Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 15076Fiche technique82905 caractères82905
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Temps de lecture estimé : 60 mn
15/07/12
corrigé 28/07/21
Résumé:  C'est bien connu, la fréquentation de certains sites Internet est dangereuse. Mais quelquefois, on n'a pas idée d'à quel point elle peut conduire à des expériences surprenantes !
Critères:  #délire #fantastique #merveilleux #conte f ff fbi revede exhib miroir
Auteur : Someone Else  (Ecris d'abord pour toi, qu'ils disaient !)            Envoi mini-message
Bienvenue au paradis !

Ils me font suer, avec leurs Experts à la noix. Réussir à coincer un type parce que l’on a retrouvé une de ses crottes de nez – pour ne pas dire un poil de cul – dans le cendrier d’une bagnole pourtant cramée huit jours auparavant, ça me gonfle. Et puis, cette carte postale idyllique de gens jeunes et beaux dans un pays où l’obésité est un fléau reconnu, ça m’agace.



Je dépose un rapide baiser sur ses lèvres. Un coup d’œil tout aussi rapide dans la chambre des gosses, ils pioncent. Moi, par contre, je n’ai pas sommeil.

J’ai profité de ce que je ne commençais pas aussi tôt que d’habitude pour consulter mes mails au lit, ce matin. Du coup, mon portable est toujours sur la table de nuit et, comme un collègue m’a parlé d’un site sympa, c’est le moment ou jamais d’aller voir et de tromper l’ennui.

Quand on a une adresse précise, la recherche est tout de même grandement facilitée, et c’est le cas ici. Arrivé à la page d’accueil, ce déballage de jolies filles est tellement improbable que c’est presque distraitement que je charge trois vidéos sur les quelques-unes qui me sont proposées.

Quelques minutes d’attente, et…


Sur la toile, il y a deux principaux types de sites de cul : quelques-uns où de très jolies filles viennent nous montrer leurs charmes, essayer de nous faire croire qu’elles sont lesbiennes, et cela s’arrête là. Ensuite, il y en a des tas d’autres où des filles plus ou moins jolies – plutôt moins que plus, en général – viennent se faire farcir par un ou plusieurs mecs quelquefois équipés de démonte-pneus ahurissants, le tout dans une piaule sordide, avec un éclairage de chiotte et des cadreurs aussi cadreurs que moi je suis bonne sœur, et travaillant avec des caméscopes merdiques.


Et puis, il y a celui-là. Pour être honnête, j’en ai déjà vu de très chouettes, mais celui-ci détient la palme. On y voit des filles, toutes aussi jeunes que ravissantes, avec des mensurations qui pourraient les faire entrer sans difficulté dans les maisons de haute-couture ou qui feraient merveille sur les plateaux de télé, de cinéma ou dans la chanson, venir faire tout un tas de cochoncetés pas vraiment convenables.

Et tout cela est tourné en haute définition et, cela se voit au premier coup d’œil, par de véritables professionnels de la mise en scène et de l’éclairage, le tout dans des décors de rêve.


Au final, on se retrouve à se dire que toutes ces masturbations féminines, toutes ces relations saphiques ou ces pénétrations sont si bien tournées que, somme toute, cela n’est quasiment pas plus vulgaire qu’un clip de Beyoncé ou de toutes ces pseudos-chanteuses qui comptent bien plus sur leur plastique que sur leur voix pour faire vibrer les foules.

Oui, ce site est sublime, et quand d’aventure ces demoiselles sont accompagnées d’un ou plusieurs garçons, cela ne nous arrange pas vraiment. Déjà, avoir une grosse queue et se farcir des filles sublimes, cela ne serait vraiment moral que si c’était à nous que cela arrivait, mais en plus, ils n’étaient pas obligés d’être beaux gosses !

Alors, que dire, sinon que c’est du porno, indubitablement. Mais là, pas de sodomies sauvages, de pipes interminables ou d’éjacs faciales en boucle, juste du rêve, du rêve et encore du rêve, du rêve de très haute volée. Si le panard absolu existe, il doit un peu ressembler à ça.


L’émerveillement passé, on se pose alors quelques questions. Pourquoi ces filles, qui pourraient aisément avoir un tout autre avenir, préfèrent-elles jouer dans ce genre de films ?

Pour l’argent ? Oui, bien sûr. Pour le sexe ? Certainement, on a souvent l’impression qu’elles ne boudent pas leur plaisir ou alors, que ce sont vraiment de sacrées actrices. Et si c’est le cas, on se dit qu’elles ont doublement raté leur vocation.

En attendant, un tel amoncellement de beautés dépasse l’entendement.


Pendant l’espace d’un instant, je me mets à rêvasser : être l’une de ces filles, savoir tout ce que je sais mais avec l’âge et la plastique de ces merveilles. Se faire tringler sur les plus belles plages du monde, par des mecs dont la beauté n’a d’égale que la taille de leur queue et leur dextérité à s’en servir. Ou se faire lécher la chatte par des filles au moins aussi belles que vous dans les palaces les plus luxueux de la planète. Ou encore, se caresser jusqu’à l’extase dans les plus beaux paysages du globe.

Je souris de ma propre crétinerie. Bah, il est temps d’éteindre la lumière et de dormir.




---ooooOoooo---




J’adore les longs cheveux d’Anita, ma femme, mais nettement moins lorsque je les ai dans la figure au réveil. Alors, je me retourne dans le lit, mais rien n’y fait, ils sont toujours là. J’essaie de me reculer, mais cela ne change toujours rien, et d’ailleurs, en tendant mes bras, il me semble bien qu’elle ne soit pas là…

Serait-elle partie me faire un café ? Ça m’étonnerait, c’est plutôt moi qui m’en charge le matin. Et quand bien même ce serait le cas, à qui sont ces cheveux ?


J’allume la lumière.

Un choc, cette chambre n’est pas la mienne, n’est pas la nôtre. Qu’est-ce que c’est que cette salade ?


J’ai passé l’âge de picoler comme un trou et de me réveiller sans savoir où je suis ou dans un lit qui n’est pas le mien. Or, là, je suis formel, je n’ai pas bu hier, mais je ne suis quand même pas chez moi !

Quoique… En vérité, cet endroit ne m’est pas inconnu. L’ennui, c’est que je l’ai quitté il y a plus de vingt ans, puisqu’il s’agit de ma chambre d’étudiant… La décoration n’est pas tout à fait la même, mais il n’y a pas de doute possible, c’est bien elle.

Un coup d’œil circulaire me confirme ma première impression, je suis seul. Tandis que je tourne la tête un peu rapidement, une mèche de longs cheveux blonds et bouclés passe devant mes yeux. Instinctivement, je les attrape, et tire brusquement dessus. Les élucubrations à base de coiffures multicolores des soirs de beuverie, je connais.

L’ennui, c’est que la mèche résiste, et que cela me fait mal. Ce n’est pas une perruque, ce sont bien mes cheveux !


Alors, je me lève d’un bond, j’ai l’impression de peser la moitié de mon poids habituel, je baisse les yeux et là, de nouveau, une claque. Depuis quand est-ce que je porte des nuisettes, fussent-elles en coton, moi ? Et où sont passés les poils de mon torse ?

Là, dans la glace, il y a une blonde, une jolie, très jolie blonde, aux longs cheveux bouclés. Elle ne doit pas avoir vingt ans, une toute petite poitrine, des jambes interminables. Deux somptueux yeux verts dans un visage d’ange, et un sourire plus qu’enjôleur. Il me faut une seconde pour réaliser que ce reflet ne peut être que le mien. Ce n’est pas possible, c’est un rêve, un cauchemar, je vais me réveiller. Je me pince, je me cogne contre le mur… J’ai mal, mais rien n’y fait.


Un coup d’œil sur ma montre, l’heure, la date, l’année, tout correspond. Il n’y a que le corps et le lieu qui coince… Si ce n’est pas un rêve, je suis bon pour Sainte-Anne.


Un café. Il me faut un café, en intraveineuse s’il le faut, mais il me faut un truc bien fort pour me réveiller.

Tandis qu’il coule, je m’étends, et dans un réflexe bien masculin, je cherche à me gratter les roubignolles. Mais à ma grande stupeur, entre mes jambes, je ne trouve rien, ou plutôt si, une petite chatte, quasiment lisse à ce que j’en ressens, avec une minuscule touffe au-dessus des lèvres. Je me retourne et le reflet du miroir est formel, je suis une vraie blonde. Je hurle…


C’est la sonnerie du téléphone qui retentit qui m’arrête. Et dans la série, depuis quand est-ce que j’ai une coque Hello Kitty sur mon biniou ? En fait de sonnerie, il s’agit d’une alarme, j’en lis le texte, « conduite à 8 heures ». Le mystère ne cesse de s’épaissir, qu’est-ce que c’est que tout ce binz ?

Je me rassois sur le lit. Les minutes s’écoulent, le café coule dans ma gorge, mais rien ne change, toujours ce satané reflet dans la glace. Mauvaise blague ? Drogue ? Univers parallèle ? J’examine toutes les options, mais rien ne colle. Et la nana du miroir est toujours là.

Il n’y a rien à faire, si je veux comprendre, il me faut avancer. Une bonne douche, froide de préférence, parviendra peut-être à me faire sortir de ce cauchemar.


Là encore, la salle de bain est conforme à mon souvenir, à un détail près : là, sur le meuble, il y a un pantalon, un tee-shirt, un soutif et une culotte. Si tout cela est bien réel, il y a une certaine logique dans la chose, mais cela n’explique rien. La douche, chaude dans un premier temps, froide dans un second, comme si cela pouvait changer les choses, mais rien…

Tout juste me surprends-je à prendre garde de ne pas mouiller mes cheveux, dans un réflexe bien féminin. Ben voyons…


Essuyage, en essayant de ne pas m’attarder sur mes seins ni sur mes courbes visiblement plutôt réussies, parce que je ne sais pas qui tire les ficelles, mais de ce côté-là, il ne s’est pas raté, il ne m’a pas raté, devrais-je dire.


Second rappel du téléphone. Un flash dans mon esprit, si je me rends à cette conduite, à défaut de comprendre, j’arriverais peut-être à obtenir des informations sur ce qui se passe.

La culotte s’avère être un string, un minuscule truc de dentelle que je trouverais ravissant si ce n’était pas moi qui devait l’enfiler. Il me rentre dans les fesses, la sensation n’est pas franchement désagréable mais tout de même assez particulière. Le soutif, ensuite. Il est assorti au bas, et là encore, minuscule, il est vrai qu’apparemment, je n’ai pas grand-chose à mettre dedans. Oui, mais… Des porte-bagages, j’en ai dégrafé quelques-uns dans ma vie, mais je n’en ai jamais enfilé. Quelle galère !


Le pantalon, maintenant. Purée, ce jean ne doit même pas être un 36 ! Jamais je ne rentrerai dedans… N’y croyant pas un instant, j’essaie quand même. Et non seulement je l’enfile facilement, mais il me va bien, me serrant juste comme il faut. Le tee-shirt, maintenant, ça, au moins, je connais, même si ceux que je porte d’habitude ne sont pas aussi moulants.


Il me faut des chaussures. Lorsque j’habitais ici, je les rangeais dans le placard sous le lavabo, un rapide coup d’œil me confirme que c’est toujours le cas. Sans surprise, ce sont des chaussures de femme, une tapée d’escarpins dans tous les genres et de toutes les hauteurs, il n’y a qu’une paire de tennis blanches sur lesquelles mon choix s’arrête. Au moins, je devrais savoir marcher avec sans trop de souci.

Je jette un œil dans le miroir, mes cheveux semblent s’être mis en place d’eux-mêmes. C’est cela que l’on appelle une permanente ? Vaut mieux, parce que moi la coiffure, même en tant qu’homme, ça fait deux.

Un coup de klaxon en bas, une auto-école, ce doit être pour moi.


Dans le couloir de l’entrée, un blouson en jean à peine plus grand que celui que j’ai offert à mon fils pour son dixième anniversaire, un sac à main, et des clés de maison. Machinalement, je rafle le tout, et m’engouffre dans l’ascenseur.


Tandis que la cabine descend, j’entreprends la fouille de ce sac.

À l’exception d’une carte d’identité, il n’y a pas grand-chose d’intéressant. Apparemment, j’ai le même nom, le même prénom – Emmanuel, mais cette fois avec deux L et un E – et je suis censée habiter à l’adresse de mes parents. Seule la date de naissance ne colle pas, un rapide calcul et j’apprends que j’aurais dix-neuf ans dans un mois.


Je m’approche de la voiture, le moniteur me sourit. Conduire ? Je dois savoir faire ça, jusqu’à hier soir, cela faisait partie de mon métier. Par contre, je n’ai jamais autant avancé ni remonté le siège.

Moteur, frein à main, clignotant, coup d’œil, je suis parti. Rassemblant mes lointains souvenirs, j’essaie de comporter comme un ou une élève, je me contente donc de suivre les directions que le moniteur me demande de suivre.



Rétro, cligno, je m’arrête le long du trottoir.



Il est bien gentil, mon moniteur, mais je ne vois pas lui raconter qu’hier encore, j’avais quarante-huit ans, une femme et des enfants, et que j’étais un homme. J’invente alors une craque.



Boulot ? Il a dit boulot ? Quel boulot ? Soudain, je me souviens d’avoir vu dans le sac une lettre concernant une histoire de stage sur laquelle je ne me suis pas attardé. Je profite d’un feu rouge et que mon moniteur est au téléphone pour y jeter un œil, et découvrir qu’effectivement, depuis la veille, je suis effectivement en formation. À ceci près que c’est précisément dans cette entreprise que je bossais encore hier ! Et, apparemment, ma tutrice est tout simplement celle qui était encore ma collègue il y a deux jours. Charmant !


Devant la boutique, il y a quelques confrères qui sont, comme tous les matins, en train de se goudronner joyeusement les poumons. Visiblement, mon arrivée est attendue et à voir leur attitude rigolarde, je n’en attends rien de bon.



Deux minutes plus tard, la bagnole est au fond, sous les regards visiblement effarés des spectateurs.



Là-dessus, il remonte dans la voiture et s’en va. Deux filles se dirigent vers moi, manifestement incrédules.



Visiblement, ces deux nanas me connaissent, ce qui confirme ce que je pensais depuis l’auto-école, à savoir que je ne suis pas seulement dans un corps qui n’est pas le mien, mais également dans une existence qui n’est pas la mienne. En attendant, essayons donc ne n’avoir l’air de rien, c’est sans doute le meilleur moyen d’en savoir plus.

Une autre idée me traverse l’esprit. Avec un peu de chance, mon autre moi-même doit être dans cette boîte. S’il y a une personne qui peut m’aider, c’est lui, enfin, c’est moi.

Les deux filles me font la bise, puis m’attrapent par le bras.



Je ne sais que répondre.



Je ressors la même salade que celle que j’ai servie à mon moniteur. Ça a marché une fois, cela semble fonctionner une seconde.



Elles haussent les épaules.



Les couloirs, les collègues que je connais tous, qui ne me reconnaissent naturellement pas mais qui s’attardent tout de même sur ma plastique. Tandis que je marche dans le couloir, je sens leurs regards posés sur mon cul, l’impression est troublante.

Un coup d’œil rapide m’informe que je suis absent depuis deux jours. Pourtant, je suis bien certain d’avoir pointé hier, et les dates affichées un peu partout correspondent bien avec la date du jour. L’erreur ne vient pas de là.


Tiens, mon bureau. J’entre.



La voix sèche de Michelle, ma collègue, vient de résonner dans le bureau. Ce rappel à l’ordre est un mal pour un bien, j’allais la saluer par son prénom.



Purée, je n’y crois pas, elle est en train de me faire faire le coup que certaines boîtes réservent aux stagiaires. Pourtant, il fut un temps – relativement loin, hélas – c’était elle qui était en stage… Je suis particulièrement bien placé pour le savoir, puisque j’étais son tuteur ! Mais moi, le coup des photocopies, je ne me souviens pas le lui avoir fait.


Une demi-heure plus tard, je suis de retour. Si je veux des infos sur mon autre moi-même, il me faut l’amadouer.



Elle vient de sourire. J’essaie la deuxième phase de l’opération « approche discrète ».



Le sang se retire de mon visage.



J’essaie de me reprendre.



Je file vers les toilettes, pas de besoin pressant en vue, juste besoin de m’isoler cinq minutes pour réfléchir. Un type m’arrête.



Je me retiens de jurer, mais cela doit se voir.



Cela m’a échappé. Je viens d’appeler un collègue par son prénom alors que je ne suis pas censé le connaître. Je ne lui laisse pas le temps de réagir, et je me précipite au petit coin.

Au bout de dix minutes, assis sur le trône, je n’arrive toujours pas à mettre deux idées bout à bout. Faute de mieux, dans une demi-heure, ce sera la pause-déjeuner, j’irai voir à l’hôpital s’il y a vraiment quelqu’un à mon nom. Je n’ai aucune idée de ce à quoi cela pourra servir, mais on ne sait jamais. Et puis, ce n’est pas très loin.


La sonnerie retentit.



Je sors sur le parking. Quel crétin ! Naturellement, je n’ai pas de bagnole.

Restent les transports en commun. Par bonheur, il y a trois ronds dans le sac à main, ça me fera au moins un carnet de tickets. Là-bas, au fond dans le bus, je remarque un type d’une soixantaine d’années, très élégant dans son costard blanc, qui me regarde fixement, l’air amusé.

Après quelques instants d’incompréhension, j’en arrive à la conclusion la plus plausible, à savoir qu’avec la plastique qui est la mienne, il est tout simplement en train de me mater. Si les rôles étaient inversés, je ferais sans doute de même.


Tiens, il descend au même arrêt que moi, mais nos chemins se séparent.


Là, sur le lit, il y a effectivement un homme et, aucun doute n’est permis, c’est bel et bien moi. J’interroge l’infirmière.



Je tourne les talons en maugréant. Un coup d’œil à ma montre, en la jouant fin et un peu de chance, j’aurais encore le temps de manger un morceau au réfectoire. Je me dirige donc vers l’arrêt de bus.



Je me retourne. C’est le mec en blanc, celui de tout à l’heure, et je n’ai pas la moindre idée d’où il a bien pu arriver.



Mon sang se glace.



Le pire étant que c’était machinalement que j’allais repartir à mon véritable domicile.



Le brusque passage au tutoiement m’intrigue encore un peu plus.



Comment peut-il être au courant de ce détail dont je n’ai strictement parlé à personne et que, personnellement, j’avais déjà oublié. J’en reste bouche bée…

Il continue.



Moi qui n’ai jamais été doué pour réfléchir rapidement, je ne sais que dire.



De nouveau, je n’en crois pas mes oreilles. Il répète.



Le temps d’entendre le bus arriver derrière moi et de tourner la tête, il a disparu, inexplicablement. Le conducteur s’arrête à ma hauteur.





---ooooOoooo---




Il est deux heures moins quart lorsque je retourne au bureau. Dire que je suis perdu dans mes pensées n’est rien, et j’ai beau tourner la question dans tous les sens, je ne vois aucune autre explication. Le téléphone sonne, je décroche machinalement.



Un peu que je suis au courant, c’est moi qui l’ai vendu.



Je raccroche.


Une bonne heure se passe, jusqu’à ce que le portable de Michelle sonne. Au fur et à mesure que la conversation avance, son sourire s’efface, tandis que son regard devient de plus en plus noir à mon égard. Elle raccroche enfin.



J’avoue que je ne comprends pas.



Elle se lève alors brusquement de son bureau, furieuse.



The boulette ! Emmanuelle ne pouvait pas être au courant de cette affaire…



En quinze années de boulot, je ne l’ai jamais vu aussi furax. Sa colère redouble, l’index est accusateur et elle est cette fois visiblement folle de rage.



Je suis dos au mur.



Le soudain passage au tutoiement l’intrigue.



Elle blêmit.



Je craque. De grosses larmes coulent le long de mes joues. J’essaie de me reprendre.





---ooooOoooo---




L’après-midi s’écoule doucement, sans que nous ne reparlions d’autre chose que de boulot. Oui, je sais où est le dossier de monsieur Legrand. Oui, je connais la différence entre un X45 et un Z36. Oui, je connais le n° de téléphone de Klonz Inc. Oui, je sais tout ça.


Je rentre chez moi.



Et si l’envie de partir aux États-Unis me prenait, le relevé de compte que je viens de trouver dans ma boîte à lettres m’en dissuaderait, Emmanuelle est à découvert.


Quand j’avais l’âge qu’elle a, mes parents m’aidaient de temps en temps. Mais comme tout se passe comme si on avait switché ma vie, transféré dans un autre corps et à une autre époque, ils ne sont plus de ce monde. Un rapide calcul m’apprend d’ailleurs que ma mère est décédée deux ans avant que mon double féminin ne naisse. Charmant !


Tenter à tout prix d’avancer. Tiens, commencer par essayer d’un peu mieux me connaître, cela ne peut que m’aider. Les cheveux longs, blonds et bouclés, les yeux verts et le visage d’ange, je ne m’attarde pas dessus, je les croise depuis ce matin dans tous les regards des types que je rencontre.


Il fait chaud, je me déshabille, et j’en profite pour examiner mes vêtements. Les chaussures, pointure 35. Le pantalon, taille 34. Le tee-shirt, taille XS. Le soutif, c’est du 85 A. Combien je mesure ? À vue de nez, un peu plus d’un mètre soixante-cinq. Mon poids ? En général, les gars ne sont pas trop adeptes du masochisme, ce qui n’est pas le cas des filles, et je trouve vite le juge de paix qui se cache sous le paddock. Le verdict est sans appel, 52 kilos. J’ai bientôt dix-neuf ans, mais j’ai des mensurations d’adolescente.


Et là, dans le miroir, c’est également sans appel. Déjà, ma couleur de cheveux est naturelle, si mes sourcils n’entretenaient déjà pas trop le doute, la toute petite touffe blonde au-dessus de mon sexe totalement épilé le confirme. De tous petits seins, ronds et fermes, un ventre rigoureusement plat, un nombril où brille un charmant piercing. Un petit cul rond, rebondi, de longues jambes fuselées et, bien entendu, pas un gramme de cellulite. Tandis que je m’attarde sur mon petit cul dans le miroir, je me rends compte que même sans me pencher, le simple fait de me mettre sur la pointe des pieds suffit pour qu’apparaisse le sillon de mon sexe.

Comme par hasard, je suis précisément le genre de fille dont ce site semble raffoler, petite, menue, absolument ravissante.


En fait, si j’étais à peine plus grande, je pourrais sans doute postuler pour ces pubs de crèmes antirides ou de produits amincissants, poser en maillot sur des plages de rêve, bref, toutes les âneries que l’on rencontre dans les pages de magazines féminins pour faire croire à la ménagère de moins de cinquante ans qu’en achetant le bon produit et en faisant le bon régime, elle pourrait un ressembler à ce que je suis.


Mais le type en blanc semble avoir d’autres perspectives pour moi et, en attendant d’en savoir un peu plus, je vais m’y tenir. Tiens, le coin des chaussures. Souvent, dans ces vidéos, les filles sont totalement nues mais gardent tout de même aux pieds leurs vertigineux escarpins.

Là, il n’y a rien de très haut mais j’ai quand même envie d’essayer, histoire de voir. Enfiler la chaussure, s’assurer qu’elle est bien en place, attacher soigneusement la bride, je m’entoure d’un maximum de précautions avant d’essayer de me lever. J’appréhende terriblement mes premiers pas, juché sur ces échasses que je suis toujours contenté d’admirer jusque-là !


Premiers pas, premières surprises : je n’ai aucune difficulté à me déplacer sur ces talons pourtant bien plus hauts que je n’en aie jamais porté. Au contraire, je trouve ça très agréable, je m’attendais à avoir mal aux pieds et il n’en est rien. La fille dont je viens d’emprunter le corps, si j’ose dire, a visiblement l’habitude de cheminer avec ça. Et un rapide coup d’œil dans le miroir me confirme l’impression que j’ai eue dès les premiers pas… La tête haute, les seins en avant, les reins cambrés, le ventre encore un peu plus plat, je suis carrément à tomber. Et quand je me tourne, là, c’est le bouquet, juste sous mes fesses, la vue sur le sillon de mon sexe est cette fois totalement imprenable.


Pour la première fois, je me surprends à aimer cette apparence. Tiens, puisqu’on en est là, comment elles font, les filles, dans ces satanés films ? Elles se prennent les seins à pleine main, se les massent, et… Mon dieu, ce n’est pas vrai !

À l’instant où mes mains touchent ma poitrine, je sens mon ventre se tordre, une sensation qui n’est pas sans me rappeler celle que l’on a en tant que mec devant une jolie fille un peu trop sexy. Alors, avec mille précautions, je passe aux pointes, qui se durcissent instantanément, l’effet est encore plus fort, j’en ai quasiment le souffle coupé.


J’essaie de ne pas précipiter les choses, tant l’appel de mon bas-ventre devient insoutenable. Caresser mon ventre, d’abord, couler jusqu’à la limite de mon pubis, résister à l’envie pour remonter jusque ma poitrine, re-dégringoler ensuite… Je n’y tiens plus, ma main se pose sur mon sexe, mon majeur s’insinue doucement entre mes lèvres, je suis trempée. Une phalange, juste une phalange, juste à l’orée de ma chatte, mais cela m’électrise déjà.


Un autre doigt qui remonte doucement le long de ma fente. Ah, le voilà, ce petit organe qui émerveille autant qu’il intrigue les hommes, à peine effleuré, le voilà qui se raidit, semblant chercher à s’évader de sa cachette. La tension est telle que je m’écroule sur le lit.


Cette fois, il me faut savoir.


Sans parler des films à la fiabilité toujours discutable, j’ai eu la chance de rencontrer dans ma vie quelques filles qui ne rechignaient pas à se caresser devant moi, histoire de faire réciproquement monter la pression. Même théorique, j’ai donc une certaine expérience sur le sujet, je vais tenter de passer à la pratique.

Surtout, ne pas aller trop vite et plus encore, ne pas être brutal. Si ce n’est pas chose aisée lorsqu’il ne s’agit pas de son propre corps – si tant est que ce soit précisément le mien – c’est assez facile quand on ressent directement chaque caresse.


Plonger son majeur dans son antre, recueillir un peu de cyprine. Plonger et replonger encore, jusqu’à ce que le doigt coulisse aisément, puis remonter jusqu’au petit bouton. Le titiller, tourner autour, l’effleurer, alterner infinie douceur avec plus de fermeté, le pincer doucement entre deux doigts. Le monde s’efface, le plaisir monte, monte encore, la respiration s’accélère, le bassin se soulève, on pense que l’explosion est proche, mais il n’en est rien. Alors, on reprend son souffle, et on repart à l’assaut. Cette fois, nul besoin de se concentrer, le ravissement ne cesse de croître, le bassin devient soudain animé d’une vie propre, le monde n’existe plus, et la jouissance vous emporte, et ne semble jamais en finir.


Je reviens sur terre, le souffle court, les cheveux collés, j’ouvre les yeux. Ah, mince, je n’avais pas pensé à cela, là-bas, à une centaine de mètres, dans la barre de bâtiments qui fait face à ma fenêtre, il y a un garçon. Pas facile de dire à quoi il ressemble, mais une chose est certaine, il n’a rien raté du spectacle.

Je compte les étages, histoire de voir où il habite, par précaution. Si d’aventure il venait à m’importuner, je saurais où le trouver. Quoi, que…



Il n’y a qu’un moyen de le savoir.

J’enfile donc mon jean à même la peau, le tee-shirt de la même façon, et je sors.

Alors, on a dit, escalier C, douzième étage, probablement porte à droite. Je sonne, bingo.

Le type qui est là face à moi est bien celui que j’ai vu tout à l’heure sur son balcon. Une bonne vingtaine d’années, brun, assez grand, pas trop mal de sa personne, mais habillé comme il se doit d’un survêt de marque. Lorsqu’il me voit apparaître dans l’entrebâillement de sa porte, sa mâchoire manque de se décrocher.



Il regarde frénétiquement à droite et à gauche, il doit se dire qu’il est en train d’être le pigeon d’une quelconque caméra cachée. Je le rassure.



L’avantage d’avoir été un mec dans une autre vie, c’est de savoir taper précisément là où ça fait mal. Objectif atteint, quelque chose me dit que bien qu’il soit à sa porte, il ne sait plus où il habite. Pour ajouter un peu plus au trouble, je l’embrasse à pleine bouche, il est si surpris qu’il en a du mal à me rendre mon baiser.



Le moins que l’on puisse dire, c’est que j’ai des méthodes un peu cavalières, mais vu ce qu’il m’arrive, je n’ai pas envie de faire de chichis. Par contre, le problème, c’est que même si je n’en laisse rien paraître, j’ai une trouille bleue : même si mon corps est celui d’une fille, j’ai toujours l’esprit d’un homme. Lorsque mon lascar va se retrouver à poil devant moi, je ne sais absolument pas comment je vais réagir. Oh, s’il se contente de me toucher, de le lécher et s’il ne se débrouille pas trop mal, ça devrait aller. Par contre, s’il me demande de le sucer ou un truc dans le genre – paraît que ça se fait, entre amants – je ne sais pas du tout comment je vais me comporter. J’ai une idée pour qu’il ne me pose pas trop de questions.



Une fois de plus, il ne comprend rien à ce qui se passe, il faut dire que d’une certaine manière, il est dans la situation du type à qui l’on propose une voiture neuve pour le prix d’une poubelle d’occasion.

Une fois à l’intérieur, quelque chose me dit que le message est passé, puisque c’est lui qui m’enlace et m’embrasse à pleine bouche. Par contre, s’il semble bien aimer mettre ses mains partout, cela fait bien cinq minutes qu’il me tripote comme s’il cherchait à se convaincre qu’il ne rêve pas, mais il n’a pas seulement passé sa main sous mon tee-shirt ou retiré un bouton de mon pantalon.



Ah, il consent enfin à me retirer mon tee-shirt et en voyant ma poitrine, il en a les yeux qui sortent de la tête.



J’aurais dû m’en douter, mais mon sac à main est tout proche. Je lui montre ma carte d’identité.



Alors, après quelques instants d’hésitation, il se penche vers moi, et m’embrasse les seins. De ce côté-là, il se débrouille pas mal, j’avoue que sa façon de m’en lécher un tout en malaxant délicatement l’autre n’est pas mal du tout. C’est follement agréable, et je sens de nouveau mon ventre qui se réveille.

Il me pousse sur le lit, et s’attaque enfin aux boutons de ma braguette, qu’il retire un à un. Tandis qu’il s’efforce de descendre mon jean sur mes hanches, je lève mon bassin pour lui faciliter le travail. Il ne peut retenir un petit sifflet admiratif.



À mourir, à mourir, moi je veux bien, mais ce n’est pas de mots dont j’ai besoin. Il doit lire dans mes pensées, puisqu’il plonge aussitôt sa tête entre mes jambes, et le contact de sa langue chaude sur mon bouton d’amour me fait perdre pied instantanément. Bon, d’accord, je manque d’expérience de ce côté-là de la barrière, mais il semble bien qu’il sache s’y prendre très correctement, au moins à ce jeu-là. Je le laisse faire : certaines femmes ont, paraît-il, la possibilité d’avoir des orgasmes multiples même si, à titre personnel, je n’ai jamais vraiment réussi à faire jouir une nana plusieurs fois de suite et à quelques minutes d’intervalle.


Était-ce elles qui n’étaient pas à la hauteur ou était-ce moi ? Je n’en sais rien, mais là n’est pas la question, tout ce que je veux savoir pour le moment, c’est à quelle catégorie de filles j’appartiens, point.

Pour le second orgasme, on verra bien. Mais en attendant, le premier s’annonce plutôt bien, sa langue furète tant et si bien entre mes lèvres qu’il me semble bien que je sois en partance pour le septième ciel. L’impression se confirme, mon horizon déjà bien noir s’assombrit encore, et j’ai l’impression que tout mon corps explose en une multitude de frissons délicieux.


Le retour sur terre se fait sans encombre, mon partenaire semble ravi et, je l’avoue, moi aussi. Mais il ne s’agissait que du premier étage de la fusée, j’attends impatiemment le second, celui qui me mettra vraiment sur orbite.


Alors, c’est à mon tour d’ouvrir sa braguette, la tâche n’est pas facile tant l’engin qui s’y cache semble gros et rigide. Bonne nouvelle, me dis-je, j’avais une certaine appréhension – une appréhension certaine, en fait – à le sucer s’il en avait été besoin.


À force de contorsions et en prenant bien garde de ne pas le blesser, je parviens enfin à extraire l’arme de son étui. L’engin est de belle taille, je le prends délicatement en main, et je commence un lent mouvement de va-et-vient. Raisonnablement, dans ce genre de plan, il est de bon ton de commencer calmement avant d’envoyer les chevaux.


Oui, ben les chevaux, je ne risque pas trop de les envoyer, et cette longue giclée de foutre qui vient de me frapper entre les seins en est la preuve. J’aurais dû m’en douter, gaulée comme je suis et avec le comportement d’affamée que je viens d’avoir, mon zouave n’a pas réussi à se retenir.


Bien entendu, il a immédiatement le moral dans les chaussettes, au sens propre comme au sens figuré. Cette situation, tous les hommes la connaissent pour l’avoir vécue au moins une fois, entre le matériel qui se la joue immédiatement aux abonnés absents, la honte que l’on ressent vis-à-vis de sa partenaire et la rage que l’on a envers soi, il vaut mieux ne pas être au quinzième étage et que la fenêtre soit fermée sans quoi on essaierait bien d’apprendre à voler. L’expression « con comme une bite », n’est pas basée sur du vent ! Bien entendu, j’essaie de relativiser les choses.



Ce disant, à grands coups de poignet mais sans trop y croire, j’essaie de remettre sa mécanique en marche, mais rien n’y fait. Au bout de quelques minutes, je lâche :



Un quart d’heure plus tard, alors que je rentre chez moi, je repense à ce que mon blaireau en blanc m’a dit tout à l’heure « trouve les réponses à tes questions ». La veille, je me demandais comment un mec normal réagirait devant l’un de ces fantasmes à deux jambes en me disant que, personnellement, je ne tiendrais pas longtemps. Eh bien, c’est confirmé, je ne suis pas le seul, et je ne peux pas dire que cela arrange mes affaires.




---ooooOoooo---





En fait, je me suis habillée comme la veille. Un autre tee-shirt, identique mais d’une autre couleur, soutif – je persiste à penser que c’est n’importe quoi, vu le peu que j’ai à mettre dedans – une autre culotte – là encore, je n’arrive pas à me faire à l’idée qu’elles sont à peine plus grandes que celles de ma fille, qui n’a pourtant que dix ans – et mon jean. Par contre, cette fois, j’ai mis des hauts talons, et il faut reconnaître que ma silhouette s’en trouve passablement changée.



Un peu plus tard dans la matinée, le boulot est plus calme. Tout en sirotant un café, Michelle et moi devisons.



J’esquisse un sourire un peu pincé.



Cela fait une éternité – au moins – que je connais Michelle, que je la côtoie tous les jours. Bon, jusque-là, c’était dans un autre corps, mais tout de même. En attendant, si ma collègue de bureau était une escaladeuse de braguette, il me semble que je serais au courant.



Elle sourit.



Déjà, qu’elle me parle de sa sexualité, voilà qui est nouveau, elle ne se serait jamais livrée à mon double masculin. Mais qu’elle me dise en plus simultanément qu’elle est infidèle tout en ne couchant pas avec d’autres hommes, j’avoue que je ne comprends pas.



Soudain, tout s’éclaire. Je souris.



Pour toute réponse, je l’embrasse à pleine bouche. Elle me rend mon baiser.




Vingt heures pétantes. Lorsque j’arrive à pied sur le fameux parking, je reconnais du premier coup d’œil le monospace familial garé le long de la grille.

Le tableau que je découvre alors me sidère : elle est toujours aussi bien coiffée, son maquillage est juste un peu plus marqué qu’à l’habitude, mais pour le reste, elle est assez loin de la collègue sérieuse que je connais. Robe noire qui lui arrive à mi-cuisse, décolleté jusqu’au nombril dévoilant une bonne partie de sa poitrine, hauts talons, bas noirs, elle est ravissante et aussi terriblement sexy.



Dix minutes de route, un chemin creux au beau milieu des champs, et un champ de blé qui ne devrait plus être long à être moissonné. Elle sort une couverture, et l’allonge sur le sol, au beau milieu des épis.



Trois minutes plus tard, je suis nue. Michelle a une telle technique pour me caresser les seins, mélange subtil de poigne et de douceur, une telle manière d’en lécher les pointes que je suis déjà prête à exploser avant même qu’elle n’ait posé ses doigts sur mon sexe.


Elle le sait, et en joue. Elle prend un malin plaisir à retarder l’échéance, encore et encore, et à faire durer le plaisir pour que je m’impatiente. Lorsque, au bout de quelques minutes, elle consent enfin à s’attaquer à ma caverne brûlante, je suis à deux doigts de défaillir. Deux doigts, c’est le cas de le dire, c’est exactement ce qu’elle m’enfourne tandis que son index ne cesse de me tire-bouchonner le clitoris. C’en est trop, j’explose… Mes reins montent vers le ciel, tout mon corps se convulse, et un éclair surgit de nulle part me frappe. Et cela dure, dure, dure encore…


Enfin, je reviens dans l’atmosphère. Michelle est là, appuyée sur son coude, visiblement amusée.



Quelques instants plus tard, c’est elle qui est nue, à l’exception de ses bas noirs. Alors, sans dire un mot, je plonge ma tête vers son sexe totalement épilé. Aux dernières nouvelles, quand j’étais encore un homme, je n’étais pas mauvais au petit jeu du cunnilingus, et elle va voir de quel bois je me chauffe. Nan mais !


Une demi-heure plus tard, nous sommes toutes les deux en train de nous rhabiller. Elle m’interroge.



En fait, c’est l’homme qui est encore en moi qui parle. Si Michael et moi avions échangés nos rôles, je suis presque certain que j’aurais eu le même problème.



Je ne réponds pas.





---ooooOoooo---




Officiellement, Michelle ne trompe son mari qu’avec des autres filles, je me demande donc bien comment elle a pu connaître Jason et savoir qu’il faisait aussi bien l’amour. Une crème, ce type ! Grand, baraqué, plutôt beau gosse et bien équipé, il a tout pour plaire.


À tel point que ce n’est pas une, mais quatre fois que je l’ai vu, et je lui ai demandé de tout m’apprendre, ce qu’il a fait avec un plaisir non dissimulé. Moi qui appréhendais de sucer, il a si bien su me mettre à l’aise que je le fais désormais avec aisance et, paraît-il, pas mal de talent. Me caresser devant lui ? Là encore, il a su chasser toutes mes inquiétudes, au point de réussir à me faire jouir quasiment à la demande, que ce soit simplement avec mes doigts ou avec un accessoire. Faire l’amour ? Facile, et dans toutes les positions, même les plus farfelues. La sodomie ? Avec lui, c’est un régal. En plus, il m’a filé toutes les combines qui permettent de ne pas avoir mal, même lorsqu’il m’a pénétrée avec un gode absolument monstrueux.


Et je l’ai tellement tanné pour qu’il ramène un copain à lui pour essayer une partie à trois qu’il a fini par accepter. Lorsqu’ils m’ont prise en double pénétration, j’ai cru m’évanouir de plaisir.




---ooooOoooo---




Huit jours. Il s’est passé huit jours sans qu’il ne se passe rien. La seule chose notable dans cette semaine a été une petite jeune, à peine plus vieille que moi, que Michelle m’a envoyée et avec laquelle j’ai passé la nuit. Ah, et puis aussi que cette même Michelle qui m’avait demandé de venir travailler avec une robe courte et moulante pour lui faire plaisir en a profité, dès mon arrivée, pour me piquer ma culotte. Bon, le vrai gag est que j’ai dû y penser dix minutes, et pourtant cette fameuse robe m’arrivait à mi-cuisse. Et puis, plus rien.




---ooooOoooo---




Purée, ma tête ! Je n’ai pourtant pas le souvenir d’avoir picolé… Et puis, c’est quoi, ce bruit ? On dirait un Steel Band… Je m’étire. Tiens, c’est marrant, je ne me rappelle pas non plus que mon lit était si grand. J’ouvre les yeux, la lumière crue du soleil m’éblouit.

Juste devant moi, il y a une silhouette, qu’il me tarde de voir correctement. Quand mes yeux ont enfin réussi à s’adapter à cette incroyable clarté, j’ai du mal à les croire…


Vite, attraper une mèche de cheveux pour vérifier qui je suis… Est-ce une bonne nouvelle ou pas, mais je suis toujours blonde. Et un coup d’œil sur ma poitrine me le confirme, au-delà d’être nue, je suis toujours une fille.


Par contre, celle qui est là devant moi, je ne l’ai jamais vue. Elle aussi est nue, ravissante, et pour faire simple, est mon pendant en brune. Même type de nana, petit gabarit, petite poitrine, visage d’ange, ses yeux à elle sont d’un bleu turquoise à mourir, bref, elle aussi est d’une beauté à couper le souffle. Par contre, différence avec moi, un rapide coup d’œil sur sa petite chatte m’informe qu’elle est totalement lisse.



Je me redresse, l’air ahuri.



Elle sourit.



Mon sang se glace.



Elle éclate de rire.



Là, elle m’explique qu’avant de se retrouver dans ce corps de rêve, elle avait trente-deux ans, qu’elle était pivot d’une équipe de basket. Oh, sportivement, cela n’allait pas trop mal, sauf qu’une fille d’un mètre quatre-vingt-dix-huit pour cent vingt kilos, ça ne fait pas fantasmer beaucoup de monde. Du coup, sa vie était un abîme de solitude, solitude d’autant plus insupportable que s’annonçait la fin de sa carrière de basketteuse.



De nouveau, elle éclate de rire.



À ce moment, le carillon retentit.



Là-dessus, sans avoir pris la peine d’enfiler le moindre vêtement, elle va ouvrir. Deux grooms entrent, poussant devant eux un chariot couvert de victuailles d’où une délicieuse odeur se dégage.



L’expression du gars est assez comique : de par sa situation, il ne doit bien évidemment rien laisser paraître de son trouble. Par contre, le ton de sa voix est assez explicite, il aimerait bien rester quelques minutes de plus, histoire de profiter du spectacle que Jenny lui offre. Quant à son collègue, s’il s’efforce également de ne pas sortir de sa réserve, il a carrément la mâchoire qui se décroche et la langue qui traîne sur le sol.


Une fois la table installée, je ne suis pas complètement certaine que tout est vraiment placé comme cela devrait être, selon les « normes » de ce genre d’établissement. Mais il faut tout de même comprendre qu’assurer son service tout en louchant comme l’ont fait les deux gars, cela tient de la performance de haute volée. Une fois la porte refermée, je ne peux que m’étonner de son comportement.



Je souris.



Tandis que nous sommes à table, j’en profite pour jeter un œil sur ce qui ne peut être qu’une suite d’hôtel, probablement de luxe ou de très grand luxe. Sur deux côtés, via d’immenses baies vitrées qui s’étendent du sol au plafond sur toute la largeur de la chambre, une vue splendide sur la mer d’un bleu turquoise, et sur une immense plage de sable blanc bordée de cocotiers.


Au loin, quelques off-shore, quelques véliplanchistes et pas mal de speed-sail et de kite-surf. Jenny s’amuse de mon émerveillement.



Puis, remarquant que je ne mange presque rien.



Elle éclate de rire.



Pendant les deux heures qui s’écoulent, Jenny n’a pas enfilé un seul vêtement. Apparemment, la nudité est une seconde nature, pour elle.

Au moment de partir, elle se contente d’enfiler une courte robe à même la peau et surtout sans aucun sous-vêtement.



Elle éclate de rire.



J’avoue qu’elle me scotche.



Je ne sais comment elle est au courant de l’opération Michael, mais je ne peux le nier.





---ooooOoooo---




Ce que Jenny appelle les studios, et qui est en fait une immense villa au bord de la plage, est à dix minutes de l’hôtel où nous résidons. Quand j’ai vu sa Ferrari, Jenny a tenu à m’avertir.



Visiblement, nous sommes attendues, mais Jenny part dans une toute autre direction. Un homme en tenue de technicien s’adresse à moi, avec un fort accent texan.



En fait de plateau, il n’agit d’une terrasse avec vue, je vous le demande, sur la mer. Le soleil est encore doux à cette heure de la matinée, le vent délicieusement tiède, la lumière splendide. L’endroit est assez idyllique, malgré la batterie de projecteurs situés en retrait.



Tandis que je me change, je ne peux que leur demander pourquoi je dois d’abord m’habiller pour me déshabiller ensuite. Elles pouffent.



Ben voyons…


C’est le même type qui revient m’apporter mon script. Pas très compliqué, arriver de l’intérieur de la chambre, prendre mon temps sur le pas de la porte donnant sur la terrasse, puis aller tranquillement jusqu’à la rambarde de pierre. Dos à la caméra, m’étirer lentement sur la pointe des pieds en profitant du soleil et en laissant mes cheveux s’envoler dans le vent, leur laisser le temps de s’attarder sur mon cul et sur mon sexe vu de l’arrière. Puis, me pencher doucement sur le rebord du balcon en faisant mine de regarder la mer, toujours pour qu’ils puissent multiplier les gros plans sur l’arrière de ma fente. Après, et seulement après, il me faudra m’allonger sur une sorte de sofa de cuir blanc, et là, en tenant compte de la lumière, je me caresserai.



Au fur et à mesure que la répétition avance et que je me rends compte de l’attention que je suscite, un sentiment curieux s’empare de moi. Lorsque l’on est une jolie fille, on ne l’est pas du jour au lendemain, en général, on a été une jolie gamine, une jolie adolescente, une jolie jeune fille avant d’être une jolie jeune femme. Du coup, on a une certaine habitude d’être regardée, envisagée, même s’il est probable que cela finisse par être pénible pour certaines qui ont un peu de mal à l’assumer. C’est l’éternel problème des gens qui, toute leur vie, se sont battus pour devenir célèbres et se rendent compte que les paparazzis vous tuent la vie ! On ne peut pas tout avoir, le beurre, l’argent du beurre et le cul de la crémière…


Mais moi, ça m’est tombé dessus du jour au lendemain et j’ai du mal à réaliser. Oh, il n’y a qu’une petite dizaine de gars sur le tournage, mais ils n’ont d’yeux que pour moi, même s’il est difficile de savoir si c’est un regard professionnel ou envieux.

Dans tous les cas, je ne sais pas pourquoi, mais j’ai envie de leur offrir ce qu’ils veulent, sans même penser aux internautes qui regarderont la vidéo par la suite.



Moteur ! Ça tourne !


Dès le premier instant, quand je suis apparue, nue, sur le palier de la chambre comme c’était prévu, j’ai senti tous ces regards changer d’attitude envers moi. J’ai aussi senti mon ventre se tordre, mon sexe ruisseler.


Surtout, ne pas aller trop vite, même si à ce moment précis, j’ai surtout envie de me précipiter sur le sofa. J’avais peur d’avoir du mal à sourire, mais il n’en est rien, tant l’attitude de cette petite assemblée est bienveillante. Au contraire, à les voir baver devant mes charmes, j’ai plutôt envie de rire, et je comprends soudain ce formidable sourire amusé que mes désormais collègues ont au tout début des vidéos.


Tout se passe comme prévu jusqu’au moment où je m’allonge sur le sofa. À cet instant, je repense à ce que Jenny m’a dit le matin même, à savoir qu’il faut s’imaginer être en train d’essayer de faire craquer le cadreur. Il faut que sa braguette explose, que sa caméra se mette à trembler, qu’il devienne tout pâle et qu’il ne sache plus où il habite et comment il s’appelle.


Bien entendu, c’est une image, sans compter que notre homme est un professionnel et qu’il en a vu d’autres. N’empêche, on va tenter le coup, et force est de constater que son regard, que je vois curieusement très bien derrière son œilleton, vient de changer brusquement lorsque je commence à jouer avec la pointe de mes seins. Quand mon index amorce la masturbation proprement dite, qu’il traîne un peu trop longtemps avec mon clitoris, je jurerais que de la sueur s’est mise soudain à couler sur son front. Et quand un doigt fureteur, suivi très vite d’un deuxième, s’enfonce tout d’abord à l’entrée de mon sexe avant d’y pénétrer tout à fait, il me semble bien qu’il est en train d’entrer dans un état second.


Changer de position, c’est prévu dans le script, je me mets donc à quatre pattes, et l’exploration de mes zones sensibles continue. Les seins posés à même le cuir, les jambes largement écartées, les doigts fouillant profondément en moi, j’ai l’impression que l’objectif va entrer en moi tant je sens sa présence à quelques centimètres de ma case trésor.



Si j’essaie de reprendre mon souffle, le chef opérateur, lui, est au bord de l’apoplexie, j’en jurerais. Il en est de même pour une bonne partie de l’équipe, qui ne cesse d’applaudir qu’après un long moment.



Je ne sais pas comment il connaît cette expression, en français dans le texte qui plus est, mais je l’apprécie à sa juste valeur.



Bonne nouvelle, je ne me vois pas jouir aussi fort une deuxième fois en si peu de temps. Il consulte sa montre.



De nouveau, je souris.



Cinq minutes plus tard, je suis entourée de tous les techniciens. Comme je n’ai pas pris le temps de me rhabiller, la scène est assez cocasse.



C’est toujours le chef opérateur qui répond.



Dix bonnes minutes plus tard, je me retrouve avec une habilleuse. Soutif en dentelle, porte-jarretelles assorti, bas blancs, l’ensemble est somptueusement réalisé, sans oublier une paire de souliers plus hauts que je n’en ai jamais vu. Du très haut de gamme, et la célèbre griffe qui le signe en est une preuve de plus.



Tout, là-dedans, est parfaitement vrai. Bon, pour être rigoureusement honnête, j’en ai plus retiré qu’autre chose. Tandis qu’elle m’aide à me mettre en valeur, je risque une conversation.



Elle sourit.



De nouveau, elle sourit.



Là-dessus, c’est tout juste si elle ne me vire pas manu militari de l’endroit où elle officie. En m’apercevant, une partie de l’équipe ne peut s’empêcher de siffler.

De nouveau, on m’explique le script, ce que je dois faire, et au bout de quelques répétitions, je suis prête à faire ce que l’on me demande.



Ce genre de prise de vue est plus facile, mais la difficulté est de réussir à maintenir la tension du spectateur. Dans un premier temps, ne rien montrer mais tout faire deviner, par exemple en se penchant vers l’avant pour mettre son décolleté en valeur. Jouer avec ce même décolleté pour faire apparaître l’aréole d’un sein, tout en donnant l’impression que ce n’est pas fait intentionnellement. Faut pas croire, c’est tout un art, et heureusement que toute l’équipe m’a expliqué comment m’y prendre !


Ce sont eux qui m’ont rappelé ce que je savais déjà, pour avoir été un observateur lambda il n’y a pas si longtemps : devant ce genre de vidéo où l’on sait que la demoiselle finira, d’une manière ou d’une autre, totalement nue ou peu s’en faut, on finit par souhaiter qu’elle ne se déshabille pas trop vite. Bon, il ne faut pas aller trop lentement, non plus, parce que la lassitude vient rapidement si cela s’éternise trop. En un mot, il faut que le client n’ait pas envie d’utiliser l’avance rapide !


Alors, ce sont eux qui, en coulisse, m’indiquent à quel moment je dois enlever tel ou tel vêtement. Le soutif ainsi que la culotte sont bien vite jetés aux orties, je me retrouve donc tout juste habillée de mon porte-jarretelles et de mes bas. Le script était précis, je devais les enlever pour finir totalement nue mais je m’y refuse. Quand j’étais un homme, je ne pouvais résister à l’attrait d’une jolie femme ainsi vêtue et, de toute manière, l’équipe m’a informée qu’en cas de soucis, il resterait la solution d’une autre prise ou simplement de quelques plans complémentaires. Du coup, je ne m’en prive pas et je déambule paisiblement dans le décor, multipliant les poses lascives et les occasions d’offrir mes charmes, notamment mon intimité, à la caméra.


Cela n’était donc pas prévu, mais lorsque je m’assieds sur le canapé et que je pose négligemment ma jambe sur l’accoudoir, ce n’est pas deux comme de coutume mais bel et bien la totalité des cadreurs qui se précipitent sur moi pour immortaliser l’instant.

Attention, pas de branlette, ce n’est pas pour le même site et il ne joue pas dans la même cour. Par contre, jouer avec ses lèvres, les écarter délicatement, faire mine de titiller son clitoris avec un sourire enjôleur, caresser ses seins et en chatouiller les pointes, ouvrir en douceur son sexe pour en découvrir les petites lèvres avant que l’on ne finisse par en deviner l’intérieur, tout cela, on peut, et je ne m’en prive pas. Lorsque, au bout d’une petite dizaine de minutes, je finis par me redresser tout en faisant, de la main, au revoir à la caméra, il règne sur le plateau un silence de cathédrale. La plupart des techniciens sont rouges comme des pivoines.



J’aimerais bien lui répondre que, précisément, je n’ai aucune idée de ce que je fais là…




---ooooOoooo---




Les semaines passent. Floride, Californie, Hawaï, mais aussi Cuba, Jamaïque, République Dominicaine, Saint-Barth et Saint-Martin, Bahamas, Fidji, Polynésie, Marquises, Île Maurice, Seychelles, Bora-Bora sans oublier d’autres endroits plus inattendus telles les Pyramides d’Égypte, Pétra ou le musée de l’Hermitage, mon passeport ne cesse de se remplir. À ce train-là, je crois que j’aurai eu des orgasmes divers et variés dans les plus beaux sites du monde ! Et la liste de mes partenaires de jeu ne cesse de s’allonger… Bien entendu, hors plateau, il y en a avec qui le courant passe plus ou moins bien, mais j’ai affaire à de sacrés professionnels, toujours sympas, toujours attentionnés, toujours performants, qui ont su très vite me reconnaître comme l’un ou l’une des leurs.


Et côté financier, à chaque fois que je consulte mon compte en banque, je n’en reviens pas, tant les sommes versées sont astronomiques. Jenny m’a bien précisé que, dans le métier, nous n’étions qu’une infime minorité à gagner autant, il n’en demeure pas moins que c’est extrêmement confortable. Oh, bien sûr, si l’on s’amuse à comparer nos salaires avec ceux des « vrais » acteurs, notamment hollywoodiens, ils sont ridicules. Mais tout le monde n’a peut-être pas besoin de gagner plusieurs millions de dollars par mois pour se sentir à l’abri du besoin…


Côté cœur, il faut reconnaître que le bilan n’est pas aussi brillant. Déjà, rencontrer quelqu’un de normal dans ce milieu n’est pas chose facile, mais en plus d’accepter le métier de cocu systématique, il lui faut attendre, attendre et encore attendre notre retour car nous sommes toujours parties aux quatre coins du monde. Et puis, quelle que soit sa gentillesse et son attention, quand nous passons au lit, il ou elle n’est jamais vraiment à la hauteur de ce que nous avons connu dans la journée…

Mais, après tout, il y a des millions de couples qui vivent sans jamais faire l’amour ou connaître l’orgasme et s’en accommodent très bien…


Par contre, même si je n’en laisse rien paraître, l’inquiétude me gagne doucement. Il paraît que j’ai été envoyée ici parce que je voulais savoir ce que ressentaient les filles qui font ce métier, et que le mec en blanc reviendrait lorsque j’aurais les réponses. Or, les réponses, il me semble bien que je les ai… Et depuis un bon moment, déjà.




---ooooOoooo---




Un petit matin, un petit matin aussi féerique que les autres, si j’ose dire. Comme à chaque fois que nous sommes à Miami, Jenny et moi partageons le même appartement. Cela peut paraître curieux, mais en dehors des plateaux, nous ne faisons quasiment jamais l’amour ensemble. Par contre, il paraît que notre complicité se voit à l’écran, ce que je n’ai pas trop de mal à croire.


Le carillon retentit, c’est le service d’étage. Hier, c’est moi qui suis allée leur ouvrir dans le plus simple appareil, aujourd’hui, c’est mon amie et collègue qui s’y colle. Pour que le cérémonial du petit déjeuner ne devienne pas trop coutumier pour les serveurs et pour varier les plaisirs, elle a simplement enfilé un léger peignoir de soie qu’elle n’a, bien entendu, pas pris la peine de nouer et qui ne cache naturellement pas ses charmes.


Le ton de sa voix, de coutume si enjoué, change brusquement.



M’habiller ? Que peut-il y avoir de si grave pour en arriver à de telles extrémités ? Lorsque que je reconnais une certaine silhouette dans l’embrasure de la porte, mon sourire s’efface. C’est le type en blanc.



Il m’invite à le suivre, juste pour traverser le couloir et pénétrer dans l’appartement d’en face.

Mais, à ma grande surprise, ce n’est pas un appartement : et pour cause, c’est une chambre d’hôpital, chambre que je connais bien puisque, sur le lit, là, juste devant moi, c’est moi. Enfin, c’est mon corps, celui de Manu. Comment cette chambre est-elle arrivée là ? Tout comme ce corps d’ailleurs ? Je n’en ai aucune idée, mais là n’est pas la question.



Si je me souviens parfaitement de ses propos lors de notre première entrevue, j’avoue que je ne comprends pas.



Le problème, c’est que je ne sais déjà pas comment et pourquoi je suis arrivée dans ce corps, ce n’est certainement pas pour que je sache comment je vais en sortir.



Ma femme et mes gosses… À ma très grande honte, j’avoue que je les avais oubliés, ceux-là. J’en ai subitement le rouge au front.



Là, c’est une claque dans la figure. Je suis KO debout.



Je me tourne vers Jenny.



Puis, me retournant cette fois vers l’homme en blanc :



Un silence écrasant emplit soudain la pièce. Lorsque l’on est follement amoureux, même si l’on sait pertinemment qu’il s’agit d’une histoire impossible, on la vit à fond, même si l’on sait que le précipice est au bout et qu’insister ne fera qu’empirer les choses. Je me rends compte que j’étais dans la même situation.



D’une voix blanche, je m’entends répondre.



Une larme coule le long de ma joue.



C’est une photo de moi, nue comme il se doit, que je signe rapidement. Tandis que l’homme en blanc la glisse dans le veston de l’homme inconscient qui est sur le lit, il sourit.



J’aurais aimé pouvoir serrer Jenny une dernière fois dans mes bras, mais le sol s’ouvre sous mes pieds. Une longue chute, et je sombre dans le néant.




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Sept heures moins quart. Satané réveil ! J’ai l’impression d’avoir dormi des jours et des jours, mais l’odeur du café me sort de ma torpeur.



C’est la voix d’Anita, ma chère et tendre. Elle m’apporte le café, c’est rarissime.



C’est le cliché d’une sublime jeune femme, blonde aux yeux verts et au corps de rêve, photographiée dans le plus simple appareil. La dédicace est simple, « À mon autre moi-même, bisous, Emmanuelle ». Je n’en reviens pas.



Puis, après un silence :



Elle hausse les épaules.



Bien entendu, je ne l’ai pas dit mais c’est un détail que j’ai noté.



Dix minutes plus tard, une alerte mail m’informe que j’ai un nouveau message. Tiens, il émane du site où j’étais hier, je ne me rappelle pourtant pas leur avoir donné mes coordonnées. Il semblerait qu’ils aient un nouveau modèle, qui ressemble étrangement à la fille de mon portefeuille. En quelques clics, j’apprends qu’elle a dix-neuf ans, qu’elle est française, plus tout un tas d’autres choses qui m’indifférent. Par contre, sa dédicace m’interpelle :



Coïncidence ? Je ne le saurai sans doute jamais.



On peut disserter longtemps sur le fait que l’industrie pornographique, au même titre que la prostitution dont elle n’est jamais qu’un dérivé plus ou moins légal, est un avilissement pour ceux qui la pratiquent. Mais le fait que ce soit précisément le plus vieux métier du monde laisse à penser que, quelquefois, certains – et certaines – y trouvent quand même leur compte.


Le but de cette histoire n’est certainement pas de glorifier ni d’idéaliser ces pratiques, tout juste de vous distraire. Si elle y est parvenue, l’objectif a été atteint.


Cela dit, elle m’a été inspirée par deux sites qui existent réellement et où l’on a vraiment l’impression que les modèles ne sont pas de notre monde. Si vous voulez en savoir plus, contactez-moi par MP.