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n° 15973Fiche technique20190 caractères20190
Temps de lecture estimé : 12 mn
01/01/14
Résumé:  Amours imprévues entre une femme mûre et un jeune homme.
Critères:  fh fplusag froid hotel amour fsodo exercice
Auteur : Séraphin
Depuis la veille

Depuis la veille, les déneigeuses et autres saleuses se sont activées à rendre les routes praticables et leur incessant ballet commence à porter ses fruits. La circulation reprend petit à petit ses droits. Une à une, les voitures hâtivement débarrassées de leur épaisse couverture blanche quittent prudemment le parking de l’hôtel.


Vers dix heures, Béatrice elle-aussi s’est enhardie au volant de sa Peugeot gris argent pour retrouver les siens, à deux cent kilomètres de là. Elle roule maintenant vers ses trois filles Carole, Camille et Cécile, son mari Paul, vers le cocon familial. Elle revit les images, les émotions accumulées depuis la veille. Elle pense à Éric… Son ventre se serre, elle a chaud, une onde d’adrénaline traverse son corps. Il faut qu’elle s’arrête. À la station, elle se précipite aux toilettes, relève sa jupe et enlève sa culotte trempée. Elle la jette à la poubelle et s’essuie l’entrejambe. Elle passe de l’eau sur son visage en feu. Petit à petit, le calme revient, elle revoit le film de sa folle aventure.


En premier lieu, sa visite à la maternité d’Amiens, sa joie de retrouver sa petite sœur Patricia, si fière de son bébé. C’est si petit un nouveau-né, elle l’avait presque oublié ! Par chance, il n’y avait pas de visiteurs et elles ont pu tout à loisir s’extasier devant la merveille, parler à bâtons rompus, sans tabou, entre sœurs, que du bonheur… Les parents, les enfants, les maris, les amours, les amants, tous ont été passés à la moulinette de leurs bavardages. Non, pas les amants, pas pour elle en tous cas. Si elle a eu une jeunesse plutôt libre, tout ça s’est sagement arrêté à la porte de la mairie. Et de l’église. Elle aime Paul. Il a vraiment assuré : une vie matérielle confortable, trois filles, une grande maison, un cercle d’amis.


Fidèle, bon amoureux en plus, même si, ces dernières années… Vingt-cinq ans de vie commune, ça estompe les passions, ça atténue les pulsions et les emportements de l’amour. Leurs relations se sont doucement effilochées. Les occasions d’épicer sa vie sentimentale n’ont pourtant pas manqué, mais elle n’a jamais été tentée. À quarante-six ans, elle reste une femme désirable : brune, de taille moyenne, un visage agréable, un « look » jeune que ses filles contribuent à entretenir.


Elle a quitté Amiens vers dix-sept heures, sous un déluge glacial. À Paris, la neige fondue remplace petit à petit la pluie.


Il n’est pas au rendez-vous ! Béatrice bénit une nouvelle fois sa fille Carole qui l’a entraînée dans cette galère. Le covoiturage ! Carole le pratique tous les week-ends pour rentrer d’Angers. Un certain Éric s’est manifesté, mais seulement pour Paris-XXXXX. Béatrice a accepté de mauvaise grâce, pour ne pas froisser Carole.


Et maintenant, Éric n’est pas là. Elle refait le tour de la place, au ralenti, scrutant à travers ses vitres embuées. Pas d’Éric. Elle déteste ce prénom. Garée en double file, elle fouille dans son sac et compose le numéro sur son portable.



Un jeune homme en jean et gabardine bleu marine, capuche sur la tête et sac au dos s’avance vers elle. Béatrice sort de la voiture, patauge pour lui ouvrir le coffre, furieuse de ne pas l’avoir aperçu et de s’être emportée au téléphone.

Ils prennent place dans l’habitacle douillet. Leurs manteaux sont constellés de petits cristaux blancs.



Sa voix est agréable, posée. La conversation, ponctuée de temps morts, est lente à démarrer. Éric, visiblement peu bavard répond poliment aux questions, mais sans relancer les débats. Elle apprend tout de même qu’il a vingt-quatre ans, qu’il termine son tour de France comme compagnon charpentier à YYYYY après une longue étape à Paris. Il joue au rugby, aime le cinéma et… la dance. Non, pas la classique. La dance de bal, de salon plutôt. Sa mère, passionnée, lui a transmis le virus. Il a même un temps participé à des compétitions. Béatrice s’étonne : rugby et dance sont-ils réellement compatibles chez un même individu ? Un court instant, Béatrice pense qu’il est peut-être gay.



La neige tombe maintenant à gros flocons. Elle forme sur la chaussée une fine couche grisâtre, spongieuse, striée de traces de roues. Déjà les bas-côtés blanchissent. On ne voit plus guère au-delà d’une vingtaine de mètres. La route réclame une attention soutenue et la conversation s’arrête progressivement. On n’entend plus que le ronronnement du moteur et le bruit saccadé des essuie-glaces. Éric somnole, sa tête coincée contre la vitre. Finalement, c’est plutôt agréable de rouler seule dans la nuit avec un jeune inconnu endormi, plutôt excitant…

Le téléphone sonne. Elle lui tend l’appareil.



Béatrice s’engage sur l’aire de repos suivante. Elle a besoin d’aller aux toilettes et souhaite téléphoner à sa cousine. Éric sort également pour prendre un café. Dehors, il fait un froid de canard.

Quand elle le rejoint au bar de la cafétéria, il discute avec deux gendarmes de la brigade autoroutière. Elle se rend compte qu’elle le voit réellement pour la première fois. Très brun, cheveux courts, barbe naissante. Visage fin, larges épaules, taille élancée. Joli garçon ! Il plairait à ses filles… Quand elle leur racontera son voyage, elles vont la charrier, c’est sûr…



Quand ils reprennent la route, la chaussée est entièrement blanche. Les voitures circulent à faible allure, enveloppées par des tourbillons de neige.



La sortie suivante indique WWWW. Béatrice s’y engage prudemment, la neige fraîche crisse sous les pneus. Au péage, l’employé leur confirme la présence d’un hôtel à WWWW, ajoutant simplement qu’ils ne sont pas les premiers à poser cette question.

Quand ils arrivent devant l’hôtel, le parking est presque complet. C’est un bâtiment ancien, vieillot, genre chaumière, avec restaurant et salle de mariage. Ils attendent dans le hall. Le personnel semble visiblement dépassé par cet afflux inattendu. Béatrice en profite pour passer un SMS à sa famille. Une employée se présente enfin, intriguée par ce couple incongru.



Éric la regarde, surpris. Sans mot dire, il monte les bagages. La chambre est étroite, démodée, la tapisserie est fanée. Il la laisse seule faire un brin de toilette.


Le restaurant est comble. Ils dînent face à face, dans le brouhaha. Une certaine gêne s’est instaurée. Chacun pense à ce qui les attend. Béatrice regrette sa décision, l’ambiguïté qu’elle sous-entend. Elle ne pensait pas à mal et voudrait clarifier la situation mais les mots lui manquent pour exprimer son sentiment.

De la musique s’échappe de la salle de réception voisine. Éric dresse l’oreille :



Il est déjà debout. Elle voudrait refuser, protester qu’elle est fatiguée, qu’elle n’a pas la tenue adéquate, mais elle n’en a pas le courage.


La salle est assez grande. Des couples de tous âges tournent et virent au son d’une valse, « mon amant de Saint-Jean ». Il l’enlace et l’entraîne. C’est effectivement un bon danseur. Un peu tendue au début, Béatrice se laisse aller, leurs pas s’accordent mieux. La fatigue aide à l’abandon du corps, efface les raideurs.

La musique s’interrompt. Ils restent là, indécis, attendant la réaction de l’autre. Un cha-cha-cha… Elle prend la main qu’il lui tend. Le rythme est rapide, les figures s’enchaînent. Elle lui sourit, elle prend plaisir à danser. Les couples s’écartent pour les regarder.


Ils s’arrêtent quelques instants pour se rafraîchir au bar mais c’est elle qui le tire à nouveau vers la piste. Ils enchaînent deux pasos, puis un tango, un rock… Elle pourrait danser toute la nuit

Un slow. Les lumières se tamisent, les couples s’enlacent… Il s’apprête à quitter la piste. Elle le retient… Ils tournent doucement, leurs corps étroitement liés. Au-delà de toute bienséance, de vingt ans de fidélité conjugale, elle se rend compte qu’elle le désire. Elle aimerait maintenant qu’il l’embrasse, son corps le souhaite ardemment, elle en est toute humide. Elle veut se reprendre, se détacher mais il a lu son consentement dans ses yeux, alors il se penche, leurs lèvres se touchent… C’est comme une délivrance, un aboutissement. Ils s’embrassent longuement, profitant de chaque seconde de cet instant magique qu’est un premier baiser. Il a envie d’elle, elle le sent maintenant.


Les lumières se rallument. Une femme d’âge mûr, à la chevelure de lionne se précipite. Elle veut absolument danser avec Éric. Il refuse poliment, elle insiste, l’œil vaguement séducteur.



Elle l’a tutoyé, elle s’en rend compte après coup.

Son téléphone affiche plusieurs appels manqués et quelques messages. Elle ne peut pas y répondre, pas maintenant, c’est impossible. Elle l’éteint.


Après la douche, elle se regarde dans le grand miroir de la salle de bain. Elle n’est plus une jeune femme. Ses seins n’ont plus l’impertinence de vingt ans, son ventre accuse quelque peu les effets de trois grossesses, mais pour le reste, c’est encore potable. Son pubis aurait besoin d’un peu d’entretien, d’une taille d’hiver, elle n’avait pas prévu… Elle en sourit. Son visage est régulier, agréable, tout juste marqué de petites rides au coin des yeux. Elle libère les beaux cheveux bruns qu’elle retenait en une austère queue de cheval et se couche.

Elle est nue sous les draps. Son cœur bat la chamade. Elle épie les bruits du rez-de-chaussée. La fête continue dans la grande salle, elle entend le martèlement sourd de la batterie.


Il faut qu’il arrive maintenant, vite avant que la raison et la morale n’éteignent le feu qui la brûle. La désirera-t-il vraiment ? À son âge, beau comme il est, il peut avoir les filles qu’il veut.

De la lumière dans le couloir, quelqu’un monte… La porte s’ouvre doucement. Éric entre sans allumer. Il va à la salle de bain, elle l’entend se doucher.


Il s’approche dans la pénombre. Elle tend les bras. Il s’allonge à côté d’elle, son corps sent le savon. Elle tremble, d’envie, de stress. Il la caresse délicatement, ses lèvres glissent sur ses seins durcis puis descendent vers son entrejambe. Elle sursaute et se cambre lors qu’il atteint son intimité. Quand il la pénètre, elle l’embrasse violemment, leurs dents se cognent. Très vite, elle jouit, c’est comme une délivrance.


Il a rapproché les lits, ils sont maintenant allongés côte à côte. Quand il a voulu se retirer, elle l’a retenu, alors il a éjaculé en elle, par longues secousses, elle en a eu un second orgasme, elle qui, d’habitude, est si longue à venir.

Elle se lève et va dans la salle de bain essuyer le sperme qui coule sur ses cuisses. Elle écarte les rideaux et regarde par la fenêtre. Il neige toujours et elle aperçoit au loin les gyrophares des déneigeuses, sur l’autoroute.


Quand elle revient, il s’endort déjà. Elle le désire encore alors elle l’embrasse sur le visage, sur le torse, puis glisse vers son bas-ventre. Son sexe est au repos, bien sage. Elle le prend, le caresse. Elle n’a jamais fait de fellation, Paul ne l’a jamais sollicitée. En cette nuit où tout est permis, elle s’y risque, maladroitement. Pas si mal quand même, puisqu’elle le sent prendre de la vigueur. Une main vient caresser ses cheveux pendant qu’elle s’active, Éric a l’air d’apprécier.

Sa bouche monte et descend en cadence le long de la verge tendue. Elle craignait d’être rebutée mais il n’en est rien. C’est agréable et excitant de s’occuper ainsi d’un homme.

Elle revient vers lui, l’embrasse et s’empale doucement sur ce phallus qu’elle a si fièrement redressé. Ils refont l’amour, beaucoup plus calmement, sensuellement. Elle dirige les débats, à son rythme, à son plaisir. Il glisse une main le long de son dos, jusqu’entre ses fesses, dans une caresse qu’en d’autres temps elle n’aurait jamais imaginée ou acceptée mais qui déclenche en elle une nouvelle jouissance.


Ils n’ont pas échangé une parole au cours de leurs ébats. Il dort maintenant, rassasié de sexe. Lovée contre lui, Béatrice savoure ces instants de plénitude, de corps comblé. Elle n’a jamais connu une telle intensité amoureuse, même au début de sa vie conjugale.

Il fait déjà jour quand Éric s’éveille. Il se lève et va à la salle de bain.

Béatrice dort encore. Il la regarde, sa belle chevelure brune étalée sur l’oreiller. Il fait lentement glisser le drap et découvre son corps de femme mûre, doux et chaud. Il la contemple longuement, jusqu’à ce qu’elle ouvre les yeux. Elle s’étire, lui sourit, il l’embrasse. Elle sent son sexe dressé contre sa cuisse. Elle est heureuse de provoquer cette érection matinale.



Elle laisse la porte ouverte, fière de son impudeur nouvelle.

Elle se couche, il caresse ses épaules, son dos, ses cuisses Elle veut lui donner plus, lui témoigner sa reconnaissance alors elle s’agenouille, la tête sur l’oreiller, offerte, impudique. Il la prend, les mains accrochées à ses hanches. Et commence un va-et-vient langoureux. Mais elle se retire et dirige le phallus raide entre ses fesses, vers son anus. Il la regarde, incrédule.



Avec sa salive, il lubrifie l’anneau inviolé puis d’un doigt, il prépare l’étroit passage. Elle frissonne sous cette caresse nouvelle.

Malgré la douceur qu’il emploie à forcer les muscles réticents, la souffrance est là, atténuée par l’excitation que Béatrice ressent si intensément. Centimètre par centimètre, il progresse dans l’étroit fourreau. Il l’embrasse sur la nuque, les épaules.

Il est profondément ancré en elle et commence un lent va-et-vient. Elle agrippe les draps et se tourne pour lui offrir ses lèvres. Son corps s’est détendu et accepte la pénétration.


La vue de cette femme nue, de ce corps exposé, de ces fesses ouvertes, l’excite au plus haut point. Rapidement, trop rapidement, malgré lui, il se vide en elle. Si elle ne jouit pas, elle éprouve un plaisir fort, multiplié par l’interdit qu’elle vient de franchir.

Il s’allonge à ses côtés, l’embrasse longuement. En même temps, sa main descend vers sa toison, vers son sexe humide. Ses doigts cherchent, trouvent le point sensible, le frottent délicatement. Leur baiser se prolonge, elle a enlacé son cou, elle ondule au rythme de sa main. Mais il s’égare, se perd, alors elle le guide et le ramène vers son plaisir.


Il a enlevé sa main à présent. Elle se caresse pour lui, par défi, parce qu’elle n’aurait jamais fait cela devant Paul. Il la contemple, son regard l’embrase, alors ses doigts s’agitent de plus en plus entre ses cuisses. Son corps se tend, s’arc-boute, l’orgasme arrive, ponctué de spasmes, presque douloureux.


Elle est devant le miroir, en petite culotte. Il s’approche d’elle, prend ses seins et pose les lèvres sur son cou. Elle se cambre contre lui et se retourne. Ils s’embrassent.



Ils restent longtemps enlacés, incapables de se séparer. Doucement, petit à petit, Béatrice détache ses bras.



Quand il referme la porte, les larmes lui montent aux yeux. Elle sait qu’ils ne se reverront sans doute jamais.