Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 14926Fiche technique14773 caractères14773
Temps de lecture estimé : 9 mn
22/04/12
Résumé:  Les ascenseurs parisiens ont toujours été exigus. Quand, en plus, on s'y retrouve coincé avec une voisine odieuse pour une durée indéterminée, on commence à trouver le temps long...
Critères:  fh inconnu voisins ascenseur voir exhib humour -humour
Auteur : User UnKnown      
Montée au septième

C’était dans un immeuble parisien, un de ces ascenseurs exigus sur lesquels une petite pancarte annonce orgueilleusement « 3 personnes, 200 kilos » alors qu’on peine à s’imaginer entrer seul dans sa cage minuscule.


Une jeune femme avait pris place dans l’élévateur antédiluvien, et s’apprêtait justement à appuyer sur le bouton du septième. Le froid mordant de l’hiver ne semblait pas avoir eu raison de ses velléités à se vêtir avec coquetterie, mais elle semblait pressée de rentrer chez elle.



Hirsute, le jeune homme sprinta sur les quelques mètres du hall, hâlant derrière lui un lourd colis, interceptant de justesse les portes qui se refermaient sur ses doigts. À la force des bras, il ouvrit grand la porte de l’ascenseur, s’inséra tant bien que mal en s’excusant. La jeune femme se recula au maximum contre la paroi, en soupirant de manière bruyante, tandis que son voisin inconnu mettait une bonne minute à caler son encombrant paquet de façon à ne pas gêner la fermeture des portes. Haletant, la veste en bataille, il renouvela ses excuses, accueillies par son interlocutrice par un second soupir.



Il tenta d’atteindre le panneau de commande, situé juste derrière le dos de la demoiselle, ce qui ne fut guère pratique. Après que la main de l’inconnu lui eut touché par mégarde le bras en tentant de le contourner, elle se contorsionna pour atteindre elle-même le bouton, soupirant à nouveau.



L’ascenseur s’éleva lentement, poussa un gémissement atroce, dépassa avec peine le premier étage. D’abord, il y avait le lourd colis, coincé tant bien que mal contre la paroi par le dos du jeune homme, qui faisait face à la jeune femme, elle-même appuyée contre le mur. Les deux s’éloignaient autant que possible, ce qui laissait tout au plus une dizaine de centimètres entre eux. Les souliers à talons de la femme la rehaussaient de quelques centimètres, les mettant ainsi à égalité niveau taille : pour rendre plus supportable cette proximité gênante, lui regardait dans le coin supérieur gauche de l’ascenseur, tandis qu’elle fixait le sol à droite. Un petit raclement de gorge discret servit d’excuse à l’homme quand, pour dégager sa jambe gauche victime d’une crampe, il effleura le genou droit de sa comparse.


Après avoir courageusement tenu jusqu’au troisième, l’ascenseur s’immobilisa avec le grincement d’un hippopotame souffrant d’un lumbago. Cette fois-ci, une interjection scatophile accompagna le énième soupir de la femme.



La situation étant gênante, et il était souhaitable pour les deux parties qu’elle se débloquât rapidement. Hélas, la machine, vaincue par un fâcheux coup du sort, ne daigna pas repartir d’elle-même.



C’est qu’elle sentait le panneau de contrôle au creux de ses reins, et ne voulait pas que son compagnon maladroit vînt la frôler à cet endroit. Elle se retourna pour l’actionner, l’effleurant au passage de sa hanche. Rien ne se passa, aussi revint-elle dans sa position première.



Le jeune homme ne savait visiblement pas où se mettre, essayant comme il le pouvait d’apaiser l’ire de sa compagne d’infortune, qui l’ignora superbement. Il reprit :



Le jeune homme faillit ajouter « cela aurait pu être pire, j’aurais pu avoir des flatulences », mais il se retint à temps. Il n’était sûr ni que l’humour conviendrait à la circonstance, ni de pouvoir retenir les siennes pendant les heures à venir.



Un long silence s’établit, que Topaze voulut rompre avec une conversation anodine.



Hector décida de ne pas aborder le sujet des flatulences.



Un ange passa, avant que Topaze ne soupire, s’avouant vaincue :



Hector y consentit, et la jeune femme s’assit, tirant sur le tissu de sa jupe afin qu’elle couvre le maximum de peau, sans réussir toutefois.



Topaze tendit une douce main à Hector qui la saisit de la dextre, posant sa senestre sur le bras de la jeune femme afin de la remettre sur pieds. Ce fut ensuite à son tour de s’asseoir. Il ne fallut pas quinze secondes à Topaze avant de pester à nouveau :



Topaze piqua un fard tandis qu’Hector se débarrassait de son pardessus et de sa veste.



La respiration accélérée, Topaze défit l’attache de sa jupe, qu’elle laissa glisser sur ses jambes, et se retourna pour saisir l’autre dans son sac. En se penchant, elle sentit son postérieur rencontrer un bassin. Un instant, elle crut que c’était le squelette. Un instant seulement.



Elle sentit deux mains s’insinuer sous son chemisier et saisir ses hanches nues.



Topaze entendit un bruit de tissu froissé, et sentit sur sa peau un corps nu se coller au sien, corps muni d’une protubérance qu’on ne rencontre habituellement pas dans ces circonstances et certainement pas avant le mariage.



Ce ne fut pas l’alarme, inopérante depuis plus de six mois, qui alerta la compagnie assurant le maintien en service des ascenseurs, mais les résidents de l’immeuble, dérangés toute la nuit par des bruits animaux, qui, renseignements pris, ne venaient d’aucun des copropriétaires. Il fallut aux techniciens plusieurs heures pour faire redescendre la cabine, coincée entre deux étages par les cahots qui l’agitaient. Quand ils ouvrirent la porte, ils ne virent tout d’abord rien, aveuglés par un épais brouillard de vapeur. Puis, ils distinguèrent, dans la cabine aux moquettes lacérées de traces d’ongles, deux corps entièrement nus, entremêlés d’une manière si complexe qu’on ne les distinguait plus, endormis sous le regard concupiscent d’un squelette de brocante et d’un farfadet en stuc…