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Temps de lecture estimé : 24 mn
16/04/13
corrigé 10/06/21
Résumé:  Alex, son mari, l'a trompée ! Béryl prend un bain. Délicieux souvenirs et souffrance : l'approche de Dominique, compagne de Camille, par esprit de vengeance. Puis l'attirance pour Camille et l'amour au féminin.
Critères:  ff fbi extracon inconnu amour vengeance cérébral revede cunnilingu nopéné init exercice confession mélo portrait
Auteur : Cheminamants  (Un autre regard, une histoire différente.)      Envoi mini-message

Concours : Concours "Trame imposée"
Le goût des femmes

Ambiance mélo :


Des pensées intérieures, délicieuses, entre réalité et rêve, mais parfois douloureuses, pour une histoire d’amour difficile à vivre. Du romantisme, de l’érotisme à découvrir en suivant les mains et les regards. Les gestes se font douceur, une avancée tout en délicatesse… au goût de femmes, et le temps s’allonge… le souvenir au cœur.


(Inspiré par la chanson « Une femme avec une femme » du groupe Mecano).




♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦




Béryl, la jolie Béryl ne montre que ses seins et leur blancheur crémeuse. Ses rondeurs sont belles, entourées de la mousse du bain. Les aréoles ont la couleur d’un bronzage léger. Les gouttes d’eau perlent jusqu’au bout de ses tétons. Est-ce agréable ? Elle fronce un peu les sourcils, elle ne veut pas savoir. Elle n’en a plus besoin. Si seulement elle pouvait ne rien faire d’autre que de prendre un bain purificateur jusqu’à la fin, et ne plus penser… Voilà ce qui lui traverse l’esprit. Son visage se fige.


Et moi qui l’observe et qui la raconte, j’ai une douleur qui me glace le sang à voir son regard qui ne regarde plus rien.


Pas de lumière dans ses yeux. Les étincelles sont restées là-bas, posées délicatement sur la bouche brillante badigeonnée de gloss tout rose de la femme qu’elle a embrassée. Mais elle est si gourmande, la bouche de la douce Camille… à lui faire briller les yeux. Alors, comment aurait-elle pu résister ? Ce n’était pas son envie, de dire « non ».


Ces pensées l’envahissent et la troublent. Une esquisse de sourire se dessine de manière fugace au souvenir des lèvres si douces, puis le semblant de sourire s’efface aussitôt de ses lèvres charnues.


Oh Béryl, ton âge n’a plus de chiffre, je le vois bien, mais ne dis pas adieu à tes vingt-cinq ans !


Plus de caresses sur ses seins ; pourtant, le velours de sa peau a reçu tant de tendresse… Les plus belles caresses, elle a envie de les oublier. Mais comment faire après les bras de Camille ?


Peut-être juste ça :


Une nouvelle fois, elle plonge la tête sous l’eau. Les seins fermes et ronds s’enfoncent eux aussi dans l’eau chaude et parfumée. Elle garde son souffle.


Combien de temps vas-tu rester, femme si femme, avec ton envie de ne plus respirer ? Dis, combien de temps te faudra-t-il pour que tu te sentes lavée ?


Je veux bien compter jusqu’à soixante, avant que tu appelles la bouffée d’air qui gonflera tes poumons ; soixante, oui, mais pas plus ! Tu ne te sentiras ni plus propre ni plus pure, si j’en ajoute dix ou même vingt de plus.


La tête réapparaît, fendant l’eau. La bouche s’ouvre en grand. L’air s’y engouffre, mélangé au son grave qui n’en finit pas d’être aspiré par sa gorge pour l’emporter avec lui. Les yeux bleu-vert bordés de cils longs et fins s’écarquillent et se mouillent des quelques larmes qu’on devine à peine. Et l’eau glisse sur son visage pour emporter tout le sel.


Je le sais, parce que je connais son cœur, je l’ai regardé vivre, battre la chamade, puis s’éteindre à petit feu.


Ça fait plus de vingt minutes que la tête disparaît sous la surface de l’eau pour ressortir, le temps que Béryl reprenne son souffle ; puis elle replonge avant de revenir une nouvelle fois vers la vie, dès que le souffle lui manque. L’air chaud et humide de la salle de bain caresse son visage juste un moment, puis le liquide remplace à nouveau l’oxygène.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



Arrête, Béryl, je t’en prie. Le tapis de bain est tout mouillé, et n’en peut plus d’être gorgé d’eau. Si tu continues, les giclées qui débordent de la baignoire à chaque fois que tu rentres ton corps dans l’eau iront s’étaler sur tout le sol. Mais tu t’en fiches, n’est-ce pas ? C’est terrible à quel point je vois que tu t’en fiches !


Dis, pourquoi tu te noies ? Dis, pour quoi tu fais ça… ou pour qui !


Tu te débats dans l’eau pour y rester encore.

Est-ce que je me trompe de le penser ?


Non ? Tu ne veux pas que ce soit « pour », c’est ça ?

Tu crois que tu n’as pas le droit d’avoir un « pour » qui te réchauffe le cœur. Mais tu te trompes.


Qu’est-ce qui me prend ? J’ai envie de lui tenir la main. De la sortir de la baignoire. D’attraper le drap de bain et de l’envelopper avec. Si seulement je pouvais lui transmettre ma chaleur, lui frictionner le dos et les fesses en l’ayant tout contre moi. Mais c’est impossible ! Je la regarde et je ne peux rien faire pour l’aider. Qui a déjà vu une narratrice sauver une femme ? Moi, je ne sais pas le faire et je ne suis pas Camille. Qu’importe mon nom, je ne compte pas : ce sont elles qui sont importantes, les belles amoureuses.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



Béryl a découvert l’amour saphique avec son corps brûlant de désir pour celui de Camille. Mais jamais elle n’a imaginé qu’une attirance incroyable allait naître entre elles après avoir fait l’amour de manière fusionnelle. Et l’air qu’elle respire depuis ne la satisfaisait plus, puisque ce n’est pas celui que respire Camille. Quelle douce torture, plus forte que sa volonté, amadouant sa raison !


Maintenant elle se juge et elle fait tomber sa propre sentence : elle est coupable ! Pour les plaisirs charnels partagés en parfaite harmonie, pour avoir succombé à l’appel de ses sens en acceptant que les doigts caressants de Camille la fassent frissonner.


Isolée dans la salle de bain, elle veut se punir d’avoir osé s’abandonner sur le lit de la belle, une fois, juste une fois, conquise par le charme de la maîtresse d’Alex, son mari. Elle ne s’excuse pas de l’avoir fait, lui prendre sa maîtresse en le trompant à son tour, même si Camille a rompu la semaine dernière avec lui. C’est un bien grand châtiment tout de même qu’elle s’inflige en noyant son dégoût ; mais quoi qu’elle fasse, elle n’effacera pas la trace de son rouge à lèvres qui s’est transféré sur la vulve de Camille quand elle a dévoré et lapé le sexe féminin humide de plaisir.



♦♦♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦♦♦



Il y a un début à son histoire.


C’est arrivé un soir où, plus qu’un autre soir, elle a eu mal, très mal. Ça fait deux mois déjà. C’était au début du printemps. Et au bout d’un an de mariage seulement, Alex lui a parlé avec des mots qui l’ont frappée plus fort qu’une gifle. Elle se souvient de tout, comme si c’était hier.


Pire, elle le revit :



Il enfile un blouson et claque la porte de l’appartement en partant. Elle s’effondre sur la chaise de la cuisine, comme une colombe terrassée en plein vol.

Qu’est-ce qui se passe ? Il était tendre, avant, et son côté parfois un peu brusque ne lui déplaisait pas. Mais là, il a montré un aspect de son caractère qu’elle ne connaissait pas. Alex, un goujat ! Mais pourquoi ? Qu’a-t-elle fait, si ce n’est qu’être attentionnée ?


Et avec son « goût des femmes » qu’il lui a fichu à la figure, qu’est-ce qu’il a voulu lui dire…

Et puis, ça a quel goût, une femme ? Elle ne sait pas, elle n’y a jamais goûté.


Béryl réfléchit et pense qu’elle a le droit de savoir. En étant attentive, en observant bien, elle découvrira bien ce qui se passe.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



Le mardi suivant, Alex rentre tard de son cours de self-défense. Il encadre des groupes deux soirs par semaine en début de soirée, à la Maison des Associations de leur quartier. Ça lui permet aussi de se libérer de toutes les pressions du boulot ; et cadre dans une banque, ce n’est pas forcément de tout repos, surtout avec la conjoncture économique actuelle. Bon, d’accord : c’est lui le prof ; mais de là à faire déborder le cours de presque une heure, il y a de quoi se poser des questions quand même…



Le jeudi, rebelote. Pas plus d’excuses que d’explication acceptable, et cette fois-ci non plus, il ne l’a pas prévenue de son retard. Par contre, en agressivité, elle a été copieusement servie. C’est décidé : mardi prochain, elle ira faire un tour là-bas !



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦




Elle ne cherche même pas à s’éloigner de cette femme qui lui souhaite une bonne soirée. Elle n’est pas là pour papoter, mais pour surveiller l’entrée en espérant surprendre une éventuelle escapade de son mari. Alors, du moment que chacune fait ce qu’elle a à faire sans se déranger, elle ne bougera pas de place. D’ailleurs, assise sur le banc juste en face de la porte, c’est ici l’emplacement le plus stratégique. Mais la femme n’est pas décidée à la laisser tranquille.



Quelle coïncidence ! Mais en réfléchissant bien, Béryl pense qu’elles ne sont sûrement pas là pour la même raison. Puisque Dominique et Camille sont lesbiennes, pas de risque pour son mari ! Lesbienne, évidemment, ce n’est pas pour elle ! Mais cette femme est… plutôt jolie. Mais bon, puisqu’elle n’y est pas, autant ne pas se demander si elle lui plairait.



Eh bien, voilà : Béryl est fixée !



Le temps passe lentement ; la pression monte et elles se sont un peu collées l’une à l’autre derrière le buisson, pour se tenir chaud à cause du petit vent frais. Comme des copines qui partagent la même galère. Ça n’a pas dérangé Béryl. Elle est gentille et elles sont du même âge.



Et elles ont supporté ça toutes les deux pendant dix minutes avant de voir les amants se séparer…


Elles sont restées quelques minutes de plus avant de se dire au-revoir. Béryl est effondrée et elle se retient de pleurer autant que de crier sa rage en pleine rue. Mais il y a aussi quelque chose de plus qui est venu bousculer ses idées : l’envie de se venger. « Alors comme ça, il aime bien goûter aux femmes ! Eh bien, je vais faire la même chose. Elle est magnifique, celle qu’il avait dans ses bras ; alors je vais en draguer une aussi jolie. Tiens, d’ailleurs Dominique ne demanderait peut-être pas mieux que de tromper sa copine. Elle est moins sexy que Camille il me semble, mais elle est jolie. L’important, c’est qu’Alex soit encore plus choqué quand je lui dirai que je suis allée avec une femme plutôt qu’avec un autre homme ! ».


Un retour à la maison pas facile.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



Pas un mot ; il ne desserre pas les dents à son arrivée. Elle prend un air assez neutre et indifférent pour lui faire croire que sa petite personne ne l’intéresse pas. Elle lui invente un début de soirée bien sympa chez sa copine. Et en définitive, il est plutôt soulagé qu’elle ne l’interroge pas.


Le lendemain, Béryl se décide à appeler Dominique. Celle-ci ne s’est pas encore remise de ce qui s’est passé la veille. Elles décident de se revoir pour discuter et échanger leurs impressions. Jeudi en huit, à l’heure du cours. Elles seront tranquilles, certaines du retard de leurs conjoints. Le choix est judicieux ; ça leur donnera le temps de prendre un peu de recul. Et c’est Dominique qui l’accueillera dans son appartement qui est à dix minutes à pied de chez Béryl. « Rez-de-chaussée, porte de gauche », a-t-elle précisé.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



Béryl s’habille bien joliment ce soir pendant qu’Alex se prépare pour son cours. Sa petite robe fraîche et printanière lui va à merveille. Les trois boutons tout ronds sont ouverts sur sa gorge, et son décolleté est parfumé avec une note florale et légère. Elle choisit une ceinture fine et souple qui accentue sa taille fine et arrondit ses hanches sans casser sa silhouette. Alex se montre surpris en la voyant habillée ainsi. Elle lui annonce qu’elle retourne voir son amie. Il n’a plus le temps de l’interroger, mais il lui dit avant de refermer la porte que sa robe est un peu trop courte. « Mais non : un peu plus bas que mi-cuisses, c’est plutôt sage. » pense-t-elle.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦




Elle la suit dans la cuisine pour chercher les petits plats qu’elle a préparés pour accompagner la boisson et, tout en papotant, elles s’installent en définitive sur les deux tabourets hauts du plateau de table qui sert aussi de plan de travail.


Elle est assise, jambes croisées. Elle regarde Dominique qui lui semble plus féminine, ce soir. Une jupe courte en vieux jean, un chemisier vaporeux noué sur la taille. Et elle s’est chaussée. Délicate attention plutôt que de la recevoir en chaussons.


Si Béryl – qui est assise de côté – se tournait juste un tout petit peu, ses genoux pourraient frôler ceux de Dominique. Si Béryl se penchait un peu en avant, le haut de sa robe laisserait entrevoir la dentelle de son soutien-gorge pour troubler Dominique. Mais une main sur son genou à faire de tout petits gestes caressants et circulaires, c’est bien aussi. D’ailleurs, Dominique ne s’y trompe pas, puisque ses grands yeux ne perdent rien des mouvements délicats d’une Béryl toute mignonne.


Béryl est souriante, sagement assise, le dos bien droit. Elle mord dans un petit biscuit sec et passe sa langue pour récupérer un grain de sel sur le bord de sa bouche. Dominique la regarde sans rien dire. Béryl creuse ses reins. Les seins vont un peu plus en avant. L’arrondi de sa croupe s’accentue. Elle rentre le ventre. Le tissu fin de la robe moule sa cuisse et se place sur le mont de Vénus pincé entre ses cuisses. Béryl a pris le temps. Elle a envie de plaire et… son mari, lui, ne la regarde pas comme ça. Non : son mari a cessé de la regarder comme le fait Dominique. C’est agréable, des yeux qui l’apprécient. Elle prend une profonde inspiration ; l’air s’engouffre dans ses poumons et sa poitrine se fait de plus en plus… attrayante.


Dominique place ses coudes sur le bord de la table et elle pose sa tête sur ses paumes de mains ouvertes. Elle ne perd rien des jeux de jambes et de bouche de Béryl, et du bout des doigts elle se caresse les joues et les tempes. Pas de vraies caresses, non : des effleurements. Elle aussi sait se montrer très femme. Les yeux des belles se charment subtilement.


Béryl apprécie le silence choisi par elles deux et elle pense qu’elle s’amuse plus qu’elle séduit.


C’est… bizarre, et Béryl retient le rire qui ne demande qu’à trouver le chemin entre ses lèvres. Dominique sourit un peu plus, elle aussi. Leurs yeux se mettent à pétiller. De la malice à la coquinerie, la frontière n’est pas bien grande et la complicité se passe parfois d’attirance.



Béryl se mord la lèvre, sans crainte. Ses lèvres ne sont pas peintes et les jolies dents blanches ne laisseront pas leur marque sur la chair pulpeuse. Mais elle a mis ses yeux en valeur en jouant avec un maquillage savant. Autant avouer que les poudres satinées et le mascara léger accentuent sa beauté. Le faux naturel lui va bien ! Son rimmel waterproof ne coulera pas, même si elle se met à rire.


D’ailleurs, le rire n’est pas loin ; vraiment pas loin.



Le rire est le plus fort et Béryl n’a plus envie de le retenir.



Et toutes les deux partent dans un fou-rire communicatif pour ne pas laisser l’amertume gagner du terrain.




♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦




Gé-ni-al ! Il n’y a pas d’autres mots pour décrire leur délire. De la franche rigolade. Elles se sont faites séductrices, et Dominique paraît prête à… succomber au charme de Béryl. Mais ce n’est pas si facile que ça. Béryl ne s’approche plus d’elle. Elle a peur d’aller trop loin, de se laisser emporter, avec au bout certainement des regrets. Et la jeune femme réalise qu’elle n’a plus envie de se venger et de faire du mal à Dominique.



Dominique s’est glissée dans une robe du soir d’un noir satiné. Son corps est si bien gainé que ses avantages sont mis en valeur de la plus belle façon qui soit.




Dominique grimpe sur le lit et sautille en chantonnant. Elle danse presque. Cet air-là, voyons, Béryl le connaît, sans pouvoir y mettre un titre ni des paroles. La mélodie est douce. C’est agréable ; Dominique a une belle voix.


Béryl ouvre la porte de l’armoire en grand et passe les mains sur les tissus, écarte les cintres pour mieux voir les tenues. Aucune qui lui plaise, du côté de Dominique.


Mais là, de l’autre côté… il y a celles de Camille ; des robes… Béryl a envie de les caresser. Elle pense au corps qu’elle a vu de loin et l’imagine sous les robes. De belles robes pour une belle femme. De l’élégance et de la classe pour faire de n’importe quel chiffon une vraie merveille, pourvu que Camille s’en vête. Elle les touche ; ces vêtements l’attirent. Elle les caresse, sa main se promène.


Elle en sort une pour la regarder de plus près, pour la sentir. L’odeur de la peau de la blonde imprègne le tissu. Elle sent bon, Camille. C’est une robe de cocktail courte, toute droite et resserrée sous le niveau de la poitrine pour former un bustier court. Voilà celle qu’elle voudrait porter ! Mettre ses seins à la place de ceux de Camille. Faire glisser la fermeture Éclair pour emprisonner son corps à elle, autant que le tissu soyeux l’a fait pour le corps de la belle. Une envie de devenir prisonnière du tissu, juste après Camille.



Béryl se met à nu. Elle glisse dans la robe. Lentement, elle referme le tissu sur sa peau. Elle se sent étrangement bien et son image dans la psyché lui dit qu’elle est belle, et Dominique le lui confirme :



La mélodie n’a pas quitté Dominique, toujours la même qu’elle fredonne sans cesse. Elle lui fait signe de la main. Béryl grimpe debout sur le lit. Dominique attache la parure. Béryl et Dominique chantonnent en se donnant la main comme des enfants. Toutes les deux debout sur le lit, elles se balancent d’un pied sur l’autre sur cet air qui ne les lâche plus. Elles n’ont pas envie de se toucher, elle s’aiment bien, pas plus.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



L’instant d’après, venant du salon, les paroles d’« Une femme avec une femme » s’égrènent et les deux femmes n’ont pas le temps de réaliser que Camille est déjà là ! Elle est entrée dans la chambre en ouvrant la porte en grand pour qu’elles s’imprègnent encore mieux des paroles. Elle les regarde, et quelques pensées viennent sans qu’elle les retienne : toutes deux si jolies, debout sur le lit, comme des adolescentes qui s’évadent en rêvant de leur future vie de femme et des plaisirs qui l’accompagneront. Elles sont touchantes, les deux rêveuses en habits de femme. Camille les trouve ainsi, particulièrement l’inconnue qui est dans sa robe.



Quand la musique s’arrête, Camille regarde Béryl, souriante, avenante et lui précise :



Béryl ne sait pas quoi dire. Elle tremble devant Camille. Un émoi devant la magie du moment. De la surprise ; et aussitôt qu’elle l’a vue, tout son corps… comme si…



Camille n’a pas l’intention de reprocher quoi que ce soit à Dominique, sachant que c’est elle qui vient de quitter les bras d’Alex. D’ailleurs, celui-ci s’est montré désagréable ce soir, exigeant. Elle est rentrée un peu déçue et triste, et puis il y a eu ce petit rayon de soleil qui a éclairé sa soirée dès qu’elle a entendu les fredonnements innocents des deux voix. De vraies femmes partageant une intimité saphique n’auraient pas fait des « lalala » en se caressant. Alors, rassurée et confiante, elle a mis le CD en espérant leur faire plaisir. Puis elle a ouvert la porte de la chambre et elle a découvert deux danseuses bien sages, debout sur le lit. Un jeu bien enfantin, mais c’est l’érotisme qui émane de Béryl qui a frappé Camille.



Béryl se désole de ne pas pouvoir rester. Camille la fascine ; le charme, sans doute : elle est si attirante… Mais non, ce n’est pas possible, elle ne peut pas être attirée à ce point par une femme ! Ce n’est pas possible et ça ne lui est jamais arrivé.



« Quoi répondre ? Mais quoi lui dire ? » se demande Béryl. Elle pense que ce serait bien qu’elle sache.



Camille n’a rien dit, mais son regard s’est voilé un instant. Béryl, se peut-il qu’elle soit « Béryl » ?…

Béryl a vu les yeux interrogateurs de Camille, mais elle n’a pas voulu en dire plus, et aussitôt rhabillée, elle s’est sauvée.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



Durant les semaines qui suivent, Béryl se détourne d’Alex, son esprit trop occupé à se remémorer les traits fins et délicats du visage de Camille. Elle lui fiche la paix, c’est ce qu’il voulait. Elle rêve de Camille, en maudissant même les bras d’Alex qui ont pu la toucher. Une jalousie de femme à cause d’une envie de femme. C’est terrible, c’est si terrible… Qu’est-ce qu’elle va faire si elle ne peut pas la toucher ?


Dominique et Béryl se revoient dans l’appartement des deux femmes, deux ou trois mardis et jeudis. Camille n’est pas là.

Et le mardi suivant, Camille rentre à l’heure. Elles se sourient. Béryl reste un moment, mais elle envoie un texto à Alex pour lui expliquer qu’elle rentrera plus tard.


Il l’a attendue.



Elle part se coucher. Et elle fait glisser Camille sous ses draps. Elle se donne du plaisir en revoyant son sourire éblouissant. Et pas d’amour à Alex, quand il vient la rejoindre. Non, elle n’a pas mal à tête ! Elle fait semblant de dormir quand il la caresse. Ça ne suffit pas… Pas grave, elle grogne de déplaisir. Il n’insiste pas.


À la visite suivante, Camille est là !



Dominique s’ennuie. Béryl est un peu trop tournée vers Camille. Camille est un peu trop centrée sur Béryl. Son couple est déjà fissuré depuis un bon moment, alors Dominique ne partage pas leurs rires. Elle envoie une série de textos, puis elle s’éclipse, les laissant toutes les deux installées confortablement dans le sofa.



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦




Béryl a la gorge nouée. Elle ne peut pas répondre puisqu’elle n’a pas réussi à s’avouer à elle-même qu’elle a envie d’elle. Une femme avec une femme, et le goût de l’amour inconnu qui la fait fantasmer.


Camille se rapproche d’elle ; sa voix et douce :



Un baiser dans le cou. Doux, chaud, sensuel. Les lèvres se retirent.



Elle effleure son visage, lèvres sur les tempes, sur le front en soulevant sa frange.



Une caresse sur la cuisse, chaste. Béryl pose sa main, elle aussi, sur la cuisse de Camille. Les mains se caressent. Douceur, tendresse. Camille penche sa tête pour regarder dans les yeux interrogateurs et suppliants s’il y a de belles lumières pour faire briller les iris où se bataillent gentiment le bleu et le vert. Oui, le plaisir brille déjà.


Béryl avance ses lèvres. Rouge à lèvres contre rouge à lèvres. Un frottement délicieux. Soupirs profonds.



La main douce se pose entre les deux seins. Béryl tend sa poitrine en avant pour lui offrir ses battements et elle offre aussi le creux qui sépare ses atouts de femme, au plus profond de son décolleté, là où la peau est dans l’attente de délicieux baisers.


La main de Camille s’empare d’un sein. Les lèvres de Béryl s’accrochent à la bouche offerte. Le baiser frémissant fait gémir doucement les deux femmes.




♦♦♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦♦♦



Et là, aujourd’hui, dans sa baignoire… Béryl, la jolie Béryl se souvient de tout. Elle a goûté l’intimité de Camille et c’était bon. La salive envahit sa bouche, ses papilles gustatives n’ont oublié ni la vulve ni l’entrée du fourreau. Elle tremble encore au souvenir de son plaisir quand elle a écarté les poils pubiens pour découvrir le sexe mouillé de désir.


À moins que ce ne soit l’eau qui la fasse trembler. L’eau est devenue si froide ! Et ces doux souvenirs ne suffisent plus à réchauffer sa peau. Pourtant, elle sait bien que c’est chaud et accueillant, au fond d’elle. C’est l’extérieur qui la glace. Lui, l’amour fusionnel d’un soir, c’était beau ; et la douleur l’attrape au ventre… il y a les autres ! Les gens et les proches. Elle frémit, elle a froid en songeant à l’impossible. Axel ne la laisse pas en paix tout en se tournant vers un autre horizon. Il l’a prévenue : « Je ne lâcherai pas ! ». Elle n’en peut plus.

Dominique et Camille… Elle se sent responsable de tout ce gâchis.

Elle a envie : encore une fois la tête sous l’eau pour que ça lui fasse mal de ne plus respirer.


Son portable sonne. Et elle pense : « Qu’il sonne donc, je ne répondrai pas ! ». Puis c’est le fixe qui se manifeste. Elle ne bouge pas.


Elle regarde ses mains : sa peau est blanche, fripée d’avoir passé tant de temps sous l’eau. Combien de temps ? Aucune importance !

Demain, ça ira mieux ; demain, elle aura du courage. C’est ça, elle aura le cran qu’il faut pour partir en laissant Alex vexé d’avoir été trahi par sa femme et abandonné par sa maîtresse en jurant par tous les dieux qu’il ne le mérite pas !


Les sonneries reprennent l’une après l’autre. Elle fait la grimace : ce bruit est si désagréable… « Qu’on me laisse au silence ! ».


Enfin, les téléphones ont fini par abandonner.


Béryl replonge la tête sous l’eau. C’est comme s’il lui fallait faire ça pour replonger dans ses souvenirs. Quand elle retrouve l’air saturé d’humidité froide, c’est le goût de Camille qui revient à la surface. Alors là, elle peut rêver d’elle en pensant que les rêves, c’est tout ce qui lui reste.


Ça au moins, personne ne pourra l’en empêcher ! Elle fantasme. Elle s’invente un soir de danse : toutes les deux enlacées sur une piste de danse. Elle, avec la robe de Camille et Camille avec la sienne. Mouvantes, lovées. Leurs bras resserrant leurs tailles pour que leurs sexes se touchent à travers le tissu. La jambe de Camille placée entre ses cuisses. Elles se trémoussent lentement, la musique est si lente. Camille lui souffle : « Tu te sens comment, ma douce ? ». Elle ne peut que lui répondre en déposant un baiser dans le creux de son cou : « Biiien, si biiien ». Et Béryl s’imagine… Elle ose dire à sa belle : « Ferme les yeux, fantasme-moi nue dans tes bras, ici. En même temps, par la pensée, je te déshabille. ».


Dans sa baignoire, Béryl croise ses bras et pose ses mains sur ses épaules. Il n’y a plus de mousse pour cacher ses seins. Elle se balance doucement avec une Camille imaginaire qu’elle enlace. Elle, lascive ; et l’eau fait des petits clapotis qui caressent ses seins à chacun de ses mouvements.


Et son corps est aussi là-bas, emporté par la musique pour deux. Oui, là-bas, à désirer la peau de Camille contre la sienne. Sous les plaisiiirs et les lumières chaudes. Fermer les yeux, aimer un peu plus. Et s’offrir aux regards des autres pour révéler le secret qui ne veut plus se cacher…


Un boucan la fait émerger : on tambourine à la porte !

Elle pense : « Faites comme si je n’étais pas là ! ».



C’est Alex. Elle a bloqué la serrure avec sa clé. Elle replonge la tête sous l’eau pour ne pas entendre, pour se dire que c’est « non ! ».



♦♦♦Ƹ̴Ӂ̴Ʒ♦♦♦



Un bruit de carreau cassé, là, dans le salon. C’est facile : elle est au rez-de-chaussée !

Des pas qui se précipitent.



D’autres pas qui se dispersent dans toutes les pièces, tout en l’interpellant.



Béryl se met debout, nue. La peau si blanche, les lèvres violacées par le froid.

La porte de la salle de bain s’ouvre en grand. Les mains de Camille la cramponnent. Dominique et Alex les regardent toutes deux.



Le poing serré, menaçant, c’est celui de Dominique.



Puis à Camille :