n° 15681 | Fiche technique | 19389 caractères | 19389Temps de lecture estimé : 12 mn | 06/07/13 |
Résumé: Je déteste le désordre public et les déprédations d'immeubles. C'est pas une meuf qui me fera changer d'idée. À moins que... | ||||
Critères: fh inconnu uniforme pénétratio | ||||
Auteur : Olaf Envoi mini-message |
Deux jeunes majeurs ont été interpellés en fin de semaine par les gendarmes. Ils sont suspectés d’être les auteurs de graffiti peints sur des bâtiments publics et des édifices municipaux. Jeudi, vers 16 h, un riverain assiste au tagage du mur d’une maison et fait appel aux militaires qui localisent le jeune. Celui-ci tente de s’enfuir en dissimulant les preuves. Une bombe de peinture noire est retrouvée sur lui. Un deuxième homme a également été interpellé. Ils seront convoqués ultérieurement devant la Justice pour répondre de leurs actes.
Voilà le genre de fait-divers qui ne paie pas de mine. Mais quand on sait ce qui se passe en amont, je dis « chapeau, les collègues ». Enfin, collègues au sens large du terme. Sans être gendarme, je fais partie d’une unité nouvellement créée pour lutter contre les déprédations. Les flags sont de plus en plus difficiles à réaliser et les avocats de plus en plus retors. Résultat : même pris la bombe à la main, les salopards sortent vierges du tribunal, si on n’arrive pas à prouver plus que la possession d’un pot de peinture.
Je ne peux pas dévoiler nos méthodes. Mais on assure sur tous les fronts : graphologie, expertise artistique, analyses chimiques, traces biologiques, la totale. Même l’ADN. Parce qu’il faut dire qu’on trouve de tout sur les bombes de peinture. À croire qu’il s’en passe des belles avec ces objets, avant et après les déprédations.
Même si je n’excuse rien, je peux comprendre. Il doit y avoir quelque chose de jouissif dans l’interdit. J’imagine facilement l’excitation qui suit l’accomplissement de l’œuvre.
C’est justement pour en savoir plus en la matière que je vais examiner de près les graffiti dont parlait le journaliste. Un vrai boulot de pro. Je veux dire, de la part des gendarmes. Ils devaient suivre les gars à la trace depuis des semaines. Chaque tag a été marqué selon notre code habituel. Certains plusieurs fois, dans l’ordre croissant de détection. Les jeunes n’avaient aucune chance de s’en sortir.
Parmi toutes les marques apposées sur le mur, je repère toutefois un graffiti qui me semble différent des autres. Et qui n’est pas encore recensé. Les collègues ont dû l’attribuer à un autre groupe de marques. Mais, pour moi, c’est évident : il ne vient pas de la même main.
Avec mon expérience, j’oserais même dire qu’il est plus… féminin. Les volutes et les rondeurs des traits ont quelque chose de fascinant. C’est la première fois que je ressens un truc pareil.
Je suis un mec assez carré de nature et ces déprédations m’énervent. Rien contre le fait de s’éclater ; mais pourquoi foutre un mur en l’air pour ça ? Sauf que là, il y a plus qu’un marquage banal. La ligne, très simple, exprime des trucs. Enfin, cela m’évoque des trucs. Et pas que dans la tête. Ce tag, qui n’a rien de figuratif, est juste bandant.
J’ai envie d’en avoir le cœur net, de prouver mon hypothèse. Je me dis qu’il y a peut-être une chance pour que l’artiste vienne poser une nouvelle marque prochainement. Cette appropriation par strates de l’espace citadin est un mode de fonctionnement habituel. Avec un peu de patience, il ou elle devrait me tomber dans les mains.
* * *
Je n’ai pas besoin de planquer bien longtemps. Le lendemain soir, vers vingt-et-une heure, une moto se pointe au ralenti, lumières éteintes. Le motard cale la bécane, sort un sac en plastique de dessous le siège et se glisse discrètement jusqu’à la façade de la maison que j’observe.
Sans enlever son casque, il commence un étrange rituel, sans doute pour bien répartir les couleurs dans les bombes. Puis tout s’accélère. En un rien de temps, le contour du graffe est dessiné. Déjà, une autre bombe crache son poison coloré.
Je tiens mon flag. D’un bond, je quitte le porche sous lequel je m’étais caché. En quelques enjambées je suis derrière le sagouin, que j’attrape par le haut du blouson.
Plutôt prêt à une réaction violente, je suis désarçonné par son attitude impassible et sa manière de m’interpeller.
Quand je disais qu’on n’avait pratiquement aucun moyen d’agir contre ces jeunes… Encore un qui connaît la loi mieux qu’un juge et qui sait qu’à part téléphoner aux flics, je suis impuissant.
Impuissant et sous le coup lorsque je vois de longs cheveux bruns entourer le visage qui émerge du casque.
Mon intuition était donc bonne : le graffeur est une fille. Et pas un thon : une belle nana, avec un sourire enjôleur et des yeux rieurs. J’essaie de prendre un ton autoritaire, histoire de lui faire comprendre que ce qu’elle fait est non seulement illégal, mais inacceptable. Face à son air narquois, je me sens néanmoins très con avant la fin de la deuxième phrase.
Cassé ! Je prends sa main. La combinaison de chaleur, de douceur et de fermeté achève d’instiller le doute en moi. Sans aucun moyen de l’empêcher de finir son œuvre, pourquoi ne pas essayer d’en percer les motivations ?
Après une courte méditation, histoire de retrouver son mode créatif, la fille met la dernière main à son tag. Ses gestes vifs et précis tiennent plus de la danse que du dessin. Lorsque tout est fini, elle reste immobile face à son œuvre. Puis, lentement, elle se retourne avec une étrange lueur dans le regard. Semblable à celles que j’ai parfois vues dans les yeux d’une femme après l’orgasme.
La façon qu’Aurélie a de déposer ses bombes les unes à côté des autres sur le trottoir confirme l’impression de sensualité qui se dégage de son attitude. Je remarque alors que les sprays que cette fille utilise sont plus minces que ceux que je retrouve d’habitude. Ils doivent juste remplir le creux de sa main. Voilà l’explication de ce que j’ai pris pour un rituel au début du graffage. On est à fond dans le sensuel, la caresse de l’objet d’où va gicler la peinture, la communion entre l’oblong fécondant et l’élan créatif féminin.
« Punaise, mais qu’est-ce qui m’arrive ? Alors que je devrais remettre cette nana sur le droit chemin, je me laisse remplir la tête. Le monde à l’envers. »
Avant que j’aie le temps de reprendre contenance, Aurélie me donne rendez-vous dans un hôtel chic, à quelques pas d’ici. Si je ne traîne pas, dit-elle, on devrait encore pouvoir manger chaud. Elle démarre sa moto sans attendre ma réponse.
* * *
J’ai de la peine à la retrouver parmi les convives. Alors que je cherche une fille en blouson de cuir avec des traces de peinture sur les doigts, je vois une princesse, habillée d’une élégante robe rouge, me faire signe au fond de la salle.
C’est donc pour cela qu’elle a échappé aux collègues jusqu’à maintenant. Face à un tel numéro, ce n’est plus de l’intérêt que je ressens, mais de la fascination. Surtout que je n’ai jamais eu l’occasion de mettre les pieds dans une telle auberge. En un tour de main, la belle m’a mis en état d’infériorité. Je n’en sortirai pas indemne.
Elle m’explique alors sa vision de son art, le travail sur le dessin, les gestes sans cesse recommencés pour arriver à la pureté de la ligne, à la rondeur voulue, à la plénitude des formes. Les heures de préparation pour atteindre le niveau souhaité, celui qui apporte la reconnaissance des autres tagueurs.
Elle me parle de ce milieu fermé, des codes, des signes de reconnaissance laissés autour des graffes.
Elle raconte aussi ce qu’elle ressent juste avant de commencer, la main sur la bombe. Cet étrange et incomparable désir qui naît, puis submerge le corps et l’esprit avant de se prolonger dans le geste graphique.
En un tour de main, cette fille me décode comme aucune autre avant elle. Ce qu’elle partage avec moi me permet d’entrer progressivement dans son monde de sensualité, d’émotions intimes, de sensations exacerbées. Je découvre la mise en danger jouissive qui précède le jaillissement de la peinture. Tant de choses qui sont étrangères à mon univers trop policé.
Cerise sur le gâteau, elle semble prendre plaisir à échauffer mes sens de tous ses charmes. Je ne doute pas être en train de participer à un dîner de con d’un genre particulier, comme si elle trouvait en ce beauf que je suis un inculte à convertir. Ceci dit, aussi longtemps que ma compagnie lui convient, ça m’est égal d’être le jouet par lequel elle va assouvir ses fantasmes. Je n’attends rien de plus que de suivre entre ses cuisses le même chemin que sa bombe de peinture pendant sa préparation au graffage.
Je vois d’ici la tronche des collègues en découvrant mon ADN sur un des principaux indices à charge !
Aurélie me tire de ma rêverie et résume en trois phrases son programme de la nuit.
Voilà qui a le mérite d’être clair ! Je dépose près de la moitié d’un mois de salaire sur la table pour régler notre repas, puis la chambre qui va abriter nos ébats. Indifférente à ces basses contingences, elle s’amuse à décrire ce qui la tente en moi et ce qu’elle imagine possible d’en faire, comme elle esquisserait le pourtour d’un nouveau graffiti sur une façade. J’en conclus qu’il ne tient qu’à moi de transformer l’étincelle en autodafé sur lequel réduire en cendres mes blocages et mes frustrations.
Mes premiers pas vers la libération de mes inhibitions se font cependant d’une tout autre manière. Le seul défaut que j’ai repéré chez Aurélie, c’est la cigarette. Elle est d’ailleurs sortie plusieurs fois de table pour assouvir son vice. Une dépendance rédhibitoire pour le sportif que je suis.
Emporté par son enthousiasme sensuel, je fais l’impasse sur ce défaut en sortant de table et la prends dans mes bras. Impossible lui cacher l’état d’excitation que provoque ce contact. Elle ne se prive pas d’en prendre la mesure à pleines mains, les seins pressés contre mon torse. Apparemment satisfaite, elle me tend ses lèvres.
Faisant fi de tout scrupule hygiénique, je laisse nos muqueuses s’accoler, nos langues se trouver, nos salives se mélanger. Objectivement, pour quelqu’un de si sensible que moi, le cocktail de saveurs qu’offre sa bouche est corsé. Contre toute attente, l’intense attrait érotique de cette conjonction me fait dépasser ma répulsion. Aussi longtemps que dure ce premier baiser, je jouis sans arrière-pensée de ce que nous partageons, de nos corps qui s’unissent, des émotions qui montent en moi, de mon envie d’elle que son abandon décuple.
Quelques heures plus tôt, j’aurais été terrassé par un haut-le-cœur à la seule idée de goûter à sa salive de fumeuse. C’est tout le contraire qui se produit. Dès la seconde où j’entre dans ce baiser vorace, quelque chose se libère en moi, une porte s’ouvre sur un monde inconnu de sensualité et de plaisirs débridés.
Je ne suis plus très sûr du détail de ce qui se passe ensuite. Seules quelques images intenses, quelques sensations troublantes sont aujourd’hui encore au fond de ma mémoire.
D’une manière ou d’une autre, elle réussit à débrancher cette partie raisonnable de moi qui, d’habitude, dit « non, attention, pas maintenant ! ». L’entendre murmurer quelque chose comme « tout, tout de suite et à donf, s’il te plaît ! » me donne le coup de grâce et s’impose comme une renaissance.
Après ? Eh bien, disons qu’elle me baise. Savamment, longuement, méticuleusement, sans une once de romantisme, ni fioritures. Nous lançons nos corps à l’assaut l’un de l’autre, pour qu’ils se gavent du désir le plus brut, des plus animales pulsions. Nous en jouissons d’une incomparable manière.
Plus rien d’autre n’a d’importance que ce que ma queue arrive à lui faire découvrir, que ce cul qu’elle me tend en suppliant de la remplir profondément.
Le besoin de jouir suinte par tous nos pores, par tous nos orifices, avec ce que cela implique d’exhalaisons en tous genres. Je me découvre friand du parfum de son corps excité. Comme si sa sueur de femelle, imprégnée de la nicotine qui sature ses émonctoires, pénétrait en moi de la plus insidieuse manière. Comme si ces miasmes prenaient peu à peu le pouvoir sur ma volonté et sur ma virilité.
Je bande formidablement. Mon sang pulse dans ma queue et la gonfle au-delà du raisonnable. De grosses gouttes de sueur coulent sur mon torse et sous mes bras. Elle les lèche avec application, sans pour autant cesser de m’exciter par de surprenantes secousses du bassin. Comme un étalon fou de désir, soumis à la violence de son instinct copulatoire, je lance ma verge triomphante à la recherche de son fourreau humide et étroit. Trouvant entre ses fesses de quoi apaiser mes tensions génitales, je la transperce d’impérieux coups de reins. Par sa manière de m’accompagner, de s’offrir, elle me fait abandonner tout reste de civilité.
Alors que je m’active en elle, je contemple les plus infimes détails de ce que je pénètre, de ce que je triture, de ce que je fais couler, gicler, de ces formidables manifestations corporelles dont elle me rend coupable de la plus perverse manière. Je me délecte de la vision de nos chairs frémissantes, épanouies, béantes, embellies par l’intensité du désir, impatientes de voluptés toujours plus inattendues.
Longuement, nous nous battons, nous poussant l’un l’autre jusqu’à cette limite de la souffrance que seules les plus folles pulsions permettent de supporter. Lorsque je faiblis, Aurélie m’apprend de nouvelles manières de la mater. Jamais elle ne se soustrait à mes regards libidineux. Bien au contraire, de manière parfaitement obscène, elle attire mes mains vers ses plis, vers ses fentes, vers ses bourrelets, sublimés par la grâce de mon envie en autant de promesses de félicité. Le moindre signe de mon excitation, si bestial soit-il, est reçu comme un hommage à sa féminité.
Le moment venu, en pleine possession de ses plus intimes relâchements, je lui fais subir les derniers outrages. Elle me rend coup pour coup, jusqu’à ce que nos carcasses s’embrasent. Seule la quête du plaisir compte encore. Plaisir de posséder, de fouiller, de perforer, puis de me vider longuement en elle, en accompagnant chaque saccade de ces bruyants grognements qui caractérisent l’instant suprême du rut.
Nous restons imbriqués aussi longtemps que je trouve la force de me répandre au plus profond de son vagin. Une fois extirpée la dernière goutte de sperme de mon bas-ventre, exhalé le dernier cri de jouissance, je m’écroule sur elle.
Juste avant de plonger dans un coma post-coïtal, je sens ses bras se refermer autour de ma taille. Je me surprends à adorer l’odeur si particulière de son haleine lorsqu’elle pose ses lèvres sur ma bouche. Une étrange tension fait immédiatement regonfler mon sexe, que je croyais hors-service pour longtemps.
* * *
Ce sera ma dernière perception d’Aurélie. Elle est déjà retournée à ses études, sans laisser d’adresse, lorsque j’émerge le lendemain matin, la bouche pâteuse, le cœur en loque et mes certitudes piétinées. En guise de cadeau d’adieu, elle a dessiné son tag au feutre indélébile sur mon bas-ventre.
Depuis cette nuit, cette signature ne s’étale toutefois plus sur les murs de la ville. À chaque instant de libre, je pars à la recherche d’un autre signe de sa main. Je finis par découvrir sa nouvelle marque dans un autre quartier. Pendant le repas, elle m’avait expliqué en changer à chaque fois qu’un amant sublimait l’étincelle. Quel plus beau compliment espérer d’une fille de cette trempe ?