurre de Karité dont l’effet est excellent pour la peau. Y-a-t-il d’autres effets ? Elle rit de ma question sans répondre.


Une odeur de rance, entêtante, titille mes narines ; une sensation de chaleur se répand partout sur mon corps et particulièrement au niveau des muqueuses, sur ma vulve et dans ma fente que la gazelle a également badigeonnée.


Pendant ce temps l’Adonis a roulé et rangé les tapis. Il s’enduit à son tour de cette mixture odorante et épicée. Zeinabou a fait de même ; nos hommes aussi. Il n’y a que le Maître pour rester en dehors de la marée huileuse. Mon désir est quelque peu retombé, mes pensées font dans le prosaïque. Je suis inquiète pour le retour et pour ma robe : comment ferai-je pour ne pas la maculer ? Je la vois déjà sacrifiée, c’est ma plus belle…


La phase accouplement est imminente, je le sais, mais il nous faut encore souffrir la pose des amulettes. Au préalable, le Maître va les sanctifier et pour ce faire il se lance dans une série d’incantations scandées à haute voix, en arabe j’imagine. De temps à autre, il lève les bras pour en appeler au ciel, brandissant un chapelet de gris-gris. Ce sont des petits sachets en peau, d’une couleur brun foncé, cousus sur trois côtés, et dans lesquels, j’apprendrai plus tard, sont logés des sourates du coran écrites sur un papier extrêmement mince, plié et replié pour former un tout petit carré.


La bénédiction terminée, le Maître confie les amulettes aux deux assistants. Ceux-ci vont se charger, qui d’en parer les couilles des messieurs, qui d’en farcir les vagins des dames. Les doigts agiles de la gazelle pénètrent le mien et le fourrent au plus profond. Me voilà investie d’une grâce cabalistique ; deux minces lanières de cuir s’échappent de ma vulve et pendent entre mes cuisses.


Reste encore une ultime étape : la sélection. Ne copulent que les plus méritants. Deux reproductrices, trois géniteurs, la gazelle et le Maître arbitrent la bataille. S’ensuit un ballet pas très convaincant, simulacre de compétition ; le jeune Apollon m’ignore, préférant rivaliser, amicalement s’entend, avec son collègue en négritude. J’en conçois du dépit.


Les deux Noirs miment la lutte, papillonnent, s’agacent, l’un l’autre autant qu’avec la femelle dont ils briguent la faveur. Ils jouent ; ils bandent ; deux chibres presque aussi orgueilleux l’un que l’autre. Implacable fascination ! Mon regard est rivé sur les phallus.


Faute de concurrent, Philippe me conquiert sans gloire. Je m’abandonne. Les préliminaires sont brefs, le gazon est frais. Nos corps huilés glissent l’un sur l’autre, parodiant une lutte cocasse.


La verge de Philippe remplace les amulettes qu’il a retirées. Il besogne, dérapant parfois, cherchant un nouvel appui. Pour ma part, j’ai beau faire, je ne parviens pas à me concentrer comme je devrais. Je reste distraite, moins soucieuse de mon devoir que de mes voisins. Ils viennent de pivoter, Zeinabou chevauche Ameth ; l’énorme queue dressée disparaît dans son ventre. Un pincement de jalousie agace mes tripes. Je baisse les paupières et tente de focaliser mon attention sur mon affaire. En vain, des images de phallus gigantesques s’impriment sur ma rétine, envers et contre tout.


Philippe œuvre toujours, assez mollement ; il s’épuise ; lui aussi ne parvient pas à se concentrer. Il a niché son visage dans le creux de mon cou entre l’oreille et l’omoplate, réorientant sans le vouloir mon champ de vision. Je ne vois plus Ameth ni Zeinabou mais en revanche j’aperçois l’Apollon. Il se rince, puisant l’eau, à l’aide de ses paumes assemblées en godet, dans un seau qu’il a récupéré je ne sais où. Je présume qu’il utilise un shampoing dégraissant, au vu des traces de mousse que j’aperçois ici et là sur son corps. Il est posté au bord de l’allée et me fait face, à trois ou quatre mètres de distance tout au plus, je vois sa queue qui pendouille, encore mi-bandée. Elle balance à chacun de ses mouvements… Impossible de m’en abstraire, cela m’obsède… Même ainsi, elle est impressionnante.



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Ameth et Zeinabou ont conclu bruyamment. Nous non, Philippe a joui… Une jouissance triste, sans effusion. Pour ma part, je n’ai pas eu d’orgasme. Pas grave !



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Le jeune assistant a renouvelé l’eau plusieurs fois. Comme les autres, je me suis nettoyée mais le résultat est loin d’être parfait, le risque est grand de tacher ma robe. J’ai des réticences à la réenfiler et attends en sous-vêtements.


Zeinabou et la gazelle sont également sensibles au problème sauf qu’elles ont été prévoyantes. Elles ont chacune prévu un pagne dans lequel elles se sont enroulées. Pour finir, Ameth m’apporte la solution, il a déniché une combinaison dans le coffre de son véhicule garé à peu de distance.


On ne peut pas dire que la tenue soit seyante, je fais dans le genre bouffon, mais ne dit-on pas : « à la guerre comme à la guerre » et tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes si la fermeture ne se montrait pas récalcitrante.



Je lui abandonne la place. Il bricole et tripatouille un instant.



De prime abord, la chose me paraît anodine mais, l’attouchement persistant, je commence à soupçonner des intentions pas du tout innocentes.



Je ne suis pas le moins du monde offusquée ; plutôt flattée, enchantée qu’enfin un homme autre que le mien me prête attention ; je désespérais.



À décharge, la faute est vénielle. Philippe n’a rien vu, rien compris. Ce n’est pas le cas de Zeinabou qui rapplique en vociférant la colère dans une langue qui m’est totalement étrangère. J’écope d’une torgnole que je n’ai pas même vu venir. Les hommes nous séparent et on en reste là.


Le retour n’est pas triste. Philippe fait la gueule, moi je joue les taciturnes, en tenue de clown, juchée sur mes talons, l’humiliation en bandoulière, mon sac à la main, ma robe aussi et le plastron grand ouvert sur mes dentelles.


Il n’y a pas un chat en vue mais en irait-il autrement que ce serait pareil, je m’en contrefiche… Je boude en façade et bous en dedans.



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Le lendemain…


La jalousie de Philipe est toujours vivace.



Il parle d’Ameth, de la baffe, de Zeinabou en faveur de laquelle il prend parti. Donc contre moi, le salaud ! Ça me démange de lui vomir des mauvaisetés au visage, de lui faire mal. Il ignore que l’Apollon, dont j’ai perdu le nom, me faisait le même effet, je suis à deux doigts de cracher le morceau…


Plus tard… La colère a passé.


Le soir au lit, le sujet revient subrepticement sur le tapis.



Il ne m’en faut pas plus pour rallumer mon obsession. Silence ! On tourne. Je me fabrique un fantasme idoine. Devinez qui je recrute ? Les deux sont au casting. Mes hallucinations sont plus vraies que nature et bien plus dociles. Terrible ! Je frise la psychose délirante. Suis-je la seule ? Faut voir, il y a des lustres que Philippe ne m’a pas si bien honorée.



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Les jours suivants…


La routine, les habitudes, rien de folichon. Philippe ne parle plus de l’aventure, moi non plus mais j’y pense parfois. Ma rage s’estompe, la gifle se fait moins cuisante. En revanche, dans mon souvenir les phallus gardent une belle arrogance.


Ces derniers temps, je dirige plus volontiers mes footings vers le parc. Une fois j’ai aperçu Zeinabou… De loin. J’ai manœuvré pour la rejoindre ; elle a fui.


J’y suis encore revenue hier matin, très tôt. Je me suis assise sur ce banc près duquel nous étions. Le parc était désert, je n’ai pas résisté, j’ai glissé la main dans mon short puis dans ma culotte, la tête emplie de ces trucs invraisemblables qui m’ont impressionnée. Un employé municipal m’a surprise. Honte sur moi, je me suis sauvée comme une voleuse.



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Quinze jours plus tard…


J’ai eu mes règles. L’exorcisme a fait long feu ; retour à la case départ.



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Début septembre…



J’ai l’intuition qu’il me faut partager son indignation.



Pendant une fraction de seconde, je caresse l’illusion de revoir l’Apollon ou bien Ameth. Ce n’est pas moi ; c’est plus fort que moi.



Il a raison, je chasse mes fantômes.




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Mi-septembre ; toujours la routine….


La météo annonce une journée radieuse. Philippe vient de partir au boulot. Cette semaine il est en poste du matin. Il est encore très tôt, le jour se lève à peine. Moi, je ne prends mon travail que beaucoup plus tard. Je feignasse. La pensée du repassage qui s’entasse me sort du lit.


Il arrive parfois que mes bonnes résolutions se dissolvent dans le café. C’est le cas ; le bourrelet sur mon ventre prend le pas ; j’arbitre pour un jogging. Une très bonne heure, peut-être la meilleure, pour faire un footing.


Je ne le sais pas encore mais le grand marionnettiste a remis mon destin sur le métier. Il tire les ficelles en douce. Il a pris les traits de la propriétaire ; celle-ci, veuve d’un Général, occupe un appartement au premier étage, en compagnie d’une vieille domestique.



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Germaine guettait sans aucun doute, elle m’alpague dans l’escalier.



Elle m’introduit chez Madame.



Je sais de quoi il retourne, Germaine m’a mise au parfum.



Comment pourrais-je refuser de balader sa Rita ? Mais mon footing est foutu. Puis-je lui expliquer ? Je devrais, ce n’est pas la première fois qu’elle me fait le coup.


La Rita est une chienne bâtarde vaguement mâtinée de berger allemand.


Les garces ! Je parle des deux biques hypocrites, elles ont omis de me signaler que la chienne avait ses chaleurs. Je vitupère tout mon saoul mais cela ne change rien au fait.


La garce ! Je parle du clébard. Elle tire sur sa laisse et lorgne du côté du mâle qui nous colle obstinément depuis que nous avons franchi la porte de l’immeuble.


Il me revient le souvenir d’une cohorte de chiens semblablement appâtés qui faisait le siège chez ma tante. L’un d’eux avait même tenté de se glisser dans la chatière. Il y était resté piégé. De fil en aiguille naît l’idée, je crois avoir trouvé le moyen de semer l’importun qui nous colle. Il me souvient avoir aperçu dans une venelle proche, un petit portillon permettant l’accès au cimetière. Je m’y rends. Par chance, l’ouverture n’est pas cadenassée. Nous entrons, le corniaud reste à l’extérieur.


Autant le dire de suite, mon contentement ne dure pas ; mon stratagème a fait long feu ; le coquin a trouvé une autre entrée et retrouvé nos traces. La chienne tire à nouveau sur sa laisse, elle n’a d’yeux que pour son bâtard, lequel lui fait des mamours et renifle sa moule, tout en surveillant mes réactions du coin de l’œil. Il ne s’y fie pas et reste sur ses gardes.


Maintenant, l’idée du cimetière m’apparaît minable et pas seulement parce qu’elle a foiré. Il me gêne de parcourir les allées en short et brassière, c’est loin d’être une tenue appropriée à l’endroit. Sans compter que je ne suis pas même foutue de trouver mon chemin dans cet univers minéral. Je suis perdue ; je ne m’y retrouve pas. Nous tournons en rond. Pas un chat pour me renseigner, il est encore trop tôt.


Je me précipite sur le premier panneau d’orientation que j’aperçois, il est érigé tout à côté des poubelles. J’étudie, tente de me repérer. Distraction impardonnable, la chienne m’échappe. Elle file d’une traite, suivie de son bâtard. Ils ne vont pas loin et restent piégés dans une sorte d’enclos niché derrière les poubelles.


Le cul de sac a un relief en pente, versant vers la voie ferrée, dont l’accès est cependant interdit par une clôture grillagée. Le sol est gazonné ; deux arbres vénérables trônent à mi-pente, délimitant un méplat sur lequel une œuvre décorative a été édifiée. C’est une construction, bâtie façon pierres sèches et selon des formes géométriques tarabiscotées dont s’échappe un prolongement linéaire de faible hauteur telle une queue, près de laquelle les deux chiens batifolent.


Ces derniers s’enfuient un peu plus loin quand j’approche et menacent de me déborder par les ailes dès lors que je les accule au fond de la nasse. Les cabots sont bien plus agiles que je ne suis ; à l’évidence, je ne parviendrai pas à les contenir si je m’obstine.


Mes tentatives vocales pour me concilier la satanée bête n’ont pas plus de succès. Elles se perdent dans le vacarme des rames. Ça défile presque en continu. De toute façon, il est plus que probable que la chienne ne m’aurait pas écoutée, même sans ce tintamarre assourdissant. Sauf à risquer de la perdre, je dois me résoudre à la laisser faire son affaire.


Laissons donc faire la nature ! Quel est la durée de gestation chez la chienne ? Je n’en sais fichtre rien. J’imagine que le moment venu, la Veuve du Général tirera un nez pas possible. Qu’y puis-je ? Qu’elle se démerde avec la progéniture. Mes réflexions ne sont pas tendres à l’égard de la vieille.


J’ai pris position, adossée au monument, reprenant souffle tout en guettant d’un œil la bougresse et l’autre corniaud. Une mélancolie insidieuse m’envahit presqu’à mon insu : les chiots, les peluches, les bébés, mon bébé, je m’apitoie, je m’attendris. Mon humeur vire au beau ; des pensées coquines me traversent l’esprit, je suis portée à l’indulgence : qu’elle en profite donc et se paye du bon temps ; je parle de la chienne, bien sûr.


Est-ce un phénomène de mimétisme ? Je sens naître une flammèche de désir, rien de décisif, juste l’envie d’avoir envie. L’aspiration est du reste plus cérébrale que physique. J’éprouve le besoin de me toucher pour lui donner du corps et me donner du plaisir. Ma main prend machinalement le chemin du foyer convoité.


Pendant ce temps le bâtard a enfin réussi à se positionner, il chevauche sa dulcinée et danse la gigue du cul de manière frénétique sans se soucier des rames qui défilent à faible allure, source d’un boucan pas possible.


On aperçoit les passagers derrière les vitres des voitures. Ils lisent ou rêvassent le nez en l’air, aveugles. Je capte parfois un regard pour une liaison fugace aussitôt rompue. D’autres fois le contact dure un peu plus longtemps, j’ai un instant le sentiment d’une connivence, dont l’ébauche s’efface déjà aussitôt qu’entrevue, emportée par la rame.


Il m’excite de me branler ainsi à la vue de tous ces gens mais j’imagine que mon plaisir serait plus intense si mon public était plus vivant. Il est clair que les voyageurs sont indifférents. J’imagine qu’ils n’ont pas matériellement le temps de se rendre compte de mon obscénité.


Pourquoi donc un public ? Il ne suffit pas que je m’avilisse, il me faut aussi des témoins.


Et en la circonstance, quels meilleurs témoins que des voyageurs dont je n’entendrai plus jamais parler ? Je me prends à rêver, un train roulant au pas, une foule de gens, tous agglutinés aux fenêtres, les uns approbatifs, les autres réprobateurs mais aucun n’est insensible, tous partagent ou réprouvent ma jouissance. Du rêve, rien que du rêve…


En fait, je ne parviens pas même à jouir ; faut admettre que les conditions ne sont pas idéales, mon short est trop ajusté, la chienne me soucie. Je la surveille d’un œil ; les deux chiens ont terminé la gymnastique, ils sont collés cul à cul et attendent au bas de la pente le long du grillage, près des voies ferrées.


D’où peut bien naître cette envie qui me prend, ce désir qui me pousse, ce besoin que j’ai de me mettre nue, de m’exhiber sans équivoque à la vue des passagers ? Je descends mon short et ma culotte jusqu’à mi-cuisses mais pas plus loin afin d’être en mesure de réajuster promptement si d’aventure un intrus survenait.


Dès lors, comment les voyageurs pourraient-ils encore se méprendre ? Du coup, l’exercice prend plus de saveur. Je me pique au jeu, oublie les risques, mon vêtement et mon sous-vêtement glissent et chutent, chiffons dérisoires désormais en tas sur mes chevilles.


Les chiens n’ont toujours pas bougé, je continue à me branler, les rames passent, nombreux sont les passagers, qui réagissent enfin au spectacle. Voyeurs éphémères, hilares, intéressés, indifférents ou offusquées, qu’importe, ils sont tous mes sujets. Chaque regard, chaque geste, qu’ils marquent l’approbation, l’envie ou le mépris, contribuent à attiser le feu qui me ronge.


Défi au danger, appel du large, soif de liberté, ma raison chavire, brouillée par le désir, je me défais des habits qui entravent mes chevilles et les range soigneusement, en un endroit idoine sur le monument. J’ai gardé mes baskets et la brassière que je n’ai pas osé ôter… J’ai hésité un peu, avant qu’une logique prudentielle assez saugrenue ne m’impose un choix conservateur.


C’est en cet équipage que je dévale près des deux chiens. Je les ai à l’œil mais ce n’est pas tant eux qui motivent ma descente que mon goût pervers pour l’exhibition. À cette distance, aucun des passagers, même parmi les plus myopes, ne pourra plus rien ignorer de mon anatomie si ce n’est mes seins. C’est délire et compagnie sous ma caboche. Affaire de pulsions… rien n’est prémédité.


Je n’ai pas non plus prévu que mon mouvement va effrayer le corniaud. Le mâle s’affole, il s’arrache puis c’est l’envolée. Le clébard a démarré en trombe, la chienne à ses trousses. Sans réfléchir je me jette à leur poursuite, il s’en faut d’un rien que je ne me saisisse de la laisse en vol tandis que la chienne rame dans la montée. Foiré ! Je me lance à nouveau et plonge. Encore foiré ! Les nerfs, l’agacement, le défi, une accélération digne d’Usain Bolt ; l’immense champ de croix s’étale devant mes yeux mais je n’ai même pas vu dans quelle direction les chiens se sont enfuis.


Découragement, bras ballants, je prends soudain conscience que je me suis aventurée au-delà du raisonnable alors que je suis dans une tenue pas du tout raisonnable, et dans le même temps, je pressens une présence dans mon dos, près des poubelles.


De fait, Ameth me regarde, les yeux ronds, bouche bée. Il porte une combinaison semblable à celle qu’il m’a prêtée.



J’apprends qu’il travaille pour une entreprise préposée à l’entretien du cimetière. N’imaginez pas une conversation badine, il parle sans me quitter des yeux, j’y lis la convoitise ; moi, pendant qu’il explique, je manœuvre avec l’intention d’aller récupérer mes vêtements. Le hic ! Ameth est idéalement placé pour s’interposer et m’interdire de rejoindre le cul de sac. Et bien entendu, ça ne loupe pas. Il se poste face à moi me barrant le passage.



Mon intonation porte un relent de vindicte ; pas su résister… Il ignore ma question.



Puis brusquement, il franchit le dernier pas, m’enlace et essaie de m’embrasser.



Il m’agrippe et m’immobilise sans peine. Je me calme. Nous restons un instant silencieux, yeux dans les yeux puis il entreprend de me caresser, d’abord la chute des reins, puis les fesses, sans cesser de me regarder. Son autre main glisse sur mon pubis lisse, un doigt s’engage dans ma fente.



Combien de fois n’ai-je pas imaginé cette scène ? Je dégouline ; faut dire que je suis humide depuis que je fais le pitre pour les passagers du RER.



Il a tapé dans le mille, je me doute que toute la clique maraboutée est au courant. Ce rappel me désarçonne, je suis désemparée. Un reste de conscience fait de la résistance mais mon corps conditionné n’en fait plus qu’à sa tête. Situation un rien schizophrène, comme il peut être quand l’imaginaire et la réalité se télescopent…


Suite à mes efforts, nous avons insensiblement dérivé jusqu’au monument. Mais je ne peux récupérer mes nippes, Ameth me retient prisonnière, m’acculant contre la construction. Il abandonne mon clito, glisse sa main sous ma brassière et s’empare d’un sein qu’il empaume tout entier.



Question persiflée avec acrimonie et appréhension aussi. Je n’aime pas trop mes seins, je les voudrais plus volumineux mais il me déplairait bigrement que lui n’en dise pas du bien.



Décontenancée et encore vaguement apeurée, je ne m’oppose pas quand il entreprend d’enlever ma brassière. Je suis désormais nue, à l’exception de mes baskets et de mon alliance, témoin muet d’une union, dont je m’apprête à écorner le contrat alors que je l’ai scrupuleusement respecté pendant six années et des poussières.


L’écho de mon credo « j’aime Philippe, j’aime Philippe… » revient en force. Il résonne encore alors qu’Ameth cherche mes lèvres. Je finis par les lui abandonner malgré mon remords. La langue fouisseuse brise mon ultime résistance puis investit mon palais, agaçant ma propre langue, laquelle se fait docile, signant ma reddition définitive.


Son sexe est dur, il imprime son empreinte sur mon ventre. L’invite est alléchante, depuis le temps que je fantasme à son sujet. Je glisse ma main et caresse la protubérance dont je sens la vigueur au travers du tissu de la combinaison.


La suite est dans l’ordre des choses.



Le gland du Noir frotte déjà sur ma vulve ; il poursuit comme si de rien n’était.


N’est-ce pas ce dont j’ai envie ? Sans doute, sauf que je balise à mort qu’il me féconde alors que ça fait des années que j’attends de l’être. De quoi devenir loufoque. Ces petites contrariétés gâchent quelque peu mon enthousiasme mais je sais aussi que je n’aurais pas le courage ni la force d’interrompre mon amant, c’est trop tard.


Mon ventre est rempli, comblé par cette turgescence dont je rêve depuis une éternité. Nos pubis s’entrechoquent et Ameth pousse encore malgré tout, espérant pénétrer davantage, distendant mes chairs à l’intérieur de mon vagin. Des battements nerveux et vigoureux signent le tempérament plein de fougue du sexe invasif.


N’empêche qu’on baise sans protection ! Un bébé métis ? Adorable et mignon mais, mais… trop de mais. L’alternative ? Un contraceptif d’urgence type pilule du lendemain, banco ! Quant au risque :



Quand bien même le danger n’en serait pas beaucoup plus faible, la réponse me convient ; elle annihile mes dernières réticences.


Pour affermir notre accouplement, j’ai noué mes bras autour de son cou, mes cuisses enserrent ses hanches tandis que lui a empoigné mes fesses. Sa prise est ferme. Nos lèvres sont à nouveau unies, nos langues se marient, j’accompagne instinctivement les mouvements de va-et-vient dès lors qu’il y vient.


S’il se peut, j’ai l’impression que sa verge gonfle encore sous l’effet des contractions de mes muscles vaginaux. Après un moment, somme toute assez court, je sens, chez lui, monter la jouissance.



Faux jeton ! Une dernière poussée et il explose dans mon ventre, éjaculant de longues giclées chaudes, irradiant de la chaleur avec le relâchement. Je lui en veux de ne pas m’avoir attendue, il s’en fallait d’un poil que je ne grimpe au ciel avec lui.


Une ombre, un mouvement, un rien m’alerte.



L’Adonis est à nos côtés, il porte une combinaison semblable à celle d’Ameth. Je ne l’ai pas entendu venir, pas plus que son camion dont le nez pointe à l’entrée de l’enclos.



Il ne m’a pas reconnue. Ameth en prend conscience.



Nous nous désaccouplons. Dès lors l’Apollon peut mieux détailler mon anatomie.



Rigolo ! Et toi, que veux-tu ? Je soutiens son regard puis baisse les yeux, rengainant mon arrogance aussi bien que les protestations que je trépignais d’émettre. À quoi bon ? Qu’on baise et puis basta ; juste un plan cul, pas un mari. Du reste, j’en ai déjà un, duquel il y aurait beaucoup à dire mais je l’aime en dépit de tout.


Blindage garanti toutes humiliations ! Je me fais fataliste et le laisse me mettre en position, abdomen en appui sur un muret opportun. Il veut me prendre en levrette. J’attends, le temps pour lui de défourailler son attirail. Ma position n’est pas confortable ; des aspérités et les arêtes me blessent mais j’imagine que je n’en ai pas pour longtemps. De fait, je sens bientôt la pression de son gland sur mes grandes lèvres. Il me pénètre d’un seul coup de rein, brutalement, méchamment ; chance que je sois déjà lubrifiée. Surprise, je gueule ; il continue de plus belle, comme un rustre, telle une brute.



Son prénom m’est soudain revenu en mémoire. Ameth m’apporte un soutien inattendu.



Ouais, il y a de la rancune dans l’air. Une pensée tordante : je paye les dettes de Philippe. L’idée m’amuse, m’excite aussi, ça fait un peu pute. Et paradoxalement, ce rapport extrêmement viril et absolument dénué de tendresse m’apporte malgré tout du plaisir. Je sens l’orgasme monter. Mamadou pilonne toujours comme s’il châtiait le dernier des mécréants. J’aborde la phase de décollage, volets braqués au maximum et n’attends plus que la poussée suffisante pour quitter le plancher des vaches.



Je l’entends brailler mais loin, très loin. Je suis dans ma bulle, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, rien ne peut plus m’atteindre, je poursuis ma course effrénée, un galop d’enfer vers la félicité.


Pourquoi avec mon cher et tendre n’ai-je pas plus souvent des intermèdes de ce genre ? Je me sens magnanime, je pardonne tout ce qu’on voudra, la brutalité aussi bien que les menus blessures qui ensanglantent mes chairs.


Mamadou continue à besogner, je sens qu’il va venir. Ameth a contourné le muret, il est face à moi, sollicitant une gâterie. Je voudrais bien lui faire plaisir, c’est un allié et je n’en ai pas tant, mais ce sauvage de Mamadou me malmène trop, je n’arrive pas à coordonner mes mouvements.


Puis soudain l’œil du cyclone, je sens les bordées dans mon ventre, une… deux… trois… quatre… cinq… dont la puissance décroît un peu chaque fois. Du feu, des odeurs, j’ai du moins l’impression d’en humer le fumet. Son sexe tressaute, je ressens les à-coups dans mes tripes.


Un nouvel orgasme, moins fort que le premier, m’a emportée. Je plane. Ameth revient à la charge, son gland poisseux et parfumé se balade sous mon nez. Je me déplace un peu, autant pour soulager mes chairs meurtries que pour mieux me placer en vue de lui tailler une pipe.



Diable ! Il a de la ressource. Effectivement, je sens son membre en train de reprendre de la vigueur parmi mes tripes. Je m’immobilise, attentive à la renaissance, oublieuse d’Ameth. Lui n’a pas renoncé, il se fait même plus impatient et force le passage.


Sa pine est grosse et longue, je dois le modérer, sinon il pourrait bien m’étouffer. Le goût est fort et acre en bouche. Le gland est doux, presque fondant, d’un contact fort agréable sous mes lèvres et au palais. Une grosse veine parcourt toute la longueur de la hampe, je la sens palpiter sous ma langue. Je le branle en même temps que je le suce. C’est un rapide, je le sens prêt à larguer sa semence. J’accélère la branlette, décidée, le moment venu, à braquer le mandrin pour fertiliser la terre.


Intentions louables, mais pas suivies d’effet. L’autre sort de sa léthargie, réattaque en trombe, je perds tout contrôle, délaisse la pipe. Ameth reprend sa chose en main.


À ce stade, j’ai des trous, je ne sais plus… J’imagine que je gémis et ahane sous les coups de boutoir du furieux tandis que l’autre se masturbe.


Je reçois les giclées en pleine face, l’une me poche un œil, la première ou bien la deuxième, une des deux en tous cas. Une autre me remplit les trous de nez. Bref, j’en ai partout dans les cheveux, sur le menton et même dans la bouche. J’essaie d’essuyer, même sommairement, mais j’aggrave mon cas, c’est tâche impossible avec l’enragé, le secoué du bocal qui me brusque, me brimbale et me secoue pire qu’un sac de patates.


Mon désir s’est évanoui, il me tarde que l’énergumène en finisse, j’ai envie de gerber.



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Mon vagin s’est transformé en spermathèque, le trop plein dégouline et poisse mes cuisses. Rien pour m’essuyer, rien pour m’habiller. Les salauds m’ont confisqué mes frusques.



Tu parles d’un deal ! N’ai-je pas déjà payé ? Je renvoie par la bande.



Les deux gugusses tournent les talons, apparemment résolus à me laisser en plan. Je les poursuis.



Voilà autre chose ! Le forcené m’a propulsée dans la cabine. Je rue dans les brancards, déterminée à taire mon adresse, y compris sous la torture.



Y-a vraiment qu’un homme pour s’étonner que j’aie des pertes, après le traitement qu’ils m’ont administré.



Le bahut s’ébranle, roule. Ici et là de rares visiteurs. Il est encore tôt. L’allée principale ; on aperçoit une sortie tout au bout, vite franchie… Puis c’est l’avenue ; la circulation est plus dense qu’à l’aube…


J’y crois pas ; on est sortis du cimetière. Je suis nue, entre deux gorilles, dans une cabine pas particulièrement discrète. On domine ; j’ai l’impression d’être exposée à la vue de tous.


Nous sommes en train de rouler sur une voie fréquentée par des dizaines d’automobilistes et dont certains m’ont déjà aperçue. Quelques-uns tournent la tête, d’autres zieutent le rétro… Combien ralentissent ? Le voisinage ne se fait-il pas plus encombré ? C’est mon quartier. Ma hantise : reconnaître une tête familière, j’en crève…



Je n’imaginais pas qu’on en irait jusque-là.



Ultime finasserie ! Pas malin.


C’est ma rue… Sauraient-ils mon adresse ? D’où la tiendraient-ils ? Pas possible, ils stoppent pile au pied de l’immeuble, ils se garent devant chez le Tunisien ; juste sur l’emplacement interdit ; le sol est zébré du marquage caractéristique.



J’aperçois l’épicier au travers de la vitrine, il rapplique avec, j’en suis sûre, la ferme intention de faire respecter l’interdiction de stationner qu’il a eu tant de mal à obtenir.



Le Noir ne fait rien pour m’aider, il joue de mes alarmes et ne me restitue les vêtements qu’à la toute dernière minute alors que l’épicier pointe le museau dans l’ouverture ; la vitre est baissée. Il me reconnaît, ravale ce qu’il s’apprêtait à dire et reste muet, bouche bée. Je suis toujours nue et ne peux m’en cacher… Merde ! Quelle bande d’enculés.


Le Tunisien se décide à refaire surface.



Et j’en ai grand mérite vu les circonstances. Il ne sert plus à grand-chose que je me bouscule comme une diablesse pour enfiler le short puis la brassière mais c’est ainsi… Dans la précipitation, mon slip, dont j’ai fait volontairement l’impasse, s’est enquillé sur le levier de vitesse. Je l’y laisse, modeste trophée abandonné en guise de pied de nez pour ces messieurs.


Le pauvre épicier est toujours là, statufié sur son trottoir. Il lui faut pourtant bouger quand Ameth ouvre la portière de la cabine. Mouvement salutaire, il se réveille, tourne les talons et disparaît dans sa boutique.


Sûr qu’il va me faire une réputation exécrable. Vivement qu’on déménage !



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Au passage du premier palier, pas moyen d’y couper, Germaine est là qui entrebâille sa porte. Elle et sa patronne passent leur temps le nez collé aux vitres à espionner la rue ou bien l’oreille aux aguets à sourciller les bruits chez les voisins et dans la cage d’escalier. Personne ne connaît mieux qu’elles les potins du quartier et ce qu’il y a à savoir sur les gens de l’immeuble.



Une baliverne, bien sûr, histoire de désamorcer sa curiosité. Car faut pas s’y fier, la Germaine a bon œil sinon bon pied et aussi du nez ; je ne pourrais pas longtemps lui cacher mon hygiène douteuse sans compter que je schlingue à plein nez l’odeur de stupre et les fragrances de luxure. Mieux vaut ne pas s’éterniser dans les parages…



Remarque judicieuse, moi aussi le boulot m’attend.



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La cagnotte du ménage est planquée dans un pot, que je range dans un placard de la cuisine. Bien sûr, je louvoie mais les autres sont plus malins… Mamadou rafle tout, les billets aussi bien que la menue monnaie.



Que dire ? Que faire ? Je ne suis pas de taille.



Le battant ouvert, il se retourne, la mine hilare.




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Trois mois ont passé, Philippe n’a pas eu écho de mes frasques. Il ne sait pas non plus que j’ai apuré ses dettes.


L’épicier tunisien ne me regarde plus du tout comme avant. Il me fout la trouille… Vivement qu’on déménage, encore faudrait-il trouver un nouveau logement.


Rita a mis bas, six petits, des bouchons, des peluches. Les chiots ont un peu plus d’un mois maintenant. Les vieilles ont l’air de m’en tenir responsable…


Moi ? Je sais depuis un peu moins de deux mois que je suis enceinte. Le toubib est formel. Ben oui, je n’ai pas pu me résoudre à avaler la pilule du lendemain. En revanche, j’ai au moment procédé au dépistage du VIH : négatif ; confirmé depuis la veille.


Je vais avoir un bébé, un bébé, un bébé… Je ne me lasse pas de le répéter. Forcément ce sera une fille.


Une ombre au tableau : comment le dire à Philippe ? Il va me tuer ou me plaquer, ce qui ne vaut pas mieux. J’ai peur. Tous les jours, dix fois par jour, trente fois par nuit, je réfléchis à ce que je vais lui dire, je l’ai même couché sur papier. Je raye, rature et remanie. Je fais des répétitions et déclame quand je suis seule. Je suis mûre pour tout avouer, faut juste que je trouve le courage de le faire : « Chéri, il faut que je te dise… »


S’il me demande de choisir… Je préférerais qu’il ne le fasse pas. Je l’aime lui aussi, presqu’autant que la graine qui grandit dans mon ventre.