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Temps de lecture estimé : 21 mn
12/06/13
Résumé:  Avec Marie, c'était un amour impossible. Avec Catherine, c'est l'amour d'une vie.
Critères:  fh hplusag amour cunnilingu pénétratio -amourpass -amourcach
Auteur : Alex2      Envoi mini-message
Adieu Marie, bonjour Catherine

Ma vie, professionnellement très instable, était partagée entre des séjours outre-mer et de courtes périodes de repos en France. Cette vie errante ne m’avait jamais permis de nouer des relations sentimentales et amoureuses très suivies, mise à part une seule rencontre qui a douloureusement marquée ma vie de jeune adulte.


Passant deux semaines en Bretagne avec un ami d’enfance, j’ai connu Marie, une femme merveilleuse. Nous nous sommes aimés passionnément deux nuits puis nous nous sommes quittés. Ce que nous avions vécu avait été d’une telle intensité amoureuse et charnelle que, bien qu’elle fût mariée, nous avons voulu nous revoir à l’occasion d’un de mes congés en métropole. Il a fallu attendre vingt mois pour cela et nous nous sommes retrouvés pendant un week-end de folie dans une auberge de la côte normande.


J’étais très amoureux de Marie. Elle me plaisait et je la désirais. Mais, mariée et aimant son époux, j’ai bien compris qu’il lui était impossible de se satisfaire de la vie que je pouvais lui offrir. Cette vie se serait limitée pour nous deux à des rencontres passionnelles mais rares qui auraient à la longue déstabilisé son couple. Nous avons décidé de mettre un terme à cette relation. Pendant les vingt mois qui avaient précédé notre seconde rencontre et ensuite après nous être quittés définitivement, l’amour qui m’a lié à Marie m’a fait comprendre que je pouvais aimer une femme au point d’envisager de partager ma vie avec elle.


Quand nous nous sommes quittés Marie a pleuré dans mes bras. Je crois qu’elle commençait à m’aimer réellement. Il était mieux que chacun de nous deux mène sa vie, sans que soit ébranlée la solidité de son couple. La lucidité de Marie m’a été cruelle. Loin d’elle et sans elle, j’étais très malheureux. Un moindre mal était que je devais quitter la France pour une longue période en Afrique.



—ooOoo—



Malgré la brièveté et la rareté de nos amours, j’ai mis longtemps à l’oublier. J’étais le seul Européen sur cette mission et cette solitude, l’absence d’une relation amicale avec un collègue, ne m’aidaient pas à l’oublier. Pendant plusieurs mois j’ai transporté partout où j’allais un chagrin qui ne me quittait pas. Je me suis habitué à cette tristesse. Lorsque je m’arrêtais un moment après une longue marche et qu’un rai de soleil fusait à travers les arbres de la forêt, ma tristesse venait éclairer au fond de moi le sourire de cette femme. Pendant des mois j’ai vécu avec elle. Ma tristesse qui était inséparable de Marie était devenue une compagne, celle qui me permettait de rêver. Parfois elle m’était cruelle, mais le temps qui passe est le meilleur ami de l’oubli. C’est avec toute la tendresse de Marie que ma tristesse revenait me visiter. Un jour elle m’a quitté ; je ne l’ai pas vue partir : simplement, un soir, je me suis aperçu qu’elle n’était plus là. Je n’avais plus mal mais je me suis ennuyé, seul avec moi-même.


Pour me reposer de ce long et difficile séjour outre-mer qui avait duré un an sans la moindre interruption, ma direction m’avait – disait-on – mis au vert. La mise au vert consistait à continuer à travailler mais en étant affecté à un projet en France, avec peu de décisions délicates à prendre et beaucoup de liberté, et c’était effectivement assez reposant. Je devais installer un réseau d’appareils de mesures sur le site d’un petit barrage dans le Morvan. Une des parcelles sur lesquelles je travaillais appartenait à une assez jolie femme qui résidait en été dans le village voisin. Je suis allé deux ou trois fois chez elle pour régler de petites formalités de droit de passage. Elle s’appelait Sandra, et habitait l’été dans une très jolie maison de campagne.


Sandra devait avoir dans les trente-cinq ans, peut-être un peu plus. Nous avons sympathisé, assez pour qu’elle m’invite un soir à dîner. Elle était divorcée et très disponible. Très rapidement, elle est devenue ma maîtresse. Tous les soirs, avant de rentrer à l’hôtel, je me rendais chez elle. J’y passais quelquefois la nuit. Sa maison était un havre de tranquillité, avec un verger et un jardin rempli de fleurs. Lorsque j’avais un peu de temps, je l’aidais dans de menus travaux. J’y ai passé des moments délicieux de paix et de sérénité, loin de Paris et de ses problèmes. J’avoue que j’ai fait traîner ce travail pour prolonger au maximum ce qui était pour moi de vraies vacances.


Un soir, arrivant chez Sandra, j’aperçus de loin, comme un sourire du hasard, une jeune fille brune. Je la vis d’abord de dos ; son maillot de bain couleur chair me fit croire un instant qu’elle était intégralement nue. Son corps était somptueusement beau. Elle était svelte, sans avoir cette silhouette décharnée et transparente qu’affectionnent beaucoup de femmes mais qui efface toute féminité. Arrivé près d’elle, la saluant, elle m’a dit :



Elle était jolie. Immédiatement, elle me plut.



—ooOoo—



Ce premier soir, elle s’est absentée pour rejoindre un ami qu’elle avait connu alors qu’ils étaient enfants et qu’elle retrouvait quelquefois les mois d’été. Sandra en profita pour me parler d’elle. Pour Sandra, Catherine était une énigme. Son ami Charles était un très beau garçon, et la réserve apparente de Catherine ne correspondait en aucune façon à la philosophie que Sandra se faisait de la vie. Elle ne comprenait pas Catherine. Elle m’expliqua : « Avec le physique qu’elle a, cette fille doit aimer l’amour sans le savoir. Quel dommage ! Tu m’aurais vue à son âge ! » Je n’en doutais pas, du moins en ce qui concernais Sandra que je pratiquais depuis quinze jours et qui parfois m’épuisait. Elle avait conseillé à Catherine d’être plus entreprenante, sans même savoir où en étaient exactement ses relations avec Charles. Elle l’avait encouragée à être offensive, et en discutant lui avait donné des conseils gratuits :




—ooOoo—



Les jours passaient et Catherine me plaisait de plus en plus bien qu’elle fût distante, réservée, parfois assez désagréable à mon égard. Probablement, cette attitude attisait mon envie de mieux la connaître. J’aurais aimé lui plaire. À certains trop rares moments, elle semblait me témoigner un réel intérêt. J’en étais ravi ; mais chaque fois que je tentais de profiter de son humeur favorable, elle redevenait pensive et absente, s’éloignait sans un mot et reprenait ses occupations comme si je n’existais pas. Alors, de façon incompréhensible, elle me manquait.


Il m’arrivait, le soir, après que Sandra m’eut littéralement éreinté, d’attendre tard dans la soirée le retour de Catherine, seul sous la véranda. Lorsqu’elle apparaissait, j’avais la sensation de la connaître depuis toujours sans qu’aucun souvenir précis ne me rattachât à elle. Elle me rappelait Marie, bien qu’en apparence tout les différenciait. Marie, petite, menue, blonde, ressemblait à une poupée. Elle avait un charme propre et ordonné. La beauté de Catherine, au contraire, était plus provocante. C’était la beauté d’une sauvageonne. Ses longs cheveux bruns tombaient en cascade sur ses épaules nues. Avec des pommettes très légèrement saillantes, elle aurait pu avoir un type asiatique, si ce n’était ses yeux d’une couleur claire indéfinissable. Sa silhouette élancée, ses hanches épanouies et sa poitrine généreuse et ferme composaient un ensemble d’une sensualité ravageuse. J’aimais aussi ses longues cuisses dont le fuselé se cassait brusquement pour s’épanouir en deux globes d’une parfaite rondeur. La sensualité cachée de Marie – que j’avais découverte par le don qu’elle m’en avait fait – je la retrouvais en Catherine, aussi mystérieuse mais plus accessible et plus visible car elle la baignait comme un halo de lumière.


Comme Marie, la façon qu’elle avait de porter son regard sur moi m’intimidait, mais embrasait mon corps et mon cœur. Parfois, elle parlait avec moi quelques minutes, puis s’excusait de ne pas rester plus longtemps ; elle montait dans sa chambre ou allait rejoindre son ami. Quand je dormais à l’hôtel, je ne cessais de penser à elle. J’appréciais de plus en plus les moments où je me trouvais seul. Ils me permettaient de chasser de ma pensée le corps sensuel et délicieusement mûr de Sandra pour y substituer le mystère de celui de Catherine.



—ooOoo—



Les jours passaient et Catherine se conduisait toujours curieusement. Elle m’évitait et j’en étais agacé. Parfois, elle était même agressive à mon égard, sans que j’en comprisse la raison. Je la regardais à la dérobée. Je la trouvais belle à mourir. Lorsqu’elle se déplaçait, ses pieds glissaient sur la mousse de telle façon qu’elle donnait l’impression de se déplacer sur un coussin d’air. La moindre partie de son corps, de celles qui ne recèlent aucun mystère parce qu’elles sont visibles, dégageait autant de sensualité que l’aurait fait tout ce qui était caché par ses vêtements et que je brûlais de contempler. J’aurais aimé la voir nue.


Un soir où elle attendait Charles, elle est apparue dans une robe très courte. Elle n’avait pas de soutien-gorge et sous le tissu fin on devinait la perfection de sa poitrine. Sandra me jeta un coup d’œil complice, et quand Catherine se fut éloignée elle me dit :



Le lendemain, elle était encore plus jolie. Elle fut beaucoup moins distante, plus souriante, mais rien dans ses propos ne put me faire deviner quelle était la nature exacte de ses relations avec Charles. Je lui ai demandé, inquisiteur :



J’ai failli ajouter « avec Charles », mais n’ai pas osé. Et elle, avec aplomb et un sourire entendu :



Elle insista sur « avec Sandra ». Cette réponse, au lieu de me gêner, me plut, car pour la première fois une parcelle d’intimité venait de s’installer entre nous.



Riant bizarrement, elle partit en courant rejoindre Sandra dans le jardin.



—ooOoo—



Un matin, en travaillant près de la rivière, j’ai repensé à ce que Sandra m’avait dit au sujet de Catherine et Charles, et de leurs promenades au bord de l’eau. Il y avait une prairie d’herbe douce parsemée de marguerites et occupée çà et là par de petits bosquets. « C’est là qu’ils viennent faire l’amour… » pensai-je. Je me suis senti ému par l’évocation du corps de Catherine allongé langoureusement, se séchant au soleil après un bain dans la rivière. Je compris alors, comme une évidence qui aurait dû s’imposer à moi depuis longtemps, que j’étais amoureux de Catherine.


La vitalité de Sandra aurait dû normalement me calmer, mais la présence de Catherine sous son toit avait un effet inverse. Depuis quelques jours, c’était moi qui épuisais Sandra ; Catherine m’insufflait un désir imprévu et neuf, et Sandra en profitait sans en comprendre la raison.


Je me souviens, c’était un jeudi. Je devais rentrer définitivement à Paris en fin de semaine. En la quittant, Sandra m’a prévenu qu’elle devait partir un ou deux jours à Lyon. Nous devions nous revoir le samedi ou le dimanche suivant, veille de mon retour à Paris.


Que faire ? Je me suis posé la question en connaissant parfaitement la réponse. L’absence de Sandra laissait la maison et le champ libre aux deux tourtereaux. Catherine sera seule, ou avec Charles ! Je viendrai la voir malgré la blessure que pourrait m’occasionner la révélation d’une liaison sérieuse avec Charles. J’étais finalement presque satisfait de savoir, mais aussi j’avais peur de cette opportunité qui me permettrait enfin de voir clair !


Le lendemain en fin d’après-midi, en arrivant devant la barrière du jardin, j’ai vu la moto de Charles. J’ai failli repartir, mais une jalousie féroce et un mince espoir m’ont poussé irrésistiblement vers cette maison. Ils n’étaient pas dans le jardin. Que pouvaient-ils faire par une si belle journée, enfermés dans une maison ? Il fallait que je sache enfin. Je voulais en être sûr. Je voulais voir Catherine. J’aimais Catherine. Cette évidence qui s’était imposée à moi me brûlait le corps, mais risquait aussi de m’écorcher le cœur.


Je venais à peine de pénétrer dans la grande salle que j’ai vu Catherine se dresser, en bikini, la poitrine nue, magnifique. Je n’ai pas vu Charles qui devait être dissimulé derrière le large canapé. Je l’ai seulement entendu marmonner quelque chose. Je ne me souviens plus exactement ni de ce que j’ai dit ni de ce que j’ai alors fait. Je me suis retrouvé dans ma voiture, triste, désespéré. Dans cet état que tout homme connaît au moins une fois dans sa vie, lorsque rien dans ce qui l’entoure, rien dans ce qu’il voit et entend n’a de sens ni d’avenir. Cet état où le plus brillant et le plus serein des ciels sont voilés par une tristesse qu’on croit éternelle ! Et aussi, j’avais mal dans tout mon corps, dans mon ventre, dans toutes mes parcelles de vie capables de receler une émotion. Je revoyais ce corps lisse, cette poitrine aux seins magnifiques, aux aréoles dilatées et aux mamelons durcis par le désir, cette taille fine, ce ventre doux et – caché par un ridicule morceau d’étoffe – ce petit triangle noir dont je rêvais et sur lequel j’aurais tant aimé poser mes lèvres ! Mon désir était devenu chagrin.



—ooOoo—



Le lendemain, toujours aussi triste, j’arpentais la campagne, pensant au terrible faux-pas que j’avais commis la veille. Il fallait que je revoie Catherine au moins pour m’excuser et aussi Sandra pour fournir une explication plausible quant à ma venue chez elle en son absence. Sur ce dernier point, ce serait facile, dans la mesure où elle ne soupçonnait rien de mes sentiments profonds. Je voulais voir Sandra seule et Catherine seule. Difficile ! Arriver tôt avant que Sandra ne soit rentrée m’obligeait à supporter avec Catherine un long tête-à-tête qui me faisait peur et qui risquait de la mettre mal à l’aise et de me faire souffrir. De plus, il y avait Charles ! Celui-là, je ne voulais pas le voir.


En arrivant, ni moto ni voiture devant la barrière du jardin. Si Catherine était là, elle était seule. J’avais les idées plus claires et je m’étais persuadé que de retour à Paris, puis ensuite beaucoup plus loin, ma déception s’amenuiserait et que je garderais un souvenir tendre et charmant de cette merveilleuse jeune fille. Un peu comme celui que j’avais de Marie, mais avec une petite pointe d’amertume et d’insatisfaction en plus, car rien d’impossible me semblait exister entre Catherine et moi. De plus, j’avais peur que notre différence d’âge de huit ans lui semble être un obstacle entre la jeune fille qu’elle était et un homme qui, par rapport à elle, avait déjà beaucoup vécu. Et c’est finalement presque serein que j’ai frappé à la porte vitrée. Je ne voulais pas me retrouver dans la même situation que la veille, Charles pouvant malgré tout être là. Catherine m’a fait signe d’entrer. Effectivement, elle était seule. J’ai eu, le temps d’un éclair, le sentiment que ma venue ne la gênait nullement. Elle n’avait d’ailleurs aucune explication à me donner, contrairement à moi. J’étais d’autant plus emprunté et ému qu’elle portait, comme le premier jour, ce maillot de bain qui mettait en valeur un corps beau à se damner. Malgré mes résolutions de relativiser la situation et de n’accorder à mes sentiments que la valeur d’une pulsion passagère, je sentis une crue de désir me submerger, me noyer, me torturer. Elle était tranquille et me regardait avec une attention qui me surprit. Rassemblant mes esprits et mon courage, j’ai commencé :



Elle me dévisageait avec surprise. Il y avait dans son regard une flamme que je n’avais pas remarquée jusqu’à ce jour, et comme une impatience dont je ne parvenais pas à comprendre la raison. C’était comme si elle voulait que je continue de parler. Elle reprit :



Je riais très mal ; elle s’en est aperçue.



Je l’ai suivie. J’avais une envie de fin du monde de la prendre dans mes bras. Elle était si belle, si charmante, si nouvellement aimable avec moi alors que tout venait d’être cassé depuis la veille… Elle s’est assise dans un rayon de soleil. Ses cheveux bruns recouvraient la naissance de ses seins. J’étais si malheureux que je m’apprêtais à partir après lui avoir demandé quand Sandra comptait rentrer. Mais je l’aimais tant que je n’avais pas la volonté de la quitter.



Je me suis arrêté. Je ne savais pas trop comment continuer. Elle est partie chercher des rafraîchissements. À ce moment, je me suis senti abandonné, et la tristesse que sa présence avait réussi à chasser réapparut, discrète, mais bien réelle comme un bruit de fond dans mon cœur. Je pris conscience pendant ces courts instants que l’amour de cette jeune femme et sa présence à mes côtés m’étaient devenus indispensables. J’étais décidé à me battre pour l’avoir à moi. Où qu’elle soit, quoi qu’elle fasse, je voulais la revoir plus tard. Elle réapparut, toujours aussi royale, élégante et aérienne. Elle était souriante et détendue. Ce n’était plus la jeune femme distante et réservée des premiers jours.



Elle s’est levée pour répondre au téléphone. Elle est restée longtemps à parler et à rire avec son mystérieux correspondant. Je pensais à ce qu’elle venait de me dire. Que sa relation avec Charles soit passagère ne me permettait en aucune façon de supposer qu’elle nourrissait envers moi des sentiments aussi forts que les miens. Au moins, l’avenir était plus clair, et j’entrevoyais la possibilité de la revoir plus tard. Je lui écrirais pour vivifier cette intimité naissante, pour qu’elle pense à moi, et qu’insensiblement je lui apparaisse comme un personnage peut-être un peu atypique et lointain mais bien présent dans sa vie.


Elle revint vers moi. Elle se déplaçait avec une grâce infinie. J’ai eu le sentiment que j’allais perdre un petit bijou qui ne m’avait jamais appartenu. Avant qu’elle ne me fasse comprendre par un silence ou par une excuse quelconque que je pouvais partir, j’ai tenté de relancer la conversation.



Elle a insisté sur « trop long ». Elle s’est tue. Elle s’est levée, croyant que je m’apprêtais à partir. Elle me regardait comme elle ne l’avait jamais fait. Au coin de ses yeux pleins de lumière, j’ai vu se former deux petites perles, d’abord insignifiantes et discrètes, deux petites perles devenues deux grosses larmes qui ont coulé doucement, traçant deux sillons humides sur ses joues de satin.


Les événements de ces derniers jours me vinrent alors à la mémoire comme les images d’un film en accéléré. Je compris tout en un instant. Elle ressemblait à une petite fille vulnérable, triste et désemparée. Ses larmes qu’elle ne cherchait pas à dissimuler ont été son plus tendre cadeau. J’étais entraîné dans un tourbillon de bonheur. Tout est devenu clair et lumineux. J’ai posé mes deux mains sur ses joues et je l’ai attirée à moi en murmurant à son oreille :



Elle sanglotait presque, elle tremblait dans mes bras. Ses paroles étaient du miel :




—ooOoo—



Pendant des heures et des heures nous nous sommes aimés. La fenêtre de sa chambre était grande ouverte mais nous n’avons vu ni la nuit tomber ni le soleil se lever. Nous ne nous séparions l’un de l’autre que pour nous regarder et aimer nous regarder. Nous ne rompions l’accord de nos souffles que pour nous parler. Nos jouissances étaient suivies de caresses et de mots d’amour. Le corps merveilleux de Catherine ne laissait aucun répit à mon désir. Elle était aussi ardente qu’inexpérimentée. Ses hésitations et ses doutes devant le corps d’un homme étaient si touchants que j’en étais envahi de tendresse. Je l’aimais au point que mes gestes, mes caresses et mes baisers se succédaient naturellement sans craindre de la choquer par des gestes extrêmes. Elle aimait tout. Je lui disais tout. Elle disait « oui ». Elle disait « encore ». Son sexe avait la saveur du bonheur. Ses seins généreux rendaient mes mains intelligentes. Tous les mots de l’amour, envie, désir, volupté, plaisir, jouissance, orgasme, exultation, tendresse, sanglots, gémissements n’avaient que deux noms : le sien et le mien.


Toute ma vie, je me souviendrai de notre première étreinte. J’ai réussi à maîtriser l’impatience de mon corps pour l’accompagner dans un orgasme fabuleux. J’ai joui avec elle. Le soleil encore haut illuminait la chambre. Pendant plusieurs minutes elle est restée allongée langoureusement, comme engourdie par le plaisir qu’elle venait de ressentir. Après, elle m’a parlé :



En revenant du restaurant, Charles m’a embrassée pour la première fois. J’ai prétexté qu’il fallait que je rentre pour qu’il n’aille pas plus loin, et surtout je voulais rentrer vite pour te voir. Mais tu n’étais plus là. Cette nuit-là, j’ai beaucoup pleuré. Hier, quand Charles m’a téléphoné, j’ai tenté de le dissuader de venir me voir après le départ de Sandra. J’avais peu d’espoir que tu viennes, toi, mais je t’attendais… C’est lui qui est arrivé. Alors, je t’ai détesté, je t’ai haï autant que je t’aimais. Tu avais mis dans ma tête et dans mon corps un tel désordre, de tels bouleversements que j’étais désemparée. Un personnage odieux de jalousie s’est insinué en moi. Il voulait se venger. Si Charles m’avait vraiment aimée, il aurait deviné que j’étais en train de sombrer. Je me suis laissée faire, comme si plus rien ni personne n’avait d’importance. Je me rendais bien compte qu’en voulant te faire du mal, c’était moi et moi seule que je mortifiais, mais je ne pouvais plus revenir en arrière.


Tu es arrivé à la seconde près ; en quelque sorte tu m’as sauvée. Charles n’a rien compris quand je l’ai repoussé. Il m’a quittée définitivement ; il devait partir pour Strasbourg ce matin. Sans vouloir le blesser, j’ai été très dure avec lui. L’important, c’est après, c’est tout ce que j’ai remué dans ma tête la nuit qui a suivi. C’était si fort et si compliqué que j’ai encore du mal à y mettre de l’ordre. Cela se résume à une bataille entre un invraisemblable espoir qui nichait au fond de mon cœur et l’évidence que je n’étais rien pour toi. Comme le pari de Pascal : être aimée de toi, c’était l’infini du bonheur ; et même si cette possibilité était infime, je ne devais pas abandonner mon petit espoir. C’est lui qui m’a empêchée de pleurer toute la nuit.


J’étais habitée par le curieux sentiment que ton intrusion n’était rien d’autre qu’un petit coup de pouce du hasard. Je me disais que cette seconde pendant laquelle je me suis trouvée à moitié nue devant toi avait un autre sens que ton simple regard posé sur mon corps. J’y repensais comme à un accident d’une extrême sensualité, comme à un lien nouveau entre nous. Je voulais me persuader qu’à ce moment précis tu m’avais désirée, et que mes pulsions qui se projetaient vers toi étaient si fortes qu’elles devaient t’envahir et t’habiter avec la même évidence que moi. J’espérais qu’elles te révéleraient un sentiment enfoui, masqué par ta relation avec Sandra.


J’étais sûre que le lendemain tu reviendrais, et sûre aussi que dans un sens ou l’autre tout serait réglé entre nous. Et quand je m’enfonçais dans des abîmes de tristesse, mon petit espoir venait me prendre la main pour m’assurer qu’il était toujours là. Aujourd’hui, comme une imbécile, c’est ce que je me disais ; je t’ai attendu toute la matinée et l’après midi. Tu ne peux pas imaginer à quel point je t’ai attendu. Et il s’est produit une chose très étrange. Je t’aimais comme une adolescente aime son Prince Charmant. Je ne cessais de penser à toi, mais insensiblement un désir tenace et impatient m’a envahie et je suis devenue une femme décidée à me donner à toi quels qu’aient été tes sentiments et tes projets. Je voulais au moins une fois dans ma vie sentir ta peau contre la mienne. Que tu m’aimes ou non, je voulais être à toi ; j’avais envie de ton corps.



—ooOoo—



Tard dans la matinée, Catherine s’est assoupie. J’avais promis de la réveiller en lui faisant l’amour. Elle dormait divinement avec sur sa figure un bonheur tout neuf. J’ai repoussé le drap. Son corps aux courbes douces et harmonieuses m’appelait. Avec une jambe rejetée hors du lit dans son sommeil, le désir avait ouvert le chemin de nos plaisirs. Devant le spectacle de sa poitrine généreuse et ferme, des courbes pleines de son ventre et de ses hanches, ébloui par un tel abandon, j’ai posé mes lèvres sur ses boucles brunes toutes imprégnées de l’odeur de nos amours. Son ventre se gonflait et se creusait comme une voile qui cherche le vent. Le bonheur surnaturel dans lequel je baignais se transmettait à mon sexe avec l’évidence d’un désir insatiable. Bien qu’éreinté par les plaisirs de la nuit, il me demandait, à nouveau palpitant, la douceur du corps de Catherine. Lorsque le bout de ma langue a caressé sa chaleur humide, je l’ai entendue ronronner. Elle n’a rien dit, n’a rien demandé. Elle savait que je la connaissais maintenant depuis mille ans et que je ferais ce qu’elle désirait sans qu’elle n’en exprime le moindre souhait. J’ai embrassé ses mamelons frais et durs comme des baies sauvages. Je me suis glissé en elle, j’ai doucement bougé pour caresser les secrets de son intimité, et j’ai attendu, calé au fond de son ventre, que sa jouissance aspire la mienne.


Je possédais un bonheur dont j’ignorais encore les trésors et les surprises.