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n° 16424Fiche technique14670 caractères14670
Temps de lecture estimé : 9 mn
28/09/14
corrigé 10/06/21
Résumé:  Il faut que je me ressaisisse. Je suis mariée, je dois arrêter de penser à lui !
Critères:  fh fplusag extracon collègues cérébral revede -bureau
Auteur : Athanagor            Envoi mini-message
Garder scellées mes lèvres

Deux silhouettes s’immobilisent devant l’entrée de mon bureau. Je lève les yeux à l’instant précis où la secrétaire d’accueil frappe à ma porte déjà ouverte.



Je ne l’écoute déjà plus. Le jeune homme me salue timidement. Son regard vert me trouble, ou bien est-ce son sourire ?


Non, c’est autre chose. Grand, large d’épaule, les cheveux bouclés et le teint hâlé, il a le physique d’un surfeur, mais son comportement ne semble pas s’y accorder.


L’ensemble de son corps paraît athlétique et harmonieux, pourtant rien dans son attitude ne montre qu’il en a conscience. Sa façon de se tenir le bras par exemple, les épaules légèrement en dedans. Ou cette vague nervosité quand je lui tends la main pour lui souhaiter la bienvenue.


Il aurait affiché un air blasé et suffisant, avec, pourquoi pas, un sourire légèrement narquois et chaque chose aurait été à sa place pour mon petit cerveau formaté : j’aurais devant moi le beau gosse de l’été, la nouvelle tête à claque du service.


Et je ne serais pas encore en train de penser à lui alors qu’il est déjà loin.




* * *




Au bout du dernier couloir, la porte de la salle de repos pivote sous mes doigts et révèle une petite pièce noyée dans la pénombre. L’armature métallique du lit d’infirmerie émet un éclat racoleur.


J’entre doucement en tirant par la main cet homme qui m’a troublé dès le premier regard. Il semble hésiter une seconde, jette un coup d’œil nerveux aux alentours avant de me suivre.


Je ferme la porte derrière lui et tourne la clé dans la serrure. Nous sommes seuls.


Je distingue sa silhouette au milieu de la petite pièce, mais pas son visage. Est-il aussi ému que moi ? Je m’approche doucement et tends la main dans sa direction. Ses doigts se mêlent aux miens, s’y accrochent avec une force surprenante.


J’entends distinctement son souffle court et nerveux. Je suis rassurée de le savoir dans le même état que moi. J’en suis d’autant plus excitée.


Nos visages se rapprochent, jusqu’à ce que nos lèvres se frôlent. Sa main puissante se blottit au creux de mon cou et, du bout du pouce, effleure le lobe de mon oreille. J’ai toujours été sensible à cette caresse.


Je suis conquise.




* * *




C’est la deuxième fois aujourd’hui que je surprends son regard sur moi. Ce matin, à la pause de 10 h, il a eu l’air troublé et s’est détourné.


Mais ce midi, sur la terrasse de la cafétéria, Yannick me fixe droit dans les yeux. Et c’est moi qui fuis son regard. Il se tient debout parmi le groupe de stagiaires et il me fait face. Je sens son attention sur moi et j’en suis complètement paralysée.


Que m’arrive-t-il ? Mes oreilles bourdonnent et mes joues me brûlent. Je dois être cramoisie ! Mon cœur bat violemment avec des élans désordonnés, c’en est presque inquiétant.


Il faut que je me ressaisisse. Je n’ai plus quinze ans ! Je dois penser à autre chose que ce grand dadais de moitié moins mon âge.




* * *




Nos langues se goûtent enfin. D’abord timidement : elles se cherchent, se testent.


Et puis subitement elles deviennent avides et se déchaînent. Ses grandes mains me saisissent le visage et sa bouche semble vouloir me dévorer.


Un peu surprise, je m’écarte en repoussant son torse. Quelle idiote ! J’ai été maladroite et j’ai brisé son élan. À croire que je ne sais plus m’y prendre !


Nous nous faisons face, mes mains toujours en appui sur sa poitrine. Un instant s’étire entre nous.

Allez ma grande, lance-toi et ne réfléchit pas.

Doucement mes doigts s’accrochent au tissu de sa chemise et l’extirpe de son pantalon.




* * *




Je n’aurais pas dû mettre cette jupe ! J’ai pourtant hésité ce matin : je savais qu’il y avait une réunion du service et que les stagiaires y assistaient.


Yannick est assis à la table en face de la mienne, de l’autre côté de la pièce. Et je suis certaine qu’il va profiter du spectacle que je lui offre malgré moi.


Réellement malgré moi ? Je n’en suis pas sûre. Pour quelle raison me serais-je réjouie de le voir s’asseoir en vis-à-vis ? Et pourquoi attendrais-je que son regard se porte sur mes jambes ? Qu’est-ce que j’espère ? Le séduire ?


Bon sang, il faut vraiment que je me reprenne. Je suis mariée, qu’est-ce que je cherche ? À foutre en l’air ma famille ? Je dois penser à mon fils et arrêter de fantasmer. Et puis rajuster ma jupe et garder les jambes bien serrées. Sans blague, j’ai honte.


Ça y est ! J’en suis sûre : Yannick vient de jeter un coup d’œil sous ma table. Ça a été bref, mais aucun doute n’est permis ! J’ai eu la sensation de son regard à travers mes collants, comme une caresse. J’en éprouve des picotements dans le ventre et cela me bouleverse : je redécouvre des émotions adolescentes !


Seulement je ne suis plus aussi candide et timorée qu’alors. Décroiser les jambes comme je le fais maintenant, jamais je n’aurais osé le faire vingt ans plus tôt.


Cette fois-ci, les grands yeux verts se portent immédiatement sur mes cuisses. Avant de me transpercer les pupilles et de me scruter l’âme. Une chaleur intense irradie mon corps tout entier.




* * *




Un à un, je détache les boutons de sa chemise pour découvrir son large torse. Mes doigts le parcourent avidement avant de laisser la place à mes lèvres. Ses tétons se figent sous l’effet de mes coups de langue tandis qu’un râle de plaisir emplit la petite pièce sombre.


Les longues vibrations sonores raisonnent sous ma peau. Elles se transforment en un frisson qui remonte le long de mon dos jusqu’à la racine de mes cheveux, propageant une onde de désir inattendue.


Je veux sentir ses doigts sur moi ! Je veux ses caresses maintenant ! Qu’il m’explore ! Qu’il me fouille !


Poussée par mes désirs, je retrousse ma jupe et j’attire sa main à moi. Le contact est maladroit, presque brutal, mais il focalise mes envies et donne naissance au plaisir physique.


Je n’ai plus besoin de le guider : une dextérité nouvelle me fait défaillir. Les doigts devenus agiles ont franchi l’obstacle de la dentelle et ont trouvé ma chair gonflée de convoitise.


Soudain faibles, mes jambes fléchissent. Pendue au cou de mon bourreau, je lui abandonne mon corps. Il le bascule en douceur sur le sommier grinçant, se penche sur moi.


Je veux sa langue.




* * *




Je n’ai jamais été aussi près de Yannick, et j’ai du mal à ne pas le dévorer du regard. Il est assis juste à mes côtés, concentré sur l’écran qui affiche le fruit de son travail. Il m’a demandé de le relire, mais c’est lui que j’examine.


Bon sang, comme il est beau. Ses doigts jouent à enrouler sa mèche rebelle, que dirait-il si je les prenais et les portais à mes lèvres. Et si je les suçais ?


J’ai découvert son odeur il y a un instant, quand je me suis penchée sur le clavier. J’étais si proche de son épaule que j’en ai senti l’arôme viril. Je devine presque son goût sur ma langue. La saveur de sa peau… Je crois que je perds pied.


J’ai l’impression que lui non plus n’est pas très concentré sur son rapport. Ses oreilles se sont empourprées et sa main caresse nerveusement sa cuisse. Est-ce que je lui fais de l’effet ? Est-ce que je lui fais peur ?


Il me regarde enfin ! Ses yeux vert transparent brillent d’un éclat mouillé et retiennent mon souffle. Là, c’est moi qui me fais peur. Vite, tourner la tête et ne pas l’embrasser ! Fixer l’écran, même pour ne rien lire ! Je ne dois pas…


Je n’ai pas le souvenir d’avoir été autant excitée. J’étais à deux doigts de lui manger les lèvres. De commettre l’irréparable. Je n’ai pas ressenti d’émotions aussi fortes depuis si longtemps ! J’en frissonne encore.


Je pourrais peut-être prolonger l’intensité de ce moment et en profiter davantage… Voilà. Comme ça. En glissant ma main sur l’assise de sa chaise, je me rapproche sensiblement de lui. J’effleure presque ses fesses de l’intérieur de mon poignet. L’a-t-il senti ? Ma poitrine frôle son bras. Je le laisse s’y appuyer timidement. Le contact se fait plus lourd.


Des milliers de décharges électriques parcourent ma peau. Je savoure l’instant présent.




* * *




Je le sens totalement à moi, à la fois passionné et appliqué. J’avais oublié à quel point être le centre d’attention est agréable. Je redeviens l’objet du désir qu’il faut choyer pour qu’il s’épanouisse.


Mon corps entier répond aux sollicitations de sa bouche. Je n’en contrôle plus les réactions. Il navigue en moi et je sens gonfler les flots de l’orgasme. Un tsunami sensationnel se profile à l’horizon.


Mais j’ai encore le temps de l’entraîner dans ma perte.


Je le repousse à nouveau afin d’inverser les rôles : à son tour de soumettre son corps à mes caresses. Je jubile déjà en imaginant les tortures que je vais lui infliger. Son sourire me nargue ? Qu’il prenne garde : il va découvrir à quel point j’ai soif de revanche !


Son pantalon va vite retrouver ma petite culotte sur le carrelage. Je veux sentir sa queue dans mes doigts. En mesurer la fermeté. En vérifier le goût. Et surtout, contempler sur son visage la fin de sa superbe : lorsque ses yeux se ferment et qu’il ne maîtrise plus l’expression de son plaisir.


Il ne résistera pas longtemps à l’assaut de mes doigts, de ma langue et de mes lèvres liguées pour qu’il s’abandonne. Je le sens partir.


C’est le moment. Il doit m’emmener avec lui ! Je lui tends mes fesses pour qu’il les saisisse et qu’il les tabasse de ses reins ! Comme ça ! Oui ! C’est bon ! Plus fort !


Face à la violence du plaisir qui m’assaille, je perds toute maîtrise de mon corps. C’est le son de mes propres râles, provoqués par d’ultimes fessées, qui réanime mes sens. Enveloppée d’une exquise torpeur, je me tourne à temps pour profiter du spectacle de sa jouissance.


Je ne réalise pas entièrement le bonheur que j’éprouve. La petite mort m’a prise au dépourvu. Notre dernière rencontre est si lointaine que j’avais oublié le mordant de sa faucille.




* * *




Je suis presque perturbée de voir Vincent parmi mes collègues de travail, il participe pourtant tous les ans au barbecue de l’entreprise, mais pas sans se faire prier un minimum ! C’est la première année qu’il insiste pour venir, alors que, cette fois, je voudrais ne pas supporter le poids du lien conjugal.


Il discute avec Yannick et je préfère prendre mes distances. J’ai peur que mon comportement me trahisse. Mais je ne peux pas m’empêcher de les observer de loin.


J’assiste au face à face redouté. Mon mari bedonnant et le jeune stagiaire qui me fait bouillir le sang depuis trois mois. Ils ont l’air de copiner, c’est incroyable. Le vieux et le jeune. Celui qui ne me dit plus rien, sauf quand je le traîne devant la conseillère conjugale et celui qui connais le pouvoir qu’il a sur moi, mais qui n’en profite pas.


Quelle tristesse tout à coup. Mon mari aussi avait ce pouvoir sur moi, j’avais cette même attirance viscérale pour lui. C’était si fort. C’était avant. Et lui avait su en profiter…


Je réalise à quel point la lassitude a engourdi notre relation de couple. Depuis quand ? La naissance de notre fils ? Avant ?


Vincent et son maudit ordinateur. Moi et mes incessantes remises en question. S’il n’y avait que ça…


Ces derniers mois ressemblent à un combat dans l’objectif de garder une cohésion familiale. Je croyais être la seule à le mener, surtout pour mon fils. Aujourd’hui je ne sais plus. Vincent a changé dernièrement. Il multiplie les efforts et les attentions, sa présence au barbecue en est une preuve.


Est-ce que je ne lui aurais pas définitivement fermé ma porte, lui refusant tout retour dans ma vie sentimentale, comme l’avais suggéré la conseillère conjugale ? Je ne sais plus… Il m’a fait souffrir. Parce que je l’aimais et que j’attendais trop de lui ? Pas seulement.


Je regarde à nouveau mon mari. Bien sûr il n’est pas aussi beau que Yannick. Mais j’y retrouve ce qui m’a plu chez lui : son calme et son charisme. Je me rappelle la sensation de puissance et de bienveillance que j’ai ressentie lors de notre première rencontre.


Je le connais par cœur et pourtant il m’a surprise aujourd’hui. D’abord avec un joli compliment en arrivant ce midi, et puis il y a cinq minutes, en me volant un baiser dans le cou, alors que je regardais Yannick. Il m’a déstabilisé.


Est-ce qu’il m’aime encore ? C’est ce qu’il m’a dit…


Un élan me pousse soudain à me rapprocher de mon mari, à le saisir par la taille et à l’embrasser. Il a l’air aussi surpris que moi.



Un pincement me saisit le cœur à l’idée d’abandonner le beau stagiaire sur place tandis que j’entraîne mon mari dans les bâtiments de l’entreprise. Pourtant, progressivement une vague de désir me secoue les entrailles et efface tous regrets. Je vais retrouver l’homme que je n’ai pas cessé d’aimer.


Au bout du dernier couloir, la porte de la salle de repos pivote sous mes doigts et révèle une petite pièce noyée dans la pénombre. L’armature métallique du lit d’infirmerie émet un éclat racoleur.