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n° 15477Fiche technique20164 caractères20164
Temps de lecture estimé : 12 mn
12/02/13
Résumé:  Sandra souffre de l'absence de son amant et se confie à un agresseur bien particulier. Le contrecoup... Bernard, le trouble, l'envie.
Critères:  f fh inconnu parking caférestau douche cérébral revede voir fmast nopéné exercice confession portrait
Auteur : Cheminamants  (Vivre ce qu'on espère et ne rien y comprendre.)      Envoi mini-message
Le trouble...

Dimanche 20 Janvier 2013



Nous sortons du grand hall de l’« Espace culturel du parc » de Ladoucette à Drancy après avoir assisté au « Concert du Nouvel An » joué avec brio par l’orchestre d’harmonie de la ville, suivi du traditionnel cocktail de gourmandises. Je ne regrette pas de m’être déplacée, pour deux raisons. La première, parce que j’aime la musique, toutes les musiques, pourvu qu’elles me fassent vibrer, et ce fut le cas ce soir. La deuxième, parce que j’aime faire la nique à la solitude des week-ends en sortant pour me divertir avec des amis ou collègues de travail, comme c’est le cas aujourd’hui.


Quelques bises et des souhaits de bonne nuit. Je les remercie pour leurs « Au revoir, à bientôt Sandra ! ». Nous nous séparons, puis je me dirige vers ma voiture que j’ai dû garer à l’écart, faute de place plus près.


Je m’installe derrière le volant et je fixe mon GPS sur le pare-brise en pensant qu’il est seulement vingt-et-une heure, et le difficile « toute seule » commence à m’envahir.


D’un seul coup, un homme ouvre la portière ! Environ vingt-huit ans, grand, musclé, la tête bien cachée sous une large capuche, mais j’ai eu le temps de voir son visage. Des yeux magnifiques, une voix douce qui contraste avec ses mots :



Je tressaille, interloquée, et sans réfléchir :



Puis je fonds en larmes et lui sors que ça m’arrangerait en fin de compte de disparaître, que je suis amoureuse d’un homme qui en ce moment même est dans les bras de sa compagne, et que je suis malheureuse, et que la solitude me pèse… à cinquante ans. Mon abonné absent me manque tellement et trois notes de musique ou un petit resto avec des amis ne me comblent pas vraiment.


Il s’assied sur le siège avant, sans rien dire. Il m’écoute, et ses grands yeux bleus sont ouverts sur l’incroyable. Surprenant, troublant aussi.


Et je parle, je parle, je parle tellement… de ma souffrance… de lui, mon amoureux.



Silencieux, le bel inconnu caresse le tableau de bord d’une main, le regard indéfinissable qui plonge dans mes yeux comme pour essayer de regarder ma noyade de plus près. Et moi, je me débats…


« S’il voulait me donner des heures et des heures, nous pourrions prendre le temps. Je me ferais désirable et languissante pour lui. Nous partagerions des milliers de caresses sensuelles en repoussant le moment de nous enflammer, juste pour le plaisir. J’ai besoin que ce soit comme ça : le désir de lui qui n’en finit pas de monter et l’abandon jusqu’à la jouissance les jours de week-end ».


L’homme a ses mains sur ses cuisses, une qui caresse lentement son jean, du genou jusqu’à l’aine et l’autre qui se crispe sur le tissu épais pour s’empêcher de me toucher. Que m’importe ce qu’il se fait à lui-même ! Puisqu’il m’est apparu sans que je le lui demande, je ne lui laisse pas le droit d’espérer autre chose que de m’écouter. Je lui avoue tous les délices érotiques qui me manquent à vivre dans les bras de mon amoureux. Puis j’arrête mon flot de paroles interminables et amères pour reprendre mon souffle. Il me glisse alors d’une voix calme et rauque :



Je repars de plus belle avec une coulée de larmes, puis d’une voix entrecoupée de sanglots :



« Si seulement je pouvais lui crier de rester pour m’aimer vraiment, ou d’arriver à me priver de lui ».


Et je raconte, je raconte, avec des mots qui se bousculent dans ma tête, tous voulant sortir pour que j’explique ce qui ne se conte pas, tout, tout de suite, juste pour moi, parce que lui, l’inconnu, n’existe presque pas. C’est sa punition et ma délivrance. Il faut qu’il sache ! Tous mes « pas de caresses le dimanche soir » depuis des mois.



Des flashes de souvenirs pas eus me brûlent de l’intérieur, pendant qu’il frotte vigoureusement son entrejambe sans défaire sa braguette. Je continue de parler de l’homme que j’aime :



Les constats de tous mes manques m’assaillent et je réalise qu’il y a un monde qui me sépare de cet homme. Il se caresse à travers le jean et s’offre du plaisir malgré les circonstances : il voulait me prendre ma vie ! Un bilan vite fait… C’est trop pour moi !



Étonnant ! Délicatement, il prend ma main. Je la lui laisse comme si j’étais devenue une poupée de chiffon. Puis il l’approche de son visage tout en se penchant vers elle cérémonieusement. Un baisemain, de lui pour moi. Troublant, un vrai, celui qui s’arrête juste avant de frôler ma peau, fait avec tendresse même, en me regardant dans les yeux. Il est beau. Je ne comprends pas pourquoi maintenant il sort de la voiture en refermant doucement ma portière. Pour me laisser prisonnière de ma vie ? Il s’en va.


C’est fini… Je tremble. Pourquoi j’ai dit tout ça ! À lui, comme ça, sans réfléchir.

Je me sens vide, épuisée, même pas plus vivante qu’avant. Puis je verrouille mes portières de voiture, seulement maintenant, comme c’est bête… Je reste prostrée, la tête posée sur la vitre froide. Je ferme les yeux en pensant à son trouble, et au mien, si différent. Ma tête s’embrume, je me sens engourdie, cotonneuse, tout devient flou, une voix lointaine qui s’estompe, quelques mots, le brouillard s’épaissit, je suis… partie… ailleurs…




—oooOooo—




Puis je sursaute, je tremble avant même de savoir, de comprendre, avant même de rouvrir les yeux, juste en entendant :



Une voix d’homme, mais ce n’est pas celle de l’autre. Je fais « oui » de la tête. J’ouvre les yeux et je me redresse, bien droite sur le siège en le regardant, indifférente. Il a la cinquantaine et les cheveux poivre et sel, pas très courts et la tignasse en bataille. J’ai froid, si froid !



Il a dû percevoir mon hésitation, puisque j’ai mis quelques secondes avant de lui répondre, alors il me dit d’un air convaincu :



D’étranges impressions titillent mon esprit et se mélangent. De la curiosité, une envie d’attention, de réconfort, une émotion, un trouble…


Puis je reviens à la réalité en entendant un bruit de moteur à quelques mètres. Je démarre et j’attends. La voiture arrive à mon niveau : c’est lui. C’est plus fort que moi, je le suis.




—oooOooo—




Quelques minutes plus tard, vitre descendue, il me fait signe que c’est là, juste à l’angle de la rue Ladoucette. Oui, j’ai vu, merci à lui, mon sauveur à retardement. Je me gare à quelques mètres de la porte d’entrée ; il fait un créneau juste devant moi. Je ne bouge pas de la voiture, car il n’y a personne dans la rue. Il reste dans la sienne lui aussi, attendant que je sois prête. Puis deux jeunes sortent pour fumer, et quelques secondes après il est là, avec un sourire rassurant. Je déverrouille les portières ; alors il approche doucement sa main de la poignée comme s’il voulait ne pas faire fuir un moineau sur sa branche. Je suis fascinée par sa main et je me colle à la vitre pour continuer à la voir jusqu’au bout. Il approche son visage dans un geste au ralenti. Je ne recule pas ma tête, je n’ai pas peur, et lorsqu’il ne reste que quelques centimètres entre nous et la vitre qui nous sépare, dans un grand souffle il y dépose un nuage de buée. De son doigt il trace ensuite lentement un point d’interrogation. Troublée, j’ouvre ma portière.



Un frisson, je me souviens… le baisemain…



Il fait attention de ne pas me toucher. Nous entrons dans le pub.



Nous enlevons manteau et blouson. Il me présente galamment la chaise qui se trouve contre le mur. Nous sommes installés de chaque côté de la petite table de bistrot et lorsque la commande est servie, du café pour lui et du thé pour moi avec du miel, il ne reste que l’immobilité et le silence entre nous, contrastant avec le brouhaha des clients et leur va-et-vient.


Je soupire, ne sachant quoi dire. Il soupire aussi. Je place mes deux mains sur la table, puis je caresse machinalement ma soucoupe avec délicatesse, d’un doigt souple. Il en fait de même avec la sienne, d’un geste masculin. Puis un sourire, comme ça, parce que je me sens bien, juste à l’instant. Son sourire en retour, franc, agréable… pour moi. Ses dents sont blanches et régulières, ses lèvres sont minces, surtout la supérieure. Je suis songeuse. Je pense à des mordillements sur celle-ci pour que le sang la gonfle et la rende plus goûteuse. Il regarde ma bouche sans aucune gêne, tout comme moi la sienne. Troublant, un désir… de je ne sais quoi, celui qui n’a pas besoin de mots, mais qui est perceptible, presque palpable, inexplicable.


Puis il se penche vers moi, puis… je me penche vers lui. Un nouveau sourire, ensemble cette fois-ci, l’un pour l’autre, mais le mien est tremblant. Je mordille ma lèvre en espérant qu’il fasse de même pour que je découvre la rougeur qui gagnera sa lèvre, comme après un baiser, celui que je ne lui donne pas. Il déglutit. Je sens quand un homme est troublé et lui… que va-t-il faire de mon trouble, celui que je ne lui cache pas ? Nous restons ainsi, nos visages si près l’un de l’autre, pour nous regarder, pour nous deviner et pour comprendre ce qui nous arrive.


Je ne me reconnais pas ; sans doute le contrecoup de ce que j’ai vécu tout à l’heure. J’étais loquace et je voulais mourir. Maintenant je ne dis plus rien et je veux me sentir bien plus que vivante. Puis il me murmure comme pour me confier un secret :



Pour l’orchidée, il y en a une qui me vient à l’esprit, c’est la Bakeria skineri, parce qu’elle est comme vous. Pour la ravigoter, elle a eu besoin d’un peu de miel dans de l’eau pendant quelques heures. Puis la tige frêle s’est redressée fièrement à force d’attentions et j’ai vu apparaître une fleur qui rosissait en s’ouvrant, tendre et lumineuse, veloutée comme la peau d’une femme. Aussi élancée, légère et aérienne qu’une taille fine prise entre deux mains.


Puis il ne dit plus rien, et quand il me fixe de son regard sombre, j’ai l’impression qu’il essaie de deviner ce que je ressens. Je suis troublée, embarrassée par l’envie qui monte en moi, celle de me laisser chavirer. Puis il reprend :



Il reprend :



Sans décoller mes bras de la table, je les fais glisser jusqu’à lui.



Je retourne mes mains et je reçois du bout de ses doigts des frôlements sur mes phalanges, des caresses qui font des cercles dans les creux de mes paumes. J’espère qu’il ne s’arrêtera pas.



Je gonfle ma poitrine et je me délecte de ce plaisir, puis je soupire pour sortir le trop-plein d’air qui vient du fond de moi. Pourvu que cela suffise pour calmer ma tempête intérieure. Son regard me dit qu’il apprécie.



J’enlève mes bottines, lui, ses mocassins et nos pieds se découvrent.



Lentement j’écarte mes jambes.



De mes deux mains, je relève ma jupe de fin lainage, puis je lui redonne mes mains à caresser. Je ne pensais pas que ça pouvait être si bon… tout…



Je frémis. Mon doigt est agile sur mon clito turgescent. J’écarte mes lèvres pour mieux le sentir. Bernard me regarde, me dévore des yeux, devine mon jeu de main sous la table, mais ne fait plus un geste. Ma deuxième main rejoint la première et j’excite mon clito plus intimement avec des titillements qui deviennent frénétiques, et lorsque je ressens de petites décharges électriques, j’enfonce mon doigt dans ma chatte et je frictionne mes parois jusqu’à la jouissance… silencieuse. Ma culotte est trempée. Il me demande ma main. Je la lui donne, avec ma mouille. Un baisemain… J’ai froid !




—oooOooo—




Ma culotte… trempée, froide, désagréable. Ma main dedans, pourquoi ? Je sors mon doigt de mon sexe mouillé, je suis engourdie, mon cou me fait mal. La vitre est glaciale. La voiture ? Je suis dans ma voiture sur le parking ! La tête calée contre la vitre.


Depuis combien de temps ? Je ne sais pas… Qu’est-ce qui s’est passé ? J’essaie de me souvenir et quand j’émerge complètement, je me rappelle, lui, ses yeux magnifiques et sa menace… étrange, mes confidences, son plaisir. Puis le baisemain… troublant. Et après ? Bernard. Pas possible ! L’inconnu, ça oui ; mais Bernard, j’ai dû le rêver, car toute cette partie de mon aventure n’est pas arrivée. Je le sais, j’ai donc dormi ; dommage…


J’ai besoin de m’étirer et quand j’écarte mes bras, je remarque un papier sur le pare-brise, coincé par le balai d’essuie-glace. Je sors le chercher en m’assurant qu’il n’y a personne dans les environs. Je reviens vite me renfermer dans ma voiture et je lis :


Vous vous êtes endormie dans votre voiture après m’avoir dit que vous alliez bien. Je suis à deux voitures de vous et j’attends de vos nouvelles. Dès que vous êtes réveillée, appelez-moi ! 06… .



Il est là derrière la vitre et j’essuie la buée avec ma manche pour mieux le voir. Il est beau, la cinquantaine, les cheveux poivre et sel et je regarde ses mains. Un frisson me parcourt le dos, puis la chair de poule gagne mes cuisses. Le froid, l’envie. Je sors de la voiture et je me plante devant lui, les jambes tremblantes. D’une belle voix grave il commence :