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Temps de lecture estimé : 10 mn
30/06/13
Résumé:  Vendeur dans une petite concession automobile, Laurent rencontre une cliente inattendue... ses pensées se bousculent.
Critères:  fh fplusag fagée frousses rousseurs profélève laid(e)s
Auteur : StepByStep  (Un homme qui rêve)            Envoi mini-message
Une petite Belette

Mardi matin, vers 11 h



Encore une matinée bien morne à attendre qu’un client potentiel veuille franchir le seuil de la zone « véhicules neufs ».


Le garage, lui, marche assez bien, les gens ont toujours des petits accrochages ou des pannes. Et puis les révisions protègent la garantie alors ça motive le client, mais la crise est là, les ventes de voitures sont au point mort et les petites concessions comme celle dans laquelle je travaille approchent de l’état de mort clinique…

Pour le moment, mes ventes payent encore mon salaire mais mon patron se pose de plus en plus de questions. Il sait que s’il agrandissait la zone atelier, il gagnerait en fluidité, rendrait ses clients heureux, grandirait en réputation et drainerait de nouveaux habitués. Et moi, dans ce cas, j’irais vraiment voir ailleurs car la grande concession située à deux kilomètres d’ici vient déjà de supprimer un poste de vendeur.


Mais voilà quelqu’un ! Une petite femme fluette. Est-ce qu’elle se trompe d’entrée ? Je me vois déjà lui dire de faire le tour du bâtiment pour accéder à l’entrée de l’atelier. J’ai l’habitude !



Avant de filer vers mon bureau, je ne peux pas m’empêcher de la scruter quelques secondes, saisi d’une drôle d’impression.

Elle a gardé ses lunettes de soleil qui lui mangent le visage mais cette voix… et cette silhouette frêle, la rousseur, ce cocktail réuni sur une même personne, ça me dit quelque chose. J’ai le sentiment de la connaître, oui, c’est même presque certain. Mais ça fait probablement un certain temps car je ne fréquente pas le troisième âge et je ne pense pas que ce soit une de mes ex-clientes.

Une vieille amie de ma mère ? La mère d’un copain d’enfance ?


Ses cheveux mi-longs, légèrement ondulés, seront bientôt majoritairement blancs mais le roux couleur carotte, visiblement d’origine, brille encore de quelques feux. Elle est vraiment petite, vraiment maigre, son cou est tout ridé, sa peau est au-delà du pâle… disons livide et même translucide entre les myriades de taches de rousseur.

Où ai-je pu croiser une mamie pareille ? Elle n’a pas un physique classique… ça va forcément me revenir !


Toujours dans mes pensées à mon retour, je la trouve assise devant la petite table où je peux recevoir les clients sans qu’ils ne perdent de vue les objets de leurs rêves. Elle a enfin enlevé ses lunettes. Son visage fin et triangulaire apparaît complètement, ses yeux bleu clair me sourient. Un vrai visage de chatte, elle a dû être belle dans sa jeunesse… Ce regard… Oui ! Un flash éclaire enfin mes neurones amnésiques !

C’est la prof de physique que j’avais en seconde, la rousse folle-dingue ! Madame Belette ! On se marrait tellement qu’avec un nom pareil elle soit aussi petite et rouquine !


Merde ! Madame Belette ! Ça ne me rajeunit pas (et elle non plus) !

Le pire c’est qu’elle ne pouvait pas me voir et c’était totalement réciproque. Je lui dois au moins trois ou quatre colles dans l’année pour preuve de notre belle entente…

Pour être tout à fait juste, elle ne pouvait pas supporter grand-monde sauf les fayots du premier rang. Mais, soyons totalement honnêtes, à l’époque je faisais plutôt partie des chahuteurs du fond et j’étais même souvent la petite vedette de service. Ça plaisait aux filles alors je me dévouais sans problème !


Oui, j’étais un jeune con et elle une jolie prof, mais une jolie prof de type peau de vache qui passait ses nerfs régulièrement sur ses élèves… le genre trop facilement débordée qui n’a plus d’autre choix que d’être tyrannique… pas vraiment le style de profs qu’on aime !


Mon esprit divague un peu… Nostalgie, nostalgie… Lycée Paul Prunier, seconde 16… Lucie, ma petite copine blondinette… il y a déjà 25ans ! Alors la mère Belette, elle peut avoir combien ? 60 ? 65 ans ?


Mais, j’ai une voiture à vendre moi ! Je dois revenir au présent qui fait bouillir ma marmite.


Présentation détaillée de la brochure de la Brio pour commencer !

Mais, sur un mauvais pressentiment, je lui dis avoir oublié mes cartes de visite pour retourner dans le petit bureau que j’ai encore le plaisir d’occuper. Pas question de lui donner ma vraie carte ! Si le lycée Paul Prunier refait irruption dans sa tête, ma vente va faire pschitt !

En revenant, je lui présente la carte d’un ex-collègue sur laquelle j’ai rayé le numéro de portable pour écrire le mien. Je lui signale dans un sourire un récent changement de numéro et le tour est joué ! Je suis presque content de moi !


Tout va bien ! Elle ne me reconnaît pas… alors autant que ça dure, non ? Je n’ai vraiment aucune envie qu’un mauvais souvenir annule ma première vente potentielle du mois ! Il faut se battre avec toutes les armes qu’on a !

De son côté, apparemment, toujours pas de flash mais j’imagine – et je sais – qu’entre mes quinze ans et ma quarantaine débutante, j’ai forcément changé encore bien plus qu’elle pendant le même laps de temps. Dans mon esprit, je vois le risque s’éloigner.

On papote encore un peu devant les jolies photos de notre nouvelle Brio et le rendez-vous est rapidement fixé à samedi à 14 h pour un essai. Je passerai la prendre chez elle, ça l’arrange et moi aussi. Autant éviter que le patron m’appelle « Laurent » devant une cliente qui a reçu en cadeau de bienvenue une jolie brochure sur laquelle est agrafée une carte au nom d’un certain « Patrick ».




Samedi, 14 h 15



Après avoir roulé deux kilomètres pour lui montrer les fonctions principales de la future prunelle de ses yeux (mon vœu le plus cher à l’instant « t » si je veux espérer garder mon poste un peu plus longtemps), je me gare pour qu’elle prenne les commandes.

Réglage du siège, des rétros, démarrage un peu chaotique… On est reparti en mode mamie… Elle roule très calmement et ça me permet de la détailler un peu plus. Je peux lui parler sans regarder la route. Ça me change des jeunes permis fougueux qui viennent essayer une voiture juste pour voir comment elle accélère.


Elle a toujours ce joli visage fin avec un petit nez en trompette qui se fronce quand elle parle. C’est triste que la peau vieillisse tant chez certaines femmes, celle de son cou est vraiment fatiguée. Le reste a vieilli aussi… la peau de ses petits bras tachetés de rousseur arrive, malgré leur maigreur, à pendouiller légèrement, les biceps et les triceps ont foutu le camp. Ma foi, c’est mon ex-prof détestée et sa décrépitude me fait presque rire.


« Non non… Stop ! Je dois rester sérieux, oublier la mère Belette et penser juste à la vente. »


Mais elle conduit si lentement… je m’ennuie… et je continue mon inventaire : ses cuisses malingres, mouchetées elles aussi d’éphélides, sont un peu écrasées sur le siège mais je vois bien qu’elles sont tout aussi flasques que ses bras quand son pied change de pédale. Elle a même des taches de rousseur sur les genoux et sur ses mains osseuses agrippées au volant. Je finis par me demander si elle en a sur tout le corps.

Elle se tourne un peu vers moi à l’occasion d’un stop et son corsage légèrement décolleté s’entrouvre avec un angle assez favorable. Voici, sous mes yeux, un peu de dentelle blanche avec dedans une petite chose pâle et fripée. Rencontre avec un sein du troisième type… euh… âge. « Pas de fou-rire Laurent ! Pas de fou-rire ! » Je m’engueule intérieurement.


Ouf ! La promenade de lenteur se termine. Madame se gare devant chez elle, madame sort de voiture, elle a le sourire et moi je me greffe celui du vendeur, affable mais carnassier, concentré.


Finie la rigolade ! Concentration ! Le plus dur reste à faire… vendre !




Samedi, 14 h 40



La discussion bat son plein, on arrive dans la zone délicate… l’argent !



Mamie rouquine ne fait pas la fière mais moi non plus… je sens bien que maintenant, elle en a vraiment envie de cette voiture… mais elle, je sais qu’elle sait que c’est la crise et que, star ou pas star, moi, dans mon petit garage, j’ai vraiment un besoin vital de vendre…


Ah ? Elle me propose un café… diversion ? Madame est rompue aux techniques d’achat ? Je dois vraiment me méfier ?


Voilà donc qu’elle s’éclipse dans sa cuisine et que j’entends la machine de monsieur George What else ? émettre deux fois son doux bruit mélodieux. Puis la petite Belette revient avec un beau plateau, deux tasses blanches, du sucre dans un petit pot assorti, des petits gâteaux… et… J’hallucine ou pas ?… Plus de soutien-gorge !


Non, je ne rêve même pas ! Quand elle s’est penchée pour poser le plateau sur la table basse, j’ai bien vu pendant cinq secondes deux petites loques pendouillant mollement mais absolument aucune trace de la dentelle blanche entraperçue lorsqu’on était dans la voiture… Elle l’a laissé où ? Dans le micro-onde ?


Elle me sourit, elle attend… Elle est contente de son coup ? Déstabilisation du vendeur ? Je crois que je dois vraiment être sur mes gardes. La Belette est rusée, c’est bien connu et ça se confirme. Alors restons pro… réaction du vendeur ! Je la ramène sur l’essentiel ! Moi aussi je sais faire diversion, je la recentre sur ses sensations au volant, les moteurs, les finitions, les options, les couleurs, elle doit rêver, elle doit se voir dedans, elle doit faire des choix… elle doit faire monter la facture elle-même pour que je puisse la baisser un peu… Elle doit avoir envie !


Elle doit… De quoi a-t-elle vraiment envie à se pencher comme ça pour que je voie le ballottage de ses gants de toilette – avec option « taches de son » intégrée – dans son décolleté osseux ? Et un petit mouvement supplémentaire et je viens de découvrir les grandes aréoles qui lui mangent la moitié du sein !

« Mais elle croit quoi ? J’ai vendu des voitures à des femmes mille fois plus belles qu’elle… et sans faire plus de remise et sans à-côtés et… elle croit quoi là ? Oh ? Elle pète les plombs ? » Sa petite main maigre est passée de la brochure à mon genou… et ses yeux qui brillent… « Merde ! Qu’est-ce qu’ils sont beaux ses yeux… Merde !… » Il se passe quoi… sa main… ses yeux… son sourire… sa bouche qui s’approche…




Samedi, 18 h



Anne est enroulée dans son peignoir et moi à nouveau dans mon costume sérieux… on s’embrasse sur le pas de la porte… j’ai vendu une voiture… j’ai baisé une ex-prof… j’ai dépassé la remise autorisée… j’ai fait l’amour à une mamie… déchaînée… j’ai la tête qui tourne… je vais sûrement me faire virer… ma bourse va se vider, au singulier après le pluriel… je m’en fous, je plane… elle est belle… je plane…


Je roule… pilote automatique… rien dans la tête… sauf des images improbables…


Sa peau flasque et tachetée de rousseur : douceur extrême de la soie…

Ses côtes saillantes, ses épaules pointues : brindille cassante, délicate vulnérabilité…

Ses petites mamelles pendantes ballottant en tous sens : mouvante et émouvante fragilité que j’aspire… que je malaxe… que je presse… que je trais !

Sa chatte rousse, odorante et usée : liqueur abondante que je déguste, tunnel de chair que je pénètre… que je remplis…

Et ses yeux… ses yeux… ses yeux… sa bouche… son nez… sa voix… ses gémissements… ses mots… sa peau… sa rousseur… son sourire… sa joie… son rire… ses yeux… et encore ses yeux… je m’en nourris… je la respire… on fusionne !




Dimanche, 9 h



On dit que les rousses sont des sorcières… que leurs taches de rousseur sont autant d’âmes qu’elles ont volées… Les légendes ont la vie dure et ce matin, seul dans mon lit, celle-ci trotte indéfiniment dans ma tête embrumée… Ma rouquine à moi est une sorcière, une vieille sorcière, une belle sorcière.


Et si « sexe sans conscience n’est que ruine de l’âme », je lui donne la mienne, elle sera sauvée mais pas volée.