Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 14600Fiche technique23139 caractères23139
4035
Temps de lecture estimé : 17 mn
05/10/11
corrigé 12/06/21
Résumé:  Quatre histoires courtes, par quatre auteurs différents, sur le thème "refus consentant".
Critères:  fh fhh couplus inconnu religion uniforme boitenuit jalousie dispute init mélo #recueil
Auteur : Collectif Antilogies      Envoi mini-message
Co-auteur : shiva__      Envoi mini-message
Co-auteur : Olaf      Envoi mini-message
Co-auteur : café-clope      Envoi mini-message
Co-auteur : LouVilneau      Envoi mini-message

Collection : Antilogies
Refus consentant

La collection « Antilogies » regroupe des textes courts (si possible entre 1500 et 6000 signes) mis en ligne sur le forum de Revebebe le 30 du mois qui suit une proposition de sujet « antilogique » par un des membres.

Tous les lecteurs peuvent avoir accès au forum : Concours et jeux d’écritures – Antilogies et autres jeux (ré) créatifs – les textes ou Antilogies et autres jeux (ré) créatifs – les discussions.



Août 2011 – Refus consentant




Confession

(LouVilneau)



Comme tous les vendredis à dix-huit heures, l’abbé Georges venait de s’asseoir dans le confessionnal. Depuis le temps qu’il faisait cela, il ne lui suffisait plus que de quelques secondes pour trouver cet état de dédoublement nécessaire à son activité à venir. Un état très particulier qui le faisait sortir de lui-même afin de pouvoir écouter sereinement les petites et les grandes misères humaines.


Plusieurs pénitents étaient déjà passés quand, bizarrement, il était sorti de sa transe. Une jeune fille était là, de l’autre côté du petit rectangle de grillage qui avouait que, le soir dans son lit, elle se caressait en pensant à un homme. Il en avait déjà tellement entendu à propos de masturbation que l’abbé se demanda ce qui l’avait soudain « réveillé », quand il s’aperçut qu’il bandait. Une magnifique érection soulevait sa soutane : mon Dieu, il y avait si longtemps ! Il fallait certainement remonter jusqu’au Séminaire pour trouver une telle érection spontanée.


Perturbé, l’abbé expédia sa pénitente avec trois « Notre-Père » et cinq « Je-vous-salue-Marie ». Et puis la vie reprit son cours, le passage des autres paroissiens, ses occupations et charges pastorales lui firent oublier cet incident jusqu’au jeudi soir suivant : en préparant sa journée du lendemain, l’anecdote lui revint en mémoire. Il avait toujours refusé d’intervenir consciemment dans les péchés qu’on lui avouait, il laissait son subconscient (l’Esprit-Saint ?) parler par sa bouche et tout le monde en avait été satisfait jusqu’à présent. Qu’est-ce qui avait bien pu le faire réagir ainsi ? Si elle revenait, il décida de « cuisiner » la jeune femme afin d’en avoir le cœur net.


Vendredi, dix-huit heures, la jeune fille est là, assise, attendant son tour. L’abbé la reconnaît, c’est Cécile, une gamine qu’il a eue au catéchisme il y a quelques années et qui était partie « à la ville » pour poursuivre ses études. Elle doit bien avoir une vingtaine d’années à présent.

L’abbé s’installe et doit attendre le passage de trois personnes avant que Cécile ne vienne s’agenouiller :



Et là encore, Cécile avoue ses masturbations solitaires et ses pensées lubriques envers un homme.



Un lourd silence s’installe, soudain interrompu par un aveu chuchoté :



L’abbé est abasourdi, ahuri par cette révélation. Une soudaine érection, incontrôlée, vient le perturber encore plus. C’est totalement en dehors de sa volonté qu’il s’entend prononcer :




Quatre mois plus tard, le ventre de Cécile commençait à s’arrondir…






oooOOOooo




Humain

(Café-clope)



Je suis un être humain.

Mon métier est de défendre la civilisation, de ramener la paix et la justice. Ou quelque chose comme ça.


L’humanité passe, elle monte de l’estomac à la bouche en laissant dans l’œsophage une sensation de brûlure désagréable, et s’en va avec la chasse d’eau, ne laissant derrière elle comme trace qu’une haleine fétide et un arrière-goût chimique et amer dans la bouche, comme un plat gâté.


Depuis mon arrivée, je n’ai fait que de la figuration dans une guerre qui n’a pas lieu, ne porte pas de nom, une guerre orpheline des nations qui l’ont déclenchée, mais qui, trop honteuses pour la reconnaître, ont préféré poser dessus le couvercle du politiquement correct en se bouchant le nez. Ça ne se passait pas trop mal. On escortait le préfet jusqu’au palais présidentiel, on patrouillait dans les faubourgs de la capitale. Des fois, on partageait une sucrerie avec un des gamins qui glandent dans les rues et nous promettent de nous trouver les plus belles filles de la terre à deux rues d’ici.


Et puis il y a eu le bus scolaire. Les quarante-trois gosses, leurs cinq accompagnateurs et le chauffeur, aucun n’a survécu. Tous sont morts sur le coup. Les autres se sont vidés sur le lino de ce cube de béton qu’il est d’usage d’appeler hôpital.

C’est complètement par hasard qu’on les a repérés, dans le centre-ville, dans un ancien hôtel désaffecté. Ça devait faire des mois qu’ils s’y étaient installés, au nez et à la barbe de tout le monde, peut-être avec la complicité du voisinage immédiat, qui sait ?



Un chargeur de trente coups chacun, une escouade de dix hommes : trois cents cartouches. Bizarre de déambuler au milieu de ces corps, certains n’étaient même pas encore morts.



Ils avaient l’élégance de signaler qu’ils quittaient la scène d’un bruit évoquant le raclement de gorge mâtiné de bulles d’air dans un continuum glaireux.

Que sont-ils ? Islamistes ? Communistes ? Un truc en « istes », de toute façon.


Qu’importe. Faire sauter des innocents, c’est ça, leur révolution, quelle qu’elle soit. Sont-ils humains ? Biologiquement, sans doute. Ceux qui béent laissent tous entrevoir la même merde sanguinolente, la même bidoche dégueu. Mais être humain, c’est juste une question de bouts de viande collés les uns aux autres ?

Un animal, quel qu’il soit, tombe de la même manière sous les balles.

Alors quoi ?


La réponse est là, sous mes yeux, sur la table : des explosifs artisanaux en préparation. Ils tuent cinquante innocents, et que font-ils ? Encouragés, ils envisagent d’en tuer cent. Pour leur révolution à la con ? Elle doit bénéficier à qui, d’abord ? Pas à leur prochain. Pas à l’humanité.

Ils n’ont rien à voir avec l’humanité, rien, même si les apparences sont trompeuses. A-t-on les mêmes scrupules à foutre en l’air les cafards qui viennent pourrir nos maisons ?


Il en restait un. Une vingtaine d’années, tout au plus. On l’a laissé baigner dans sa pisse pendant au moins deux heures avant de poser la première question. Il ne voulait pas répondre.

On a demandé un volontaire, pour aider à l’interrogatoire. J’ai levé la main. Je ne savais pas trop comment m’y prendre. Je devais avoir l’air un peu empoté ainsi. Mais j’apprends vite, ça a été mentionné sur plusieurs de mes carnets de notes, lorsque j’étais petit.


Lorsque j’en ai fini avec lui, il n’était pas beau à voir, mais il était encore vivant, et, s’il ne bougeait pas trop la mâchoire, il pouvait encore parler. Enfin, plutôt gargouiller. L’interprète a tout traduit, le caporal soigneusement noté. Il ressemblait à une sorte de soufflé aux fruits rouges, et ne bougeait presque plus. Terroriste. C’était un terroriste.


Il pleurait, appelait sa mère de toutes ses forces. C’est impressionnant, comme sensation : on a en face de soi un type capable de semer la mort, la terreur et la désolation et qu’on craindra plus qu’un dieu vengeur. Ce corps n’est pourtant pas plus solide que les autres : on n’imagine pas combien il est facile de retourner des pouces, surtout quand on a eu huit autres doigts pour s’entraîner auparavant.


Tout ça a permis de retrouver d’autres caches. Combien de tués ? Quelques-uns. Mais, contre tout cela, combien d’innocents sauvés ?


Il a pu, de manière fulgurante, être pour une poignée d’entre nous, un visage, une voix, des cris. Pour d’autres, il a été l’ombre anonyme qui a décidé arbitrairement que leurs vies s’arrêteraient au moment voulu. Sans autre raison que la seule volonté de frapper aveuglément, comme le cancer. Pas le Camarade Suprême ou un quelconque grand prophète. Il avait le choix.


Je crois que personne ne sait où sont ses restes. J’ai haï ce type, il m’a forcé à faire ce que j’étais venu combattre. Mais peut-on gagner une guerre en tendant des bouquets de fleurs ? Lors d’un traitement, on détruit de la vie, aussi. Et mon patient, c’est ce pays.


Les raids sur les autres planques ont suscité la colère et l’indignation de la population : hé, quoi ? On nous refuse la liberté d’être des morts en sursis, les prochains à agoniser sous les yeux des médecins impuissants ? Scandale ! Alors, l’insurrection a métastasé. La méthode est implacable : pas plus d’un prisonnier à la fois. Quand c’est possible.


Les taches sur ma tenue de combat ont noirci, elles ne partiront plus. Je songe à tous ces attentats qui n’auront pas lieu, à tous ces gens qui, demain, pourront aller à l’école, au travail. Qui pourront vivre encore un peu, grâce à moi.


Mon métier est de défendre la civilisation, de ramener la paix et la justice. Je veux qu’on dise ça.

Je reste un humain, malgré tout.






oooOOOooo





Refus consenti

(Shiva-)



Il est 23 h lorsque nous arrivons au club. Notre entrée est remarquée par les deux couples attablés près de la piste de danse, qui interrompent brusquement leur discussion au champagne, comme s’ils nous avaient attendus.


La salle est presque vide. Nous sommes gênés par l’examen grossier et les observations des quatre individus, certainement pas habitués, au regard de leurs manières déplacées. Nous feignons l’ignorance et allons discrètement nous isoler près du bar.



En attendant le retour de Vincent, je prends mes repères, tentant de dessiner mentalement le plan du club. Imaginant ce qui pourrait se trouver derrière telle ou telle ouverture, alcôve, rideau… ou bien en haut de ces escaliers-là.


Un des hommes du « groupe de Quatre » qui nous a accueillis il y a 10 minutes se dirige vers moi, maladroitement distingué.


Je n’aime pas son genre : la soixantaine, pas très grand, le profil aiguisé, nerveux, le regard fuyant. On dirait une fouine ou un terrier en chasse. L’œil brillant, vif, un sourire forcé et hypocrite. Il m’inspire méfiance et dégoût :



Vincent revient avec nos cocktails.



Après m’avoir questionnée du regard, Vincent décline poliment la proposition du type qui n’insiste pas, visiblement déçu, peut-être même vexé.



Nous le remercions d’un sourire aimable, tandis qu’il s’éloigne pour rejoindre ses amis.


Nous prenons nos verres et visitons les lieux. Les rideaux cachent des petits salons privés, il y a un sas vitré pour les fumeurs, des banquettes et miroirs dans les alcôves. À l’étage, un cabinet de toilette, une grande salle où sont disposés un lit simple et un lit à baldaquin. C’est assez pauvre de décoration, pas très intimiste, cela manque de style et d’harmonie.





Déjà une heure que nous sommes là. Nous espérions que l’arrivée d’autres couples permettrait que l’on s’amuse un peu. Seulement, tous ceux qui sont arrivés depuis ne nous correspondent définitivement pas : trop vieux, trop gras, trop flasques, trop maigres, trop vulgaires… trop de « trop » ; inutile d’insister. Un couple expose leur échange de caresses intimes, près du bar, une femme bouge pathétiquement sur la piste de danse, dans l’espoir de motiver d’autres personnes à se joindre à elle. Non, décidément ce club n’a rien d’engageant. Notre première expérience du genre était plus jouissive.


Blasés, nous allons fumer une cigarette dans le sas vitré, le temps de laisser une dernière chance au destin de nous présenter un couple qui nous séduise.


C’est alors que deux jeunes nous rejoignent. Échange de banalités et regards implicites. Le garçon me plaît. Je sens sa main chaude remonter le long de ma cuisse, tandis qu’il vient lécher mes lèvres. Je me laisse aller, et tout le monde peut apprécier le spectacle, avant que nous allions nous installer dans un des salons privés. Je m’installe sur la table basse, genoux écartés et cambrée, offerte à Armand, qui glisse ses doigts sur mes lèvres humides. Je me délecte alors de Vincent, pour lui offrir une fellation comme il les aime.


Armand me pénètre lentement, un doigt après l’autre, tirant un peu plus sur les parois de mon orifice. C’est à peine douloureux et, après quelques instants, j’aime sentir son poignet glisser, par va-et-vient sur le bord de mes lèvres. Vincent s’agrippe un peu plus à moi, à chaque fois que ma bouche se resserre autour de son membre, sous l’effet des subtiles mais intenses sensations provoquées par la main d’Armand, et les doux pincements de sa copine sur mes boutons érectiles gonflés et dressés. Je sens rapidement une vague de plaisir s’emparer de Vincent et moi. C’est presque merveilleux.


Le couple nous quitte et Vincent s’éclipse un moment, après quelques tendres baisers.


Je reprends à peine mes esprits, et sens de nouvelles mains me caresser les hanches. Les yeux dans le vague, je suis prête à jouir à nouveau, sous ces caresses masculines de plus en plus précises sur ma peau et mon sexe. Le type me pénètre alors en levrette, de manière inattendue et plutôt brutale. J’arrive à distinguer le tissu rayé d’une chemise noire, forcée de garder la tête baissée, la main du type fermement appuyée sur ma nuque, pendant qu’il s’ébroue en moi. Son affaire est vite réglée. La mienne aussi. Je me retourne : Nasim se rhabille sans un mot, l’air satisfait d’avoir obtenu ce qu’il voulait ce soir.






oooOOOooo




Première fois

(Olaf)




La jeune femme reste silencieuse, le visage fermé.



Il s’approche d’elle, provocant.



Sa voix tremble, il se contient avec peine.



Elle tend la main vers lui, une immense tristesse au fond des yeux.



Elle détourne la tête. La discussion tourne à l’aigre.



Il reste prostré, à bout d’arguments. Elle se prépare à partir, à contrecœur. Au moment où elle veut ouvrir la porte, il la retient.



Elle sursaute, désarçonnée par ce soudain intérêt.



Bouleversée, elle referme la porte et s’avance vers lui. Elle le prend entre ses bras, serre son visage contre son ventre. Il reste immobile, paralysé par ce qui bouillonne en lui.


Elle finit par reculer d’un pas. Sans cesser de le regarder, elle déboutonne sa blouse et la laisse glisser au sol. Ses seins nus frémissent sous les yeux du jeune homme. Malgré tout son ressentiment, il ne peut s’empêcher de les contempler. Elle revient près de lui et prend sa tête entre ses mains. Il ne se détourne pas lorsqu’elle approche son mamelon de sa bouche.



Elle lui retire ses derniers habits. Il ne résiste plus et la laisse s’allonger sur lui.


Elle écarte ses cuisses pour l’aider à se glisser contre sa vulve, puis le prend en elle, d’un mouvement des reins.


Il se laisse guider sur le chemin du plaisir. Enfoui au fond de son ventre, il découvre les sortilèges que seule une femme amoureuse sait offrir.


Quelques mots murmurés contre son oreille suffisent à le faire craquer. Une indéfinissable explosion d’émotions et de volupté, dans les larmes et le sperme, scelle cette première fois, qu’il n’aurait jamais pu imaginer plus intense, même dans ses rêves les plus fous.