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n° 14822Fiche technique18091 caractères18091
Temps de lecture estimé : 11 mn
23/02/12
Résumé:  Quelques réflexions, un peu de train, une nuit dans un hôtel.
Critères:  fh extracon hotel voyage train voir portrait -extraconj
Auteur : Limonova      Envoi mini-message

Série : Belle sans seigneur

Chapitre 01
Belle sans seigneur

6 Février 2012


Cher Nicolas,


Comme promis, mon analyse objective et pertinente. Cela dit, je ne me sens pas le droit de t’analyser, ni de pointer ce qui pourrait aller ou pas dans ton caractère. Je vais me contenter de te livrer mon ressenti, celui de Palmyre et celui d’après. Cela n’engage que moi, et ma perception des choses. Et peut-être que cela pourra t’éclairer sur tes expériences actuelles.


J’ai flashé sur toi au Club Med, c’est indéniable. Tu détonnais tellement au milieu de ces gens, que je côtoie chaque fois que j’y vais, sans les fréquenter. J’avais l’intention de passer un joli moment, sans conséquence aucune. Et puis nous nous sommes promenés, nous nous sommes écrits et puis ta douceur et ton côté affectueux et tactile m’ont beaucoup étonnée. J’étais prête à te garder comme amant, et puis très vite, tu as dit « mon amour ». C’est là que j’ai péché. J’aurais dû immédiatement redresser la barre, connaissant la valeur d’une telle déclaration au bout de 48 heures de fréquentation. Au lieu de quoi, j’ai plongé la tête la première dans cette folie d’adolescents.


Ensuite, la suite, et puis la fin. Prévisible à en mourir, je parle pour moi. Je m’explique, je suis une personne très complexe, qui veut tout et son contraire. Ce qui se traduit par des comportements parfois impulsifs, obtus et décalés. Tu m’as traitée un jour de petite fille gâtée, et tu n’as pas tort. Je suis très exigeante sur à peu près tout, avec une relation très fusionnelle à l’argent. Tu m’as dit un jour aussi que tu n’avais absolument pas les moyens de m’entretenir et ta franchise t’honore. Je suis en même temps sensible et vénale, sincère et fausse, parfois aussi. Tout cela pour te dire que nous n’aurions pas été heureux, parce que je ne le suis pas et que personne n’y peut rien.


En ce qui te concerne, je pense que tu es une personne extrêmement séduisante. Tes côtés papa présent, homme accompli, fin gourmet, protecteur, attentionné et doux ont de quoi en faire craquer plus d’une – ce qui doit être un peu le cas. Pour autant, tu n’es pas parfait et je ne t’apprends rien. Tu es humain donc tu doutes, tu te trompes, tu évalues mal certaines situations. Rien de grave. On est quelques-uns à croire que le bonheur n’est pas pour nous, et qu’il n’est pas mérité lorsqu’il se présente. Toi et moi faisons partie du club, chacun à sa façon. Si tu enchaînes les relations inutiles, c’est que tout n’est pas très clair avec la personne à laquelle tu tiens. Réaction normale, et on ne peut pas t’en vouloir. Tu n’es peut-être pas prêt, mais devant la bonne volonté de cette personne tu te sens coupable. Tu as besoin de ce dont tu m’as privée, entre autre de temps. Tes relations inutiles ont l’avantage d’être rapides et peu encombrantes. Viendra le moment où tu t’en lasseras, ce qui est inévitable. Si cette personne est toujours là, c’est que c’était la bonne. Sinon la vie t’en offrira d’autres, parce que tu le mérites vraiment. Tu as un passage à vide, ce qui est bon signe, car tu te remets en question et qu’il y a une raison, ou plusieurs. Je te fais confiance pour rebondir, tu aimes trop la vie, et tu aimes l’aimer, ce qui est plus rare.


Voilà.


J’ai déménagé, sinon. La maison est belle, j’adore mon espace, ma chambre, mon dressing, mon salon. Le jardin est grand, la piscine aussi. Mes relations avec mon mari se sont beaucoup apaisées, il tient réellement à moi et s’inquiète énormément pour mes épisodes, nombreux, de tristesse et d’insatisfaction. Mais dans l’ensemble tout va bien. Je dépense toujours autant, mais pour la maison, enfin sa décoration. J’adore cela, et les compliments qui vont avec.


Si je n’ai pas pu répondre à toutes tes questions, ou mal, ne m’en veux pas, j’ai fait de mon mieux.


Je t’embrasse.




Ceci était la réponse à un sms de sa dernière – et obsolète en date, voire tout court –, toquade. Toquade résultant d’un séjour en club de vacances où elle emmenait tous les ans une amie et leurs garçons respectifs. Il lui demandait son avis sur lui, car « relations inutiles, personne à laquelle il tient qui s’éloigne, bla-bla ». Il en résultait une remise en question quasi-existentielle, ce qui la surprit beaucoup, avant de la faire rire, car il avait des connexions neuronales très incertaines, ce qu’avaient masqué un corps plus que bien bâti et une soif tactile, touchante au début, puis très vite écœurante.


Bien entendu elle ne pensait pas un traître mot de sa missive, à part peut-être les passages la concernant, elle. Mais, selon son humeur, il lui arrivait d’aimer faire plaisir, et elle pressentait que toutes ces paroles allaient, en plus de l’impressionner, lui procurer la sensation d’un semblant de matière à réflexion.


Et elle ne se trompait pas, car presqu’immédiatement, preuve qu’il n’avait pas eu le temps d’introspecter quoi que ce soit, il lui envoya sa réponse :




Et bien, je suis heureux, même très heureux de t’avoir demandé cet avis, je savais qu’il en sortirait quelque chose de positif et je ne suis pas déçu, je suis même assez troublé par ces révélations car tu as été très vague par moment et surtout quand tu as décidée d’arrêter notre relation.


Tu vois la grande leçon de tout cela est malheureusement qu’il ne faut pas déclarer ces sentiments trop rapidement, tu réalises que c’est « mon amour » qui t’as en fait, fais peur. D’un autre côté si tu m’avais dis ou fait comprendre que tu souhaitais juste que l’on soit amant et que tu ne quitterai jamais ton mari et ton mode de vie, je l’aurai compris et peut être accepté un temps… Car moi j’étais très amoureux de toi. En revanche je te trouve un peu sévère avec toi, je ne crois pas que tu sois si horrible que tu veux bien le dire et je ne suis pas d’accord quand tu dis que je ne crois pas au bonheur et que je ne le mérite pas, non au contraire j’ai été très gaté par la vie et espère bien l’être encore. Je crois aussi que tu es complexe mais qu’en fait tu fais de la résistance au bonheur mais cela tu l’as dis et le sais.


Pour le reste c’est très gentil et même si cela est plutôt flatteur je le prend avec plaisir venant de toi.

je regrette une chose quand même c’est de n’avoir pas eu suffisamment de temps pour te faire l’amour.

Merci de tout coeur pour ce très beau moment, tu es gravée à jamais dans ma mémoire.


Je t’embrasse très fort, te souhaite de trouver la paix intérieur et plein de bons moments avec Maxime.


Nicolas.




Maxime était son fils et la réponse lui rappela à quel point Nicolas était fâché avec l’orthographe, la syntaxe, la grammaire, bref tout ce qui participait de son évaluation personnelle des personnes qu’elle rencontrait, hommes ou femmes. Il n’avait même pas l’excuse d’être GO, encore qu’elle en avait croisé un dont les yeux malicieux et les termes choisis pour esquisser son profil psychologique l’avaient laissée perplexe. Non, il était GM (gentil membre), et il avait fait honneur à son statut, car sur les trois occasions qui se présentèrent pour faire l’amour, son membre resta gentil, et les rata toutes. Elle s’en fichait complètement toutefois. Elle était assez abstinente en ce moment.


Elle avait eu une cohorte d’amants. Deux personnes en émergeaient, sexuellement parlant : Jérôme, et son mari. Jérôme était associé – à hauteur d’elle ne sait combien –, dans une société qui s’occupait d’elle ne savait quoi. Cela avait l’air très pointu et prometteur, car lorsqu’il en parlait, ses yeux cessaient de la regarder pour se déplacer vers un point inconnu de l’horizon, et un petit sourire satisfait remplaçait l’air sérieux et pénétré qu’il gardait la plupart du temps.


Il avait eu une vie antérieure de baroudeur, riche et remplie – qui passait autant par la plongée sous-marine pratiquée dans des îles lointaines en qualité de moniteur que par une coopération dans un pays africain. Ajoutez à cela, une ceinture noire de judo, quelques accords de guitare, des solos de batterie et vous vous faisiez une certaine idée de la personne. Physiquement il était musclé de partout, mais des muscles secs et en finesse, ce qui lui faisait porter beau l’habit. La chose qu’elle ne supportait pas chez lui était une chevalière en argent oxydé, totalement incongrue à son auriculaire.


Elle se souvint d’un week-end, où ils avaient pris le train ensemble à Paris, lui, pour aller faire de la voile, elle, pour une cure de thalassothérapie, dans deux endroits différents. Ce qui les réunissait était ce voyage en train et une nuit à passer ensemble à Rennes avant de prendre chacun sa correspondance le lendemain. Ils s’embrassèrent un peu dans le wagon-restaurant, s’ennuyèrent beaucoup au point d’en être gênés et enfin arrivèrent à destination. Le taxi les déposa dans le mauvais hôtel, et ils durent marcher quelques centaines de mètres pour rejoindre le bon. Elle observait attentivement les gens dans la rue, fascinée par leur provincialité. Cela n’avait rien à voir avec leur mise. L’atmosphère était différente, un je-ne-sais-quoi suspendu dans le temps qui donnait l’impression qu’il y avait un décalage de quelques mois entre la capitale et eux.


Une fois arrivés à l’hôtel, ils eurent à peine le temps de se rafraîchir avant d’aller dîner dans un établissement étoilé réservé par lui. Là encore, dans le taxi, elle avait le visage collé à la vitre, avalant les paysages et les personnes les peuplant, tandis que lui pressait sa main dans un mouvement dont elle ne savait trop si c’était de l’impatience ou un accès d’affection.


Le dîner fut comique, pour elle en tout cas. C’était la première fois qu’elle voyait autant de « bonne société » réunie. Il y avait là, le couple sexagénaire coutumier des lieux, des notables – de la mairie sûrement, leurs cravates en étaient un indicateur assez fiable –, des commerciaux « gradés » avec des filles aux lunettes très sérieuses à leur table, et zéro touriste. Ah si, eux ! Aucune trace de caustisme ni de cynisme nulle part. Ils dînèrent de choses très compliquées et indéfinissables, pas du tout le genre de nourriture qu’elle s’attendait à trouver dans son assiette. Jérôme la dévorait du regard et semblait très amoureux. Elle fut vite fatiguée et demanda à rentrer à l’hôtel, car le réveil s’annonçait difficile le lendemain. Une fois au lit, elle le regarda pensivement, puis lui souhaita bonne nuit en lui tournant le dos. Il eut l’air surpris, mais pas plus que cela. Une demi-heure passa, puis une autre. Personne ne dormait mais ils faisaient comme si. Elle sentit sa main dans ses cheveux, il lui sembla qu’ils se dressaient tous, électrisés par ce contact imprévu. Il les caressait avec tendresse et douceur. Elle se retourna pour lui effleurer la joue dans un geste de gratitude.



« De notre relation ? » pensa-t-elle, tandis qu’il commençait à déposer des baisers dans son cou. La trajectoire sinueuse de ces derniers amena ses lèvres sur la naissance de ses seins, qu’elle n’avait pas particulièrement réceptifs en temps normal. Mais là, dans la semi-obscurité de cette chambre d’hôtel, il lui sembla qu’ils se préparaient à quelque événement exceptionnel, et il en était ainsi de tout son corps. Son téton commençait à émerger, répondant à l’appel d’amour de la langue de son partenaire.


Elle était immobile, n’esquissant aucun geste de réciprocité. Elle voulait se concentrer de toutes ses forces sur ce que ses sens lui procuraient, quitte à en être peu coopérative. La langue continuait de laisser, entre succions délicates et baisers, de petites quantités de salive qui, en refroidissant sur sa peau, la faisaient frissonner, de désir, de plaisir, presque de peur.


Soudain, il la saisit, presque brusquement, et la déplaça en travers du lit. Elle était sur le point de lui faire remarquer son manque de manières, mais déjà la zone de son nombril était la proie de cette langue redoutable. Elle croisa ses cuisses, davantage pour retarder le moment où il arriverait à destination que par molle résistance.



Elle écoutait la sarabande de son propre cœur. Son corps se tendait au fur et à mesure que son partenaire essayait d’obtenir exactement le contraire.


Il inséra la main latéralement dans le pli entre ses cuisses et son pubis et, repoussant doucement la cuisse, il obtint l’écartement voulu, et une sorte de plainte sourde, comme un appel au secours étouffé.



Déjà il embrassait la peau lisse à l’intérieur de ses cuisses, puis sa bouche vint explorer les grandes lèvres de son sexe. Elle agrippa ce qu’elle trouva de draps, et rejeta la tête. La langue de Jérôme débusqua son clitoris et délicatement le décalotta, bien au chaud au creux de sa bouche. Elle respirait en discontinu, partagée entre l’extase de se laisser ainsi faire et la culpabilité de ne rien donner en retour, du moins en apparence.


Elle sentit une légère pression à l’entrée de son vagin. L’humidité ruisselante de ce dernier permit le passage presqu’instantané des doigts de son amant. Elle répéta de façon hagarde son prénom.



Elle releva son bas-ventre et espéra qu’il comprendrait son message. Au lieu de quoi il s’arrêta net pour essayer de discerner son expression. Puis il lui sourit amoureusement et alors qu’elle allait lui demander si lui l’aimait, il la pénétra de toute la longueur de son membre.


Elle ferma les yeux, une sensation d’irréel la saisit. Il lui faisait l’amour en cadence avec les battements de son cœur affolé. Elle se jeta à corps perdu dans cette bataille de luxure et de sens en recherchant et retenant son sexe en elle à coups de déhanchements plus ou moins ordonnés. Elle attendait que son membre vienne buter sur le col de son utérus pour le caresser avec les muscles de son vagin. Soudain il se pencha sur elle pour aspirer ses seins et elle crut percevoir une parole.



Elle les regarda et, en effet, ils avaient triplé de volume. Jérôme était fou de désir, il replongea en elle de toutes ses forces et elle, ballottée telle une poupée de chiffon, priait pour que cet instant durât une éternité.



Vingt minutes plus tard le réveil sonna.


Éperdument amoureux, ils prirent une douche ensemble, s’habillèrent puis descendirent dans le hall de l’hôtel où une machine leur distribua avec souffrance deux gobelets en plastique remplis de café imbuvable. La note réglée, ils se dirigèrent vers la gare. Ils s’embrassèrent à en perdre haleine dans la buvette. Elle prenait le train la première, il l’accompagna jusqu’au wagon et fit plein de dessins sur la vitre avec son doigt, et des baisers avec la bouche. Subitement il disparut pour surgir devant elle, et l’emmener hors des regards, devant la porte. Il l’embrassa et soupesa ses seins.


Une fois le train en marche, elle le regarda longtemps, jusqu’à ce que la distance l’eut transformé en un petit point grisâtre.


Arrivée sur les lieux de sa cure de thalassothérapie, elle annula tous les soins après avoir observé la clientèle et le personnel paramédical et les remplaça par des promenades le long du chemin des douaniers. Elle lut aussi énormément.


Trois jours après ils se retrouvèrent, toujours à la gare et reprirent le TGV en sens inverse. Ils étaient comme deux gamins dissipés, se bécotant et se moquant des regards désapprobateurs.


Enfin Paris. L’attente dans la file de taxis, le froid, la nuit. Elle était fatiguée, et lasse de ce surmenage. Il le remarqua et la blottit contre lui.



Elle monta dans le taxi, il rentra la tête à l’intérieur pour lui offrir un dernier baiser.


Elle ne le revit que deux ans plus tard, dans un bar bondé où elle écouta le récit détaillé de ses prouesses professionnelles et sentimentales. Il couchait avec une passionnée de cinéma indépendant aux gros seins, mais « moins attirants que les tiens, va savoir pourquoi ».


Oui, va savoir. Ses seins à elle avaient mis un mois à reprendre leur forme initiale. Que c’était déjà loin tout cela.




À suivre