n° 15862 | Fiche technique | 8552 caractères | 8552Temps de lecture estimé : 6 mn | 23/10/13 |
Résumé: La rencontre d'une femme qui va bouleverser à jamais ma vie ; les premiers pas. | ||||
Critères: fplusag extracon amour nopéné nonéro | ||||
Auteur : Lamoureux (L'amoureux) Envoi mini-message |
Cet amour est mort, je le sais. Pourtant il vit au fond de moi ; ce qu’on appelle un souvenir impérissable. Un moment de notre vie à tous les deux. Tout cela est si loin aujourd’hui. Pourquoi le coucher sur le papier alors ? Il me semble que je n’étais pas heureux alors, mais ce fut un bel amour, qui mérite mieux que de rester enfoui à jamais dans nos mémoires. Ces quelques flashes qui demeurent teintés d’érotisme, de désir, et de plaisir. Tu fus la femme de mes vraies premières fois, voilà pourquoi.
Vingt ans déjà.
J’étais un jeune homme un peu naïf avec pourtant, toute l’arrogance de sa jeunesse. Tu étais une jeune et belle femme. Dix ans nous séparaient, ou nous ont réunis je ne sais plus. Mariée, deux enfants, une vie qui n’aurait pas fait rêver la jeune fille que tu fus, une vie que j’ai bousculée, et pourtant…
Mon premier employeur, mon premier CDI, même si je ne le savais pas encore, puisque j’étais étudiant. C’est toi qui m’as formé. Je ne connais pas le coup de foudre, je ne sais pas si c’est ce que j’ai vécu ce jour-là. Mais lorsque j’ai croisé tes yeux, j’ai eu ce sentiment que rien jamais ne pourrait m’en détourner. Tout au long de cette journée, et les jours qui suivirent, alors même que j’avais compris l’essentiel du poste, je passais mon temps à t’interroger, pour que tu me confirmes que je faisais bien, et nos regards se croisaient, et j’étais heureux.
Tu étais belle, je n’étais pas laid. Très vite nous avons formé un duo, plein de discours enflammés pendant les pauses, de joie, et de rires, de confidences. Et puis je crois que nous sommes devenus amis ; parce que tu étais mariée, et que j’avais une haute estime de l’amour, et plus encore de l’amour que je te portais : il ne pouvait se satisfaire d’une aventure extra-conjugale.
Puis tu m’as fait connaître ta famille. Après tout j’étais un ami ; et c’est ainsi que je suis devenu l’ami de toute la famille, jouant avec les enfants, plaisantant avec le mari devant un verre, et me consumant d’amour pour toi.
Et parce que tu aimes les hommes et que tu aimes séduire, je ne peux croire que tu ne le savais pas dès le premier jour. J’avais le rôle de l’amoureux transi, qui ne connaît pas les femmes ; tu avais le rôle de la femme qui a croqué les hommes, sûre d’elle ; qui a connu des hommes à genoux devant elle lorsqu’elle les a quittés ; qui ne s’est jamais résolue à ne vivre que pour un seul. Aujourd’hui pourtant tu sais que ce n’est pas la recette du bonheur, mais quelle est-elle ?
Et puis voilà un soir, nous rentrons chez vous, nous avons bu tous les trois, lui plus que de raison s’endort dans le canapé ; les enfants dorment dans leur chambre. Tu te plains depuis plus d’une heure d’un mal de tête persistant. Quand commence le jeu ? Je ne sais pas. Tu me dis que ces migraines ne passent que par un massage du cou. Je te crois. Nous ne buvons plus. Nous sommes probablement ivres, mais pleinement conscients l’un et l’autre. Il y a quelques silences, des regards. Il dort toujours sur le canapé. Tu te lèves vers la cuisine ; je te suis. Et puis nous parlons un peu l’un à côté de l’autre, il ne fait pas froid dehors, c’est agréable. La discussion revient sur ta migraine.
Je me propose :
Ce oui inconscient faisait-il partie de tes armes ? En tout cas nous reprenons la conversation, mais l’envie est présente des deux côtés c’est sûr.
Et puis soudain tu me dis :
J’approche de toi ; tu es toujours à la fenêtre, le regard qui se perd… Je suis derrière toi, mes mains vont se poser sur toi pour la première fois, elles vont ressentir le grain de ta peau, apprécier ta chaleur ; elles se posent au ralenti à la base de ton cou. Nos respirations semblent suspendues ; je m’applique consciencieusement, en ne profitant pas complètement de l’instant : je veux que ta migraine disparaisse. Puis elles s’emparent de tes épaules et reviennent sur le cou, je ne les commande plus, je ne réfléchis plus ; toute mon intelligence, toute mon éducation, mon savoir, tout cela n’est plus : mon être se résume à deux mains qui vont et viennent sur ta peau, c’est le deuxième coup de foudre. Elles sont amoureuses de ta peau, comme je suis tombé amoureux de ton regard magnifique, et puis du reste de ta personne.
Je sens ton souffle s’accélérer, je n’ai plus conscience du mien ; mon cœur s’est emballé aussi. Nos corps se sont rapprochés jusqu’à se toucher. Ton bassin commence à onduler, il vient toucher le mien, s’écarte et se puis se colle. Je me contrôle de moins en moins, mes mains s’enhardissent, et puis deviennent folles, elles courent vers tes seins. Je veux ta bouche. Je veux t’embrasser, te forcer un peu à te retourner. Tu comprends que la situation t’échappe. Je n’ai pas conscience du danger.
Me voilà calmé. Comme vidé.
Nous allons retourner dans le salon. Sans un mot. Nous venons de franchir une frontière.
D’autres barrières vont tomber. Il est six heures du matin. Nous nous asseyons, prenons un café. Tu me dis que ta migraine est passée, je te dis en souriant que ce fut un plaisir, et que je veux bien recommencer à ton prochain mal de tête ; tu joues l’offusquée.
Nous sommes déjà amants.
Les jours qui vont suivre me verront heureux et enthousiaste. Je veux croquer la vie. Je suis amoureux. Je dois te le dire.
Prochaine soirée : nous sommes chez des amis communs. Nous sortons. Il monte dans la voiture de ton frère qui nous a accompagnés, tu montes dans la mienne.
Nous n’avons que quelques minutes pour rejoindre votre appartement. Nous avons une folle envie d’échanger sur ce qui nous arrive depuis cette fameuse soirée. Depuis les regards échangés ne sont plus les mêmes, je suis fou de toi, je ne te laisse pas indifférent : je n’ai pas un physique de rêve, mais je crois bien que ma séduction se situe ailleurs : tu aimes toutes ces petites attentions qui sont les miennes, mon langage feutré, mon comportement d’un autre temps. Tu m’as ainsi confié que j’étais le premier à t’ouvrir la portière pour que tu montes et descendes de la voiture. Que tu ne pensais pas trouver dans un homme plus jeune que toi autant de galanterie, puisque déjà elle semble avoir abandonné ceux de ta génération.
Tu ne dis plus rien. Tu ne sais plus quoi dire. Nous roulons. Je suis heureux, débarrassé de ce poids énorme. Tu sais maintenant, tu l’as toujours su. Mais tu ne peux plus faire semblant.
Nous sommes amants. Nous arrivons chez vous. Ils sont installés depuis un certain temps. J’ai roulé très lentement. Cela attire le doute soudainement. Tu es bouleversée et le caches mal, je suis plein d’enthousiasme, de joie, je suis heureux et le montre. Il a compris qu’il s’était passé quelque chose ce soir-là.
Je vous quitte dans la nuit, je monte dans ma voiture. Sur le tableau de bord, il y a une carte postale. Je me souviens : tu as prétexté avoir oublié quelque chose dans le coffre, et tu es redescendue à ma voiture. Je l’ouvre : J’hésite encore entre l’amour et l’amitié.
Je pleure. Si tu as écris cela, c’est que tu n’hésites plus. Je démarre la voiture. J’ai oublié les clés de chez mes parents, il faut que je remonte. Je sèche mes larmes. Je frappe à la porte, tu ouvres, tu as compris que j’avais lu la carte.
Le discours est banal, les yeux ne se quittent pas, se dévorent même. Il me faut repartir. Tu me donnes les clés, nos mains se touchent ; je te regarde, et m’en vais.