Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 15631Fiche technique70968 caractères70968
Temps de lecture estimé : 35 mn
02/06/13
Résumé:  La situation lui échappant, Roméo, dépité, se réfugie dans les bras d'Alberto...
Critères:  fff hh fffh jalousie chantage dispute fellation cunnilingu pénétratio hsodo théatre humour -théâtre
Auteur : Gufti Shank            Envoi mini-message

Série : Roméo et Juliette - Le spectacle de fin d'année

Chapitre 03 / 03
Roméo et Juliette - Le spectacle de fin d'année - Acte III

Les personnages :


Juliette

Cassandra : la meilleure amie de Juliette

Roméo

Eloïse : la meilleure amie de Roméo

Siriac : le meilleur ami de Roméo et le petit ami de Cassandra

Flora : une collègue de Roméo

Johanna, Alberto, Conrad, Magnus, Yul : des collègues de Roméo et Flora



***



Résumé de l’acte I : Pour le spectacle de fin d’année de leur entreprise, Flora et Roméo préparent une pièce de théâtre avec leurs collègues. Juliette assiste à une répétition où Flora se montre extrêmement provocante, essayant de séduire Roméo sous ses yeux, et allant jusqu’à faire s’abandonner à elle Magnus, Yul et même Alberto, pourtant attiré plutôt par les hommes. Un peu plus tard, Roméo se confie à Johanna, et ils élaborent un plan visant à excéder et dégoûter Flora : ils vont lui faire croire que Juliette et Eloïse l’ont quitté ; le sachant célibataire, Flora se précipitera vers lui ; et il fera alors semblant de l’ignorer et de lui résister pour tomber dans les bras de Johanna, rendant ainsi Flora folle de jalousie. Juliette et Eloïse, peu confiantes dans la fiabilité de ce plan, demandent en secret à Alberto de surveiller Roméo.



Résumé de l’acte II : Johanna convainc Flora que Roméo s’est fait larguer. Celle-ci tente alors de le séduire par tous les moyens, mais il parvient à lui résister, pour finalement faire mine de tomber dans les bras de Johanna. Flora, incrédule et hors d’elle, les espionne et les surveille, tandis qu’Alberto surveille lui aussi le faux couple pour le compte d’Eloïse et Juliette. Roméo et Johanna, s’apercevant qu’ils sont suivis, se réfugient chez la jeune femme, et devant l’insistance de Flora, simulent un corps-à-corps torride. Elle les découvre et s’en va, résignée et dégoûtée. Mais Johanna ne s’arrête pas et poursuit ses caresses, réellement attirée par Roméo. Et c’est alors qu’Alberto les découvre à son tour. Il décide de ne rien dire, mais de faire chanter Roméo et Johanna. Mais c’est sans compter sur Flora qui, prise de remords, se rend chez Juliette et Eloïse pour leur présenter ses excuses et leur avouer qu’elle a découvert Roméo et Johanna sur le point de faire l’amour.




***




Acte III, scène 1

Mardi 20, 19 h 45

L’appartement de Juliette et Roméo

(Juliette, Eloïse)



(Les deux jeunes femmes sont assises l’une contre l’autre dans le canapé ; Eloïse étreint tendrement Juliette qui pleurniche et geint, le visage enfoui dans le creux de l’épaule de son amie.)



Eloïse : Chhhut… chhhhhut… attends, ne t’imagine pas le pire ; ce n’est peut-être pas ce que tu crois…

Juliette (reniflant) : Mais tu l’as entendue ! Il couche avec Johanna !

Eloïse : Oui, mais c’est ce que nous a dit Flora. Et je ne suis pas sûre qu’il faille y accorder le moindre crédit.

Juliette : Mais tu as bien vu qu’elle était sincère…

Eloïse : Flora, sincère ? Elle s’est déjà foutue de nous plusieurs fois, non ?


(Juliette observe Eloïse et paraît peu à peu reprendre espoir.)


Eloïse : Tu ne crois pas que le mieux serait d’en apprendre un peu plus ?


(Elle prépare son téléphone.)


Eloïse (avec un sourire optimiste) : Tu me donnes le numéro d’Alberto ?






Acte III, scène 2

Mardi 20, 19 h 50

L’appartement de Johanna

(Roméo, Johanna, Alberto)



(Alberto, pantalon baissé, est debout devant le canapé où Roméo et Johanna, assis l’un à côté de l’autre, le masturbent et le suçotent alternativement, avec bien peu d’entrain.)



Alberto : Hmmm… ouais… c’est pas mal… Ça manque un peu d’énergie mais c’est pas mal…


(Johanna et Roméo soupirent lourdement.)


Alberto : Pensez à Juliette et Eloïse… Vous ne voudriez tout de même pas qu’elles apprennent ce que vous étiez en train de faire…


(Le téléphone d’Alberto sonne. Il l’extirpe d’une poche de sa chemise.)


Alberto (observant l’écran) : Ah bah, tiens, justement…


(Il décroche et porte d’une main le téléphone à son oreille, et de l’autre main, presse la tête de Roméo contre son entrejambe.)


Alberto (au téléphone) : Allô ? Salut Eloïse !

Johanna (à Roméo) : Tu veux le laisser nous faire chanter comme ça ?

Alberto (au téléphone) : Oui, très bien ! Je suis justement avec eux, là.

Roméo (à Johanna, en masturbant Alberto) : Ben non, mais…

Alberto (au téléphone) : De quoi ? Si Roméo a couché avec Johanna ?


(Un silence. Alberto presse la tête de Roméo, qui soupire avant de s’efforcer de suçoter avec lassitude. Alberto le regarde, satisfait.)


Alberto (au téléphone) : Mais qui c’est qui vous a raconté ça ?

Roméo (à Johanna) : Tu veux pas le sucer, toi ? Parce que moi, là, franchement…

Johanna (à Roméo) : Ben… ça m’enchante pas non plus…

Alberto (au téléphone) : Flora ?

Roméo (fort) : Ah merde ! Encore un coup de cette salope !

Alberto (à Roméo) : Chhhut !

Roméo : Quand je pense que c’est à cause d’elle que je suis en train de…

Alberto (au téléphone) : Non, non, rien. Mais…


(Roméo se lève et attrape le téléphone des mains d’Alberto.)


Roméo (au téléphone) : Allô ? Dis, c’est quoi, ces conneries ? Depuis quand vous me faites surveiller par mister tarlouze, là ?

Alberto : Eh, mais je t’emmerde ! Et rends-moi ce téléphone !

Roméo (au téléphone) : Mais non, j’ai pas baisé avec Johanna ! Vous allez quand même pas croire l’autre emmerdeuse !

Alberto (fort) : Rends-moi ce téléphone ou je leur dis tout !

Roméo (au téléphone) : D’ailleurs si vous voulez tout savoir, c’est Alberto qu’est en train de baiser avec Johanna, là !


(Roméo éloigne le téléphone de son oreille pour observer rapidement l’écran.)


Roméo : Attends, comment on fait pour…


(Il appuie une touche puis pointe l’écran en direction du bas-ventre d’Alberto.)


Roméo (fort) : Tiens, regarde !


(Johanna, amusée, fait mine de tenir Alberto par le bassin tandis que celui-ci s’empresse de remonter son pantalon. Roméo rappuie sur une touche puis reporte le téléphone à son oreille.)


Roméo (au téléphone) : Alors tu vois bien que c’est pas moi qui baise avec Johanna !

Alberto (achevant de se rhabiller) : Pffff, tu fais chier, Roméo ! Moi qui voulais te rendre service…

Roméo (au téléphone) : Hein ? Mais… Mais non, c’est pas une partouze, qu’est-ce que tu vas imaginer là !

Johanna : Aïe…

Roméo (au téléphone) : Mais si, bien sûr, que je peux résister ! … Mais… Mais je sais pas, oui, je les regardais, c’est tout… Je buvais l’apéro, tranquille…

Alberto : Tu vois, t’es pas crédible. T’aurais dû me laisser gérer.

Roméo (au téléphone) : Mais ça va pas la tête ?!? Non mais… attends ! … Attends !


(Un silence. Il balance le téléphone sur le canapé.)


Roméo : Putain, elle m’a raccroché au nez !

Alberto : Je te l’avais dit, t’aurais dû me…

Roméo : Oh fais pas chier ! Tu vois où ça nous mène, tes conneries ?

Alberto : Mes conneries ?!? Eh, je voudrais pas dire mais…

Johanna (criant pour les interrompre) : STOP !


(Les deux jeunes hommes l’observent un instant. Elle se lève et achève de se revêtir en continuant d’une voix résignée.)


Johanna : Je suis désolée, Roméo, je te trouve super sympa et… très attirant… tu m’excites beaucoup, même… mais c’est vraiment trop la folie, là… Depuis que je t’ai amené ici, y a deux personnes qui sont venues nous regarder baiser, et puis ensuite il a fallu qu’on le suce, lui, là, et maintenant tes copines vont vouloir ma peau… Et tout ça alors que je t’ai juste taillé une pipe… Tes plans sont vraiment trop compliqués pour moi, je crois…


(Un silence édifiant.)


Roméo (confus) : Euh… je… je… tu as raison. Excuse-moi, je suis désolé.

Alberto : Euh… oui… pardon, Johanna. Désolé.


(Un silence gêné.)


Johanna : Et j’aimerais autant que vous partiez, maintenant, les garçons.

Roméo : Euh, ouais… ouais… on y va…

Alberto : On file, oui. Bonne soirée.

Roméo : Ciao, Johanna, et encore désolé.

Johanna : Bonsoir. À demain, au travail, nous aurons oublié tout ça.


(Roméo et Alberto sortent, piteux.)






Acte III, scène 3

Mardi 20, 20 h 10

La rue, devant l’immeuble de Johanna

(Roméo, Alberto, des passants)



(Roméo, au téléphone, maugrée. Alberto fait les cent pas à ses côtés.)



Roméo (raccrochant) : Et merde ! Elles veulent pas me répondre ! Franchement, tu fais chier avec tes plans à la con ! On dirait Siriac !

Alberto : Ouais, ouais, je suis désolé, okay ! Mais faut reconnaître que toi aussi t’es con ! Tu montes un plan gros comme une baraque juste pour aller te taper la nouvelle employée : c’est complètement nul !

Roméo : Mais j’avais pas prévu de me taper Johanna, c’est elle qui voulait, c’est elle qui me trouvait attirant, tu l’as entendue, non ?

Alberto : Ah bah voilà ! Tout ce que t’as retenu, c’est qu’elle te trouve attirant…

Roméo : Oh, fais pas chier !


(Il compose un nouveau numéro et porte le téléphone à son oreille.)


Alberto : Enfin, c’est vrai que t’es attirant…

Roméo : Fous-moi la paix !


(Un silence.)


Roméo (raccrochant) : Putain ! Et Siriac qui répond pas non plus ! Merde ! Je vais quand même pas aller pieuter chez Flora…

Alberto : Ben, pour le coup, je pense que tu y serais bien accueilli…

Roméo : Je m’en fous ! C’est à cause d’elle que Juliette et Eloïse me font la gueule.

Alberto : Et Johanna…

Roméo : Et Johanna, oui ! Et c’est à cause d’elle aussi que j’ai été obligé de te sucer.

Alberto (amusé) : Tu n’as pas aimé ?

Roméo : Franchement ? Non !


(Un silence.)


Alberto : Si t’as nulle part où aller, tu peux venir à la maison.

Roméo : C’est ça, pour que tu m’encules… C’est hors de question ! De toute façon, il faut que j’aille voir Juliette, il faut que je règle ça…

Alberto : Je veux pas être chiant, mais il est possible qu’elle soit passablement agacée quand même…

Roméo : Comment ça ?

Alberto : Ben… quand elle m’a contacté pour me demander de te surveiller, elle m’a déjà donné l’impression de pas avoir top confiance en toi. Et là, avec ça…

Roméo : Mais quoi, avec ça ! Y a rien eu, là ! Si t’avais pas débarqué…

Alberto (l’interrompant) : Si j’avais pas débarqué, t’aurais sauté Johanna…

Roméo : Pffff !


(Un silence.)


Alberto : Bon, enfin, si t’as besoin, tu peux dormir chez moi.

Roméo : Mouais, okay. Je te tiens au courant. Allez, je file. À plus.

Alberto : Bon courage.


(Ils s’éloignent, chacun d’un côté.)






Acte III, scène 4

Mardi 20, 22 h 50

L’appartement d’Alberto

(Alberto)



(Alberto est assis et somnole dans un fauteuil, devant la télévision. Une sonnerie de téléphone retentit et le fait sursauter. Il se lève pour décrocher.)



Alberto (pâteux) : Allô ? … Ah, salut Roméo. … Eh ben… ouais, bien sûr, je te l’avais proposé… … Okay, à tout de suite.


(Il raccroche, repose le téléphone et se frotte les yeux, puis se dirige vers le coin cuisine pour préparer du café. On frappe à la porte.)


Alberto (fort) : Ouais, vas-y, entre !


(Roméo entre, piteux et hagard, avec un petit sac de voyage. Il s’avance jusqu’à un fauteuil où il se laisse choir en soupirant.)


Alberto : Alors ?

Roméo : Pffff !

Alberto : Je te fais un café ?

Roméo : Elles m’ont foutu à la porte.


(Alberto apporte une tasse fumante à Roméo.)


Roméo : Merci. Et j’avais oublié, mais Siriac et Cassandra sont en vacances. Du coup, je veux bien que tu m’héberges pour la nuit, oui…

Alberto : Oui, oui, pas de problème.


(Un silence.)


Alberto : Mais… euh… tu… tu veux que j’aille leur parler ?

Roméo (souriant avec cynisme) : Non, inutile, je crois qu’elles en ont autant après toi…


(Un silence.)


Roméo : Ainsi qu’après la pauvre Johanna…

Alberto : Et Flora ?

Roméo : J’en sais rien, elles m’en ont pas parlé.


(Un silence.)


Roméo : Oh, putain ! Elles me gonflent, n’empêche, toutes ces nanas !

Alberto (battant des cils avec amusement) : Si je peux t’être d’un quelconque réconfort…

Roméo (rigolant) : Euh, ouais, non, mais elles me gonflent pas encore à ce point-là, hein…


(Un silence.)


Roméo (le regard dans le vague) : Cela dit… en y réfléchissant…


(Alberto l’observe avec incompréhension. Roméo relève les yeux, et les plonge dans ceux d’Alberto. Puis il prend une profonde inspiration et déboutonne son pantalon. Alberto, incrédule, hésite en le dévisageant.)


Roméo (lui tendant la main, visiblement avec un effort) : Tu viens ?


(Alberto dépose sa tasse de café et s’assoit sur l’accoudoir du fauteuil de Roméo ; il pose une main sur sa tête et le caresse doucement. Roméo ferme les yeux, crispé. Alberto l’embrasse.)


Alberto : Détends-toi…

Roméo : Je… je n’ai pas trop l’habitude, hein…

Alberto : Laisse-toi faire, je m’occupe de tout.


(Il glisse une main dans le pantalon de Roméo tout en continuant de lui caresser les cheveux.)






Acte III, scène 5

Mardi 20, 23 h 10

L’appartement d’Alberto

(Roméo, Alberto)



(Roméo est assis dans le fauteuil, la tête penchée en arrière, les yeux fermés et crispés. Alberto est agenouillé entre ses jambes et suce profondément sa verge à demi gonflée.)



Alberto (retirant ce qu’il a dans la bouche) : Hmmm, ça y est, ta grosse queue commence à bien durcir…


(Roméo, les yeux toujours clos, presse d’une main la tête d’Alberto pour la rapprocher de son sexe.)






Acte III, scène 6

Mardi 20, 23 h 25

L’appartement d’Alberto

(Roméo, Alberto)



(Roméo est assis dans le fauteuil, la tête penchée en arrière, les yeux fermés et crispés. Alberto, nu, le sexe tendu, est assis sur son bas-ventre, empalé sur sa verge, lui tournant le dos. Il oscille des hanches en montant et descendant son bassin par à-coups au-dessus de son partenaire.)



Alberto (entre deux ahanements) : Oh putain, Roméo ! J’adore ! Ta grosse queue me fait du bien ! Aaaah ! Attends, je vais remettre un peu de lubrifiant…


(Il s’extirpe et se relève, se saisit d’un tube de gel et en dépose abondamment sur le préservatif entourant le sexe tendu de son partenaire. Puis il reprend sa place, s’empalant de nouveau lentement dans une profusion de longs gémissements. Il se met ensuite à se masturber vivement au rythme des va-et-vient qu’il imprime.)






Acte III, scène 7

Mercredi 21, 10 h 15

Un salon de détente, sur le lieu de travail de Roméo

(Johanna)



(Johanna est assise sur une banquette, un gobelet fumant à la main. Flora entre.)



Flora (froidement) : Salut.

Johanna : Salut.

Flora (s’approchant de la machine à café) : Roméo n’est pas avec toi ?

Johanna : Euh… je…


(Alberto entre, pimpant et guilleret.)


Alberto : Salut les filles ! Oh, il faut absolument que je vous raconte ! J’ai passé la nuit avec Roméo, c’était formidable ! Et vous aviez bien raison, c’est vraiment un amant merveilleux !


(Johanna pouffe ; Flora écarquille les yeux. Puis toutes deux se regardent, incrédules. Alberto va à son tour prendre un café.)


Flora (à Johanna) : Mais je croyais que… Roméo et toi…

Johanna : Euh… c’est-à-dire que…

Alberto : Le pauvre garçon a été très chamboulé, ces derniers jours ; et il a trouvé avec moi la tendresse qui lui faisait défaut.


(Flora pouffe. Alberto s’assoit dans un fauteuil.)


Flora : Roméo… La tendresse qui lui faisait défaut… On parle bien du même, là ?

Alberto : Tu serais surprise de savoir à quel point il s’est abandonné à mes caresses…

Flora : C’est un gag ? Une caméra cachée ?

Alberto : Tu peux bien plaisanter, mais j’en ai encore mal au cul…


(Johanna éclate de rire.)


Flora (sceptique) : Mouais, bon… dis, à tout hasard, ton amant merveilleux, tu ne sais pas où il est ? Parce qu’on a pas mal de boulot, ce matin ; et sans lui, je vais jamais finir à temps.

Alberto : Le pauvre était un peu épuisé de notre longue nuit torride, et il m’a dit qu’il viendrait un peu plus tard aujourd’hui, mais il ne devrait plus tarder, maintenant.


(Flora et Johanna observent Alberto avec incrédulité. Un silence. Roméo entre justement.)


Johanna : Tiens, ben quand on parle du loup…

Alberto (ravi) : On en voit la queue !


(Il se lève et vient déposer un smack à Roméo sous les yeux mi-incrédules mi-amusés des jeunes femmes.)


Roméo (à Flora) : J’ai vu que tu n’étais pas dans le bureau ; je me suis dit que tu serais sans doute ici. Y a une sacrée pile de dossiers, ce matin, on dirait. On y va ?

Flora : Euh… ouais…

Alberto : À tout à l’heure, mon chou !


(Roméo sort, suivi de Flora.)


Alberto : Aaaah, je suis sur un petit nuage !

Johanna : Mouais… méfie-toi quand même des plans de Roméo… Crois-en mon expérience : d’ici peu, tout le monde voudra ta peau…






Acte III, scène 8

Mercredi 21, 12 h 50

Un salon de détente, sur le lieu de travail de Roméo

(Flora, Conrad, Magnus, Yul)



(Tous quatre discutent en savourant une tasse de café.)



Conrad : Roméo, homo ? Non, j’y crois pas une seconde.

Flora : Mais moi non plus j’y crois pas ! Sauf qu’Alberto chante depuis ce matin qu’il a baisé toute la nuit avec lui.

Yul : Johanna dit qu’ils l’ont quittée hier après l’apéro pour aller passer la soirée ensemble.

Conrad : Ouais, mais Alberto, il parle trop et il dit souvent des conneries.

Flora : C’est vrai, mais là il est carrément en transe ! Et pour le mettre dans cet état, crois-moi, il en faut…

Magnus : Et Roméo ? Il t’en a parlé ?

Flora : Mouais, vite fait. Mais il a tout confirmé.

Yul : Et puis de toute façon, t’as vu, c’est limite s’ils se roulent pas des pelles en public…

Conrad : Ben putain !

Flora : Ouais, comme tu dis… Mais je vais continuer mon enquête…


(Elle sort.)


Magnus : En tout cas, ça l’a drôlement chamboulée, Flora, c’est bien la première fois qu’elle a pas…

Yul : Ah ouais, merde ! En plus, c’était mon tour !


(Flora revient.)


Flora : Oh, j’ai failli oublier ! Tu viens, Yul ?


(Elle lui prend la main ; ils sortent tandis qu’elle commence à déboutonner son chemisier de sa main libre.)






Acte III, scène 9

Mercredi 21, 18 h 40

Une rue, devant un immeuble

(Roméo, Alberto, des passants)



(Les deux jeunes hommes marchent d’un pas tranquille. À quelques mètres d’eux, Flora, Conrad, Magnus et Yul entrent, les suivant plus ou moins discrètement.)



Magnus : Chhhut, chhut ! Taisez-vous, ils vont nous entendre.

Yul : Attends, pas trop vite…

Conrad : Regardez, j’hallucine ! Ils rentrent chez Alberto…


(Roméo et Alberto sortent vers un hall d’immeuble. Flora soupire.)


Conrad : Bon, ben voilà qui va arranger nos affaires, finalement ; n’est-ce pas, Flora ?

Yul : Ben oui, maintenant que Roméo est gay, tu vas pouvoir te consacrer pleinement à nous.

Magnus : Tu veux venir dormir à la maison, ce soir, Flora ?

Flora : Oh, foutez-moi la paix !






Acte III, scène 10

Jeudi 22, 9 h 20

Un local d’archives sur le lieu de travail de Roméo

(Flora, Roméo)



(Tous deux sont occupés à ranger et trier des dossiers et des classeurs.)



Flora : Bon, Roméo, tu ne crois pas que la comédie a assez duré ?

Roméo : De quelle comédie parles-tu ?


(Flora ferme la porte du local puis s’avance vers Roméo en déboutonnant son chemisier.)


Flora : Je ne crois pas que tu sois homo.

Roméo : Je me fous bien de ce que tu crois, je sais ce que je ressens…

Flora (ôtant son soutien-gorge et libérant sa poitrine) : Et ça ? Tu vas me dire que ça te laisse froid ?

Roméo : Non, tu as de très beaux seins, toujours ; mais… comment dire… je crois que les femmes ne m’attirent plus vraiment.

Flora : N’importe quoi !


(Elle presse son corps vers celui du jeune homme et se trémousse un instant contre lui, agitant ses seins lourds juste devant son visage. Roméo soutient négligemment ses assauts. Flora finit par reculer d’un pas et plaque une main entre les jambes du jeune homme.)


Flora (déçue) : Mais c’est tout mou…

Roméo (amusé) : Ça y est, tu as fini ?

Flora : J’arrive pas à y croire…


(Roméo se retourne et recommence à classer des dossiers. Flora sort en pestant et en refermant son chemisier.)






Acte III, scène 11

Vendredi 23, 19 h 40

L’appartement de Juliette et Roméo

(Juliette, Eloïse, Flora)



(Les trois jeunes femmes discutent, debout près de la table.)



Juliette (incrédule) : Franchement, j’en doute…

Eloïse : Ben, ça m’étonne moi aussi…

Flora : Puisque je vous le dis ! Et croyez-moi, j’ai vérifié…

Eloïse : Comment ça, t’as vérifié ?

Flora : Ben j’ai fait tout ce que je pouvais…

Juliette (l’interrompant froidement) : Mouais, comme d’hab, quoi…

Flora : Eh, attends, vous l’avez largué, oui ou non ?


(Un silence.)


Juliette (pensive) : Roméo… homo… ça me fait bizarre…

Eloïse : Ouais, quel gâchis, tu veux dire !

Flora : Je suis d’accord, c’est vraiment dommage.

Juliette (emportée) : Mais c’est de ta faute, tout ça ! C’est tes manigances qui l’ont fait renoncer aux femmes !

Flora : Tu rigoles ! S’il s’est précipité dans les bras d’un mec, c’est parce que vous, vous l’avez dégoûté des femmes !

Eloïse (levant le poing) : Eh, tu veux que je te dégoûte des femmes, moi, pour voir ?


(Juliette pouffe. Flora peine à se retenir de rire aussi.)


Flora : Non, justement, si je suis passée vous voir, c’est pour vous proposer quelque chose.


(Juliette s’assoit ; puis tandis que Flora parle, Eloïse va-et-vient dans la pièce.)


Flora : Écoutez, comme Roméo n’est plus entre nous, je vous propose une trêve.

Juliette : Une trêve ?

Eloïse : Comment ça ?

Flora : On arrête de se bouffer le nez le temps de découvrir ce qui lui est arrivé…

Juliette : On s’en fout de ce qui lui est arrivé ; de toute façon, il ne fait plus partie de notre vie !

Eloïse : Euh…

Flora (amusée) : Vraiment ?

Eloïse (à Juliette) : Ouais, tu vois, même elle, elle y croit pas ; t’es pas très crédible…


(Juliette soupire.)


Juliette : Eh, merde ! Il s’est quand même tapé la petite salope de son boulot, là !

Eloïse (désignant Flora) : Ouais, puis sans doute aussi la grosse salope…

Flora : Eh, mais je t’emmerde ! Et puis en plus, c’est faux : il me repousse depuis des semaines !

Juliette : Ah, ça, ça me fait plaisir !

Flora : Pfff… ben ça commence bien, cette trêve…

Eloïse : Mais pourquoi on ferait une trêve, d’abord ? Tu l’as quand même bien mérité, qu’on te fasse chier…

Flora : Parce que j’ai peut-être un plan qui pourrait marcher pour faire craquer Roméo et nous assurer qu’il est pas homo…


(Juliette écarquille les yeux d’étonnement.)


Eloïse : À mon avis, le jour où on voudra récupérer Roméo, on n’aura qu’à claquer des doigts, nous…

Flora (ricanant) : Okay, pas de problème… Ben, vous m’appellerez si nécessaire, hein…


(Elle s’éloigne vers la porte de l’appartement.)


Flora : Bon courage pour vos claquements de doigts…


(Elle sort. Eloïse et Juliette se regardent, perplexes. Eloïse s’empare de son téléphone et compose un numéro.)


Eloïse (au téléphone, suave) : Roméo ? … Oui, salut. … Dis, j’aimerais vraiment que… qu’on puisse se voir. … Tu me manques. … Et… peut-être que je parviendrai à convaincre Juliette, et que…


(Un silence.)


Eloïse (hurlant avec une stupéfaction croissante) : Hein ?!? … Comment ça, pas intéressé ?!? … Tu te fous de moi ou quoi ! … Et puis… … Hein ?!? … Mais tu le connais même pas, ce type-là ! … Quoi ?!? … T’as raison, une bouffe un de ces jours, non mais tu me prends pour…


(Juliette lui arrache le téléphone des mains.)


Juliette (au téléphone) : Salut, c’est Juliette. Tu peux me dire ce qui t’arrive, là ?


(Un silence. Eloïse fulmine.)


Juliette (au téléphone) : Ben, si tu veux savoir, oui, franchement ça me fait chier que tu sois homo !


(Un silence.)


Juliette (au téléphone) : Oh, tu me gonfles !


(Elle raccroche.)


Juliette : J’hallucine !

Eloïse : Rappelle vite Flora !

Juliette : J’aimerais être sûre qu’il se paye pas notre tête, quand même…

Eloïse : Ben, si elle-même dit qu’elle a tout essayé…

Juliette : Et tout ça à cause de cette petite salope de Johanna…

Eloïse : Et de ce salaud d’Alberto, tu peux ajouter.

Juliette : Cet enculé, même, si j’ai bien compris.

Eloïse (souriant) : Remarque, j’aurais bien aimé voir ça, Roméo et Alberto.

Juliette (ne souriant pas) : Non, ça ne m’amuse pas. Ça m’amusera lorsque je serai sûre qu’il se paye pas notre tête.


(En soupirant, elle appuie sur quelques touches de son téléphone.)


Juliette (au téléphone) : Mouais, bon… il semblerait que tu avais raison.


(Un silence.)


Juliette (au téléphone) : Bon, ça va, arrête de rire ! Oui, on l’a appelé. … Arrête de rire, je te dis ! Sinon, ta trêve, tu peux te la foutre au cul !


(Un silence.)


Juliette (au téléphone) : Bon et c’est quoi, ton plan, alors ?


(Un silence. Juliette, écarquille les yeux, puis paraît un instant pensive, et finit par sourire.)


Juliette (au téléphone) : Je ne sais pas si ça va amuser Eloïse, mais ça vaut le coup d’être tenté.

Eloïse : De quoi ? C’est quoi, le plan ?

Juliette (posant une main sur le micro) : Chhut, attends…

Eloïse : Fous le haut-parleur.


(Juliette, souriant, appuie sur une touche.)


La voix de Flora : …nerait qu’il résiste. Ou alors ce sera mauvais signe…

Juliette (au téléphone) : Bon, et tu verrais ça où et quand ?

Eloïse : Attends, j’ai rien compris, répète.

La voix de Flora : Je sais pas… Le plus tôt sera le mieux, non ?

Juliette : Je te raconterai, tu vas adorer.

La voix de Flora : De quoi ?

Eloïse : Pfff…

Juliette : Non, je parlais à Eloïse. Donc, quand ?

Flora : Demain soir, chez moi, ça vous irait ?

Juliette : Okay. Pour quelle heure ?

Eloïse : Ben non, pas okay : j’ai pas envie, moi. Ça sent le traquenard, ce truc…

Juliette : Chhht !

La voix de Flora : Vers sept heures. Et apportez un ou deux sextoys, des trucs de gouines, vous devez bien avoir ça, vous…

Eloïse (hurlant) : Hein ?!? Mais qu’est-ce que c’est que ce truc de dingues ?!? Je veux pas baiser avec Flora, moi !

Juliette (s’efforçant de masquer le micro et sa voix) : Okay, bon, ben à demain, alors… Bonne soirée.

La voix de Flora : Ouais, salut.


(Juliette raccroche tandis qu’Eloïse continue de brailler.)


Eloïse : C’est tout ce que vous avez imaginé, baiser avec la grosse truie juste pour faire chier Roméo ?

Juliette : Oui, et devant lui.

Eloïse : N’importe quoi !

Juliette : Et c’est clair que normalement, il devrait craquer…

Eloïse : Mais moi aussi, je vais craquer ! C’est hors de question que je touche à cette crevure !

Juliette : Mais y en aura pas pour longtemps…

Eloïse : Non. Définitivement.

Juliette : Comme tu veux. Mais moi j’irai quand même.


(Eloïse observe Juliette, consternée.)


Juliette : Ben, elle a raison ; ça peut marcher.


(Un silence.)


Juliette : Et j’aimerais autant que tu sois là…

Eloïse : Pfff…






Acte III, scène 12

Samedi 24, 19 h 15

Le salon de Flora

(Flora)



(Flora, vêtue d’une tenue provocante, déambule dans le salon, vérifiant la mise en place de la table, puis préparant quelques verres à apéritif. Une sonnette retentit. Flora sort.)



La voix de Flora : Salut, bienvenue.

La voix de Juliette : Salut. Désolée, on est pas très en avance…

La voix d’Eloïse (froide) : Salut.

La voix de Flora : Ouaouh ! Vous êtes ravissantes ! Si avec ça on y arrive pas…

La voix d’Eloïse : Mouais…

La voix de Flora : J’ai failli vous appeler pour tout annuler, Roméo hésitait à venir…

La voix de Juliette : Ah bon ? Pourquoi ?

La voix de Flora : Alberto est malade, apparemment.

La voix de Juliette : Ah ouais, ils en sont à plus se quitter, carrément…

La voix de Flora : Mais il a rappelé cet après-midi, et normalement, ils viennent.

La voix de Juliette : Tiens, on a apporté ça…

La voix de Flora : Fais voir…


(On entend le bruit d’un sac en plastique qu’on manipule.)


La voix de Flora : Ah ouais, quand même ! Vous avez prévu l’artillerie lourde… Oh la vache ! Ça, j’avais jamais vu… fais voir…

La voix d’Eloïse : Bon ça va, vous allez quand même pas vous le mettre tout de suite, non plus !

La voix de Flora : Tenez, entrez, c’est par là.

La voix d’Eloïse (glaciale) : Oui, on connaît, on est déjà venues rechercher Roméo ici une fois ou deux…


(Juliette entre, portant une robe somptueuse et élégamment maquillée et coiffée, suivie d’Eloïse, en jean et tee-shirt, puis de Flora, qui tient un grand sac en plastique visiblement rempli de tout un tas d’objets plus ou moins encombrants.)


Juliette : Oh, allez, arrête de faire la gueule…

Eloïse : Euh… ouais, on est en trêve, okay… mais on va quand même pas devenir subitement les meilleures amies du monde, hein ; alors n’en faisons pas trop, d’accord ?

Juliette : Bah, maintenant qu’on est là, autant en profiter…

Flora (effleurant les fesses d’Eloïse) : Savoure la paix, belle Eloïse…


(Eloïse écarquille les yeux et rougit. Juliette les regarde curieusement.)


Flora (s’éloignant pour déposer le sac) : T’en fais pas, je vais pas te la piquer…

Juliette et Eloïse (en même temps) : Eh, je…

Flora (les interrompant en désignant la fenêtre) : Ah, ils sont pas en retard !


(Juliette et Eloïse jettent un regard vers l’extérieur.)


Juliette : Alors ? Comment on fait ?

Flora : Essayez de rester cachées au début : il faut que l’effet de surprise soit maximal. Tenez, là, par exemple, derrière le buffet.


(Eloïse et Juliette se dissimulent dans un coin de la pièce, derrière un gros meuble. La sonnette retentit.)


Flora : Rabattez un peu le rideau…


(Elle décale quelque peu un voilage, achevant de cacher globalement les deux jeunes femmes.)


Flora : J’y pense, ils risquent pas d’avoir vu votre voiture ?

Juliette : On est venues en bus.

Flora : Parfait. Bon, je vais ouvrir.


(Elle reprend le sac en plastique et l’apporte à Juliette.)


Flora : Tenez, je vous redonne votre attirail. Mais soyez sages, hein…


(Elle s’éloigne face aux soupirs des deux jeunes femmes, puis sort alors que la sonnette retentit de nouveau.)


Eloïse (à voix basse) : Ça pue, ce plan ! J’espère que c’est pas un traquenard.

La voix de Flora : Voilà, voilà, j’arrive. Entrez, les garçons.

La voix de Roméo : Bonsoir.

La voix d’Alberto (bancale) : Bonsoir Flora. Mais tu es ravissante…

La voix de Flora : Eh ben qu’est-ce qui t’arrive, Alberto ? Tu m’as l’air bien mal en point.

La voix d’Alberto (pâteuse) : Oh si tu savais… je suis malade ! Y aurait eu que moi, on aurait annulé, mais Roméo se faisait une telle joie de venir…

Eloïse (à part) : Ah oui… tiens donc…

La voix de Roméo : Oui, tu comprends, Flora, c’est notre première sortie en couple, Alberto et moi, alors…

Juliette (à part) : Pfff ! N’importe quoi !

La voix de Flora : Entrez, suivez-moi, c’est par ici. Mais tu connais déjà, toi, Roméo, n’est-ce pas ?

La voix d’Eloïse : Grrrr !

La voix de Roméo : Allons, Flora, cesse de rouler du cul comme ça, je te l’ai dit : je suis avec Alberto, désormais…


(Flora entre, suivi de Roméo qui porte une belle composition de plantes fleuries et traîne Alberto de sa main libre.)


Eloïse (à part) : J’hallucine ! Et il lui tient la main…

Juliette (à part) : Oui… et puis honnêtement, je sais pas bien ce qu’il peut lui trouver, à Alberto…

Eloïse (à part) : Ben faut reconnaître que là, il est pas à son avantage. Mais en temps normal…

Flora (désignant le canapé) : Mettez-vous à l’aise, asseyez-vous.


(Alberto s’assoit. Roméo dépose la composition florale puis s’assoit à son tour.)


Flora : Je vous sers quelque chose à boire ?

Roméo : Volontiers.

Flora : Un whisky, comme d’hab ?

Juliette (à part) : Grrrr !

Eloïse (à part, amusée) : Chhhhut ! C’est la trêve…

Roméo : Oui, je veux bien, merci. Mais attends, je vais t’aider.

Flora : Alberto ?

Roméo : Peut-être qu’un pastis sec te ferait du bien ?


(Alberto verdit, puis se lève soudain en hâte.)


Alberto : Euh… je…

Flora (tendant le bras) : Au fond du couloir, à droite…

Alberto (s’éloignant) : Excusez-moi.


(Il sort, sous les yeux navrés de Roméo et Flora. Celle-ci s’agenouille finalement près d’une table basse pour servir le whisky.)


Flora : Glace ?

Roméo : Oui, je veux bien.


(Elle dépose un glaçon, puis s’approche exagérément de Roméo pour lui tendre son verre. Il s’en saisit et regarde d’un air lointain la poitrine de Flora, tandis que la jeune femme se déhanche en s’avançant encore, lascive.)


Roméo : Tu perds ton temps, Flora…


(Elle passe ostensiblement sa langue sur ses lèvres en se trémoussant à genoux devant Roméo.)


Flora (ingénue) : Je ne t’excite plus ?

Juliette (à part) : Grrrr !

Eloïse (à part) : Déjà ça, en temps normal, il peinait à rester zen…

Roméo (calmement) : Non, désormais, c’est Alberto que…


(Il est interrompu par une longue éructation sonore provenant d’une pièce voisine, suivie d’un grand bruit de vomissements ronflants et éclaboussants.)


Eloïse (à part) : Ah ouais, quand même ! Il fait pas semblant, Alberto, quand il est malade…


(Un silence.)


Flora (amusée) : Donc ? Tu disais qu’il t’excite, c’est ça ?


(Roméo soupire. Elle se redresse, puis s’assoit sur un fauteuil, face à Roméo.)


Flora : Alors ? Comment se passe ta nouvelle vie ?


(Elle bombe le torse, puis écarte ses jambes pour les croiser lentement.)


Roméo (sans même la regarder) : Eh ben écoute, pas si mal. Je me sens débarrassé d’un poids. Tu vois, toutes ces filles qui me couraient après… au moins, je n’ai plus tout ça à gérer.

Eloïse (à part) : J’hallucine !

Juliette (à part) : Quel salaud !


(Flora jette un regard appuyé vers le buffet derrière lequel sont cachées les jeunes femmes.)


Flora : Et donc toutes ces filles ne t’excitent plus ?

Roméo : Non.


(Flora échancre encore son chemisier et porte un doigt à ses lèvres tout en glissant une main entre ses cuisses, et fait mine de se déhancher en soufflant d’extase.)


Juliette (à part) : J’hallucine !

Eloïse (à part) : Quelle salope !


(Roméo l’observe un instant, puis sifflote gaiement.)


Roméo : Tu perds ton temps, je te dis…

Eloïse (à part) : N’empêche, c’est étonnant qu’il lui saute pas dessus…


(Flora, désappointée, se redresse.)


Flora : Eh ben, tu as bien changé… je ne te reconnais pas…

Eloïse (à part) : C’est clair !

Juliette (à part) : Ouais, si seulement il avait été tout le temps comme ça…


(Flora se rapproche de nouveau de la table basse pour servir un autre verre. Un nouveau long vomissement se fait entendre, ponctué de râles, de toussotements, et de divers crachats de glaires plus ou moins grasses.)


Flora (amusée) : Oh oui ! C’est vrai qu’il est follement excitant !

Roméo : Le pauvre… T’as pas des médocs, là, quand même ?

Flora : Si ; j’irai voir quand il aura fini.


(Elle se rassoit.)


Flora : Donc te voici homo… Qui l’eût cru…


(Roméo la dévisage, amusé, sans répondre. Elle lance à nouveau un regard appuyé vers le buffet.)


Flora : Eh bien, figure-toi que moi aussi, depuis quelque temps…


(Un silence.)


Roméo : Oui ?

Flora : Depuis quelque temps, je me suis mise à éprouver beaucoup de plaisir avec des filles.

Roméo : Eh bien tu vois, tu peux me comprendre, finalement…

Flora (mystérieuse) : J’ai deux nouvelles copines avec qui je m’amuse de temps en temps…

Roméo : Ah ?


(Encore un long vomissement sonore.)


Roméo : Attends, je vais quand même aller voir, peut-être…


(Il se lève et sort. Flora vérifie qu’il s’est bien éloigné et se précipite vers la cachette des jeunes femmes.)


Flora (à voix basse) : Vous avez vu ?

Eloïse (à voix basse) : Ouais…

Juliette (à voix basse) : Je le reconnais plus…

Eloïse (à voix basse) : Et t’es vraiment une sacrée salope !

Flora (à voix basse) : Merci du compliment.

La voix de Roméo : Tout va bien, Alberto ?

La voix d’Alberto (englaviotée) : Formidable !

Flora (à voix basse) : Bon, c’est le moment, non ?

Eloïse (à voix basse) : Ouais, allez, on y va !

Juliette (à voix basse) : Ah, ça y est, t’es motivée ?

Eloïse (à voix basse, déboutonnant son jean) : Bah ouais, on va quand même le dépédiser un peu…


(Juliette et Flora la regardent un instant curieusement.)


La voix de Roméo : Je peux faire quelque chose pour toi ?

Flora (à voix basse) : Bon, ben, allez, c’est parti !


(Juliette, Eloïse et Flora se déshabillent en hâte.)


La voix d’Alberto : Euh… je… Bleuaaargggllll ! Blllaaarrrruuuggghhh !

Eloïse (à voix basse) : Par contre, c’est pas gagné d’être excitée dans ces conditions…

Flora (à voix basse) : On s’en fout ; l’essentiel, c’est d’impressionner…


(Les trois jeunes femmes, nues, se précipitent sur le canapé. Juliette s’agenouille sur les cuisses de Flora, tandis qu’Eloïse caresse ses fesses et leurs seins tout en les embrassant à pleine bouche.)


La voix de Roméo : Euh, Flora, t’as pas un truc pour le bide…


(En réponse, Flora pousse un long gémissement de plaisir feint et glisse une main entre les cuisses d’Eloïse.)


La voix de Roméo : Flora ?


(Eloïse gémit à son tour. Roméo entre et pousse un grand cri de stupeur en découvrant les trois jeunes femmes se caresser.)


Roméo : Mais… mais… qu’est-ce que…

Juliette : Hmmm !

Eloïse : Aaaahhh…


(Roméo, la bouche ouverte, demeure pantois et fixe la scène d’un regard baveux.)


Flora : Hmmm ! J’adore leur corps, regarde… Quel beau spectacle…


(De sa main libre, elle presse un sein de Juliette.)


Flora : Quel dommage que ces charmes te laissent désormais indifférent, mon pauvre Roméo…


(Les jeunes femmes continuent de se peloter, s’embrasser, se caresser. Roméo tire à plusieurs reprises sur son pantalon.)


Roméo (fort, vers le couloir) : Euh, Alberto, je dois te laisser te débrouiller un instant…


(Alberto répond vaguement quelque chose, mais sa voix est couverte par les plaintes et les gémissements des jeunes femmes qui continuent de se câliner en dardant des regards de braise à Roméo. Celui-ci finit par s’avancer, un sourire aux lèvres, en déboutonnant son pantalon.)






Acte III, scène 13

Samedi 24, 20 h 05

Le salon de Flora

(Juliette, Eloïse, Flora, Roméo)



(Tous les quatre sont nus, plus ou moins enlacés sur le canapé. Roméo y est assis, chevauché par Juliette qui lèche Eloïse, tandis que lui-même lèche Flora.)



Juliette : Aaaahhh !

Eloïse : Hmmmm !

Flora : Ouiiiii !

Roméo : Hmmmggggnnn !


(Alberto entre, livide et chancelant. Il s’immobilise en découvrant la scène.)


Alberto : Et voilà que j’ai des visions… Ce doit être la fièvre… J’ai vu un lit, je file me coucher.


(Il fait demi-tour et sort. Personne ne semble s’être aperçu de sa présence. Les jeunes femmes échangent leur place, Flora prenant celle de Juliette et Eloïse celle de Flora.)






Acte III, scène 14

Samedi 24, 20 h 50

Le salon de Flora

(Juliette, Eloïse, Flora, Roméo)



(Tous les quatre sont nus, vautrés, éreintés, soupirant et en sueur, sur le canapé.)



Juliette (caressant doucement le sexe mollissant de Roméo) : Eh ben, je préfère ça…

Eloïse et Flora (ensemble) : Oui, moi aussi.


(Roméo ne répond rien, se contentant de sourire. Eloïse se lève et va se saisir du sac en plastique.)


Eloïse : Bon, dites, on avait justement apporté de quoi s’amuser un peu…


(Juliette et Flora soupirent profondément.)


Flora : Eh ben pour quelqu’un qui voulait pas venir…

Roméo (amusé) : Y a quoi, dans votre sac ?

Eloïse (extirpant un harnais muni d’un gode) : On avait pris de quoi t’enculer si nécessaire.

Flora : On pourrait toujours s’en servir pour Alberto.

Juliette : Oui, le pauvre…

Roméo : Oui, il va falloir que je lui annonce que je le quitte…

Flora : Alors ça y est ? Tu n’es plus homo ?

Roméo : Ben…

Eloïse (avec un sourire malicieux, s’équipant du harnais) : Alors ça y est, la trêve est finie…


(Elle s’approche de Flora.)


Eloïse (à Juliette) : Tiens-la bien, je vais me la faire…






Acte III bis, scène 1

Mercredi 21, 10 h 50

Un bureau sur le lieu de travail de Roméo

(Johanna)



(Johanna, assise au bureau, tapote nerveusement des doigts sur un classeur. Elle finit par décrocher le téléphone et compose un numéro.)



Johanna (au téléphone) : Roméo ? Oui, c’est Johanna. … Dis, si tu as quelques minutes, dans la matinée, tu peux passer ? … Oui. … Okay, super.


(Un silence. Elle fronce les sourcils et paraît réfléchir, puis tapote à nouveau nerveusement sur son classeur.)


Johanna : Entrez.


(Roméo entre.)


Roméo : Salut.

Johanna : Ah, salut.

Roméo : Je peux t’aider ?


(Elle se lève et s’avance vers lui d’un air grave.)


Roméo (gêné) : Euh, Johanna, je suis sincèrement désolé pour hier soir, je ne voulais pas…


(Elle l’interrompt en posant un doigt sur ses lèvres.)


Johanna : Chhhhut… Écoute… J’ai pensé à toi toute la nuit, en me reprochant d’avoir été trop dure avec toi, hier soir ; et ce matin, à la pause, j’apprends que t’aurais passé la soirée avec Alberto et que t’aurais tourné homo… et du coup, je m’en veux terriblement… Je ne sais pas quoi dire, je suis désolée.

Roméo (soulagé) : Ah, mais ne t’en fais surtout pas, Johanna ! C’est moi qui suis sincèrement désolé de ma conduite. Et ne t’inquiète pas, tu n’es pour rien dans ce qui se passe… ce n’est pas du tout à cause de toi que…


(Il s’interrompt.)


Johanna : Que tu es homo ?

Roméo : Euh… oui, voilà…

Johanna : Tu es sûr ?

Roméo : Oui, oui, ne t’en fais pas !

Johanna (emballée) : Parce que je m’en veux, tu comprends, je t’ai repoussé, et à mon avis tu n’y es pas habitué, et du coup, tu deviens gay ; ça me fait bizarre, je me dis que c’est à cause de moi…


(Roméo soupire et ferme la porte derrière lui.)


Roméo : Bon, écoute, Johanna, calme-toi. Je vais tout te raconter, mais il faut que tu me promettes de ne rien dire… surtout à Flora…

Johanna (sincère) : Je te le jure !

Roméo : En fait, même, tu pourrais peut-être m’aider…






Acte III bis, scène 2

Mercredi 21, 12 h 50

Un salon de détente, sur le lieu de travail de Roméo

(Conrad, Magnus, Yul)



(Tous trois discutent en savourant une tasse de café.)



Magnus : En tout cas, ça l’a drôlement chamboulée, Flora, c’est bien la première fois qu’elle a pas…

Yul : Ah ouais, merde ! En plus, c’était mon tour !


(Flora revient.)


Flora : Oh, j’ai failli oublier ! Tu viens, Yul ?


(Elle lui prend la main ; ils sortent tandis qu’elle commence à déboutonner son chemisier de sa main libre.)


Conrad : Eh ben… Roméo, homo…

Magnus : Ouais… ça fait bizarre, hein…


(Ils jettent leurs gobelets puis sortent. Roméo entre par une autre porte.)


Roméo : Hé hé hé ! Impec ! Ça marche même mieux que prévu…






Acte III bis, scène 3

Jeudi 22, 9 h 22

Un local d’archives sur le lieu de travail de Roméo

(Flora, Roméo)



(Flora presse son corps vers celui du jeune homme et se trémousse un instant contre lui, agitant ses seins lourds juste devant son visage. Roméo soutient négligemment ses assauts. Flora finit par reculer d’un pas et plaque une main entre les jambes du jeune homme.)



Flora (déçue) : Mais c’est tout mou…

Roméo (amusé) : Ça y est, tu as fini ?

Flora : J’arrive pas à y croire…


(Roméo se retourne et recommence à classer des dossiers. Flora sort en pestant et en refermant son chemisier.)


Roméo (soupirant) : Eh ben… heureusement que je me suis branlé ce matin…






Acte III bis, scène 4

Jeudi 22, 9 h 35

Un salon de détente, sur le lieu de travail de Roméo

(Johanna)



(Johanna savoure un café en parcourant un feuillet. Flora entre en trombe, visiblement agacée, et va commander un café.)



Flora (froidement) : Salut.

Johanna : Salut. Ça va ?

Flora : Non, ça ne va pas ! Je viens de me prendre un vent du tonnerre ! Roméo me résiste plus que jamais ! Je ne sais pas ce que tu lui as fait ou ce que tu ne lui as pas fait, mais il prétend qu’il est devenu homo !

Johanna : Oh, calme-toi, ce n’est pas moi. Déjà avec moi, l’autre soir, il n’est arrivé à rien.

Flora (s’asseyant) : Ah bon ? Comment ça ?

Johanna : Eh ben, quand tu es repartie de chez moi, tu te souviens… c’était pourtant chaud, mais il n’a jamais vraiment bandé. Il a fini par s’excuser, et on a discuté ; il s’est en quelque sorte confié à moi : et il m’a dit qu’il était attiré par Alberto. Que toutes ces histoires avec ses copines, avec toi, avec moi, ça lui pesait, qu’il ne savait plus comment gérer, et cætera.

Flora : Putain, j’en reviens pas ! Et comme ça, tac, du jour au lendemain, les filles arrêtent de l’exciter ! T’y crois, toi ?

Johanna : Ben, tout ce que je sais, c’est qu’il a eu une panne avec moi…

Flora : Mouais… et avec moi, c’était pire qu’une panne : il m’a résisté…


(Un silence.)


Johanna (faussement hésitante) : Peut-être qu’il lui faudrait une excitation plus forte encore, quelque chose qui le ferait fantasmer très fort…

Flora : Hmmm… peut-être, oui… mais quoi ?

Johanna : Je sais pas… Tu t’entends bien avec sa nana ?

Flora : Pas franchement non… pourquoi ?

Johanna : Ben sinon, ç’aurait sans doute pu marcher. Toi et elle…


(Flora la regarde curieusement et paraît réfléchir.)


Flora : Mouais… Je sais pas trop…


(Un silence.)


Flora (se levant) : En tout cas, ça me fait bien chier ! Bon, allez, je retourne bosser.

Johanna : À plus.


(Flora sort. Un silence. Roméo entre.)


Roméo : Alors ?

Johanna : Oui, ça y est, je lui ai dit.

Roméo : Et qu’est-ce qu’elle a répondu ?

Johanna : Rien, elle a juste dit « mouais ».

Roméo : Bon, reste à souhaiter que l’idée fasse son chemin…

Johanna : Ça m’a l’air bien foireux, ton plan, quand même…

Roméo : Oh, telle que je la connais, Flora ne va pas rester sur un échec, et y a des chances que ça marche. Merci, en tout cas ! Et je compte sur toi pour ne pas me trahir…

Johanna : T’en fais pas !






Acte III bis, scène 5

Vendredi 23, 22 h 25

L’appartement d’Alberto

(Roméo)



(Roméo va-et-vient, un verre à la main.)



Roméo : Bon, faut que je trouve autre chose, quand même…


(Un bruit de chasse d’eau. Alberto entre, pâle.)


Alberto : Eh ben, c’est pas la joie…

Roméo : C’est vrai que tu es bien blanc. Ça ne va pas ?

Alberto (nuageux) : Non, pas trop. Je crois que j’ai une sorte de gastro. Il va falloir qu’on s’abstienne ce soir encore…

Roméo (à part, serrant discrètement le poing en un geste victorieux) : Yes !

Alberto : Hein ?

Roméo (évasif) : Non, rien, je disais juste : merde !

Alberto : Ouais, comme tu dis, c’est pas de bol… Toi qui as mal à la tête deux soirs de suite, et aujourd’hui moi qui suis malade…

Roméo : J’espère que tu seras remis pour demain, pour aller dîner chez Flora. Ça m’ennuierait de devoir y aller seul…

Alberto : Oh, me parle pas de bouffe !

Roméo : Désolé…

Alberto : Je crois que le mieux est que j’aille m’allonger. Bonne nuit.

Roméo : Dors bien. Appelle-moi si tu as besoin.


(Alberto sort. Roméo soupire en se laissant choir dans un fauteuil.)


Roméo : Eh ben… je m’en sors bien…






Épilogue, scène 1

Dimanche 25, 18 h 40

Une terrasse de café

(Roméo, Johanna, un serveur, des clients)



(Johanna et Roméo sont attablés ensemble. Autour d’eux, plusieurs autres clients. Le serveur va-et-vient entre les tables.)



Johanna : Bon, alors, raconte ! Ça a vraiment marché ?

Roméo : Oui ! Encore mieux que prévu !

Johanna (stupéfaite) : Tu as vraiment couché avec les trois ? En même temps ?

Roméo : Oui ! Et grâce à toi. Merci…

Johanna : Oh ben, de rien… Je n’ai pas fait grand-chose…

Roméo : Ben si, quand même ; c’est toi qui as « inspiré » cette idée à Flora…

Johanna : Oui, ben j’aimerais autant pas être là quand elle va le réaliser…

Roméo (amusé) : Boh, t’en fais pas ; elle est persuadée que grâce à elle, je ne suis plus gay…

Johanna : Et Alberto ?

Roméo : Ah là là ! Lui, il a morflé, pour le coup : il était franchement malade jusqu’à ce matin, et ensuite il a fallu que je lui explique qu’entre lui et moi c’était fini…

Johanna : Le pauvre…

Roméo : Oui, je m’en veux quand même un peu. Mais en même temps, il avait qu’à pas accepter de me surveiller.

Johanna : Ce que je me demande surtout, c’est comment il a pu… enfin…

Roméo : ?

Johanna : Et même toi, en fait… tu as vraiment couché avec lui depuis mardi ?

Roméo : Non, juste une fois. Quand tu nous as virés de chez toi. Les deux soirs suivants, j’ai prétexté un mal de tête, et ensuite il a chopé sa gastro.

Johanna (amusée) : Comment t’as fait ce coup-là ? Tu as acheté des cultures de virus ?

Roméo : Non, mais je dois avouer que ça m’a bien arrangé. Je crois vraiment que les hommes m’attirent pas plus que ça…

Johanna : J’aurais bien aimé assister à ça, en tout cas. Alberto et toi en train de…

Roméo : Arrête ! J’ai fermé les yeux tout du long en essayant d’imaginer que c’était…


(Il s’interrompt.)


Johanna (amusée) : Que c’était qui ?

Roméo : Euh… n’importe.


(Un silence.)


Johanna : Et Juliette ? Et Eloïse ? Comment elles ont pris ça ?

Roméo : Je sais pas trop…

Johanna : Elles se sont rendu compte de rien ?

Roméo : Non, je crois pas. J’ai l’impression qu’elles sont soulagées que je sois pas homo.


(Juliette, Eloïse et Alberto entrent discrètement de l’autre côté de la scène.)


Eloïse (à voix basse) : Tiens, vas-y, ils sont là-bas !


(Alberto s’avance jusqu’à Roméo sans que ce dernier le voie. Johanna l’a aperçu et écarquille les yeux de plus en plus à mesure qu’il s’approche. Alberto se jette finalement sur Roméo pour l’étreindre et l’embrasser. Celui-ci sursaute et tente de le repousser.)


Alberto : Oh Roméo ! Mon Roméo !

Roméo (se débattant) : Que… que…


(Eloïse et Juliette s’avancent à leur tour sous les regards mi-inquiets mi-amusés de Johanna.)


Alberto (surjouant) : Oh, Roméo ! Tes amies Juliette et Eloïse m’ont confié à quel point elles adoreraient que nous puissions poursuivre notre relation ! Elles étaient désolées de la façon dont tout cela s’est terminé, et elles sont prêtes à nous accorder chaque jour un peu de temps à tous les deux pour continuer à nous aimer.


(Roméo tourne en tous sens des yeux effrayés.)


Johanna (rigolant) : Ah oui, cette fois c’est sûr : elles ne se sont rendu compte de rien…

Juliette (s’efforçant de paraître froide) : Vas-y, Alberto, on te le laisse…


(Alberto s’assoit sur les genoux de Roméo qui se crispe et se recule au maximum sur son siège. Eloïse et Juliette attrapent chacune une chaise libre à une table voisine et s’assoient d’un côté et de l’autre de Johanna.)


Eloïse (fraîchement) : Nous, on va discuter un peu avec Johanna…


(Celle-ci cesse soudain de sourire.)


Johanna : Euh… je réalise soudain que le temps passe drôlement vite…


(Elle se lève sous les regards froids appuyés des deux jeunes femmes.)


Johanna (gênée) : Merci pour le verre, Roméo.


(Ce dernier tente de répondre, mais Alberto l’étouffe presque en essayant encore de l’embrasser. Johanna sort.)


Eloïse (se calant en arrière dans son siège) : Aaaah ! Allez-y, les garçons, on vous regarde…






Épilogue, scène 2

Samedi 14, 21 h 15

Une petite salle de spectacle

(Juliette, Cassandra, Roméo, Eloïse, Siriac, Flora, Alberto, des spectateurs)



(Sur un coin de la scène, une estrade figure une scène de théâtre où paraissent jouer Roméo, Flora et Alberto, déguisés. De l’autre côté, sur des rangées de sièges, de nombreux spectateurs observent la pièce. Sur l’une des rangées sont assis côte à côte Siriac, Cassandra, Juliette et Eloïse.)



Flora (théâtrale, se tournant vers Roméo) : Salut à mon vénérable confesseur !

Roméo (difficilement) : Roméo te remerciera pour nous deux, ma fille…

Flora : Je lui envoie le même salut ! Sans quoi ses remerciements seraient immérités.

Cassandra (à Juliette, chuchotant) : Alors finalement, Roméo joue le prêtre ?

Juliette (cynique) : Oui, il a spontanément préféré ce rôle qui lui convenait mieux…


(Cassandra sourit.)


Eloïse : Chhhht ! J’essaie d’écouter…

Alberto : Ah ! Juliette, si ta joie est à son comble comme la mienne, et si, plus habile que moi, tu peux la peindre, alors parfume de ton haleine l’air qui nous entoure, et que la riche musique de ta voix exprime le bonheur idéal que nous fait ressentir à tous deux une rencontre si chère.

Flora : Le sentiment, plus riche en impressions qu’en paroles, est fier de son essence, et non des ornements : indigents sont ceux qui peuvent compter leurs richesses ; mais mon sincère amour est parvenu à un tel excès que je ne saurais évaluer la moitié de mes trésors.

Roméo : Allons, venez avec moi, et nous aurons bientôt fait ; sauf votre bon plaisir, je ne vous laisserai seuls que quand la sainte Église vous aura incorporés l’un à l’autre.


(Eloïse et Juliette rigolent tandis qu’Alberto prend la main de Flora sous les yeux agacés de Roméo ; tous trois s’éloignent sur la scène et les lumières baissent.)


Siriac (se penchant vers Juliette) : Mais il m’avait pas parlé d’une autre nana, une petite jeune toute mimi, qui devait jouer je sais plus qui ?

Juliette (ravie) : Hélas, elle a spontanément refusé le rôle…

Eloïse (amusée) : Et pour le coup, c’est pas nous…

Cassandra (à Juliette) : Comment ça ? C’est la Johanna dont tu m’avais parlé ?

Juliette : Oui. Et je te laisse imaginer comme Flora a pu réagir quand elle a découvert qu’elle s’était fait pipeauter par Roméo et par la gamine…

Eloïse (réjouie) : Pauvre Johanna…

Cassandra (inquiète) : Qu’est-ce qui lui est arrivé ?

Juliette : Elle a spontanément demandé une mutation…

Eloïse : Oui, pour la succursale slovène de leur entreprise…


(Les lumières se rallument. Sur l’estrade, Yul et Magnus entrent.)


Yul : Je t’en prie, mon bon Mercutio, retirons-nous…


(Sur le côté de la scène, derrière un rideau, Roméo, Flora et Alberto se désaltèrent et paraissent discuter à voix basse.)


Yul : La journée est chaude ; les Capulet sont dehors, et, si nous les rencontrons, nous ne pourrons pas éviter une querelle : car, dans ces jours de chaleur, le sang est furieusement excité !


(Sur le côté de la scène, Flora se serre contre Roméo.)


Cassandra : Eh, regardez Flora !

Magnus : Tu m’as tout l’air d’un de ces gaillards qui, dès qu’ils entrent dans une taverne…

Juliette : T’en fais pas…

Magnus : …me flanquent leur épée sur la table en disant…


(Flora fait mine d’embrasser Roméo. Cassandra tourne un regard inquiet vers Eloïse.)


Magnus : Dieu veuille que je n’en aie pas besoin !

Eloïse : Elle essaie désespérément plein de trucs, mais on s’est assuré le soutien d’Alberto…


(Alberto embrasse soudain pompeusement Roméo. Quelques rires fusent de l’assemblée des spectateurs, déstabilisant Magnus et Yul. Flora et Roméo soupirent profondément.)





FIN