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n° 14578Fiche technique26558 caractères26558
Temps de lecture estimé : 15 mn
14/09/11
Résumé:  En matière d'attachement, tous les détails comptent.
Critères:  fhh extracon inconnu fsoumise hdomine contrainte fellation pénétratio attache bondage yeuxbandés -fhh -fsoumisah
Auteur : Olaf      Envoi mini-message

Collection : Mais où sont donc les chaussettes orphelines ?
Shibari

Lorsque l’élève est prête, le maître apparaît


Ses premiers contacts avec l’art de l’attachement remontaient à plusieurs mois. Elle l’avait découvert au hasard d’une lecture, puis au gré de recherches sur la toile. D’emblée, elle avait été attirée, séduite même.


Il y avait certes l’esthétique de la corde nouée autour d’un corps nu et les détails anatomiques ainsi mis en valeur. Parfois à outrance, tant la corde peut se glisser de manière impudique dans des plis intimes, étrangler les seins pour mieux les faire saillir, ou laisser des traces dans les chairs les plus fragiles. Mais il n’y avait pas que cela. La relation particulière qui devait s’établir entre le modèle et l’artiste l’interpellait. Au point que ce mélange de soumission et d’abandon dans la confiance la plus totale faisait naître de très fortes émotions en elle.


Progressivement, à force de laisser des images se former dans sa tête, l’idée de se soumettre à cette élégante torture commença à la troubler. En rêves, d’abord. Qui la laissaient, au réveil, frémissante d’un désir inassouvi. Puis, sous forme d’une envie de plus en plus précise.


L’idée d’incorporer la douleur à des jeux érotiques représentait toutefois un obstacle majeur à ses yeux. Elle perdait tous ses moyens et surtout tout désir, dès qu’un amant se montrait trop brusque. Sans certitude qu’un homme dont elle avait envie saurait garder contenance et maîtriser son animalité, elle était incapable de s’abandonner. C’était ce dont elle était persuadée et aucun de ceux qui avaient traversé sa vie jusqu’à ce jour ne lui avait permis de changer d’idée.


Pourtant, à force de s’intéresser au shibari, elle se mit à y découvrir autre chose que de la contrainte. Paradoxalement, elle réalisa qu’elle ne voyait sur les visages que des expressions de jouissance, alors même que les corps soumis aux plus acrobatiques encordements auraient dû être en souffrance. Comme si tout l’art du maître consistait à leur permettre de sublimer cette dolence, une fois dépassé un certain stade de contrainte.


Cette expression de volupté, qu’elle découvrait chez les soumises, elle était sûre de ne l’avoir jamais laissé paraître sur son propre visage. Les femmes qui abandonnaient leur corps à la corde et aux nœuds, devaient éprouver quelque chose de plus fort, d’infiniment plus intense et complet que le simple plaisir sensuel et érotique qu’elle avait ressenti entre les bras d’un homme jusqu’alors.


Aurélie lutta longtemps contre cette évidence. Mais elle dut bien s’avouer que la tentation d’une telle expérience prenait de plus en plus de place en elle. Dans son esprit, d’abord, de manière assez intellectuelle. Puis, plus sournoisement, au creux de son ventre.


Son homme, à qui elle avoua finalement son désir, la regarda avec étonnement, à la limite de l’inquiétude. À l’évidence, elle ne pouvait espérer aucun soutien de son côté. Ne connaissant aucune autre personne en qui elle eut assez confiance, elle commença à désespérer d’arriver à tenter l’aventure.


Il y avait certes des séminaires pour débutantes. Mais le peu qu’elle en avait vu sur la toile ne lui donnait pas envie de confier son corps à des maîtres autoproclamés, qui ne lui inspiraient rien qui corresponde à sa démarche.


C’est en suivant les discussions sur un forum d’amateurs de shibari, qu’elle fit connaissance de Raphaël et commença à échanger quelques messages avec lui. Ses réponses attentives et patientes à ses questions, souvent naïves, la mirent en confiance. Elle lui fit part de ses envies. Loin de lui proposer un rendez-vous ou une adresse plus ou moins recommandable, il la guida dans ses réflexions, ses hésitations et la motiva à entreprendre par elle-même la recherche qui lui correspondrait le mieux.


Le fait qu’il parlât de nawa-do, la voie de la corde, plutôt que de shibari, acheva de la convaincre. Elle suivit ses conseils et commença par travailler la technique des nœuds.


À la manière d’un cours par correspondance, elle lui envoya quelques photos, très sages au début, puis progressivement plus libres, pour lui montrer ce dont elle était capable. Il apprécia ses progrès, l’encouragea à améliorer telle ou telle technique, non sans ajouter quelques compliments sur ses charmes dévoilés.


Au-delà des conseils pratiques, il lui permit surtout de réaliser que, contrairement à ce qu’elle imaginait au début, toute la démarche commençait par la maîtrise du nœud. Non seulement parce qu’il était à l’origine du geste, qui doit confiner à la perfection pour être efficace. Mais parce que, précisément, le nawa-do n’était rien d’autre que l’art de prendre possession d’un corps par les entrelacements de la corde. C’est son exacte tension qui engendre les plus folles sensations, ce que seul un parfait placement des nœuds rend possible.


Comme dans tous les arts martiaux orientaux, l’effort et, souvent, la sublimation de la souffrance permettent de se libérer de soi. Rien de plus logique donc que d’entrer dans cette voie, non pas en se soumettant soi-même à l’attachement, mais en apprenant les gestes qui façonnent le juste nœud et permettent d’obtenir la parfaite tension de la corde.


Sous la respectueuse conduite de Raphaël, elle apprivoisa les techniques les plus complexes. Lorsqu’il la sentit prête, il lui proposa de se lancer dans l’auto-attachement, lui apprenant les trucs indispensables à une libération rapide en cas de problème.

Elle aurait certes préféré pouvoir pratiquer avec un ou une partenaire partageant ses aspirations. Elle n’en continua pas moins son apprentissage solitaire, en se disant que lorsqu’elle aurait atteint une maîtrise suffisante de son art, Raphaël lui proposerait peut-être une expérience à la mesure de ses désirs les plus fous.


Quelque chose dans ses messages et ses encouragements paraissait en effet évoluer vers un échange plus personnel. Il lui semblait même que leurs contacts devenaient plus sensuels, plus intimes, comme si, imperceptiblement, la voie de la corde était en train d’ouvrir d’autres voies de découverte entre eux.


Elle appréciait d’ailleurs cette lente prise de possession, cette manière de tisser à distance par des mots ce qu’il saurait tout naturellement réaliser avec une corde sur son corps. Une autre forme de lien se développait inéluctablement. Une relation quelque peu inquiétante, compte tenu de ce qu’elle vivait dans son couple, mais de plus en plus indispensable à son bien-être, à son équilibre même.


Vint alors le jour où il lui proposa non seulement une construction particulièrement raffinée, mais une première suspension. À force de recherches sur le sujet, elle savait que c’était là l’aboutissement du chemin qu’il lui avait permis de suivre.


Passée cette expérience personnelle, elle serait non seulement capable de vivre d’une manière nouvelle et différente tout ce que la corde avait à lui faire découvrir, mais elle serait prête à partager son art avec d’autres.


Elle lui fit part de son appréhension. Le mélange de confiance et de tendresse qu’il exprima dans ses réponses lui permit de faire le pas. Elle apprécia sa comparaison à Dasniya Sommer [1], la référence absolue en matière de maîtrise du corps et de la corde, dont elle se sentait néanmoins si éloignée.


Sa décision fut rapidement prise. Le lendemain, à midi, lorsqu’elle serait sûre d’être seule, elle répéterait les katas, puis réaliserait la suspension qu’il lui proposait.


oooOOOooo


Après avoir expédié fébrilement ce qu’elle devait faire le matin, Aurélie prépare tout le matériel nécessaire à la cérémonie dans la chambre d’amis, là où son homme ne met pratiquement jamais les pieds. Puis elle se dénude. Après une courte méditation, elle commence le rituel par un shinju [2], auquel elle ajoute une boucle nécessaire à la suspension. Elle apprécie la sensation de la corde contre ses seins. Elle se laisse même aller un instant à rêver que Raphaël est tout contre elle, en train de serrer les nœuds.


Elle poursuit avec un matanawa [3], qu’elle prend soin de compléter par quelques tours de corde autour de ses hanches, de manière à permettre un bon maintien de son corps dans le vide. Quelques entrelacements viennent s’ajouter aux premiers, qui devraient faciliter des changements de position au gré des tensions exercées sur les brins libres.


Lorsque les cordes courtes sont placées, Aurélie fixe trois longs brins aux boucles qu’elle a préparées. Vient maintenant le moment le plus difficile de sa création. Elle s’efforce auparavant de se recentrer sur les gestes à réaliser, en faisant abstraction du troublant mélange d’émotions et de sensations qui sont en train de la submerger.


Lorsqu’elle se sent prête, elle passe la corde attachée à sa poitrine autour d’un anneau qu’elle a depuis longtemps fixé au plafond. Vient ensuite la corde attachée à ses hanches et son bas-ventre. Puis la première corde fixant ses jambes.


C’est à ce moment qu’elle réalise avoir laissé trop peu de longueur à l’un des brins. Il manque juste quelques centimètres pour arriver à s’attacher de manière correcte, avant de commencer la traction qui la mettra en complète suspension.


Irritée par son imprévoyance, Aurélie avise une chaussette orpheline sur le bord de la corbeille à linge qui était restée là depuis la dernière lessive. Qu’importe l’entorse à la tradition, le morceau de nylon fera un raccord parfait.


Satisfaite de sa solution de rechange, elle reprend son rituel et met la construction en tension. Les cordes se placent sur son corps aux endroits prévus, les nœuds se raffermissent. Au fur et à mesure que les brins s’ajustent et que les forces se répartissent, elle éprouve de nouvelles sensations, une perception différente de son corps dans l’espace.


Elle continue à tirer sur les brins principaux. Seules les pointes de ses pieds touchent encore le sol. Ce qu’elle découvre est si fort, si troublant. Elle ne peut s’empêcher d’associer Raphaël à ce qu’elle est en train d’éprouver. Un léger sourire se forme sur ses lèvres à l’idée d’être ainsi offerte nue à ses regards, après l’avoir laissé préparer son corps pour ce sacrifice consenti.


Finalement, comme le veut la tradition, elle réalise avec la dernière corde l’attachement de ses bras, qui parachève son œuvre. Seul un brin reste libre pour se détacher en cas de problème. Mais Aurélie en est bien loin.


Une fois ses poignets réunis, elle donne une petite poussée du pied et se laisse aller dans le vide. Les jambes tendues, elle love son corps dans l’entrelacement des cordes qu’elle a habilement nouées. À moins d’un mètre du sol, elle commence à se balancer, à mi-chemin entre rêve et réalité. Sa perception de l’espace est transformée. Sa peau enregistre une multitude de sensations nouvelles. Tout n’est pas que douceur. Pour toute autre qu’Aurélie, la position serait même inconfortable. Mais l’enserrement est rapidement supportable. Mieux, il la met dans un état de conscience différent.


Bercé par un lent balancement, son esprit s’échappe et va rejoindre Raphaël. Où est-il à cet instant ? Que fait-il, alors qu’il la sait en train de réaliser l’étape ultime de son entraînement ? Essaie-t-il de la soutenir par ses pensées positives ? L’imagine-t-il nue, offerte, presque écartelée par les cordes ? Que va-t-elle oser lui raconter, lorsque cette première expérience sera terminée, lorsqu’elle sera à nouveau les deux pieds sur terre ?


C’est à cet instant précis qu’elle entend une clef tourner dans la serrure de la porte de l’appartement. Contre toute attente, son homme semble revenir chez eux, alors qu’il est censé être à son travail, à des kilomètres de là.


Désagréablement surprise, Aurélie a un sursaut de tout le corps. Juste ce qu’il aurait fallu éviter. D’un coup, la construction savamment étudiée est déséquilibrée. Le raccord en nylon se désolidarise des brins de corde et bloque tout rééquilibrage. Au mouvement suivant, la jeune femme se trouve enserrée sur le côté, dans un inconfortable yoko tsuri [4].


Les voies de la corde sont impénétrables. Surtout celle du brin de sécurité qui a entretemps échappé de ses mains. Prise au piège, elle est désormais incapable de se libérer rapidement.



Son homme vient d’entrer dans l’appartement. Il ne peut pas encore la voir.



Il doit avoir découvert son sac à main dans l’entrée et s’étonner de ce qu’elle ne réponde pas. Même si elle n’est pas sûre d’arriver à se libérer et risque d’avoir très prochainement besoin d’aide, il est exclu qu’elle se laisse découvrir dans une position aussi humiliante.


Trop tard. Il ouvre la porte de la chambre d’amis. Tournée comme elle est, elle ne le voit pas. Lui, si !



Complètement interloqué, il s’approche pour essayer de comprendre ce qu’elle est en train de faire. Elle ferme les yeux pour éviter son regard. Tétanisée par la surprise et la colère, au bord des larmes, elle se sent incapable de répondre à ses questions. Jamais il ne comprendra, n’acceptera ses aspirations. Jamais elle ne lui avouera son fantasme.


Cet incident pourrait bien sonner le glas de leur couple.


Une éternité s’écoule sans que rien ne se passe. Le cœur battant à tout rompre, Aurélie essaie de deviner où son homme se trouve exactement et quelles peuvent être ses intentions. Il n’a apparemment aucune envie de la détacher. Elle perçoit des mouvements autour d’elle, mais, trop troublée, elle est incapable de se faire une image précise de ce qui se trame. Aurait-il décidé de ne pas la libérer ?


Elle reste immobile, prête à subir ses sarcasmes. Toujours silencieux, il semble vouloir s’offrir d’autres plaisirs. L’infime courant d’air qu’elle sent entre ses jambes ne laisse aucun doute. Il s’est maintenant placé de manière à contempler son entrejambe à sa guise, ce à quoi elle se refuse depuis toujours. Salaud de voyeur, pervers sadique.


Elle devrait accepter d’affronter la réalité, ouvrir les yeux et lui parler. Elle s’en sent incapable. Il profite de sa passivité pour tourner autour d’elle. D’une légère poussée, il met son corps mouvement. Le pire qu’il puisse faire pour lui enlever toute conscience de ce qui lui arrive.


Il complète le supplice en nouant un foulard autour de ses yeux. Puis il sort de la pièce, apparemment pour discuter, à voix basse, avec un inconnu. C’est l’horreur absolue. Littéralement pieds et poings liés, Aurélie se trouve par un coup du sort entièrement soumise au bon vouloir de son homme et d’un étranger qu’il a décidé de faire participer à la curée. Jamais elle n’aurait pu imaginer cela de lui.


Une main détache maintenant la corde qui emprisonnait sa jambe gauche. Pas assez pour qu’elle puisse prendre appui sur le sol et se redresser. Mais juste suffisant pour libérer un peu d’espace entre ses cuisses. Aurélie voudrait se rebeller, cacher sa nudité, empêcher qu’on profite indignement de la situation. Pourtant, quelque chose dans la douceur des manipulations la retient de hurler.


Les deux gars ont visiblement l’intention de savourer l’instant, mais leurs gestes font preuve d’une certaine retenue. L’idée d’être ainsi écartelée sous leurs yeux lui est insupportable. Leur manière de se comporter, le temps qu’ils prennent à la contempler avant de s’emparer d’elle, la rassurent. Au point qu’un léger trouble commence à monter en elle.


Elle tente d’échapper à sa situation inconfortable par la force de sa pensée, en imaginant Raphaël à ses côtés. C’est le frôlement de son regard qu’elle sent entre ses jambes. C’est sa main qui vient de se poser sur son ventre, dont elle se met à attendre des caresses plus précises.


Comme pour satisfaire ce secret désir, quelqu’un commence à parcourir son corps du bout des doigts, s’attarde sur ses courbes, glisse partout où la corde laisse assez de place, effleure délicatement le bout de ses seins, comprimés entre deux brins de corde. La sensation est agréable. Une savoureuse succion y succède, offerte par des lèvres qu’elle est presque sûre de reconnaître.


C’est alors qu’elle sent une main se faufiler le long de ses cuisses, jusqu’à l’orée de ses fesses. Placé comme il doit l’être pour sucer les pointes de ses seins, son homme n’est pas en position de l’embrasser et de la caresser simultanément. Lorsqu’elle le réalise, Aurélie tente d’échapper aux attouchements de l’inconnu. Ses jambes battent inutilement dans le vide.


Dès qu’elle se calme, les deux s’entendent pour la faire tourner plusieurs fois sur elle-même. Les nœuds et les cordes se tendent et rendent vaine toute résistance. Autant en prendre son parti. Si tel est le choix de son amant, pour autant que les deux hommes continuent à être aussi prévenants, pourquoi ne pas les laisser prendre son plaisir en mains ?


Leurs caresses recommencent. Renonçant à se rebiffer, Aurélie s’offre la liberté de découvrir de nouvelles sensations, qui envahissent son ventre et y font croître un désir inusité. Une envie très particulière de plaisir monte même en elle, qu’elle ne veut plus réprimer.


Les deux compagnons ont découvert son secret, mis à nu son plus intime fantasme. Quelle importance ? Qu’ils la fassent jouir et qu’on en finisse. N’était-ce pas à ce genre de libération qu’elle aspirait, par le biais des cordes. Si l’heure est venue, qu’il en soit ainsi.


Une main inconnue va-et-vient délicatement entre ses cuisses, avant de se poser sur ses hanches. Celui qui s’est emparé de ses seins poursuit ses attouchements et ses baisers. Le rythme des caresses s’accélère. Déjà, elle est incapable de distinguer ce que lui offre son homme de ce que l’inconnu s’ingénie à lui faire découvrir. Elle est parcourue de délicieux frissons du haut en bas de son corps. Entre deux longs baisers sur son intimité, elle se régale d’un souffle chaud sur sa vulve entrouverte et trempée.


Incapable de savoir de qui, ni d’où va venir la prochaine caresse, elle n’en éprouve que plus de plaisir à se laisser surprendre. Les partenaires jouent de ses sens en alternance et profitent des temps morts pour se déshabiller. Aux effleurements des doigts, des lèvres et de la langue, s’ajoutent maintenant les frottements des peaux nues contre son épiderme à la sensibilité exacerbée. La peau d’un des inconnus est particulièrement douce. Il abuse avec une insupportable maîtrise du jeu du froid et du chaud, la caressant sur tout le corps de ses bras, de son ventre, de son visage même, avant de s’éloigner à nouveau, pour prolonger l’insupportable attente de la prochaine caresse.


Puis tout s’arrête. Ils ne disent mot, mais Aurélie imagine sans peine ce qu’ils se préparent à accomplir. Déjà, elle sent un membre raidi presser contre sa vulve impatiente. Au moment où l’un des hommes commence à la pénétrer, en maîtrisant habilement les poussées de ses reins et le balancement qui y fait suite, l’autre se met à caresser son visage de la pointe de son sexe. Il s’amuse à laisser des traces humides sur sa joue, l’arrière de son oreille et sa nuque, avant de revenir tout près de sa bouche.


Le désir animal ainsi exprimé la fait craquer. Elle engloutit la tige et commence à la sucer. Le goût agréable et particulier de ce sexe et de ses sucs lui est inconnu. La peau est fine et douce. Aurélie en vient presque à regretter de ne pas pouvoir poser ses doigts sur cette verge si émouvante.


La fellation qu’elle offre à l’inconnu porte rapidement ses fruits. La tige frémit à chaque coup de langue, les mouvements des reins de l’homme sont de plus en plus vigoureux. Elle le laisse s’enfoncer profondément dans sa bouche. L’autre, sans doute mis dans un état second par la scène de fellation, accélère le rythme de sa copulation et l’envahit de plus en plus fougueusement.


L’excitation des deux amants gagne Aurélie, qui se soumet maintenant à leur bon vouloir, bien au-delà de leurs plus folles espérances. Tant qu’à se transformer en objet de plaisir, autant le faire bien. Et en tirer soi-même le meilleur profit.


Sans plus chercher à percevoir qui lui procure quelle volupté, Aurélie laisse se dérouler derrière ses paupières un film particulièrement sensuel, donnant aux corps, aux verges, aux doigts en train de la pénétrer, les apparences qui la troublent le plus. Le résultat est presque instantané, les sensations que lui procurent les hommes se trouvent décuplées. Une vague de plaisir monte à une vitesse vertigineuse entre ses reins. Elle ne peut se retenir de gémir, de feuler, de crier son désir des deux mâles, dont elle veut pouvoir se gaver sans retenue.


Par la puissance de son désir, la jeune femme passe d’une posture de soumise à celle de dominante. Elle se met à exiger des prouesses, imposer des positions, provoquer des empalements que son corps immobilisé par les cordes serait incapable d’obtenir par lui-même. Les deux types, d’abord hésitants, finissent par répondre à ses injonctions. Ils se démènent et s’amusent à changer fréquemment de place, pour le plus grand plaisir d’Aurélie, qui perd toute notion du temps et de l’espace.


Tous trois sont maintenant entièrement pris dans un voluptueux tourbillon, dont ils ne sortiront que délicieusement épuisés. De puissants spasmes raidissent le sexe de l’homme qui s’active entre les cuisses d’Aurélie. Les grognements qui s’échappent de sa bouche à l’instant de se répandre en elle la font basculer. Un formidable orgasme la traverse, de la pointe des seins jusqu’au plus profond du ventre. Cela suffit à entraîner le second partenaire dans leur débauche érotique. Dépassé par son excitation, il ne prend même pas le temps de l’avertir avant de se vider en longues giclées dans sa gorge.


Après l’explosion de plaisir qui les a réunis, ils restent étroitement imbriqués, presque enlacés, autant que l’encordage le permet. Ils profitent longuement de chaque vague, de chaque soubresaut qui ne cesse de secouer leurs ventres.


Quelques minutes plus tard, lorsqu’ils ont repris leurs sens, les deux amants se remettent à caresser Aurélie. Un régal dont elle n’a pas l’habitude au sein de son couple. Cette manifestation de tendresse de la part de ces deux mâles, apparemment comblés et reconnaissants, la touche et l’apaise.


Elle n’en est pas moins troublée de reconnaître le goût du sperme qui tapisse sa bouche. Si ses sens ne la trompent pas, les mains qui caressent son bas-ventre et ses cuisses à l’instant ne seraient donc pas celles de son compagnon. Encore moins les couilles qui viennent de se vider dans sa matrice. Les deux hommes auraient-ils poussé la perversion jusqu’à s’entendre sur un tel partage des plaisirs ? À moins que son compagnon, pris au jeu ou en proie à un fantasme inavoué, ait choisi de lui faire cadeau d’une virile alternative.


Aurélie tente de graver au plus profond de sa mémoire quelques souvenirs tactiles et olfactifs de l’inconnu, dans l’espoir de découvrir un jour son identité. Il ne lui en laisse pas vraiment le temps. Après avoir donné un ample mouvement de rotation à la construction dans laquelle elle est prisonnière, les deux compères s’éloignent en effet sans mot dire. Ainsi balancée, elle perd à nouveau la perception de l’espace et du temps. Le plaisir qu’elle vient d’éprouver se mélange aux sensations que provoquent les cordes pour former dans son corps et son esprit un invraisemblable cocktail sensuel.


Juste avant de quitter l’appartement, l’un de ses prévenants tourmenteurs revient dénouer une des cordes, puis dépose un tendre baiser sur ses lèvres. Elle y répond fougueusement. Au moment où il se redresse, elle est presque sûre de l’entendre murmurer nawa-do, un mot que Raphaël est un des rares adeptes à utiliser pour qualifier cet art.


Est-elle en proie à un délire érotique ou est-il bien l’inconnu sensuel ? Il était le seul à savoir quand et comment elle mettrait son fantasme à exécution. Depuis quand connaîtrait-il son homme ? Aurait-il tout manipulé, de son premier conseil sur le forum jusqu’à sa venue à leur domicile ?


Une mise au point s’impose, dès le retour de son compagnon, si elle veut trouver une réponse à ces questions. Après la découverte de cette forme de liberté et de plaisir, est-ce toutefois bien ce qu’elle désire ?


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[1] http://www.dailymotion.com/video/xb7qxn_dasniya-sommer-idiosyncrasy-shibari_creation

[2] shinju = attachement des seins, http://www.japaneseropeart.com/RopeArt/Shinju/index.html

[3] matanawa = la corde du bas ventre, http://kinbaku.kiev.ua/wp-content/uploads/2011/08/tumblr_lj06d65pxK1qfvizao1_500.jpg

[4] yoko tsuri = suspension sur le côté, http://melbourneropedojo.com.au/Classes_and_events/Gallery/