n° 15799 | Fiche technique | 10153 caractères | 10153Temps de lecture estimé : 6 mn | 12/09/13 corrigé 10/06/21 |
Résumé: Lit et ratures. | ||||
Critères: grp voisins jeu humour | ||||
Auteur : Samuel Envoi mini-message |
Ils étaient tous les quatre d’une liberté totale. Les deux filles, Mylène et Sandra, dormaient ensemble et se faisaient prendre le matin par Larry et Ben, alternativement avant le petit déjeuner. Les deux garçons invitaient le soir un copain de virée et formaient un cercle étroit. Et le comble, c’est que tous les quatre s’adonnaient régulièrement à la masturbation individuellement ou mutuellement. Ils avaient essayé toutes les pratiques, et même la sodomie sous hypnose. Leurs orifices étaient devenus tellement sensibles qu’un simple canule introduite provoquait une vague d’orgasmes, que la vision d’un olisbos générait d’humides tremblements, que l’odeur du gingembre déchaînait des érections douloureuses et un durcissement des tétons.
Ce soir-là, les quatre étaient enfoncés dans leurs fauteuils en osier tressé et laissaient voir des sexes entrouverts pour les unes, érigés pour les autres. Mais personne ne passait à l’acte. La discussion avait tourné autour de l’œuvre de Mallarmé. Larry avait repris ces deux vers :
Le vierge, le vivace et le bel aujourd’hui
Va-t-il nous déchirer avec un coup d’aile ivre
Sandra : — Un cygne pris dans la glace reprend conscience de sa condition et fait un ultime effort pour se libérer. Un peu comme nous, n’est-ce pas ?
Ben : — Si on se suicidait en baisant ? La Grande Baise dans le style de La Grande Bouffe.
Mylène : — Il y en aura toujours un des quatre qui le fera de mauvaise grâce, juste pour faire plaisir.
Sandra : — Il faudrait revenir à Baudelaire :
La vie n’a qu’un charme vrai, c’est le charme du jeu…
Larry : — Eh bien soit, jouons !
Ben : — Oui, à la roulette russe !
Mylène : — Le strip-poker, on a déjà donné…
Sandra : — Allons, un peu d’imagination. On peut détourner le jeu pour le rendre sexuel.
Et c’est ainsi qu’ils jouèrent d’abord au Cluedo.
Larry : — Mademoiselle Rose sodomise le colonel Moutarde dans la cuisine avec une carotte ?
Ben : — Non, ce n’est pas cela.
Mylène : — Mademoiselle Pervenche masturbe le professeur Violet avec une clef anglaise dans le garage ?
Sandra : — Bravo. Bien joué, Mylène.
Ensuite, ce fut le Monopoly. La partie se termina quand Larry installa un hôtel de passe rue de la Paix et quatre maisons closes aux Champs-Élysées. Trop cher, les autres n’ont pu suivre qu’en s’acquittant d’une fellation sur le vainqueur. Ensuite, la Pursuit fut tellement triviale que tout le monde baisa avec tout le monde dans une fringale de sexe inégalée depuis le début de la soirée. Et on installa la roulette.
Ben : — Russe ?
Sandra : — Non, monégasque.
Mais dès que le croupier (rien que le nom déjà donnait des frissons) annonça : « Rien ne va plus ! » ce fut l’orgie, d’autant que le copain de virée habituel, Jérémie, était arrivé et qu’il n’avait pas déchargé depuis la dernière fois.
Mylène : — Depuis la dernière fois !
Jérémie : — Depuis hier, quoi.
Mylène : — Oui, mais quand même. Tu te rends compte ! Depuis la dernière fois !
Sandra : — Mais maintenant qu’on a trois garçons, on pourrait peut-être tenter un cache-cache géant dans tout l’immeuble ?
Larry : — Génial. On se cache où on veut, chez un particulier ?
Sandra : — Exactement, tous les résidents ici sont cools. Ils connaissent nos goûts pour la luxure. Et ils apprécient qu’on ne se cache pas dans nos ébats.
Ben : — OK, celui qui est trouvé est baisé sur le champ par celui qui colle.
Sandra : — C’est Jérémie qui est arrivé le dernier…
Mylène : — Et celui qui n’a pas tringlé depuis la dernière fois…
Sandra : — Alors, c’est lui qui s’y colle !
Jérémie : — Oui, mais si je trouve une fille ?..
Ben : — Oui, Jérémie n’est pas bi.
Larry : — Pour une fois, tu peux faire un effort. J’aime pas les mecs sectaires.
Jérémie : — Je pourrais au moins les prendre par-derrière ?
Sandra et Mylène : — Mais oui !
Jérémie : — Je compte jusqu’à cent.
Sandra sonna au troisième chez les Malraux, un couple de charcutiers sympathiques qui trouvèrent le jeu fort à leur goût. Elle se cacha sous le lit. Mylène chercha refuge au quatrième, où les Camus, professeurs des écoles, l’accueillirent avec plaisir. Elle se planqua dans la baignoire. Ben se retrouva au sixième sous les jupes de mademoiselle Duras, qui avait beaucoup de mal à garder son sang-froid. Et Larry descendit chez la concierge, madame Yourcenar, au rez-de-chaussée, bien dissimulé dans le local des poubelles.
Le problème, c’est que Jérémie avait tellement peur de tomber sur une fille qu’il ne trouva personne.
Ainsi, les Malraux se mirent au lit et, émoustillés par le jeu de cache-cache, s’envoyèrent en l’air de la plus belle des façons. À plusieurs reprises, Sandra voulut participer, mais aussitôt les charcutiers criaient : « Attention, il va vous trouver ! » Alors, elle reprenait sa place sous le lit et se contentait de laisser sa main divaguer sur les deux corps en sueur.
Mylène, dans la baignoire des Camus, assista avec délice à leur toilette intime, et en fin de soirée, madame le professeur entra même dans la mousse tiède pour quelques privautés. « Si jamais il entre dans la salle de bain pour vous trouver, il sera trompé car je lui dirai : enfin, jeune homme, vous voyez bien que je suis toute nue ! »
Ben resta toute la soirée sous les jupes de mademoiselle Duras, qui souhaitait bien qu’on ne le trouvât pas, tant lui plaisait le programme de télévision en langue française et le programme de la soirée en langue arabe.
Pour Larry, l’odeur devint un peu dérangeante dans le local des poubelles, mais madame Yourcenar y faisait des allers-retours fréquents qu’elle agrémentait de son parfum naturel rehaussé par Pétrole Bleu de chez Gaultier. Pas Théophile : Jean-Paul. Mais c’est bien quand même. Elle expliquait :
Il répliquait :
Elle concluait :
Jérémie tenta quand même de sonner à une porte, celle de monsieur et madame Pagnol, des retraités du Sud :
La nuit, un instant perturbée au point de ne pas sortir sa lune, reprit son cours. Le jeu de cache-cache se prolongea jusqu’au petit matin, Jérémie ne faisant aucun effort pour accélérer le rythme de la partie. Pas très doué, mais tout de même pas sourdingue, il se guida sur les cris d’orgasme qui s’élevaient tantôt d’un étage, tantôt d’un autre. Il finit donc vers six heures trente à trouver le dernier larron.
On en était là, devant un petit café fumant, quand on entendit le laitier. Sandra proposa le jeu du domino-domina. Nus, ils se déguisèrent en dominos portant un chiffre sur la bouche et un autre sur le sexe. Le laitier, monsieur Paul Claudel, s’amusa donc à agencer les cinq amis. Ainsi Mylène avait dans sa bouche le sexe de Ben qui supportait en son fondement la pine de Jérémie, lui-même tête-bêche avec Larry qui avait un doigt dans Sandra. Il arrosa le tout de lait de façon que les numéros noirs ressortent davantage. Et tout l’immeuble, attendri et reconnaissant, s’attroupa devant les jolis dominos endormis et entourés de chats tout aussi admiratifs.
Madame Malraux : — On dirait un cygne pris par les glaces…
Monsieur Pagnol : — Alors, vous aussi… Cela vous fait penser à Mallarmé…
Madame Yourcenar : — Inévitablement…