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n° 15067Fiche technique30909 caractères30909
Temps de lecture estimé : 18 mn
10/07/12
Résumé:  Julie est une jeune femme qui aimerait vivre le grand amour. Comme les autres. Enfin, pas complètement comme les autres...
Critères:  f fh jeunes inconnu collègues bizarre travail cérébral voir exhib fmast portrait -exhib -mastf -lieuxpubl
Auteur : Athanagor            Envoi mini-message
Papillon de nuit

Julie est étudiante. Elle aura vingt et un ans en octobre prochain. Pour elle, la vie n’a jamais été vraiment cruelle, ni vraiment rose. Son existence est marquée par la succession des années scolaires puis par les années de fac. Rien d’extraordinaire.


Elle-même s’estime très banale, et digne de peu d’intérêt. Elle n’est pas laide, elle ne le pense pas. Il lui arrive régulièrement de se faire draguer par des hommes. Mais ça ne l’intéresse pas. Pas comme ça. En réalité elle se trouve neutre, vide de l’intérieur. Rien n’est encore venu la faire vibrer au point qu’elle s’engage corps et âme pour quelqu’un ou pour quelque chose.


Par exemple, elle n’a rien à voir avec ces jeunes militants qu’elle admire secrètement. Eux, ils assument des choix, même si ce sont parfois des choix débiles. Mais ça lui donne envie de ressentir, comme eux, un appel vers une cause.


Elle s’imagine que c’est un truc qui vous brûle de l’intérieur, une envie bouillonnante et irrépressible d’agir pour changer le monde et les gens. Avec ça dans le ventre, on doit bien se sentir un peu plus vivant non ? Mais à quoi bon ? De toute façon elle ne changera jamais le monde. Elle le sait bien. Alors pour l’instant, rien dans les tripes. Pas de feu bouillonnant. Rien.


Julie vit simplement sa vie, elle papillonne. Elle se laisse porter par les événements et ça lui réussit plutôt bien quand elle y pense, le soir dans son lit.


C’est vrai qu’elle est un peu seule. Elle s’en rend bien compte. Les quelques tentatives de vie en couple qu’elle a eues se sont toutes finies en catastrophe. Alors le prochain challenger, il a intérêt à avoir de sérieux arguments pour prétendre s’incruster dans son lit.


D’ailleurs en ce moment, il y aurait bien un candidat. Il s’appelle Thomas et il travaille avec Julie sur l’aire de péage de l’autoroute, au nord de la ville. Mais contrairement à elle, c’est son vrai métier, et pas un job d’été qui ne durera que quelques semaines. Tous les deux font partie de la même équipe de receveurs-péage. Ce sont les personnes qui sont aux barrières, dans les cabines, et qui font payer les automobilistes allergiques aux caisses automatiques.


Julie a eu la bonne surprise, à son premier jour de travail, de découvrir ce beau jeune homme élancé, aux cheveux frisés presque blonds. Comme elle, il traîne une nonchalance qui lui a plu.


Et puis il a toujours une histoire à raconter, une anecdote à dormir debout sur un client farfelu ou une rencontre étrange qu’il a faite la veille. Julie doute que tout soit vrai, mais elle pourrait rester pendue à ses lèvres pendant des heures.


Il a une façon de parler qui retient l’attention. Et une voix chaude, profonde et calme qui peut s’animer soudain pour les besoins d’un effet.


Oui, Julie laisserait bien Thomas entrer dans son lit et combler un peu sa solitude. Seulement Thomas n’est pas du tout intéressé par elle. Aucun doute là-dessus.


Julie sait reconnaître l’intérêt qu’elle suscite chez les hommes, ils ne sont pas très fins la plupart du temps. Mais chez Thomas, elle n’a trouvé aucun signe visible de la moindre attirance, tout juste un intérêt de politesse.


Elle s’est demandé pendant un temps si Thomas n’était pas tout simplement gay. Mais après avoir vu une grande brune lui sauter au cou à la fin d’un service, elle a écarté cette hypothèse tout en cherchant les pires défauts chez cette pétasse.


C’est sûr que Julie, avec son mètre soixante-cinq, n’a pas de si longues jambes. Et puis elle n’a pas non plus de si beaux seins. Mais au moins les siens sont naturels !


Pourtant Julie sait être séduisante. Elle sait se rendre désirable. Irrésistible même. Des petits seins, c’est très bien aussi. On peut, par exemple, ne porter dessus qu’un léger débardeur. Il suffit alors d’un petit courant d’air un peu frais et tous les regards masculins sont hypnotisés par les tétons qui s’impriment dans le tissu.


Et pour l’avoir expérimenté, Julie sait aussi captiver toute une salle d’attente remplie d’hommes. Quelques passements de jambes un peu langoureux quand on porte une petite jupe et l’atmosphère se charge aussitôt en testostérone. C’est très facile.


C’est très facile, seulement ça ne marche pas sur Thomas. Elle a bien tenté un jour de venir travailler en tenue sexy. Elle avait volontairement dévoilé un large décolleté sous les yeux convoités. Mais contrairement à l’effet voulu, Thomas s’était légèrement redressé et n’avait pas fini son histoire. Il était retourné dans sa cabine avant la fin de la pause en laissant Julie perplexe.


Malgré ces déconvenues, Julie continue ses tentatives de séduction à l’égard de son ténébreux collègue. Mais peut-être avec moins de conviction, en laissant une plus grande part à la rêverie et au fantasme.


Lorsqu’elle est à son poste, dans sa cabine, et qu’aucune voiture n’est en vue, ce qui n’est pas rare au milieu de la nuit, Julie se surprend parfois à contempler la cabine de l’autre côté de la voie. De dos, presque irréel sous la lumière des néons, elle observe Thomas.


En pensée, elle lui caresse la nuque. Elle passe la main dans ses cheveux en laissant ses doigts s’emprisonner dans les fines bouclettes. Et puis elle essaye de deviner l’odeur qui y règne. Elle s’imagine s’approcher de ce dos musculeux, enlacer cette fine taille et coller sa joue contre la chaleur virile de ces larges épaules.


Elle se prend tellement au jeu qu’une nuit, sa main est venue se lover entre ses propres cuisses et a doucement caressé l’épais tissu de son jean.


Elle n’a pas été beaucoup plus loin car une voiture s’est approchée de sa caisse, les pleins phares allumés. Elle a vite retrouvé son sang-froid, mais a gardé tout le reste de la nuit l’impression d’un feu qui couvait dans son bas-ventre et l’idée d’inachevé.


La semaine suivante, une nouvelle nuit de service l’attend. Et comme d’habitude, elle partage ces heures ingrates en compagnie de Thomas.


Émoustillée par la précédente expérience nocturne, jouée et rejouée mentalement le soir dans son lit, Julie est toute excitée quand elle aborde Thomas dans les locaux du centre de péage. Pour l’occasion elle s’est faite très coquette, s’appliquant davantage sur son maquillage, et privilégiant une jupe. Thomas lui en fait d’ailleurs la remarque, mais sans pour autant marquer beaucoup de plaisir. Néanmoins le compliment fait son effet sur Julie qui s’en nourrit pour son futur scénario.


Cette fois Thomas ne restera pas de dos, quand elle le rejoindra mentalement dans sa cabine, il l’attendra. Il lui redira des compliments sur sa tenue et puis il lui avouera qu’il aime retrouver à chaque service la bonne humeur et le sourire de Julie. Elle s’y voit très bien. Elle fera taire Thomas d’un baiser volé sur sa bouche. Cette fois, il ne se défilera pas et il l’accueillera dans ses grands bras.


Cette nuit-là, Julie a poussé un peu plus loin ses rêveries en observant Thomas dans sa cabine. Sa main s’est glissée à nouveau entre ses cuisses et n’a trouvé que le fin tissu de sa culotte comme barrage entre ses doigts et son sexe. Autant dire que ses rêveries ont pris une autre dimension. C’est sa main à lui qui lui écrasait le clitoris. Ce sont les doigts maladroits de Thomas qui ont baissé sa culotte à mi-cuisse pour dévoiler un sexe réceptif. Et c’est son gland, chaud et humide, qui s’est frayé un chemin jusqu’entre ses lèvres.


Malheureusement pour Julie, à nouveau, de puissants phares la ramènent à la réalité. Elle n’a pas le temps de réajuster sa culotte avant que la voiture n’emprunte la voie qui conduit à son guichet. Qu’importe, le chauffeur ne se rendra compte de rien, elle n’a que le buste de visible.


Le paiement est rapidement réglé. Le conducteur, probablement un commercial pressé de retrouver son foyer, ne la regarde presque pas. C’est à peine si Julie entend les formules de politesses d’usage.


Elle éprouve tout de même une petite hésitation et finalement une légère satisfaction à rendre la monnaie de la main même qui la caressait l’instant d’avant.


L’automobiliste ne marque pas de surprise. Pourtant Julie s’imagine que les pièces sont un peu plus poisseuses que d’habitude. Peut-être même que le ticket de caisse possède une marque, formée par l’impression de ses doigts humides sur le papier. Elle en sourit de plus belle à ce type qu’elle ne reverra sûrement jamais. Et elle regarde un moment la voiture s’éloigner. Lorsqu’elle reporte son attention sur Thomas, ce dernier s’est retourné et la regarde.


Instinctivement ses cuisses restées entrouvertes se resserrent. Thomas lui adresse une petite grimace accompagnée d’un signe de la main, le pouce tourné vers le sol. C’est un jeu qu’il a mis au point et qui consiste à noter les clientes, en fonction de leur beauté ou du modèle de leur voiture.


C’est la première fois qu’il semble partager son évaluation avec Julie en adaptant les règles et en notant son client à elle. Rien que pour le contredire, elle fait mine de réfléchir puis montre son pouce tourné vers le ciel. Elle accompagne son geste d’une moue un peu coquine, l’air intéressée, ce qui fait naître un rire chez Thomas.


Serait-ce possible qu’il lui accorde un peu plus d’attention ?


Thomas tourne à nouveau le dos à Julie dont les doigts ont vite retrouvé la chaleur de son sexe. Ce rire inattendu fait évoluer le scénario que Julie dresse mentalement.


Ils sont nus, tous les deux, et se promènent main dans la main en pleine nature. Il fait chaud et Thomas enserre Julie de ses bras musclés. Puis il la pousse doucement dans les herbes hautes et ils roulent tous les deux, l’un sur l’autre. Le rire bruyant de Thomas se mêle au sien. Julie peut sentir la verge de Thomas battre mollement ses cuisses. Jusqu’à ce qu’il stoppe leurs roulades et la plaque sur le dos. Ses grandes mains maintiennent les bras de Julie au-dessus de sa tête. Et il l’embrasse enfin, passionnément. Son sexe s’est durci.


Dans la petite cabine, au milieu de l’autoroute, la culotte de Julie est venue s’échouer par terre. Deux doigts enfoncés profondément dans le vagin et l’autre main caressant frénétiquement son clitoris, Julie se rapproche de la petite mort. Elle est toute à son délire et quand elle finit par jouir, silencieusement, c’est Thomas qui est en elle et qui la remplit.


La réalité la rattrape petit à petit. D’abord Julie reprend contact avec la cabine de Thomas, îlot lumineux perdu dans l’obscurité ambiante. Puis, progressivement, l’autoroute se dessine autour d’elle et reprend forme.


Pour finir, elle prend conscience de ses doigts en elle, et de sa culotte par terre. Du fauteuil qu’elle a imprégné de son plaisir.


Julie est comme hébétée. Un sentiment très étrange l’assaille. Elle n’est pas sûre de ce que c’est, ce n’est pas clair.


Elle se sent reconnaissante, satisfaite. Physiquement détendue. Mais un petit vide au creux du ventre est présent. Est-ce de la honte ou tout simplement l’excitation qui retombe ?


Non elle n’a pas honte, elle a même l’impression d’avoir franchi un cap, d’être quelqu’un d’autre, avec une expérience de plus à son actif. Elle est presque fière, oui. Elle pourra raconter à sa meilleure copine qu’elle s’est masturbée au milieu de l’autoroute à quelque mètres seulement de Thomas, elles vont bien en rire, c’est sûr.


Les phares d’un camion se rapprochent des barrières du péage. Ils sont rares à cette heure d’habitude, et ils passent presque toujours à la caisse de Thomas, qui est la plus à droite sur la chaussée.


Julie se sent pousser de nouvelles ailes. Elle ne remettra pas sa culotte. Au contraire, tandis que le camion s’approche, elle remonte davantage sa jupe. Elle peut voir son propre sexe encore luisant de plaisir. Elle se demande si du haut de son camion, malgré la voie qui les sépare, le chauffeur du poids lourd peut la voir écarter ses petites lèvres et jouer avec.


Sûrement pas, c’est dommage. Julie le regarde droit dans les yeux quand un doigt s’enfonce à nouveau en elle. Il la remarque enfin, sans doute attiré par son regard trop intense et son visage trop rouge. Avant que le camion ne redémarre, il se passe une éternité pour Julie. Plusieurs fois, ses yeux croisent ceux du routier. Ils étaient d’abord curieux, ils deviennent insistants. Vicieux ? Elle en est sûre : il sait.


Cela excite terriblement Julie, bientôt submergée par un flot de désir. Dans sa tête des sentiments forts et contradictoires se mêlent : Julie se sent à la fois exposée au danger mais détentrice d’une puissance démesurée ! Elle se sent enfin exister.


Julie n’essaye plus de masquer les mouvements qui secouent son bras jusqu’en haut de son épaule. Elle ne lâche pas le chauffeur des yeux tandis que le camion s’éloigne lentement. Lui non plus ne semble pas vouloir la quitter : plusieurs fois son visage réapparaît à la fenêtre avant que l’obscurité ne l’avale complètement.


La face avide aux yeux écarquillés du routier reste imprimée un moment dans la mémoire de Julie. Jusqu’à ce qu’un coup de klaxon, en provenance du poids lourd déjà loin, retentisse.


Dans sa cabine, Thomas relève la tête puis se retourne vers Julie. Elle ne peut s’empêcher d’éclater de rire en faisant mine de ne rien comprendre.


Et c’est vrai, elle ne comprend pas ce qui lui a pris. Mais c’était tellement bon ! Tellement fort !




Depuis cette nuit un peu spéciale, Julie a installé un petit rituel : chaque fois que son service lui impose des heures au milieu de la nuit, elle s’habille en conséquence. Sa tenue doit être pratique avant tout et elle doit lui permettre de se dévêtir et de se rhabiller très rapidement.


Très vite, elle tente de nouvelles expériences. Une nuit, elle effectue son service complet en ayant retiré tous les vêtements en dessous de la taille. Chaque nouveau visage qui défile devant sa cabine est scrupuleusement analysé par Julie, les yeux brillants. Et quand la voiture redémarre, elle décide si il ou elle a deviné la situation.


Une autre fois, elle s’est acheté un sextoy. Calé entre ses cuisses, le petit œuf vibrant permet à Julie de continuer de se masturber pendant les échanges avec les clients. Plus d’un l’a félicitée pour son air enjoué cette nuit-là, mais aucun ne s’est douté que c’était grâce un nouveau kit mains libres.





À l’issue de son contrat, à la mi-septembre, Julie n’est plus tout à fait la même. Certes elle n’a toujours pas réussi à attirer Thomas jusque chez elle. Mais elle se sent plus épanouie et plus en phase avec elle-même. Elle a l’impression de se libérer peu à peu du masque de conformité qu’elle s’efforçait de porter depuis le collège.


Pourtant, le soir, elle échoue toujours seule dans son grand lit. Alors elle repense avec un brin de nostalgie à ces longues séances de masturbation au milieu de l’autoroute. Et au regard étrange de ce chauffeur, la fois où elle a joui, alors même qu’il lui tendait sa carte bleue. Elle n’avait pas su garder le visage suffisamment impassible.


Pour retrouver ces sensations, une nuit, Julie est ressortie de chez elle et a pris sa petite voiture. Sur la route étroite qui la menait cet été à la gare de péage, elle s’est arrêtée entre deux bosquets d’arbustes, le long du grillage qui surplombe l’autoroute. De là, elle peut voir les routiers passer dans leur camion. Eux aussi peuvent la voir, s’ils ont l’œil.


Après avoir stoppé le moteur, éteint les phares et ouvert sa vitre, afin d’entendre une éventuelle voiture approcher par la petite route, Julie soupire longuement. Tout le temps qu’elle a mis pour venir ici, elle a senti la pression monter doucement. Le goût exaltant de l’interdit et du danger l’a à nouveau envahie.


Pendant cinq bonnes minutes, elle reste le regard fixe, consciente des phares qui l’éclairent lorsque les voitures apparaissent face à elle. Va-t-elle se dégonfler ? Non, la chaleur qui émane de son ventre est trop intense pour qu’elle puisse l’ignorer. Elle va se masturber.


Lentement, ses mains attrapent le bord de la robe légère qu’elle a enfilée avant de partir. Elles remontent le long de ses cuisses, jusqu’à ses hanches, et dévoilent sa culotte. Ses doigts gourds passent sous l’élastique enserrant sa taille, avant de redescendre jusqu’à ses genoux. Le sous-vêtement glisse le long de ses mollets, s’écrase en douceur sur ses chevilles et recouvre le cuir de ses sandales.


Seule au milieu de nulle part, Julie prend son temps.


Dans l’obscurité de la nuit, elle écarte les cuisses et jette un coup d’œil entre elles. Elle ne voit rien. Elle allume alors le plafonnier et scrute à nouveau son sexe, comme si c’était la première fois qu’elle le voyait. Un doigt passe entre ses lèvres et confirme à Julie qu’elle est déjà très excitée.


Par réflexe, elle porte son doigt à ses narines et hume son odeur intime. Habituellement elle la dégoûte, elle la fait se sentir sale. Mais cette nuit c’est différent. Julie est entière, elle assume qui elle est et ce qu’elle est. Dans sa tête et dans son corps. Elle se reconnaît par son odeur. Elle se goûte du bout de la langue. Et elle aime ça.


Laissant le plafonnier allumé, Julie fait glisser les bretelles de sa robe et découvre sa poitrine. Dans la lumière pâle, ses mains effleurent ses seins avant de s’en saisir et de les masser de manière appuyée. Elle écrase, caresse, pince jusqu’aux tétons rigides.


Un appel de phare vient l’encourager à poursuivre. C’est un camion qui passe à présent à son niveau. Elle aperçoit à la vitre de la cabine un pouce levé et le visage hilare d’un jeune homme. Oui, c’est ça qu’elle recherche. Une dose de plaisir brut la fait frissonner.


Julie revoit dans un flash le visage de Thomas. Elle saisit cette vision et ne la lâche plus. Thomas la regarde se donner du plaisir. Il est à son poste de travail, dans sa cabine blafarde et ses yeux sont rivés sur elle. Elle ne se cache plus.


Elle ne se cache plus. Dans un état second, Julie ouvre sa portière. Impossible de sortir. Sa cheville est prise. Retenue par sa culotte. Il faut l’enlever. Complètement. Sur le siège passager. Julie peut sortir à présent.


Debout à côté de sa voiture, Julie se sent défaillir, les jambes en coton. Elle doit se raccrocher au regard imaginaire de Thomas pour ne pas tomber. Une main sur le toit de la voiture et l’autre sur la portière, elle s’est légèrement penchée en avant pour reprendre son souffle.


Cette position plairait à Thomas. Julie se cambre davantage et goûte le petit courant d’air nocturne qui caresse son sexe. Oui, il viendrait par derrière et la prendrait sans ménagement. Il la saisirait par les hanches et lui tambourinerait les fesses.


Julie peut presque sentir la queue de Thomas la pénétrer, à moins que ce ne soient ses propres doigts ? Elle veut le sentir contre elle. Elle referme la portière et s’assoit sur le capot encore chaud de sa Clio. Le coup de klaxon qui retentit à ses côtés ne la perturbe pas dans son délire.


Les yeux mi-clos, Julie s’allonge sur le capot. Ses mains sur son cou sont celles de Thomas. C’est lui qui la retourne doucement, et qui lui plaque les seins sur la chaleur du moteur. Ses fesses sont tendues pour lui, pour qu’il les saisisse à pleines mains, peut-être même qu’il plongerait le visage dedans pour la goûter avec sa langue.


Julie n’est plus consciente des phares qui l’inondent d’une lumière froide. Elle est toute à Thomas.


Jusqu’à ce qu’un concert de klaxon la sorte de sa fièvre délirante. Elle rouvre les yeux et aperçoit un break bleu foncé avec un gyrophare sur le toit arriver à sa hauteur. À l’intérieur, elle reconnaît des gendarmes en uniforme. L’un d’eux la pointe du doigt.


Une sueur froide la saisit : elle n’avait pas pensé à ça ! Subitement Julie reconnecte la réalité et prend conscience du spectacle qu’elle offre. Elle ne peut pas rester là ! Ils vont venir la chercher ! Ou appeler du renfort !


Sans prendre le temps de rajuster sa robe, Julie s’engouffre dans sa voiture et démarre. La douche est froide. Comment a-t-elle pu perdre pied et se retrouver dans cette posture ?


Cinq minutes plus tard, encore essoufflée et en état de choc, Julie se gare sur le parking réservé au personnel de l’autoroute. L’habitude acquise cet été l’a conduite là, juste à côté de la gare de péage. Julie ne réalise pas tout de suite où elle se trouve. Elle reste prostrée derrière son volant.


Elle n’est qu’une exhibitionniste ! L’image du pervers au grand imperméable l’assaille. Non, ce n’est pas elle, ce n’est pas possible. Julie refuse de le croire ! Elle n’a pas pensé aux conséquences, c’est tout.


Elle voulait juste être elle-même. Se lâcher. Pour une fois, se lâcher.


Et puis… C’était tellement bon de s’abandonner, sans peur, sans pudeur. Sans honte. Être une femme qui jouit, corps et âme, face au monde entier. Bon sang, elle était enfin elle-même !


Elle sentait la vie palpiter dans ce corps qui est le sien. Lui piquer la peau. Électriser son cuir chevelu. Mouiller ses doigts.


La boule qui s’était formée dans le ventre de Julie s’estompe au fur et à mesure qu’elle analyse ce qui s’est passé. Finalement elle assume plutôt bien ce qu’elle a fait. Le seul problème, c’est qu’elle délirait. Julie le sait parfaitement bien. Elle était en pensée avec Thomas.


Le déclic se fait dans sa tête comme elle repense à lui. C’est la voiture de Thomas qui est garée juste à côté ? Elle réalise enfin où elle se trouve ! Et c’est une nuit où il travaille. Il n’est pas loin d’elle, dans une de ces cabines dont elle peut apercevoir le toit.


Et Julie est assise là, à moitié nue, déjà offerte en pensées à Thomas il y a moins de dix minutes.


Non, ça elle ne pourra pas le faire ! Jamais Julie ne se montrera à Thomas comme elle l’a fait sur le bord de l’autoroute.


Pourtant ses oreilles sont déjà bouillantes rien que d’y avoir songé !


Non, c’est inutile d’y penser, elle n’osera jamais.


Est-ce que ce serait même possible ?


Peut-être que…


Si elle se place près du local technique, elle pourrait être visible de Thomas. Et uniquement de lui. Le petit bâtiment est dans le dos des conducteurs lorsqu’ils s’arrêtent au péage, ils ne la soupçonneraient pas.


Mais Julie refuse d’y penser plus longtemps, c’est de la folie ! Ce n’est pas comme tout à l’heure, elle n’est plus protégée par un grillage.


Mais elle était face à des inconnus. Là c’est différent. Il s’agit de Thomas. Peut-être même qu’il pourra la rejoindre ?


Le scénario que monte progressivement Julie lui semble de plus en plus réalisable. Et voir la réaction de Thomas quand elle se masturbera devant lui sera la chose la plus excitante qu’elle puisse imaginer.


Toutes les alarmes de Julie sont à présent désamorcées. Elle a retrouvé un peu de cet état second qui la portait tout à l’heure. Avec une différence : à présent elle ne délire plus !


Elle rajuste nerveusement les bretelles de sa robe légère pour traverser le parking et rejoindre le local technique. Elle arrive bientôt devant le petit bâtiment. Son souffle est court. Elle peut encore renoncer. Elle le sait.


À quelques mètres d’elle, Julie reconnaît Thomas. Il est assis dans sa cabine et a le regard plongé dans une revue. D’où elle se trouve, noyée dans l’obscurité, il ne peut pas la voir. Il lui suffit de faire quelques pas en direction du local pour plonger dans le halo d’un lampadaire.


Julie songe un instant à rester là, en secret, et à se masturber face à Thomas. Elle pourrait voir son visage au moment de jouir. Ses doigts descendent déjà jusqu’à son sexe. Puis s’arrêtent. Non, elle va lui offrir ses fesses comme elle l’a fait tout à l’heure dans son délire.


D’un pas mécanique, saccadé, Julie pénètre la zone de lumière. Elle poursuit sa marche jusqu’à atteindre le mur du local. Elle le touche, du bout des doigts, comme pour marquer sa destination. Elle se retourne, les yeux fermés, et s’appuie le dos au mur. Elle lui fait face.


Quand elle ouvre les yeux, Thomas n’a pas levé la tête. Elle le scrute avec attention. Il ne pourra pas fuir cette fois. Il faudra bien qu’il voie son désir. Et qu’il l’accepte.


Julie attend patiemment que Thomas la remarque pour commencer. Elle imagine déjà ce qu’elle va faire. Le premier mouvement. Quelle main. Comment.


Soudain une voiture approche du péage. Thomas lève enfin les yeux de sa revue et capte presque aussitôt la présence de Julie. Il semble étonné de la voir là et le fait comprendre d’un mouvement de recul, sourcils levés.


Julie ne bouge pas. Elle attend patiemment que la voiture qui s’est arrêtée à la hauteur de Thomas redémarre pour commencer. En attendant ce moment, Julie se charge des échanges visuels avec son ancien collègue. Ça lui donne du courage.


La barrière se soulève, la voiture démarre lentement. Top départ mental.


Julie commence par glisser sa main sous une de ses bretelles et la fait glisser. Dévoile un sein. Thomas l’observe, les yeux grands ouverts, par-dessus le terre-plein, alors qu’elle effleure son aréole.


Julie ne le quitte pas des yeux. Il va enfin la voir telle qu’elle est.


Thomas semble littéralement subjugué ! Julie se nourrit du regard ahuri de son ancien collègue. Il ne sait pas encore tout, il n’a pas tout vu.


Elle a saisi le tissu de sa robe et le froisse nerveusement entre ses doigts. Le manque de réaction de Thomas l’encourage : elle va aller au bout. D’un geste maladroit, ses doigts passent sous le tissu et lui caresse le haut des cuisses. Puis les hanches. Lentement elle écarte les jambes.


Son sexe est enfin offert. Julie défaille en y pensant. Ses genoux plient sous elle. Elle se retrouve presque assise, le dos au mur. Ce n’est pas grave, elle continue de voir Thomas la fixer. Elle peut continuer de s’offrir à lui.


Ses mains parcourent son corps et s’attardent aux endroits que Julie rêverait de voir effleurés par Thomas. Ses doigts devenus nerveux s’attardent de plus en plus entre ses lèvres et sur son petit bouton.


Julie sent monter un orgasme. Mais elle ne peut pas jouir maintenant ! Elle ne lui a pas offert ses fesses !


Elle se laisse glisser sur le sol et s’allonge sur le côté pour y remédier. En repliant ses jambes sur sa poitrine, elle peut les lui donner, tout en continuant de l’observer.


Julie s’imagine que le regard de Thomas la pénètre tant il est focalisé sur son sexe. Ses doigts à elle l’accompagnent en plongeant dedans.


Thomas se lèche les lèvres nerveusement. Ce sont ses grandes lèvres qu’il lèche. Et son clitoris qu’il écrase du bout de la langue.


Julie sent des vagues de plaisir l’assaillir de plus en plus violemment. Elle est sur le point de jouir ! Ses yeux sont plongés dans ceux de Thomas. Ne les quittent plus. Jusqu’à ce qu’elle ne se contrôle plus. Les spasmes qui la secouent sont irréels, la puissance des décharges est inédite. Le corps de Julie agonise sur la pelouse.


Quand elle revient à la vie, et qu’elle rouvre les yeux, Thomas n’a pas bougé. Le regard vitreux, il semble ailleurs. L’air idiot.


Julie est un peu déçue. Elle aurait voulu qu’il la rejoigne. Mais ce n’est pas grave. Elle est allée au bout et se sent forte. Elle sait maintenant ce dont elle est capable. Et lui aussi !


Lorsqu’elle se relève, elle n’est plus du tout chancelante. Au contraire, c’est bien droite et fière qu’elle nargue maintenant Thomas avant de rajuster tranquillement sa robe.


Ce n’est qu’une fois sur le parking, lorsqu’elle est sur le point d’atteindre sa voiture qu’un grand vide la secoue. Avec violence. La vision de sa petite voiture vide peut-être ? Ou celle, par extension, de son grand lit froid qui l’attend ?


Tout ça pour quoi ? À quoi bon être forte et entière pour être encore une fois seule !


Le bruit de pas de course dans son dos balaye presque aussitôt son désespoir. Thomas la rejoint ?


Julie se retourne, lumineuse. Les larmes au bord des paupières. C’est lui ! Il est sorti de sa léthargie et il arrive enfin ! Un drôle de sanglot s’échappe de sa gorge.


Thomas s’approche maintenant au pas. Essoufflé. Ses mains fiévreuses débouclent sa ceinture et commencent à déboutonner sa braguette.



Le visage ému de Julie se métamorphose sous l’effet de l’horreur.



Ce sont les derniers mots que Julie supporte. Dans un cri strident, elle s’engouffre dans sa voiture et démarre le plus vite possible.


Juste avant de quitter le parking, un majeur se dresse, hystérique, par la fenêtre de la Clio.