n° 15148 | Fiche technique | 23284 caractères | 23284Temps de lecture estimé : 14 mn | 09/09/12 |
Résumé: Métempsychose érotique. | ||||
Critères: fh hplusag profélève revede voir lingerie intermast fellation pénétratio fsodo conte -f+prof | ||||
Auteur : Aline Issiée Envoi mini-message |
Depuis toujours, j’ai l’impression d’être en décalage avec mon époque. Je crois que c’est un trait partagé par beaucoup, mais il était si fort chez moi qu’il m’a poussée à m’orienter vers des études d’histoire, comme pour connaître des époques qui m’auraient mieux convenu. Je ne savais certes pas, en entamant ces études, qu’elles allaient m’aider à découvrir ma vraie personnalité…
Car le décalage dont je parle m’a longtemps gênée, surtout depuis l’adolescence. À la fac, j’étais une étudiante parmi d’autres, avec petits copains et sorties libres – je pouvais aller danser en boîte, m’alcooliser avec des amis tout en regardant de jolies filles exécuter ces « lap dance » qui augmentent encore la chaleur de ces établissements, et me retrouver au lit avec l’un ou l’autre de mes camarades – mais j’étais aussi, confusément, extrêmement différente de toutes les autres. Je n’avais donc jamais connu de liaison « suivie », ni n’étais jamais vraiment tombée amoureuse…
Je crois que c’est mon apparence physique qui dressait ainsi comme une barrière entre mes contemporains et moi. L’époque, chacun le sait, est aux sylphides, aux longues et minces silhouettes, hanches fines, seins menus et hauts placés. Les « plantureuses » sont bien entendu toujours existantes – et souvent affichées en photos suggestives dans les endroits les plus masculins, comme les vestiaires non mixtes des salles de sport, les cabines de chauffeurs routiers ou les ateliers. Mais les représentations de ces corps bien pourvus et rebondis sont souvent accompagnées de visages plutôt vulgairement maquillés, avec une absence générale de finesse dans l’expression : bref, celles qu’on appelle « les grosses salopes », quoi qu’attirantes pour certains et non des moindres, sont plutôt ressenties comme tendant vers la putasserie. Ce que je ne saurais mépriser, d’ailleurs ; simplement, ce n’était pas mon cas.
Car je crois que mon apparence était comme ambivalente : j’étais « à côté » des normes de mon époque. Ça ne voulait pas dire que je souffrais d’un surpoids ou d’une obésité mais simplement que mon corps était tout en courbes, et en chair plutôt épanouie. Pourtant, mon visage n’avait rien de commun avec les « bombas latinas » qui font onduler des lèvres gonflées et des regards lourds, comme des invites sexuelles immédiates. Il était plutôt fin, en amande, avec des traits réguliers, une petite bouche en cœur… De plus, ma carnation particulièrement blanche rougissait fort facilement, et ma poitrine était certes un peu plus forte que celles des filles de mon âge, mais surtout plus ronde, plus « pommelée », avec des aréoles fort fines, presque grêles. Dans une époque où seules les filles longilignes étaient représentées dans les magazines, ma silhouette, qui évoquait plutôt un « 8 » et où tout était galbé, jusqu’à mes mollets et mes cuisses rondes, détonait franchement.
Ce fut lors de ma quatrième année d’études que ma gêne à ce sujet se dissipa, et ce fut grâce au mémoire que j’entrepris, sur le conseil de mon professeur, Jacques Jude. Enfin, « grâce au mémoire »… disons aussi que je devais sûrement avoir les dispositions voulues !
Voici :
Jacques Jude était l’un des meilleurs profs de la fac de X. Et, ce qui ne nuisait en rien, un fort bel homme de trente-cinq ans environ – mais lui aussi, comme moi, bizarrement un peu « décalé ». Il était fort large d’épaules, toujours impeccablement habillé, mais près du corps, avec une taille fine, des pantalons serrés qui faisaient ressortir des cuisses musclées et nerveuses, un fessier haut porté. C’était lui qui distribuait les sujets des mémoires aux étudiants et, dès qu’il m’avait vue, il m’avait conseillé de choisir comme sujet d’étude les XVIIe et XVIIIe siècles français. En discutant avec lui, après un cours, du contenu de mon mémoire, il m’avait écoutée évoquer devant lui les aspects philosophiques de cette période, notamment les penseurs libertins : en partant de Théophile de Viau pour arriver à Diderot, ou Voltaire, et en prenant comme exemple quelques grands romans « libertins » comme les « Liaisons Dangereuses ».
Jacques Jude m’avait alors interrompue – et je le revois encore, lui assis à demi sur son bureau, et étendant devant lui ses longues jambes serrées dans un impeccable pantalon noir, et moi, assise sur un inconfortable siège d’amphithéâtre, les jambes serrées et un peu relevées, levant les yeux vers lui et rougissant sous ses compliments :
Pendant que Monsieur Jude m’indiquait ainsi une bibliographie aussi précise que surprenante, je me sentais rougir. Le sujet de mon mémoire était certes connu des historiens, mais confier à une simple étudiante de tels textes, de telles descriptions… Je décidai pourtant de me laisser guider en tout par mon professeur. Je le sentais en effet très bienveillant à mon égard, il m’avait fait souvent des compliments, non seulement sur mon travail, mais sur ma personne, et je me sentais particulièrement à l’aise en sa présence, regardée et même admirée ! Et puis, il avait une manière de parler qui différait tant du vocabulaire de notre époque. Il me semblait que, sur ce plan, nous avions décidément les mêmes goûts… Au-delà des mots, une sorte de complicité érotique commençait à nous engager l’un vers l’autre : le professeur vers l’élève appliquée et rougissante…
J’attaquai alors mon mémoire sur « Les plaisirs des boudoirs au temps des libertins », et bientôt les lectures et les livres que mon professeur me procura commencèrent à me troubler énormément. Certes, la manière beaucoup plus allusive, l’écriture si délicieusement surannée des textes que j’étudiais différaient en tout de la littérature érotique contemporaine. Mais justement : malgré les quelques siècles de distance, la description des pratiques et des mœurs me paraissait parfaitement naturelle – comme si c’était là mon élément.
Je m’en ouvris à Jacques, en lui demandant comment il se faisait qu’une seule page de Fanny Hill ou certains passages de Restif de la Bretonne puissent autant m’émouvoir, alors que j’étais une jeune femme du XXIe siècle, libérée des contraintes et des mœurs subies par mes ancêtres ! Il eut alors un petit rire, et me proposa de venir le soir même, chez lui. Il y avait là des livres qu’il ne pouvait pas prêter, car certains étaient d’authentiques trésors historiques à la valeur inestimable, et de plus, fort fragiles, ayant été beaucoup lus. Jacques m’assura que je trouverais là l’explication de mon trouble, sans compter le bénéfice que mes études en tireraient.
Le soir même, j’allai sonner à la porte de l’appartement de Monsieur Jude, qui se trouvait dans un des plus vieux quartiers de Paris, en plein cœur du Marais. Pendant que je grimpais par un grand escalier, aux marches patinées et à la rambarde luxueusement volutée, jusqu’à sa porte, je me sentais à la fois bien petite et pourtant comme « à ma place ». L’immeuble, rénové, datait visiblement du XVIIIe siècle. J’étais tellement émue, comme si j’étais « pour de vrai » transportée à cette époque, que mon cœur battait dans ma poitrine, mes seins se soulevaient, comme ceux d’une fille convoquée par un grand seigneur libertin, pour un souper galant, en bonne compagnie bien sûr. Car les livres étaient formels : les petits soupers se passaient en commun, les filles allant de l’un à l’autre de ces messieurs, et aucun plaisir n’y manquait, ni celui de la chair ni celui du sexe…
Cette illusion était si forte que je fus un peu déçue de trouver Jacques seul, tant mon imagination m’avait emportée à l’époque des excitations libertines. Certes, son appartement, pourvu de tout le confort moderne, avait su garder l’esprit de la fin du XVIIe siècle. Son salon ressemblait bien plus à un boudoir, avec sofas et coussins de soie, qu’à nos mornes salles où trônent désormais les télés devant de lourds canapés. Sa bibliothèque était somptueuse, même si un ordinateur était posé, de manière incongrue, sur un délicieux petit secrétaire, sûrement fabriqué de la main de Boulle lui-même. Et une « collation », où figuraient des fruits confits dans des compotiers, des abricots mûrs à point, des huîtres ouvertes et garnies de cédrats, du vin épais dans de hauts verres à pieds, des biscuits à la cuillère, complétait l’illusion…
Ce fut amusant, comme une sorte de dînette, et très instructif, car Jacques m’apprit la provenance de chaque plat que nous goûtions ensemble. Et c’était un vrai plaisir de sentir qu’il aimait me détailler, me regarder longuement, pendant qu’à mon tour je plantais mes yeux dans les siens, tout en buvant lentement le vin de Corinthe, qu’il préférait entre tous…
À la fin du souper, il alla chercher, sur un rayon, un des livres rares qui garnissaient sa bibliothèque, et, m’invitant à m’asseoir près de lui sur le sofa, il l’ouvrit et m’en montra les illustrations. Je fus si émue que je sentis mon souffle qui se coupait : car les images que Jacques me montraient étaient certes parfaitement érotiques, même plus que cela, mais surtout le personnage principal qui y était représenté dans différentes positions me ressemblait comme deux gouttes d’eau. Je retrouvais la forme de mon visage et de ma bouche, et mon corps était si exactement conformé comme celui que je voyais que c’en était hallucinant. D’un seul coup, je me rendais compte à la fois que je représentais, au vingt et unième siècle, l’idéal physique du dix-huitième siècle, mais encore que j’étais l’incarnation de la sensualité et de l’érotisme de toute cette époque.
Car Jacques, lentement, tournait les pages, et à chaque image c’était une nouvelle scène qui était dessinée, certes en noir et blanc mais avec une précision quasi photographique : là, on voyait ma jumelle desserrer un corset qui avait soutenu et porté en avant des seins aussi ronds que les miens. Sur l’image suivante, elle était allongée sur un lit, les jupons retroussés et les fesses à l’air, pendant qu’un personnage, habillé comme un petit marquis de ce temps-là, lui écartait les cuisses, à l’aide d’une badine de cuir. Il y avait une progression dans les images : au lit, l’homme lui pressait la poitrine d’une main, pendant que l’autre avait disparu entre ses cuisses et que les draps et les couvertures du lit marquaient tous les signes du désordre. Enfin, d’autres hommes et d’autres femmes rejoignaient les amants, et des couples se formaient et se défaisaient, au rythme de différents enlacements, de nombreuses combinaisons lubriques. On voyait distinctement ma jumelle, à genoux, s’emparer du membre du libertin, pendant qu’un autre homme approchait son sexe du postérieur généreux de la belle. Une image la montrait aussi, pantelante, les yeux fermés, pendant que trois hommes s’activaient sur elle, qui semblait endormie…
Je levai les yeux vers Jacques, qui s’amusait visiblement de mon trouble et qui, presque naturellement, une fois le livre refermé, se pencha vers moi et ouvrit de sa langue mes lèvres, pour me donner un baiser profond et terriblement appuyé. Quand il eut fini, il se redressa, et ce fut moi qui me jetai alors à son cou : tout ce que je venais de voir, et surtout la découverte que j’étais la réplique exacte d’une libertine du XVIIIe siècle m’avait terriblement excitée, et je sentais bien qu’entre Jacques et moi, le désir explosait et abolissait les siècles !
Je me sentis de nouveau si émue que je sentais que tout mon corps réagissait. Comme si j’avais enfin trouvé ma vraie place – et j’avais parfaitement compris ce que Jacques désirait réellement, et je le désirais aussi. En souriant, je me suis donc relevée du sofa, et j’ai cherché, dans la grande armoire de la chambre, ce que je savais y trouver : Jacques m’attendait encore que je revenais vers lui, habillée exactement comme une libertine. Un « panier » soutenait un jupon, recouvert lui aussi d’une jupe. Un corset, laissant les pointes de mes seins visibles, les soutenait et semblait les offrir aux mains qui voudraient bien les caresser. Ma coiffure comportait une sorte de bonnet, qui contenait fort mal l’ensemble de ma chevelure. Des bas blancs, s’arrêtant aux genoux, complétaient l’ensemble. Et toute ma silhouette, ronde et à la taille exiguë, mais aux hanches larges, semblait faite pour cette sorte d’habillement…
Jacques me laissa faire, et je pris exactement la pose d’une des gravures, m’allongeant sur le ventre, parmi les coussins du sofa, et regardant Jacques de côté. Et ce fut à l’aide d’une badine semblable à celle du dessin qu’il releva mes jupes et mes jupons, avant de délacer mon panier et enfin de couvrir mes fesses et mes cuisses de baisers d’autant plus ardents qu’il n’hésitait pas à recourir au vocabulaire du temps :
J’adorais cette manière de parler, et je m’offrais le plus complètement possible : il commença à m’enculer, toujours en parlant comme un grand libertin, mais sauta, juste avant la fin, pour m’enfoncer son pieu dans mon con, en me faisant jouir ainsi coup sur coup.
Après ce premier tableau, nous parcourûmes, Jacques et moi, presque toutes les images des Mémoires d’Henriette, sauf celles qui concernaient d’autres partenaires. Mon clitoris était si excité, soit par les doigts qui me « polluaient », comme disait Jacques, soit par la badine qu’il promenait parfois tout au long de mon corps, soit par la vue de son membre à lui, que je ne cessais de prendre en bouche, puis de le ressortir pour le caresser, puis de le remettre à l’entrée de mon con ou de mon cul, pour avoir le plaisir de le sentir rentrer d’une seule et solide poussée, que j’avais l’impression de jouir en continu.
Quant à Jacques, lui non plus n’arrivait pas à se retenir. Il déchargea au moins trois fois pendant la soirée, dont une dans mes mains, j’eus juste le temps de diriger son membre vers mes seins, et il déposa son sperme (que nous appelions, pour continuer le jeu délicieux, sa « semence ») sur ma poitrine, qui s’en trouva aspergée… Mais à chaque fois, nous reprenions notre lecture qui, jointe à ma propre excitation, permettait à mon professeur de recommencer à durcir… pendant que nos mains et nos lèvres interrompaient souvent le tournage des pages, et que nos soupirs semblaient s’échapper du livre lui-même.
Quand nous eûmes fini notre « lecture », c’est-à-dire au bout de trois heures de baise effrénée, nous étions exténués, et surtout le boudoir était sens dessus-dessous : bien malin celui qui aurait pu dire que les étoffes, les vêtements, les chaises qui étaient tombées par terre étaient du vingt et unième siècle… Jacques se leva pour remettre un peu d’ordre, mais j’étais si fatiguée que je restais comme j’étais, comblée et allongée à même le sofa, les jambes encore ouvertes et ruisselantes de cyprine et de sperme, la tête posée sur mon bras replié et regardant en souriant mon professeur préféré. Celui-ci, se tournant vers moi, me détailla de fond en comble, puis :
Je me souvins alors des scènes « collectives » du livre, où des couples s’échangeaient, et surtout du dessin d’Henriette, extasiée sous les corps de trois hommes qui s’occupaient en même temps d’elle, et j’interrogeais Jacques du regard. Que voulait-il exactement ?
Je me relevai alors d’un seul coup, alertée et tremblant légèrement, et je commençai à regarder les murs de l’appartement. Étaient-ils disposés comme ceux des « petites maisons » ? Nous avait-on épiés, pendant tous nos longs ébats ? Jacques avait remis son pantalon noir, mais moi j’étais restée entièrement nue, quand, fixant un des charmants dessins du papier peint à la manière des toiles de Jouy qui ornaient le salon, je vis avec stupeur la cloison pivoter, et des inconnus, deux hommes et deux femmes, habillés comme en 1698, entrer masqués dans la pièce. Je n’eus que le temps de mettre un bras devant mes seins, une main sur mon sexe, dans une tentative parfaitement vaine de cacher ce qu’ils devaient avoir déjà longuement contemplé, depuis un des judas du salon… Déjà un des hommes s’avançait vers moi, pendant que les deux femmes faisaient comme une révérence, dévoilant leurs seins, envers mon professeur…
La suite ? Elle était déjà écrite dans les Mémoires d’Henriette…
Et ce fut cette nuit-là que mon mémoire obtint, haut la main dirons-nous, la mention « Très bien »…