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Temps de lecture estimé : 7 mn
26/10/13
Résumé:  Vous rappelez-vous Yannick, notre première rencontre ?
Critères:  #épistolaire #tutu fh cadeau hotel amour cérébral
Auteur : camilleM            Envoi mini-message
Vous rappelez-vous, Yannick ?

Vous rappelez-vous, Yannick, notre première rencontre ? C’était au lendemain de la publication, sur ce site d’histoires érotiques, de pensées que j’avais écrites pour moi-même, lorsque je fus assaillie par cette horde de lecteurs trop empressés d’aller directement au but et fatigués par avance des propos d’une femme qui dévoila sans honte ni fausse pudeur ses plus intimes souvenirs ? Vous fûtes le premier à me soutenir, le premier à venir au secours de cette atteinte à ma liberté d’expression.


Vous rappelez-vous, Yannick, les messages amicaux que nous échangeâmes ensuite ? Vous, fasciné par la démarche osée et insolite de cette jeune femme qui osa dire tout haut ce que beaucoup de ses semblables ne pensaient que tout bas, par le charme de ses mots et par la délicatesse de ses pensées ; moi, amusée par l’enthousiasme de ce lecteur qui m’intrigua par sa spontanéité, par le sentiment d’infériorité devant la Femme avec un F majuscule qu’il m’imaginait être et par la déférence un peu trop marquée qu’il me témoignait ?


Vous rappelez-vous, Yannick, comment ces échanges épistolaires se sont progressivement affermis, et comment, au milieu des mots, se sont subrepticement glissées les expressions de sentiments quelque peu plus intimes, de baisers virtuels que nous nous empressâmes de consommer avec toute la puissance de notre imagination ou, qu’au contraire, nous nous promîmes de conserver juste pour en faire durer le souvenir ?


Vous rappelez-vous, Yannick, le jour où vous m’avez dit m’avoir déposée, telle une fleur délicate, au cœur de votre jardin secret, me laissant à penser que vous me contempliez à chaque fois que vous vous y rendiez. Et moi, abusant un peu de votre confiance, une fois que vous fermiez la porte de cette serre si bien cachée au fond de vous-même et paradoxalement si lumineuse, je me plaisais à me balader dans ses allées, examinant toutes vos pensées inavouées, des plus heureuses au plus sordides, poussant le vice jusqu’à plonger mes racines dans le suc de vos rêves érotiques les plus malsains. Certes, jamais vous ne me parlâtes de ces derniers, pudeur que j’ai appréciée à sa juste valeur, mais, comme le dit la chanson, il ne me fallut pour les découvrir qu’un tout petit peu d’imagination.


Vous rappelez-vous encore, Yannick ce qui suivi ? Mais non, vous ne le pouvez, ceci releva uniquement de mes fantasmes, à moi toute seule. Vous ne pouvez donc vous souvenir qu’un jour, je me suis transportée à la vitesse de la lumière sur la terrasse d’une station balnéaire bretonne, vêtue juste du nécessaire pour la belle saison, vous y ayant donné rendez-vous tout en vous intimant l’ordre de ne pas m’aborder et de ne pas vous faire connaître. Je me suis assise sur la chaise de ce café, lisant, en signe de ralliement, ce romain dont le titre à lui seul, À l’ombre des jeunes filles en fleurs, sonnait déjà comme une promesse.


Quel dommage que vous ne puissiez apprécier combien je me suis délectée de m’être ainsi livrée à votre regard et à celui de tous les badauds, les regardant individuellement dans les yeux telle la passante de Baudelaire, m’imaginant que vous étiez ce jeune homme si bien bâti, cet homme d’âge mûr aux temps grisonnantes ou encore ce faux Apollon qui dormit sur la place pendant tout l’après-midi. Et comme je goûtai à l’avance la lente montée de l’envie qui devait croître en vous, qui que vous puissiez être, à me voir là, si provocante, dans ma simplicité toute féminine.


Vous ne pouvez pas non plus savoir combien j’avais envie de vous, et que le soir, quand je me suis rendue dans ma chambre d’hôtel, je vous ai indiqué par e-mail le numéro de ma chambre, que je vous y ai attendu nue sous cette couette qui me devint insupportable après quelques minutes seulement, que j’y ai soupiré d’aise à l’idée d’imaginer que vous étiez exactement mon type d’homme et que vous alliez apparaître dans l’encadrement de ma porte, éveillant en moi l’envie primordiale d’être prise par vous et de vous être soumise.


Quel dommage que vous ne puissiez vous rappeler ce que vous n’avez pas pu vivre, à savoir que je n’avais pas allumé la lumière pour conserver de vous une image aussi idéalisée que possible de ce que peut être l’Homme, qu’aussitôt que vous êtes entré dans mon appartement, vous avez arraché cette intempestive couette, dernier rempart de la civilisation, que vous vous êtes déshabillé en toute hâte, et que, malgré toute mon envie, vous avez refusé de me prendre avec toute l’avidité qui devait normalement accompagner cette violence contenue qu’impliquaient nos états d’esprit.


Combien vous devez vous languir, en lisant ces mots, de n’avoir pu partager au même moment que moi ce plaisir fantasmé de votre langue se faufilant au creux de ma bouche et qui me fit tant de bien, avant que cette partie si agile de votre corps ne préféra la saveur de ma peau, et plus particulièrement de ce morceau de moi, là, plus bas, activité qui me procura un début d’extase dont les mots, aussi subtils et aussi raffinés qu’ils soient, ne pourront jamais rendre compte.


Que je regrette de ne pouvoir vous rappeler que, pour ne pas susciter d’émoi chez nos voisins de chambre, je me suis volontairement appliqué comme bâillon ce membre qu’on dit viril, me donnant ainsi la sensation de me rapprocher de cet état de félicité dont je vous avais déjà fait part dans mes pensées intimes antérieurement mises en ligne. Que dans cette position, nous restâmes longtemps, moi, sur vous, impudiquement livrée à votre voracité, vous, en dessous, appréciant comme il se devait toute la saveur des fruits de l’expérience acquise en cette matière par une jeune femme de 29 ans.


Ne soyez pas déçu si vous ne pourrez vous raconter, dans quelques jours, que quand nos corps n’en purent presque plus, quand je vous ai supplié de me procurer la perfection du bonheur charnel, je vous l’ai demandé en des termes que la décence ne me permet pas de rendre publics ; et que me retournant pour vous offrir la vision de ces deux lunes qui combla d’aise vos pupilles, vous oubliâtes complètement la présence de l’autre, que l’on pouvait admirer par la fenêtre, tellement lointaine en ce moment précis de la nuit.


Comme je vous devine dans la peine de ne pouvoir vous remémorer que, moi à genoux et penchée vers l’avant, la croupe relevée et ouverte à toutes vos folies, vous avez avec délicatesse choisi la porte du paradis plutôt que celle de l’enfer, et que vous n’avez pas ainsi abusé de ma faiblesse momentanée (votre civilité vous honore) ; et vous faufilant dans ce passage si bien aménagé, vous avez trouvé le ton juste pour me faire gravir une à une les marches du bonheur qu’on qualifie de façon tellement inexacte de charnel. Je vous ai bien entendu caché que j’appréciais la simultanéité de la caresse de ma main sur la partie antérieure de ma féminité, et qu’en ce moment précis, la sensation d’un orgasme vaginal naissant a été accompagnée d’un mouvement plus rapide de ma main.


Qu’il me désole de ne pouvoir vous raconter qu’à l’instant précis où il n’y eut plus de retour possible, qu’après avoir encouragé une dernière fois votre ardeur à la tâche par des mots si bien choisis, ma tête s’est enfoncée dans la douceur veloutée du coussin où, ne me retenant plus, j’y ai craché à pleins poumons la fureur de mon cri d’orgasme, évitant ainsi l’occasion de susciter chez ces voisins si encombrants l’envie d’appeler police-secours.


Qu’il est triste de penser que jamais vous ne pourrez réitérer avec moi cet acte de jouissance qui vous transporta aussitôt après le mien sur le chemin que je venais juste d’emprunter, moi vous prenant aussitôt par la main en pensée, pour vivre ce passage toujours trop court dans un monde où la rationalité n’est pas de mise.


Et comme vous maudirez votre frustration actuelle de ce que, dans mon fantasme avec vous, les préservatifs et les autres casse-ambiance n’aient pas eu cours, et que c’est avec beaucoup de grâce que j’acceptai l’honneur que vous me fîtes de me remplir le corps de votre substance procréatrice, sans craindre en aucune manière les suites fâcheuses qui parfois transforment ces moments d’abandon en mesures expiatoires.


Vous rappelez-vous, Yannick, que nous nous sommes quittés juste avant le lever du jour, dans cette pénombre si rassurante, ne sachant toujours pas à quoi ressemblaient nos traits et quels étaient nos âges ; et que sans nous être adressé une seule fois la parole, nous nous sommes convaincus une fois encore que si la connaissance de nos natures profondes n’était pas accessible par l’examen de nos visages, la porte que nous nous étions mutuellement ouverte avait à défaut rendu un tel savoir possible.


Vous rappelez-vous enfin, Yannick, que nous nous sommes écrit, avant cette rencontre entre nous dans mon monde idéalisé, pour nous dire que l’amour qu’on ne fait qu’en imagination est peut-être le plus beau cadeau que l’on puisse s’offrir. Et si nous ne nous le sommes pas écrit, alors laissez-moi le faire maintenant.




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Vous rappelez-vous, Yannick, notre première rencontre ? C’était au lendemain de la publication, sur ce site d’histoires érotiques, de pensées que j’avais écrites pour moi-même, lorsque je fus assaillie par cette horde de lecteurs trop empressés d’aller directement au but et fatigués par avance des propos d’une femme qui dévoila sans honte ni fausse pudeur ses plus intimes souvenirs ? Vous fûtes le premier à me soutenir, le premier à venir au secours de cette atteinte à ma liberté d’expression.


Vous rappelez-vous, Yannick, que je vous avais promis de vous raconter une belle histoire pour vous remercier de m’avoir si bien épaulée alors ?


Que cette histoire concrétise désormais mon intention et vous donne l’occasion d’ajouter, pour votre plus grand bonheur, un souvenir supplémentaire à nos petits échanges strictement épistolaires dont les détails n’appartiendront à tout jamais qu’à nous seuls.


Cérébralement vôtre,


Votre Camille