n° 16633 | Fiche technique | 21635 caractères | 21635 3531 Temps de lecture estimé : 15 mn |
11/02/15 |
Résumé: Origine et évolution d'une guerre. | ||||
Critères: #historique contrainte fellation fouetfesse | ||||
Auteur : Bernard Nadette Envoi mini-message |
Le jour se lève à peine en cette fin juillet sur le port de Dorbauxe. C’est l’instant où tout dort encore avant que l’activité ne reprenne. Tous sont tirés du sommeil par des explosions du côté de l’entrée du port. Ce sont les habitants près de la rade qui les premiers voient ce qui se passe. Les deux tours qui protègent l’entrée sont en flammes et des dizaines de vaisseaux battant pavillon taibrinque entrent dans le port. Déjà des troupes ont commencé à débarquer. C’est la guerre. Depuis plusieurs mois les relations étaient tendues entre la couronne taibrinque et le royaume de Cranfe, mais les diplomates s’activaient. L’espoir d’un compromis était réel.
La maigre garnison tente de résister. La petite frégate à l’ancre lâche une bordée, pour l’honneur, touchant un vaisseau de transport qui prend feu. Elle n’aura pas le loisir d’en tirer une seconde. Deux vaisseaux de ligne trois-ponts ripostent, la coulant. L’officier commandant sur la frégate fait évacuer immédiatement après le tir, ordonnant aux marins de rejoindre la terre. C’est la panique. Les habitants fuient vers la campagne emmenant ce qu’ils peuvent. La résistance ne dure pas une heure. Le commandant de la place préfère capituler pour sauver les hommes qui lui restent, à peine une soixantaine sur deux cents. Face aux quatre ou cinq mille hommes débarqués il est inutile de les sacrifier, d’autant que plusieurs heures se passeront avant que les premiers renforts puissent arriver et encore, en nombre insuffisant.
Malgré cette victoire éclair, les chefs ennemis sont déçus. Ils espéraient prendre au piège la flotte du Ponant, que des renseignements leur avaient assuré être au port. Hors celle-ci est partie depuis quelques jours pour une tournée vers les comptoirs du sud où des pirates se manifestent trop souvent. Le commandant François de La Tiémont comprend que c’est l’espoir d’anéantir la flotte au port qui a poussé l’État-major ennemi à se lancer dans la guerre. Cela aurait été un avantage important, peut-être décisif, si la flotte du Ponant avait été détruite.
Des incendies se déclarent. Dieu merci l’hôpital, où les blessés ont été conduits, est épargné. L’ennemi vide les entrepôts, s’empare des navires de commerce à quai, rafle tout ce qu’il peut en ville, avant de se retirer. Il regroupe la quarantaine de soldats encore valide que dirigeait le commandant, auxquels s’ajoutent une vingtaine capturés dans les tours, et peut-être deux cent cinquante habitants qui ont été attrapés, dont une soixantaine d’homme et plus d’une centaine de femme et presqu’autant d’enfants. Visiblement nombre de représentants la gent masculine se sont sauvés sans s’occuper du reste, laissant ces dames se débrouiller avec la marmaille.
La vertu de quelques d’entre elles a eu à souffrir du comportement de la troupe. Parmi ces malheureuses, le commandant repère la fille du gouverneur Catherine de Révilly qui serre contre elle les lambeaux d’une chemise de nuit. Il va protester auprès du général ennemi qui autorise Monsieur de La Tiémont de demander à ses hommes de prêter leur vareuse aux dames qui en ont besoin en attendant qu’elles puissent se vêtir décemment. Lui-même va porter à Catherine son manteau, même s’il sent la poudre. Elle a le regard dur. Quand il s’approche, elle dit d’une voix neutre :
Quand, pour enfiler le manteau, elle lâche le bout de tissu qu’elle serrait contre elle, il voit que son bas-ventre et ses cuisses sont barbouillés de sang.
Tous sont embarqués sur des transports. Les conditions sont rudes. Les prisonniers sont confinés dans les cales. L’odeur devient vite pestilentielle, entre les tinettes et le mal de mer. Il n’y a, bien sûr, pas de vêtements de femme sur des navires de guerre, aussi pour vêtir celles qui en ont besoin est-il distribué des tenus de marins. Seul le commandant a droit à une cabine avec les officiers. Ses efforts pour que l’on autorise les prisonniers à aller sur le pont quelque temps dans la journée sont vains. Deux enfants meurent pendant la traversée, leurs corps sont jetés par-dessus bord, après une rapide bénédiction sans même que leurs mères puisse assister à la cérémonie. Heureusement le voyage ne dure qu’une quinzaine de jours.
Tous les prisonniers sont débarqués à Mayphoult. Les soldats sont envoyés sur un ponton prison, fors le commandant qui est emprisonné dans une caserne. Les civils sont enfermés dans des entrepôts où ils devront travailler. Seule une dizaine de femmes échappent à ce sort. Six sont discrètement expédiées vers un lupanar, au grand bénéfice de la bourse de certains officiers qui les avaient repérées comme étant isolées. Les quatre autres, dont Catherine de Révilly, qui appartiennent à de bonnes famille sont envoyés à cinq lieues dans les terres dans un établissement destinée à l’éducation des demoiselles de la haute noblesse. Après intervention du commandant, elles sont accompagnées d’un simple d’esprit toujours souriant, la bouche ouverte, ce qui le fait baver, dont explique-t-il l’unique capacité concerne les plantes et le jardinage. L’amiral duc de Stovertin, commandant de la flotte, estime que le parc de l’institution où sa fille est pensionnaire, pourra l’occuper.
Après le raid sur Dorbauxe, le royaume cranfais a lancé les opérations militaires terrestres, au nord vers les provinces continentales taibrinques. Ces derniers avaient précipités leur entrée en campagne, dans l’espoir de la destruction de la flotte du Ponant. Quand leur ambassadeur avait remis au Roi Louis XIV la déclaration de guerre, avec un délai trop court pour qu’un courrier puisse atteindre le port de Dorbauxe, la mise en défense de leurs forteresses n’était pas complètes. Aussi une demi-douzaine de places mineures sont tombées rapidement. Le siège de trois autres de plus d’intérêt, est bien entamé. L’arrivée de la mauvaise saison ralentit les opérations.
Comme un malheur n’arrive jamais seul, une épidémie frappe le royaume, heureusement bien moins importante que celle qui avait frappé deux siècles auparavant, mais la famille royale est durement touchée. Le roi perd d’abord son fils aîné, le prince héritier, qui est bientôt suivi dans la mort par ses deux garçons et son petit-fils. Le second fils du roi ne reste Dauphin que quelques jours avant d’être emporté à son tour, précédé de ses deux enfants. Seules les filles survivent à cette hécatombe. Le troisième fils du roi étant mort d’une chute de cheval quelques années auparavant, c’est son fils Louis qui devient l’héritier. Celui-ci n’était, il y a peu, que huitième dans l’ordre de succession. Il est âgé de 27 ans. Il apprécie peu la vie à la cour où il se montre rarement.
C’est un garçon taciturne qui s’est pris de passion pour la mer lors d’une visite des ports de l’océan par son grand-père. Tandis que ce dernier, suivi de l’ensemble de la cour, faisait sa tournée en passant par la voie terrestre, lui embarquait sur un vaisseau et passait par la voie maritime. Il supplia le roi de le laisser devenir marin. Celui-ci finit par y consentir. Il montra de réelles dispositions et deux années plus tard, quand le poste devint vacant, sa Majesté le nomma Grand Amiral. Contrairement à ses cousins, il est encore célibataire. Bien évidemment il va devoir cesser de naviguer et se marier pour assurer la continuité de la dynastie. Pour l’instant il est absent et ne se doute pas de son nouveau statut.
Au mois de mars, les opérations terrestres reprennent sérieusement. Deux nouvelles places taibrinques tombent. De plus, l’armée continentale du roi Guillaume III essuie deux défaites en tentant de venir les secourir. D’abord Courtro puis celle, encore plus grave, de Tenofony. Aussi l’État-major décide-t-il d’envoyer des renforts avant que la situation ne s’aggrave. Les troupes convergent vers les points d’embarquements et une flotte est rassemblée pour assurer le passage.
Sur ordre du Roi Louis, une opération navale est soigneusement et préparée par l’Amirauté dans le plus grand secret. En l’absence du Grand Amiral, c’est l’amiral de Villerutay qui s’en charge. C’est un marin austère et respecté de tous pour ses compétences. C’est lui qui a formé le nouveau Dauphin. La flotte du Ponant a été rappelée d’urgence. Un débarquement sur les côtes ennemies est mis au point. Il faut agir rapidement avant que les habits pourpres ne se rendent compte de l’atout qu’ils détiennent.
Des agents ont pu être envoyés. Les premiers dès avant le retour de la flotte de l’amiral de Stovertin. Un sloop rapide l’avait suivi et dès que l’équipage avait déduit sa destination, il l’avait dépassée et avait pu accoster sans problème sous pavillon neutre à Mayphoult. Plusieurs hommes débarqués avaient suivi toutes les opérations consécutives à l’arrivée de la flotte et avaient pu envoyer de précieux renseignements. Surtout que le commandant de La Tiémont, ayant reconnu l’un d’eux, était parvenu à faire passer des messages.
L’Amiral espère profiter que le gros de la flotte ennemie protégera le passage des transports de troupes vers le continent, pour rencontrer des défenses plus faibles. De plus des troupes ont été prélevées pour être envoyées sur le continent. Par mesure de sécurité, la flotte est dispersée dans une dizaine de ports et non point regroupée dans le grand port militaire de Streb, celui-ci devant compter nombre d’agents ennemis. Cette dispersion peut être risquée en cas d’attaque massive de l’ensemble de la flotte adverse. Pour pallier cette éventualité, la défense de tous les ports est renforcée. Des troupes y ont donc convergé. Cela a un gros avantage, ces mouvements ne semblent pas trop anormaux et ces troupes seront celles qui embarqueront, sans que d’autres mouvements significatifs puissent alerter des espions.
Les civils, même les femmes, portent des fers aux pieds. Sur leur ponton, les soldats sont contraints de travailler s’ils veulent manger, mais au moins ne sont-ils pas entravés, probablement parce que sur un ponton les évasions sont plus délicates. Les plus à plaindre sont les filles envoyées dans la maison close. On s’efforce de briser leur volonté par de mauvais traitements pendant huit jours dans une cave. Au neuvième jour, le soir, elles sont conduites devant la mère maquerelle qui leur explique que ce qu’elles ont subi n’est que plaisanterie à côté de ce qui les attend si elles ne filent pas droit, mais si elles se montrent dociles, elles verront que la vie peut ne pas être désagréable. Elles sont ensuite expédiées dans la partie arrière de la maison où l’on ne peut accéder que par une seule porte et où toutes les fenêtres sont grillagées. Leur nouveau domaine est au deuxième étage. Il leur est annoncé qu’elles vont pouvoir prendre un bain et avoir de nouveaux vêtements.
Un nommé Jack, un des gardes-chiourme, après avoir conduit les nouvelles pensionnaires à leur chambre, s’attarde un moment dans celle de Jacquotte, fille d’un tisserand. Il lui ordonne de venir le sucer. Docilement elle vient s’agenouiller et défait son pantalon et se met à l’œuvre. Profitant du relâchement de l’attention de l’homme, elle réussit à s’en débarrasser avec son propre poignard, après l’avoir mordu. Le bruit en a alerté un autre, qui appelle son collègue. N’obtenant pas de réponse, il ouvre la porte. Jacquotte qui s’est dissimulée derrière, l’estourbit à son tour. Elle les fouille, s’empare du couteau du second et des bourses des deux hommes, mais ne s’attarde pas à en compter le contenu. Elle va pour se diriger vers les chambres de ses compagnes d’infortune, mais un bruit de course l’en dissuade. Elle se précipite et monte, sans rencontrer personne, encore trois étages jusqu’au grenier. Aucune issue, aucun endroit où se dissimuler.
En dessous, l’alerte est donnée. Un incroyable tumulte agite la maison. Les appels se répondent de partout. Une étroite lucarne attire son attention. Elle réussit à la forcer. Pour tenter de se glisser sur le toit, elle est obligée de se déshabiller. Les montants lui râpent le corps. Elle ne regrette plus en cet instant d’avoir une poitrine menue. Elle réussit de justesse à s’extirper, comme un homme tente de l’attraper par la cheville. Le lourdaud qui a failli l’agripper, ne peut évidemment suivre le chemin qu’elle a emprunté. Il passe la tête pour voir vers où elle fuit. Elle n’a pas fui et lui assène un coup de tuile qui le crâne qui le fait redescendre dans le grenier. Elle se rhabille rapidement. Nonobstant son corps douloureux qui proteste, elle monte sur le faîte pour évaluer la situation. En dépit de la nuit elle se fait une idée assez juste de la topographie.
L’arrière et les côtés de la maison sont occupés par un jardin clos de hauts murs. Plusieurs torches le parcourent, cette voie est interdite. Le quatrième côté donne sur une rue. En s’approchant, elle voit que celle-ci est bien large d’une douzaine pieds (équivalent des distances en fin de texte). Elle a déjà sauté cette distance. Son père la traitait de casse-cou, de garçon manqué et de chat, mais là, avec son organisme affaibli, ses muscles engourdis et l’absence d’élan, elle n’a pratiquement aucune chance. Elle repère une maison plus basse que les autres. C’est le seul endroit où cela peut être possible. Elle rampe jusqu’en face, se redresse et avec l’énergie du désespoir s’élance. Elle atterrit de justesse sur le toit avec un bruit qui lui semble assourdissant. Elle commence à glisser, elle va s’écraser plus de trente pieds plus bas. Elle préfère ça à retourner dans cette damnée maison. In extremis, elle parvient à s’accrocher et à se rétablir.
Quant aux quatre dernières, après avoir marché jusqu’à leur nouvelle résidence sous bonne garde, si elles espéraient un sort plus enviable, elles déchantent vite. Elles ne recevront pas en ces lieux l’instruction que l’on y dispense. À défaut de consignes précises de l’amiral, la directrice considère que les nouvelles arrivantes remplaceront avantageusement des servantes. Cela économise ainsi les gages à payer. Si elles ne portent pas de fer aux pieds, on les fait trimer dur, et le soir elles sont enfermées dans les combles. Quant aux pensionnaires, à quelques exceptions près, elles sont loin de se montrer charitables. Elles affichent du dédain pour leur adversité. La malheureuse Catherine est particulièrement la cible des brimades et des railleries de certaines demoiselles qui ont appris, Dieu sait comment, qu’elle avait été violée par la soldatesque. Trois mènent ces persécutions, Elizabeth, la fille du duc de Galacester, Ann, fille du comte de Gateway et Victoria, fille du duc de Levington. Quelques autres suivent, la majorité est indifférente, préférant ignorer qu’entrer en conflit avec ces trois-là. Une seule, Mary, fille du comte de Clairidence, les soutient autant qu’elle le peut, montrant compassion et bienveillance.
Un jour qu’une compagnie d’infanterie passait à proximité, elles firent arracher ses dessous à Catherine par leurs bonnes, afin qu’elle soit plus à l’aise pour accueillir les soldats, comme elle avait si bien su le faire à Dorbauxe. Elles n’osent agir ainsi sur les gens de leur maison, craignant une réaction paternelle en cas de débordement avec des filles dont les parents, les grands-parents et parfois sur plusieurs générations servent ou ont servis leurs seigneuries. Les responsables de l’établissement n’interviennent que rarement, devant considérer que tout cela est détails, tant que ça ne concerne pas le personnel employé et que cela ne nuit pas au bon fonctionnement de l’institution. Elles entrent parfois dans le jeu des chipies, quand ces dernières viennent se plaindre de fait réels ou imaginaires afin que les prisonnières soient punies. Un jour même, Elisabeth accuse Catherine du vol de sa trousse de toilette. Elle l’a vue la cacher, Malgré les protestations d’icelle, elle obtient d’appliquer elle-même le châtiment. Son souffre-douleur est immobilisé à plat ventre sur une grosse barrique renversée. Alors la fille du très haut et très puissant duc daigne relever de ses propres mains les jupes et descendre les dessous. Elle savoure de voir les fesses dénudées, avant d’appliquer fermement les vingt coups de palette de cuir, prenant bien soin de les espacer. Elle jubile intérieurement, d’autant plus qu’elle a elle-même dissimulé la trousse.
Une autre victime est le simple d’esprit, que l’on accable d’ordres et de contre-ordres, qui est tarabusté, piqué, battu parfois. Un jour elles le coincent dans le fond du parc et malgré ses gémissements, son air égaré et ses tentatives pour s’éloigner, le font mettre nu et chargent une bonne délurée de s’occuper de lui. Celle-ci, sous l’œil intéressé des pensionnaires commence par prendre son sexe en main et le branler. Elle obtient une certaine consistance, alors elle le prend en bouche et s’applique à le sucer, le lécher, lui montre ses seins. Une surveillante qui passe par-là, choquée, intervient, met fin au jeu et punit… la bonne. Une autre fois, au risque qu’il s’y noie, elles le font choir dans l’étang d’un canot où elle s’efforçaient, sans grand succès, de le faire ramer. Heureusement à force de barbotages désordonnés, il réussit à regagner la rive. Malgré sa situation précaire, Catherine s’efforce de protéger le simplet au risque de retours de bâton.
Pour les prisonniers, aucune libération n’est en vue, à moins d’un hypothétique échange et les nouvelles qui leurs parviennent seraient rares et aléatoires sans le commandant de La Tiémont. Il a le privilège de pouvoir sortir, escorté d’un garde, entre autre pour aller visiter ses hommes sur le ponton et les civils, sans avoir toutefois l’autorisation, à son grand regret, de se rendre à l’institution. Il obtient des nouvelles de l’agent qu’il avait repéré à son débarquement. En contrepartie, il fournit des renseignements à partir de ce qu’il observe dans la caserne et de ce qu’il peut tirer en discutant avec des officiers trop bavards.
Ces échanges ne sont pas faciles. Il faut qu’il écrive ses propres messages, qu’il les dissimule, qu’il les fasse passer à son correspondant et récupère les siens. Plusieurs scénarii ont été mis au point. Quand il sort, il place un vase devant sa fenêtre qui est visible de la rue. L’agent change souvent d’aspect. Certaines fois il utilise ses talents de pickpocket. Substitution et remise se font au cours d’une brève bousculade, d’autres il se fait passer pour un vendeur ambulant, les petits rouleaux de papier fin sont échangés pendant la transaction, pour d’autres enfin, un lieu de dépôt et de retrait est arrangé lors du précédent échange.
Sur le ponton, sous la houlette de deux sous-officiers vétérans, les soldats gardent discipline et condition physique. Cela permet de conserver le moral.
Pour les civils, après une semaine des améliorations se sont produites. Le gouverneur est venu les visiter. Il était mécontent que les militaires aient cru bon de les ramener. Il a trouvé indigne qu’ils soient enchaînés et les fers sont tombés. Il leur a fait quitter les trois entrepôts où ils étaient entassés pour les expédier à la sortie de la ville dans un ancien couvent, désaffecté depuis que Henry VIII, l’aïeul du Roi, avait quitté le giron de l’Église pour pouvoir répudier sa femme et épouser une jeune beauté. Les lieux avaient été transférés à l’armée, mais n’étaient pratiquement plus utilisés. Y mettre les prisonniers a, à ses yeux, un triple avantage. Primo libérer des entrepôts situés près du port. Secundo les installer dans un endroit plus facilement surveillable. Tertio faire restaurer et entretenir les bâtiments quelque peu négligés.
Le couvent est un vaste espace entouré de hauts murs. Les prisonniers sont confinés dans la clôture qui fait tout de même 650 par 210 toises. Dans l’autre partie est installée la garde. Les anciens dortoirs, une fois vidés et nettoyés, retrouvent leur ancienne fonction. Le plus vaste servira aux familles, l’autre aux isolés. Ce dernier est divisé, plutôt symboliquement, en deux parties : une pour les hommes, une pour les femmes. Les cuisines reprennent leur activité, de même que les ateliers. Dorbauxe est connu pour ses toiles et nombreux sont les tisserands capturés. Le gouverneur fait venir des métiers à tisser, du matériel de cardage et de filage. Quelques tailleurs fabriqueront des uniformes. Tous ne sont pas utilisés à l’intérieur de l’enceinte. Tous les matins plusieurs dizaines tant hommes que femmes se voient mettre une chaîne à un pied pour aller travailler à l’extérieur à des travaux de terrassement ou de voirie et même quelque fois pour être loué à des particuliers.
Certaines familles n’ont pas été séparées et se retrouvent au complet en captivité. C’est le cas de la famille Bourdeau. Les deux frères Pierre et Yves, leurs femmes, Blandine et Jeanne et leur cinq et quatre enfants auxquels s’ajoutent la sœur de Blandine, Fanchon, seule avec ses deux enfants, son mari ayant péri lors de l’assaut. D’autres ont éclaté. Nombres de femmes et dans une moindre mesure d’hommes se retrouvent sans leurs conjoints, souvent avec des enfants. Heureusement pour ces derniers, un couple de maître d’école fait partie des prisonniers. Ainsi des enfants qui seraient restés analphabètes à Dorbauxe, apprennent-ils à lire et écrire. Par contre aucun prêtre n’est parmi les déplacés Après tractation, c’en est un attaché à la mission commerciale de la Ligue maritime du Nord qui célèbre la messe le dimanche, alternativement sur le ponton et au couvent.
La vie reprend ses droits pour les exilés, malgré les conditions d’existence si particulières.