Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 15502Fiche technique42343 caractères42343
Temps de lecture estimé : 24 mn
02/03/13
corrigé 10/06/21
Résumé:  L'enquête de Pauvert avance un peu malgré des interrogatoires difficiles. Chez les Fabre, Claire, restée seule, reçoit une étrange visite. Marthe Rougier réussit à s'enfuir de sa prison.
Critères:  fh bizarre campagne fsoumise hdomine vengeance contrainte cunnilingu attache baillon policier sorcelleri -amourdura -fsoumisah
Auteur : Musea      Envoi mini-message

Série : Les sorcières de Saint Amant

Chapitre 27
Le fantôme

Résumé de l’épisode précédent :


Les craintes de Marthe Rougier étaient fondées : elle est arrêtée. L’inspecteur de police Marius Pauvert l’interroge et parvient à la mettre en difficulté, car il l’oblige à reconnaître qu’elle pratique la magie et qu’elle est très proche d’Olivier Desgrange.


Louis emmène Claire chez Anita, sa meilleure amie, à qui elle veut confier son désarroi. Dans la chambre d’Anita, cette dernière apprend à Claire qu’elle a vu Olivier Desgrange se rendre chez Marthe Rougier dans la nuit du 14 juillet. Pendant qu’elles parlent ainsi, l’inspecteur Pauvert arrive afin de l’interroger, car elle est la dernière personne à avoir vu Marc Audebert avant sa disparition. Anita laisse Claire seule dans sa chambre et descend répondre au policier : elle était au bal, elle a dansé avec Marc, ils se sont promenés ensuite dans les rues de Saint-Amant et ils ont vu Olivier Desgrange frapper très fort à la porte de Marthe Rougier. Après avoir déposé Anita chez ses parents, il est donc possible que Marc Audebert ait rencontré Olivier Desgrange et qu’ils se soient disputés. Le cadavre trouvé dans la voiture calcinée ne semblant pas être celui d’Olivier, c’est peut-être celui de Marc !




ooooOOOOoooo





Claire était seule dans la chambre d’Anita. Elle entendait en contrebas le bruit des conversations, la voix de Pauvert chaude et basse, celle d’Anita un peu sèche et elle soupira. Elle espérait de tout cœur que son amie n’aurait aucun ennui. D’un regard, elle balaya le mur tendu de papier fleuri de la chambre et se dirigea vers la petite étagère où Anita mettait les quelques livres et revues qu’elle possédait. Elle prit un numéro du Petit Écho de la Mode et le feuilleta pour trouver des modèles de robes qui pourraient lui plaire sans qu’ils soient trop habillés. Les jolies filles qui y étaient dessinées portaient avec grâce des blouses, des robes fluides, loin de ses tenues habituelles. Elle feuilleta un magazine, puis un autre. Tout était très joli mais tellement élégant qu’elle n’oserait jamais travailler dans une telle tenue. Elle allait se décourager lorsqu’elle avisa un joli modèle de robe mauve nommé Campagne, garni de petits boutons de nacre blanche. Celui-là pourrait convenir. Une robe simple, quelques petits plis sous les seins, une coupe ajustée mais pas trop. Et il y avait même le patron joint au centre du journal. La jeune fermière était si absorbée dans sa lecture qu’elle n’entendit pas la porte de la chambre s’ouvrir doucement puis se refermer. Ce ne fut que l’effleurement de ses cheveux qui la fit sursauter :



D’un bond elle se dressa et se retourna mais la pièce était vide. Et pourtant, Claire sentait une présence près d’elle, un souffle court, un souffle d’homme, chaud près de son cou, puis un murmure contre son oreille :



De plus en plus angoissée par la situation, la jeune fermière voulut se précipiter hors de la chambre mais au moment où elle allait se jeter sur la porte, celle-ci se verrouilla sous ses yeux. Elle était prisonnière et à la merci d’un fantôme maléfique qui ne pouvait être que le comte Desgrange, faisant de la magie à distance. La jeune fille, terrorisée, se mit à tourner dans la pièce comme un animal sauvage traqué, mais où qu’elle aille se réfugier, elle se trouvait rejointe. Au comble de la panique, Claire chercha à ouvrir une des deux fenêtres mais sans y parvenir. Et, plus angoissant encore, elle sentit deux bras puissants l’enlacer et la retenir, puis l’attirer à nouveau, une main à demi plaquée sur sa bouche, assez brutalement, au centre de la chambre. Elle essaya de se débattre mais l’étreinte semblait de fer. Et elle eut beau tenter de frapper son agresseur, elle ne rencontrait que du vide. Devant son impuissance, son tourmenteur se mit à rire doucement.



Furieuse, la jeune fille s’agita, réussit à échapper à la main qui fermait sa bouche et s’écria :



Et Claire sentit qu’une main invisible remontait et tentait de prendre possession d’un de ses seins. La main agaçait le téton à travers le tissu de coton noir de sa robe et Claire sentit malgré sa terreur son ventre se tendre. Affolée de ne pouvoir empêcher son corps d’éprouver du plaisir, Claire tenta de crier mais aussitôt une autre main vint fermer sa bouche, réduisant son cri à un gémissement plaintif.


Profitant de son avantage, le fantôme accentuait ses caresses. La main qui caressait le téton, qui dardait joliment à présent, descendit lentement, caressa le ventre à peine bombé de Claire et passa sous sa robe pour trouver rapidement l’entrecuisse qu’il devinait déjà humide suite à ses premières caresses. Avec un petit rire, il glissa à l’oreille de sa victime :



La main de Desgrange caressait à présent la culotte légèrement humide de Claire, deux de ses doigts écartaient doucement le tissu de coton et trouvaient les deux lèvres légèrement gonflées du sexe féminin, mouillées de cyprine. Aventureuse, la main poursuivit son exploration jusqu’à dénicher le clitoris de sa cachette et le frotta doucement, faisant gémir Claire. La jeune fille se tortillait pour échapper à la caresse, son corps se cabrait, refusant l’attouchement de toutes ses forces. Parvenue à nouveau à dégager sa bouche de la main invisible qui l’obstruait, elle protesta :



Et de ses mains, elle tenta de griffer et de desserrer l’étau invisible qui l’emprisonnait. Mais le fantôme du sorcier, plus rapide qu’elle, parvint de nouveau à l’immobiliser, resserra son étreinte et se mit à rire doucement :



Claire sentit alors un doigt se glisser dans son intimité tandis qu’une caresse humide effleurait son sexe. Elle tressaillit lorsque l’étreinte du sorcier fantôme se relâcha brusquement et, quelques secondes après, se sentit poussée en arrière. Le fantôme de Desgrange venait de la renverser en travers du lit de coin d’Anita et la jeune fille sentit des mains inconnues lui écarter sans ménagement les jambes, relever sa robe noire, déchirer sa culotte tout en la maintenant couchée et bâillonnée. Puis, une langue tout aussi invisible prit possession de son sexe mis à nu sans qu’elle puisse opposer aucune résistance. La caresse était insistante, violemment excitante et donnée d’une façon si sensuelle qu’elle ne pouvait que gémir :



Elle se tordait sur le lit, impuissante, terrorisée, tandis que le fantôme de Desgrange léchait avidement son sexe, sa tête solidement calée entre les cuisses de sa victime. Il aimait la caresser ainsi, rendre sa langue dure pour cajoler son clitoris dressé, faire gémir et supplier la jeune fille. Plus aucun obstacle ne l’empêchait de la prendre au moins par l’intermédiaire de la statue-totem qu’il avait créée et sur laquelle il prodiguait réellement ce cunnilingus improvisé. Pour imiter le sexe vierge de la jeune fille, il avait enfoncé la rose de soie blanche volée au bal au niveau du sexe de la statue et c’était les pétales de soie qu’il léchait, comme s’ils avaient constitué la vulve de sa dulcinée. Claire, par le biais de cette jolie figure d’argile, était maintenue sous envoûtement magique. Sa résistance physique continuelle, le fait qu’elle se débatte malgré le sort d’emprise forcée qu’il exerçait sur elle, excitait Desgrange au plus haut point. Il avait compris que le pendentif de la jeune fille ne la protégerait plus, la mettant totalement à sa merci. Mais il savait aussi que même s’il décidait de la prendre maintenant via son fantôme, seule une pénétration réelle du sexe vierge de la jeune fille mettrait Claire sous son emprise totale à la fois physique, psychique et magique. Et plus que jamais, ce début de viol l’incitait encore plus à jouir physiquement de ce jeune corps féminin, sur lequel il avait tant fantasmé des années durant.


Si cet avant-goût d’étreinte ne constituait pour lui qu’un prélude, une revanche prise sur la frustration qu’il avait accumulée depuis la nuit du bal, il mesurait mieux, maintenant qu’il la possédait avec sa bouche et ses mains, l’attraction que présentait pour lui la jeune fille. Née d’une sorcière blanche, elle disposait d’un charme magnétique particulier, d’une aura enveloppante, quelque chose d’intense et de secret qui appelait la possession totale et lui donnait envie d’elle comme jamais il n’avait désiré une femme. Il avait l’impression en la touchant via l’égrégore* qu’il avait créé, qu’il atteignait un niveau de pouvoir magique et maléfique sans précédent tout en affirmant toujours plus son identité masculine. À travers sa possession de la jeune fille, il manifestait l’arrogance de son rang social, une domination de classe, de sang et il prenait aussi une revanche sur l’isolement qu’il avait vécu durant son enfance solitaire.


Claire, de son côté, subissait les caresses du sorcier noir et, malgré ses tentatives d’évitement farouche pour échapper à cet abus, elle comprenait avec horreur, minute après minute, que ces attouchements la rendaient physiquement de plus en plus soumise à son agresseur. Un doigt invisible, sans forcer l’hymen, l’assaillait, tout en caressant les petites lèvres de son sexe, puis les grandes, revenant à l’intérieur du vagin plein de cyprine et torturant son ventre qui se contractait de spasmes voluptueux. Et dans le même mouvement, la langue habile du sorcier aiguisait son clitoris, faisant pression sur le capuchon gonflé, l’agaçant de mille façons, faisant gémir continuellement la jeune fille qui sentait progressivement son corps de plus en plus happé par le plaisir.


Les cuisses maintenues largement écartées par son tourmenteur, la jeune fille sentait ses reins épouser malgré elle le mouvement que donnait le fantôme du comte à ce coït buccal forcé. Un goût de bile envahit sa bouche en même temps que son corps se tendait comme un arc et succombait au plaisir que lui donnait son amant invisible. Et sous le coup de l’humiliation et de l’horreur, deux larmes jaillirent de ses yeux.


Avec un rire de triomphe, le fantôme de Desgrange se dégagea, maintenant toujours sa victime écartelée sur le lit. Et après avoir absorbé l’énergie dégagée par le plaisir qu’il avait donné à sa victime, il se pencha sur la jeune fille tétanisée et il lui murmura d’une voix suave :



Ayant dit cela, il desserra enfin son étreinte, laissant la jeune fille se recroqueviller sur le lit. Épuisée, larmoyante, endolorie et se sentant trahie par son propre corps, Claire sanglotait doucement. Le fantôme la considérait avec amusement et désir, sans même mesurer l’horreur qu’il lui avait fait subir. Tout occupé par les sensations fortes d’emprise sexuelle et de pouvoir qu’il retrouvait et qui lui donnaient une impression de toute-puissance, il questionna :



Un bruit de pas courant dans l’escalier interrompit son discours. Le sorcier, d’un geste, déverrouilla la pièce. Et lorsqu’Anita ouvrit la porte de sa chambre, la voix et le corps fantômes de Desgrange avaient quitté les lieux. La jeune blanchisseuse trouva son amie recroquevillée sur son lit, l’air hagard et effrayé, prostrée et blanche comme un linge. Différents numéros du Petit Écho de la Mode étaient éparpillés à terre, une chaise avait été renversée. Affolée, Anita se précipita. Mais aussitôt qu’elle toucha Claire, la jeune fille eut un haut-le-corps comme si son amie l’avait brûlée. Puis d’un seul coup, elle éclata en sanglots et entre deux crises de larmes, elle hoquetait :



Et ce disant, elle se balançait d’avant en arrière, comme si elle pouvait bercer sa douleur. Bouleversée de la voir réagir ainsi, pressentant le pire, Anita s’écria :



Ne pouvant toujours pas parler tant les larmes l’aveuglaient, Claire ne put que hocher la tête. Mais cette seule réponse suffit à Anita qui explosa :



Claire ne répondit pas. Elle ne pouvait pas parler tant son émotion était grande. L’impression de dégoût, de salissure, d’insécurité avait atteint son maximum. Et elle se disait que quoi qu’elle fasse et où qu’elle aille désormais, le comte la retrouverait et cette fois-ci la violerait, fantôme ou pas fantôme. Pourquoi avait-elle attiré cet homme ? Qu’avait-elle dit ou fait qui puisse le rendre aussi violent avec elle ? Pourquoi voulait-il qu’elle devienne son épouse ?


Elle savait d’avance que la comtesse Desgrange s’opposerait à une telle union et elle-même n’avait aucune attirance pour le jeune comte, encore moins pour entamer une vie conjugale avec lui. Elle le trouvait aussi pervers, violent et haineux que Louis était doux, plein d’attentions et réellement gentil. Évoquer le luthier lui fit se souvenir qu’il n’allait pas tarder à arriver et ses larmes redoublèrent car elle se disait qu’à présent et plus encore que ce matin, elle n’était plus digne de l’épouser. Si seulement son corps n’avait pas pris tant de plaisir aux caresses de Desgrange… Mais son corps l’avait trahie ! Pourquoi, oh ! pourquoi n’avait-elle pas pu se dégager suffisamment de la poigne de fer du sorcier et hurler pour appeler au secours ? Mais hurler contre un homme invisible qui abusait d’elle, qui l’aurait crue ? Anita peut-être et encore… Tout le monde l’aurait prise pour une démente.


Claire, toute à la violence qu’elle avait subie, éprouvait une profonde culpabilité et une honte grandissante de l’agression. Dans son désarroi, elle ne comprenait pas que l’orgasme qu’elle avait eu sous les assauts de Desgrange n’était qu’un plaisir réactionnel dû à la stimulation, détaché de toute forme d’adhésion physique, psychique, affective et émotionnelle. Un voile noir s’était répandu devant ses yeux. Et l’abîme intérieur qu’elle découvrait semblait un puits sans fond dans lequel elle ne finissait plus de tomber. Elle avait l’impression de s’éloigner d’elle-même, de tout ce qui avait fait la saveur de son existence jusque-là. Tout devenait vide, sans intérêt, sans avenir. Elle se disait qu’elle était comme morte, un cadavre moribond à l’apparence de vie.


En essuyant ses yeux bouffis de larmes, elle réalisa alors que son amie n’était plus dans la pièce et elle se mit à trembler. Elle avait peur, peur que le comte se manifeste à nouveau dans la chambre… Quand elle entendit le bruit d’une voiture dans la cour, elle se recroquevilla davantage sur le lit d’Anita et ses larmes redoublèrent. Elle se sentait sale, indigne, méprisable. Bientôt la voix de Louis résonna dans la cuisine des Fabre et des pas lourds montèrent rapidement l’escalier. Quelques secondes plus tard, le luthier fut là devant elle.



Mais Claire le voyait et l’entendait à peine. Elle se sentait prisonnière du monstre qui l’avait abusée sexuellement. Elle ne pouvait que pleurer à chaudes larmes sans pouvoir s’arrêter et tenter de se protéger de tout contact physique. Lorsque le luthier voulut s’approcher d’elle, elle fit un bond sur le lit et dans ses yeux se manifestait une telle peur panique que Louis comprit immédiatement que la jeune fille avait été agressée par leur ennemi. Alors, le plus doucement qu’il put, malgré la fureur qu’il ressentait pour Desgrange, il s’assit au bord du lit et il dit tendrement :



Anita, qui venait de monter pour voir comment allait Claire, pensant que peut-être la jeune fille irait mieux en présence de son fiancé, vint tristement poser sa main sur l’épaule du luthier :



Là, Anita s’arrêta net et fixa son amie intensément alors que cette dernière détournait les yeux et se recroquevillait davantage sur le lit :



Mais Louis l’interrompit :



Anita, décontenancée, soupira. Le luthier avait raison. Elle réfléchissait, tout en se remémorant certains détails des jours précédents. Repassant dans son esprit le moment où elle avait aperçu le comte Desgrange devant la maison de la vieille sorcière, elle s’écria :



Louis passa la main sur son front car en discutant avec Anita, il venait de se rendre compte que, selon toutes probabilités, Marthe Rougier avait isolé Claire afin que seul le comte puisse la courtiser. Faire courir une mauvaise réputation sur Claire et sa famille lui permettait un double bénéfice : se venger de Rose qu’elle considérait comme usurpatrice des pouvoirs de Louise. Pouvoirs qui auraient dû, selon elle, lui revenir de plein droit. Et enfin unir son filleul en sorcellerie à la fille de son ennemie. La magie noire ainsi dominerait Saint-Amant.



Brusquement inspiré, se rappelant ce qu’il avait lu sur le grimoire de Rose, il se tourna vers sa fiancée toujours prostrée sur le lit d’Anita :



La jeune fermière fixa le luthier avec un air horrifié et secoua la tête avec l’énergie du désespoir. Elle pleurait toujours à chaudes larmes, incapable de s’arrêter.



Claire ferma les yeux et se mit à sangloter. Elle avait peur de cette perspective magique qui pouvait tout aussi bien réussir que les entraîner un peu plus vers le chaos. Elle aurait voulu le dire à son fiancé mais encore sous le choc de l’agression, elle ne pouvait parler. Elle n’arrivait même pas à contrôler son corps qui tremblait de façon continue. Et son ventre à nouveau lui faisait mal, comme si on le déchirait de l’intérieur. Anita, bouleversée de voir son amie aussi souffrante, dit au luthier :



Un instant après, Justine Fabre était dans la chambre. Alertée par sa fille de l’état de Claire, elle fit tout d’abord sortir le luthier et doucement, comme on apprivoise un animal, elle approcha un linge humide, effleura avec celui-ci la main de la fermière, puis sentant la jeune fille se raidir, elle posa sa main fraîche sur sa main :



Claire tremblait toujours mais laissait la main de la blanchisseuse caresser sa main. Après une minute de cette approche douce, Justine Fabre réussit à coucher la jeune fille et à passer de l’eau fraîche sur son front brûlant. Claire lui tenait une main, comme pour la retenir, l’empêcher de partir. Ses tremblements s’étaient un peu calmés. Mais ils reprirent lorsqu’Anita revint porter l’infusion.



Claire hocha la tête mais elle tremblait trop pour prendre la tasse que madame Fabre lui tendait. Alors la blanchisseuse rendit la tasse à Anita, puis, attirant doucement Claire dans ses bras, elle la cala contre elle comme un petit enfant et demanda à sa fille d’approcher la tasse des lèvres de Claire.



Anita pencha légèrement la tasse et Claire, presque rassurée, but doucement. L’infusion très forte de goût la surprit mais eut un effet immédiat sur elle. L’état de choc fit place presque aussitôt à un état d’abandon total, une immense fatigue, presque léthargique. La seule douleur qui restait était son corps endolori et son ventre qui la tourmentait. Madame Fabre, émue, coucha doucement la jeune fille gémissante et alla chercher l’édredon de plumes dans l’armoire pour la couvrir. Puis, un doigt sur ses lèvres, elle fit signe à Anita de sortir, lui signifiant qu’elle allait veiller Claire. La jeune fille sortit et tout aussitôt tomba sur le luthier :



Le luthier redescendit l’escalier et la suivit dans la grande salle. Anita lui désigna une chaise de paille et elle-même vint s’asseoir face à lui. Puis, à voix basse, elle expliqua :



Louis, déjà pâle, devint blême de douleur et de rage.



Anita sourit avec émotion :





ooooOOOOoooo




Marthe avait été gardée dans la pièce de son interrogatoire, une petite salle qui servait de bureau et où étaient rangées les banderoles et décorations de fête du village. La vieille femme n’avait pas droit d’en sortir, même pour aller aux toilettes. Pauvert avait laissé un pot de chambre sur une chaise, avant de faire prévenir l’avocat qu’elle sollicitait pour la représenter. Tant de précautions avaient surpris la vieille dame. Que pouvait-il craindre puisqu’elle n’avait plus aucun pouvoir ?


Plus aucun ? Pas vraiment. Une des capacités magiques qu’elle avait gardées, c’était celle de connexion à la statue-totem modelée par Olivier Desgrange. Elle pouvait ressentir à travers la sculpture toute la passion de son élève et ses actions d’emprise sur la petite Claire Dupuy, cette gamine innocente qui servait si bien leurs plans… Peu de temps après la fin de l’interrogatoire, Marthe avait visualisé le rituel engagé par Desgrange et ses approches de la jeune fermière sous forme fantomatique. Elle avait suivi la scène d’abus avec délectation, tout son vieux corps ressentant à la fois l’affolement de Claire mais aussi le plaisir que le jeune sexe découvrait sous les premiers assauts du comte. Le trouble pervers envahissant que la vieille femme avait ressenti, la résistance de Claire, tout cela faisait refluer en Marthe une énergie puissante, maléfique, qui réactivait ses pouvoirs premiers. Elle se nourrissait à une source indirecte de magie, comme une sorte de parasite.


À la fin de l’agression de la jeune fille, elle comprit qu’elle disposait à nouveau de certains pouvoirs qu’elle pensait disparus. Et sa première pensée fut de sortir de sa prison pour rejoindre au plus vite son filleul en sorcellerie. Elle voulait plus que cette visualisation. Elle voulait assister en personne à l’accouplement de son élève avec la fille de son ennemie. Et elle voulait aussi à cette occasion renforcer l’emprise du sorcier sur Claire, de sorte que la jeune fille soit totalement soumise et offerte à lui et qu’elle-même, Marthe, fût par conséquent unie sexuellement à son élève par le corps de cette victime de choix.


Marthe en tremblait d’avance de délice. Enfin le grand moment arrivait. Tout ce qu’elle avait attendu durant des années allait se produire. Son amour pour Olivier allait se concrétiser, la petite Claire porterait l’enfant qu’elle-même ne pouvait donner à son filleul, leur pouvoir occulte maléfique et définitif règnerait sur Saint-Amant, sa victoire serait totale.


Pauvert avait beau l’avoir confinée dans une pièce sans fenêtre, il n’avait fait que tourner la clé dans la serrure pour l’enfermer. Elle se pencha pour écouter attentivement et n’entendant aucun bruit, aucun signe d’une quelconque présence humaine à proximité, elle décida de faire tomber la clé avec une épingle à chignon sur un morceau de tissu, puis de l’attirer à elle, dans le mince espace qui séparait la porte du plancher. Ce qu’elle fit. Une fois la clé entre ses doigts noueux, elle l’introduisit dans la serrure, entrouvrit la porte pour voir si le couloir était gardé. Mais constatant que la voie était libre, elle prit un morceau de drap blanc, sa canne et se glissa bientôt au-dehors, par une ruelle déserte. Elle se hâtait, prenant les passages les plus étroits. La tête et les épaules couvertes, elle espérait ne rencontrer personne. Il fallait qu’elle sorte au plus vite du village.


Déterminée, comme portée par l’urgence et l’énergie qu’elle avait puisée dans l’agression de Claire, Marthe avançait rapidement et sans encombre. Elle allait traverser la rue principale, lorsqu’elle croisa deux enfants qui se poursuivaient en bordure de la route qui menait à l’ancienne mine. Les deux bambins, intrigués par l’apparition, la dévisagèrent, la reconnurent mais prirent peur en voyant la vieille femme agiter sa canne d’un air menaçant. Ils s’enfuirent en hurlant, appelant leurs mères. Marthe, angoissée à l’idée qu’ils donnent l’alerte, décida de prendre un chemin de traverse, plus long par la forêt mais plus sûr. Elle contournerait les hameaux les plus proches en passant près des bosquets de prunelliers et de noisetiers. Et elle rejoindrait la mine à l’angle des bois noirs. Son cœur battait à tout rompre, d’excitation, de peur et de fatigue. Et le chaud soleil qui inondait encore la campagne du Livradois la faisait transpirer à grosses gouttes.


Vite, il fallait qu’elle se dépêche, il ne fallait pas que les gendarmes la retrouvent. Peu lui importait désormais ce qui pouvait lui advenir à cause de sa fuite, signant sa culpabilité. Elle savait qu’elle disposait d’une solution puissante qui pourrait renverser toute opposition, toute accusation. Si elle unissait ses pouvoirs à ceux de son élève, elle pourrait dès cette nuit, une fois qu’Olivier aurait achevé sa possession et son union sexuelle, frapper d’amnésie tous ceux qui au village voudraient lui intenter un procès et l’arrêter pour meurtre.


Il s’agissait à présent d’attirer la jeune Claire auprès d’eux et de la sacrifier sur l’autel magique qu’ils allaient préparer pour la recevoir. Marthe s’occuperait de tout. Son plan se déroulait sans peine dans son esprit et semblait décupler ses forces pour accélérer sa marche. Traversant la forêt de sapins, elle se voyait déjà assister au supplice, prononçant le rituel de mariage et d’union noire tandis qu’Olivier répandrait sa semence dans le ventre leur jeune victime qui ne pourrait que hurler son plaisir et se soumettre à lui.


Bientôt, elle fut en vue du site des premiers puits de la Fayolle. La vieille sorcière sourit. Elle était sauve et l’avenir lui appartenait désormais, radieux, à l’image du soleil qui dardait ses rayons à l’entrée du repaire de Desgrange.




(à suivre)




*égrégore : Entité, fantôme qui est constitué d’énergie et de forces psychiques magiques puissantes reliées au sorcier, possédant une certaine autonomie.