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Temps de lecture estimé : 34 mn
02/07/15
Résumé:  Violaine voit ses amies disparaître, et se remémore une vie agitée.
Critères:  fh fhh hplusag couleurs extracon cocus collègues grossexe boitenuit voiture voir fellation cunnilingu pénétratio sandwich fsodo partouze confession nostalgie -coupfoudr -amourcach
Auteur : Tito40      Envoi mini-message
Violaine, souvenirs d'antan

Je suis une vieille femme maintenant, ça devait bien arriver. Mes amies sont mortes les unes après les autres. Me voilà seule. Mes vieilles copines qui m’invitaient à leur table, qui me tenaient compagnie au cinéma, auxquelles je pouvais raconter mes malheurs et dont j’étais la confidente, je les regrette. Mais j’ai eu une belle vie ; il est peut-être temps qu’elle se termine.


Non ne vous inquiétez pas, je ne suis pas dépressive.


Mes parents – de braves gens – n’ont eu guère de chance. Ma mère, après ma naissance, n’a cessé de décliner. Elle n’avait pas de santé comme on dit. Toute sa vie elle a enchaîné les petits boulots ; ça se terminait toujours par de longs arrêts de maladie, largement justifiés. Ses employeurs préféraient ensuite ne pas la garder. Elle a supporté son sort sans se plaindre. Mon père, lui, était plus robuste. Au moins physiquement. Il a trimé comme un forçat toute sa vie dans une usine cradingue, martelant du fer chaud, à s’en rompre le dos, en espérant un peu de reconnaissance. Il n’a reçu que dédain, brimades et vexations. Ils n’avaient l’un et l’autre aucune éducation, aucune relation, j’étais leur seul avenir, leur seule fierté.


Dès mon plus jeune âge, on m’a plus remarquée pour la finesse de mes traits que pour mes traits d’esprit. Mignonne, jolie, je n’entendais que ça. Et plus on me disait belle, plus mes parents étaient ravis. Alors je leur faisais plaisir en affichant ostensiblement mes atouts. Tous les garçons me couraient après, j’étais celle qu’il fallait embrasser pour pouvoir crâner devant les autres. Ce n’est qu’en arrivant en seconde que j’ai réalisé que la beauté du corps, comme atout pour réussir, c’était bien mince. À moins de vouloir faire carrière dans la nunucherie.


C’est vrai qu’à cet âge j’étais belle. Oui, je n’ai pas peur de le dire. Cette photo que j’ai sous les yeux en témoigne. Si l’on fait abstraction de ma coupe de cheveux un peu hors d’âge ou de la couleur de mes vêtements, cette fille que je vois là est splendide. Seconde aux championnats de France de gymnastique, la médaille autour du cou, on ne voit que mes longues jambes fuselées, mon bassin étroit, mes bras musclés. Seconde sur le podium, mais infiniment plus belle que ces deux perruches qui ne visaient que la performance.


Dès que je me suis mise à travailler à l’école, les résultats ont suivi. Terminées les sorties avec les copines, les balades sur les porte-bagages des motos trafiquées de mes copains. Boulot, boulot. D’élève moyenne, je suis devenue bonne élève, puis très bonne élève. La jalousie que je suscitais auparavant en raison de mon attractivité pour la gent masculine était dorénavant doublée d’une jalousie plus perfide, tenant à mes résultats scolaires. J’étais devenue ambitieuse. Vous imaginez le tableau ? La belle plante qui a quelque chose dans la tête, elle se retrouve vite sans amies.


Les garçons n’osaient plus me draguer, les filles hésitaient à me présenter leurs copains. Un temps j’ai ressenti une forme de lassitude et un sentiment de vacuité, vite oubliés quand j’ai obtenu une mention très bien au bac. Mes parents n’en revenaient pas. Moi non plus.


Réussir était devenu mon obsession. Et la réussite passait par des études brillantes et l’accès à des réseaux d’influence. Ambitieuse et presque arriviste. Ma mise à l’écart au lycée a vite été reléguée au rang des mauvais souvenirs. Les étudiants que je fréquentais étaient tous issus de bonnes familles et dotés de QI au-dessus de la moyenne. Aucune chance de les impressionner par ma culture ou ma capacité à apprendre. Mais je n’avais pas perdu mon apparence, et elle allait à nouveau me servir. Ou me desservir.


Mes copines de promo enchaînaient les aventures plus ou moins folles pendant que je bossais. À la colocation, c’était un défilé ininterrompu de prétendants – pas les miens – qui venaient vider leur stress et leurs couilles dans les chambres avoisinantes. Je bossais.


J’avais déjà 24 ans quand j’ai connu enfin le plaisir des sens. Rien de génial. Je m’étais refusée jusque-là car je n’avais jamais eu le bonheur de rencontrer un garçon qui me convienne parfaitement. Je le voulais grand, beau, brun, intelligent, courageux, généreux ; je voulais aussi qu’il soit tendre, serviable, qu’il sente bon, et qu’il soit issu d’une famille aisée. Le mec parfait. Ceux qui m’ont approchée pouvaient avoir l’une ou l’autre de ces qualités essentielles que je recherchais, mais il en manquait toujours trop pour que je négocie quoi que ce soit. Et pour moi, le premier devrait être le bon et le dernier. Mes parents m’avaient inculqué une éducation radicale de ce point de vue. On se marie une fois et une seule, et à l’élu de mon cœur il me faudrait offrir ma virginité au soir de nos noces.


Pour rencontrer des étudiants d’autres filières, j’avais accepté une invitation à une soirée organisée par une autre grande école. Il y avait un dress-code précis pour cette soirée, à base de blanc et de transparence, auquel je me suis soumise pour ne pas faire tache. À peine arrivées avec quelques filles de ma promo, nous avons été emportées par une ambiance totalement débridée. Alcool bien sûr, mais aussi d’autres choses assez nouvelles dont j’avais entendu parler mais auxquelles je n’avais pas été initiée.


Une soirée dingue, où le DJ nous avait entraînés dans des rythmes rendus psychédéliques par des éclairages saccadés qui vous plongent dans la folie. Habituellement, dans les soirées je jouais la petite fille sage et réservée. Je m’en échappais discrètement vers 1 heure, arguant d’une grosse fatigue. Pas cette fois. Je n’ai pas vu le temps passer, ni les verres descendre, et encore moins les vapeurs m’embraser. En sueur, survoltée, je me suis livrée sur la piste de danse comme jamais. Mes vêtements me collaient à la peau, me rendant quasiment obscène. Mais j’étais tellement partie que ça ne me dérangeait pas. Ils pouvaient bien me regarder, me frôler et même me toucher, j’étais la reine de la fête ; la reine de la nuit.


Plusieurs garçons étaient aussi allumés que moi, et me dansaient autour. J’ai senti des mains sur mon corps me faire vibrer, jusqu’à une série de slows. Je me suis jetée dans les bras du premier qui s’est précipité, et pour la première fois de ma vie j’ai apprécié un corps contre le mien. Un corps trempé de sueur, qui sentait le mâle ; mais un corps puissant, protecteur, qui me serrait contre lui. J’ignorais son nom, il ignorait sans doute le mien. Je n’avais qu’aperçu son visage, tout juste avais-je senti ses mains sur mes fesses pendant les danses précédentes, encore qu’il eût pu s’agir de quelqu’un d’autre. Et je m’en moquais à cet instant précis. J’étais en train de savourer la pression de son torse sur mes seins quand il a passé sa langue dans mon cou, me provoquant des frissons partout.


Ce n’était pas moi. Moi, la fille de bonne éducation à défaut d’être de bonne famille, je ne pouvais pas me laisser ainsi toucher et lécher sans réagir. Une fille sans limites et sans tabous habitait mon corps ce soir-là. J’avais envie de la faire partir, de l’évacuer, de la virer, mais j’étais aussi curieuse de savoir où elle pourrait aller. J’ai basculé un peu la tête pour lui laisser plus de place, me livrant à ses baisers baveux. Cette autre fille qui aime qu’on la touche, qui se laisse caresser par le premier venu, me transmettait ses sensations charnelles, ses émois, ses frissons. Pour moi, « interdit », ça voulait dire « interdit ». Point. Pour elle ce soir-là, « interdit » ça voulait dire « fais-le ; si on l’interdit, c’est que ça doit être vachement bien. Et merde aux conventions, fuck l’éducation ! »


Cette fille qui habitait mon corps ce soir-là n’a pas protesté quand le garçon a posé ses lèvres sur sa bouche, quand elle a senti les vapeurs d’alcool lui entrer dans les narines. Au contraire, elle lui a offert sa langue et a collé son bassin contre le sien. Elle n’a pas davantage protesté quand il lui a pris les fesses dans ses grandes mains ; elle a même posé les siennes par-dessus pour les diriger plus bas. Il a remonté une main sur ses seins qui n’avaient jamais connu de main d’homme. Il a compris que le fruit était mûr quand il l’a prise par la main pour la diriger vers le parking. Elle n’a pas résisté quand il l’a allongée sur la banquette arrière d’une voiture, a soulevé sa jupe pour ôter sa culotte trempée. Elle appelait de ses vœux qu’il ne tarde pas trop à venir la prendre pendant qu’elle avait la tête dans les étoiles, mais il a préféré manger son fruit défendu, balader sa langue sur ce sexe poilu dont il voulait goûter le suc, la pénétrer de sa langue en lui malaxant les fesses. Elle se caressait les seins frénétiquement pendant qu’il lui broutait la nature. Cette fille qui habitait mon corps se comportait comme une salope, une fille facile, une harpie.


À l’époque, on ne craignait pas les MST ; c’était réservé à d’autres pays. Et on supposait que les hommes savent se retirer avant qu’il ne soit trop tard. J’avais déjà joui, bien sûr, en me faisant plaisir toute seule, mais c’était hygiénique, et je n’en avais retiré qu’une satisfaction relative, au point de me dire que si c’était ça, ça n’en valait pas franchement la peine. Pour la première fois, la fille qui habitait mon corps et qui s’abandonnait au bon vouloir d’une langue experte me fit connaître un orgasme fulgurant, incontrôlable, qui me conduisit à la limite de l’évanouissement.


Le garçon l’avait sentie disponible, et elle l’était. Il a terminé d’ôter les vêtements de la belle, pressée d’être enfin nue devant lui. C’était bien mon corps, mais il ne se pouvait pas que ce soit moi, les cuisses écartées, les genoux agrippés par les mains, attendant que ce garçon sans nom vienne profiter d’une vulve inexplorée. Je n’osais pas encore regarder son sexe, gardant ses yeux dans les miens jusqu’à ce que je sente son gland chercher le passage. J’ai passé une main entre nos ventres pour le guider, et surtout pour éviter qu’il ne me pénètre trop brutalement. Il ne savait pas que j’étais vierge. Une fille vierge n’offre pas ainsi son cul à n’importe qui, au premier qui demande, à celui qui ose. Elle se refuse et se fait attendre. Mais celle qui m’habitait faisait fi de tout ça. Elle voulait une queue, tout de suite.


J’ai senti une douleur fugace quand il a forcé le passage ; je me suis concentrée sur la progression de l’engin dans ma chatte pour oublier la douleur et éviter la honte. Ça n’avait en effet rien à voir avec mes doigts. Gros, dur, long, son sexe n’était pas fait pour moi, et pourtant il se faisait progressivement une place suffisante pour lui permettre d’aller et venir dans mon humidité abondante. Je ne peux pas dire que le plaisir ait été immense, mais me savoir prise, sans défense, à la merci de ce garçon, m’avait emplie d’une confiance aveugle. J’avais envie d’être comme les autres à ce moment-là, c’est-à-dire baisée sans retenue. Il en a profité.


S’il m’avait demandé mon avis, je l’aurais prié de se retenir encore un peu, de me laisser le temps de savourer ses ruades. J’aurais voulu qu’il me lime encore un peu, que je m’habitue. Mais il n’a rien demandé. Je l’ai senti accélérer et se raidir, je l’ai entendu râler et jurer. Il a sorti son sexe de mon ventre pour se le secouer devant moi. Pour la première fois je voyais un organe masculin en érection, gluant et brillant, raide comme la justice. Une crème épaisse a jailli du gland violacé, m’envoyant un premier jet sur les seins, le reste sur le ventre. En appui sur ses bras, il a repris sa respiration avec de déposer un baiser sur ma joue et de me remercier comme si je venais de lui rendre un service. Il s’est reculé, et sans autre attention pour moi, a remonté son pantalon et m’a laissée là, comme une conne. J’ai essuyé le sperme sur mon corps et suis retournée à la soirée, heureuse que cette fille qui avait un temps habité mon corps me permette de vivre son extase, et humiliée de n’avoir servi qu’au plaisir égoïste d’un homme.


Je m’en suis voulu. Terriblement. Je n’étais plus vierge, je connaissais les plaisirs du sexe, au moins partiellement ; je connaissais l’odeur du sperme et les mots crus que prononce un homme quand il jouit. Je connaissais la triste solitude d’une femme abandonnée comme une serpillière une fois la performance achevée.


Durant les mois qui ont suivi, ma relation avec mon corps a progressivement changé. D’abord, il a bien fallu que j’admette que durant cette soirée initiatique, personne n’avait pris des décisions à ma place, personne n’avait utilisé mon corps sans mon consentement. C’est bien moi qui avais avancé mes fesses vers ces mecs qui dansaient, moi encore qui avait laissé ce garçon me lécher dans le cou, moi aussi qui l’avait suivi dans sa voiture. Et il m’avait baisée alors que j’écartais grand les cuisses pour le recevoir. Il fallait que j’assume. Assumer m’avait permis de revoir les images avec une plus grande acuité, et de m’en servir pour alimenter mes fantasmes quand je me masturbais. Ça m’était arrivé de temps en temps auparavant. Dorénavant, c’était régulier.


Dans le cadre de mes études, j’ai fait plusieurs stages en entreprise, dont un à l’étranger. À chaque fois, j’ai senti que je pouvais tirer avantage de ma plastique. Ça allait d’invitations à déjeuner qui allégeaient mon budget à des inscriptions sur des listes VIP dans des soirées sélect. J’ai compris que si je voulais me construire un réseau et accéder ainsi à une vie meilleure, je ne pouvais utiliser que ce que j’avais : mon corps qui faisait envie aux hommes, mon esprit qui me permettait de tenir des conversations dans tous les domaines, et ma capacité de travail.


Quand j’en éprouvais le besoin, j’acceptais « un dernier verre » pour me détendre et profiter de la vie. J’ai eu de nombreux amants, toujours des hommes plus âgés que moi, qui m’offraient leur tendresse et leur présence pour une durée que j’avais choisie. À chaque fois j’étais très claire. Il n’y aurait pas de sentiments, pas de chichis. On était là pour se faire plaisir, s’éclater au lit, se bouffer le cul éventuellement, mais pas pour faire des projets.


Les choses mises au point dès le début, mes aventures furent toutes sans lendemains et sans regrets. J’ai eu affaire à des partenaires plus ou moins expérimentés. Les plus habiles m’ont initiée à des pratiques que je n’imaginais même pas, ouvrant petit à petit mes œillères en même temps que mon cul. En clair, après quelque temps, je savais à peu près tout faire dans un lit, et j’y prenais du plaisir. Mais faire l’amour n’était finalement qu’un exercice physique, un entraînement, une répétition de gestes obscènes ou pas, sans autre but que de savourer l’instant présent.


Les hommes qui me mettaient dans leur lit me disaient que j’étais chaude. C’était sans nul doute un compliment dans leur bouche, mais je ressentais tout autre chose. Bien sûr, au moment de les sucer ou d’écarter les cuisses, j’étais on ne peut plus chaude, on ne peut plus salope. Mais au fond de moi je sentais la glace se former. J’étais devenue ambitieuse, oui, arriviste aussi, mais c’est surtout d’être devenue un être froid qui me faisait peur.


Aucun sentiment n’était jamais venu magnifier une relation. À force de ne pas en vouloir, c’était bien ce qui devait arriver. Je n’éprouvais aucun sentiment pour les hommes qui me faisaient l’amour, et quand l’un d’eux me déclarait sa flamme malgré nos accords préalables de ne pas tout mélanger, je le fuyais.


Une fois diplômée, j’ai trouvé mon premier emploi dans un grand cabinet d’audit. D’abord junior, il m’a fallu faire mes preuves. C’est un monde exigeant où les nuits sont courtes, et les week-ends chargés de travail. Je me suis éclatée. J’ai adoré ce métier. Je n’avais pas le temps de penser à quoi que ce soit d’autre. Toujours en déplacement, j’avais trouvé un rythme que me convenait, bien que toujours anxieuse quant à ma froideur.


Au gré de mes déplacements, je rencontrais des hommes de passage, qui comme moi dormaient à l’hôtel. Ça faisait une compagnie pour le dîner, et souvent aussi pour la nuit. En faisant l’amour, j’éprouvais une joie immense de voir leurs yeux exorbités quand ils me découvraient nue, de les faire bander sans effort, de les sentir me pénétrer et de les entendre râler quand ils me baisaient. J’adorais sentir leur sperme remplir ma bouche ou couler sur mon ventre. J’adorais quand l’un ou l’autre me demandait de faire des choses que leurs femmes refusaient, et que je leur offrais la totale avec délectation. Mais je n’aimais pas les lendemains matin, quand je me disais que ma vie tournait en rond, sans véritable relation, sans amour.


Mon projet de me marier vierge et pour toujours s’était envolé. Mes rêves avec.


Au début de la troisième année, j’ai gravi un échelon. D’habitude il faut quatre ans. J’avais progressé vite. Je me suis retrouvée manager, et à ce titre j’avais cinq juniors à encadrer. Les déplacements devinrent plus rares, mon job consistant à coordonner et à contrôler le travail de mon équipe.


On m’avait attribué un bureau avec vue sur la Seine, au quatrième étage. Une pièce exiguë mais confortable. Mes collègues au même poste avaient tous des photos personnelles dans leur bureau. Une compagne ou un compagnon, des enfants, un chien, une vie quoi… Et moi rien.


Le groupe nous avait annoncé un changement de direction dans mon service. Mon directeur venait d’être muté aux États-Unis. Son remplaçant s’est présenté le lundi matin en réunissant les équipes dans la salle de réception.


Une cinquantaine d’années, costume gris foncé et chemise bleue à rayures fines, il avait des cheveux blonds coupés très court et un regard bleu acier d’une froideur terrifiante. Grand, les épaules carrées, il semblait taillé dans un roc. D’une tenue sévère, ses sourires furent rares le jour de sa prise de poste. Il fit le tour des collaborateurs en leur serrant la main en même temps qu’il mémorisait leurs noms et fonctions. Quand il est arrivé à ma hauteur et qu’il m’a tendu sa grande main ferme, je me suis sentie toute petite, minuscule. Pour la première fois j’étais impressionnée, peut-être même terrifiée. Passaient par son regard perçant une intensité et une insensibilité que je ne connaissais pas, à part peut-être dans mon propre cœur.


Autant son prédécesseur était absent – ou plutôt invisible – autant lui était présent et omnipotent. À cheval sur les principes, sans concessions ni originalité, c’était un travailleur acharné, une brute du boulot, un stakhanoviste. Il revoyait les moindres détails, nous faisait déplacer des virgules, et réclamait toujours plus de rigueur, toujours plus d’implication, toujours plus de travail.


Mes collègues l’avaient pris en grippe et ne se lassaient pas de balancer sur son compte à la moindre occasion. Pas devant lui, bien entendu. Moi, j’étais subjuguée. Si j’avais été un homme, c’est lui que j’aurais voulu être. Pas seulement lui ressembler : être lui.


Je le regardais se mouvoir avec délectation. Je buvais ses paroles. Edmond – puisque c’est ainsi qu’il se prénommait – était la représentation vivante de mon modèle.


Mes déplacements du passé et ce qu’ils m’apportaient d’un point de vue sexuel me manquaient. J’étais revenue au plaisir onaniste, seule dans ma chambre, revoyant tels ou tels ébats pour me motiver. Mais une fois la nuit venue, c’est lui que je voyais dans mon sommeil. Lui, souriant, me regardant avec envie, me caressant la main, m’invitant à dîner. Lui prévenant, lui toujours. Cet homme m’obsédait.


Il portait une alliance, mais ne parlait jamais de sa vie privée. Boulot-boulot. Je me montrais aussi disponible et efficace que possible pour le satisfaire, et peut-être aussi pour attirer son attention ; mais il semblait n’en avoir cure.


Chaque année, les meilleurs managers étaient récompensés. C’était une tradition. Mes résultats m’ont valu des félicitations, et une réception a été organisée. Un lauréat par métier, ça faisait 8 vainqueurs, tous invités avec leurs conjoints dans un grand restaurant, en présence du boss.


Ils allaient tous venir accompagnés. J’irai seule. Comme d’habitude. Il était hors de question de payer quelqu’un pour faire semblant. À l’heure de me choisir une tenue pour la soirée, je me suis retrouvée bien embêtée. Je n’avais que des tailleurs austères pour le travail, et des tenues décontractées pour le week-end. Rien pour une soirée habillée. J’ai hésité un long moment, mais il eût été aussi incongru de me présenter dans l’une de mes tenues de la semaine qu’en jean et polo. Je n’avais d’autre choix, vu l’heure tardive, que de passer cet ensemble que j’avais acheté quelques années avant pour la soirée étudiants. Je n’avais heureusement pas pris un gramme. Ma jupe était un peu transparente à la lumière et mon chemisier blanc trop fin, mais il était trop tard.


À mon arrivée au restaurant, j’ai été accueillie à l’entrée par Edmond, tout sourire pour une fois. Une poignée de main rapide mais ferme, les yeux dans les yeux. M’appelant pour la première fois par mon prénom, il m’a invitée à entrer avant d’orienter son regard vers ceux qui arrivaient juste derrière.


Le plan de table était dressé. Les sept autres lauréats étaient tous accompagnés. Edmond semblait être venu seul, et je me suis retrouvée à sa droite. Pétrifiée. Allais-je oser manger en sa présence sans faire tache, répondre quand il me parlerait, lui adresser la parole, le regarder ? Cet homme qui me fascinait allait se trouver à côté de moi, presque contre moi, pendant tout le repas. Un nœud s’est formé dans mon estomac et j’ai failli changer les cartons devant les assiettes pour m’échapper de cette situation ingérable. Je n’en ai pas eu le temps.


Ma peur fut de courte durée : il se montra immédiatement prévenant et attentionné, me couvrant de compliments sur mon travail, sur mon implication, sur mon efficacité. Rien de personnel au début, mais il y est venu tout doucement. D’abord un compliment sur mon look. Il m’a fait remarquer que toutes les autres avaient l’air emprunté, très apprêtées ; qu’au contraire j’avais un maquillage discret et qui m’allait à ravir. Puis une remarque sur ma tenue, jeune et fraîche, qui me seyait parfaitement. Puis il s’est étonné qu’une jeune fille aussi jolie soit venue seule, à moins que je n’aie eu un compagnon qui n’aurait pas pu m’accompagner. J’ai avoué. Je vivais seule. Et sans que je n’aie à le lui demander, il m’a confié qu’il était veuf. Après un silence assez long, il a ajouté que sa femme lui manquait. J’ai baissé la tête, ne sachant quoi dire. Il a enfin ajouté, me glaçant de surprise, que je lui rappelais sa défunte femme. Il semblait lui-même gêné de me faire cette confidence. Il avait l’air mal à l’aise en tournant son alliance sur son doigt.


La soirée fut longue, mais le temps a vite passé pour moi. Il n’est pas resté à discuter qu’avec moi, bien sûr, mais j’ai quand même eu l’impression qu’il m’accordait le plus possible de son temps. Ses yeux n’avaient pas la raideur des heures de bureau, son ton était plus convivial, presque amical. Totalement détendue, j’ai pu parler avec lui de mille choses, futiles ou sérieuses. Nous avions malgré notre différence d’âge des façons assez voisines de voir le monde. Quand la soirée s’est terminée, je me suis mise à espérer que nos relations au bureau allaient aussi évoluer. Cet homme me plaisait. Pour la première fois de ma vie, j’avais envie de faire du bien à quelqu’un, m’oubliant presque dans ce souhait. Pour la première fois de ma vie, je venais de tomber amoureuse.


Tomber amoureuse. En voilà bien une expression grotesque ! Pourquoi tomber ?


Tomber, parce qu’on perd ses repères, qu’on perd ses protections instinctives. Tomber parce qu’on oublie ses principes, et qu’on se laisse glisser. Et tomber parce qu’une fois amoureuse, on ne se relève que difficilement.


Dès le lundi, j’ai senti que rien n’avait changé. Edmond était redevenu la machine, le travailleur forcené. J’étais redevenue « Mademoiselle », sans égard particulier. Sauf que quand il me regardait, j’essayais de voir autre chose dans le fond de ses yeux ; mais ils étaient vides et froids.


Pas une fois il n’a varié, pas une fois je n’ai senti la moindre ouverture. Ça a duré deux ans. Pendant 2 ans je n’ai cessé d’espérer, de rêver de lui, de me caresser en pensant à lui. Pendant deux ans je me suis fourvoyée. Mes résultats ont décliné à mesure que mes tenues vestimentaires se voulaient plus attractives, pour lui plaire, pour qu’il me remarque. Puis le groupe nous a annoncé qu’Edmond allait bénéficier d’une promotion. Il allait lui aussi nous quitter pour rejoindre le bureau de Seattle. À son pot de départ, j’ai pleuré.


Le lundi suivant j’étais convoquée au bureau de la DRH. J’ai cru à une sanction, mais en réalité elle voulait me sonder sur mes souhaits pour l’avenir. Quel poste, quel métier, quel pays ? Je ne m’attendais pas à ça, et encore moins à ce qu’elle me propose, comme je semblais ouverte à toutes les opportunités, de prendre un poste à Seattle. Mon cœur s’est emballé avant que ma raison ne le fasse revenir sur Terre. Me trouver dans la même agence, subir son regard froid et continuer d’espérer dans le vide n’était pas une vie pour moi. J’ai refusé poliment, demandant à ce qu’on me mute plutôt en Russie. J’ai senti un rictus dans mon dos quand je suis sortie du bureau.


À mon retour à la maison, j’ai jeté ma veste avant de m’effondrer en pleurs. Cette vie n’était pas celle que j’avais imaginée. J’avais aimé un seul homme dans ma vie, qui ne m’aimait pas en retour. J’allais avoir 30 ans, et un avenir gris. Quand mon portable a sonné.



Stupeur. La voix d’Edmond qui avait dû déjà entendre mes sanglots.



Je n’allais de toute façon jamais le revoir, et ces sentiments que je gardais pour moi depuis 2 ans pesaient trop lourd. Sans réfléchir, j’ai senti que je devais m’ouvrir, qu’il sache.



La gêne avait changé de camp. J’entendais son souffle dans le combiné, mais pas sa voix. Il devait cherchez ses mots.



Et re-changement de camp. Le ménage n’était pas fait. Du linge propre attendait que je fasse chauffer le fer, et même l’évier était encombré. Je lui ai donné mon adresse avant de changer d’avis, et je me suis activée pour mettre de l’ordre.


Edmond est arrivé un quart d’heure plus tard, un bouquet de roses rouges à la main. Tout sourire, il m’a fait la bise avant d’entrer. Assis tous les deux à la petite table de ma minuscule cuisine, nous nous sommes regardés longuement avant qu’il ne décide de rompre le silence.



Enfin une action de diversion qui allait me permettre de bouger un peu. Je me suis levée pour ouvrir un placard et en sortir le paquet tout neuf. Il m’a regardée faire ; son regard bleu acier ne me quittant pas des yeux. J’étais démaquillée, les cheveux en bataille. J’avais passé un tee-shirt informe. J’étais à peine présentable. J’ai mis la machine en route, et quand je me dirigeais vers le tabouret il s’est levé, se mettant sur mon passage. J’ai senti comme un aimant m’attirer contre lui ; ses bras se sont refermés sur moi comme un étau. Mes seins sont venus se coller contre son torse. Il m’a serrée à m’en couper le souffle, me caressant le dos. J’ai senti ses mains dans mes cheveux, ses cuisses se coller aux miennes. La machine à café commençait à crépiter. L’odeur du café frais se mêlait agréablement à celle, suave, de son parfum.


Je me suis sentie fondre. Il a cherché ma bouche pour un baiser d’abord chaste, du bout des lèvres, avant que nos langues se mettent à danser. Je me suis vite retrouvée nue, emportée par une frénésie indescriptible. J’avais attendu tellement qu’il veuille bien s’intéresser à moi, je n’avais plus de temps à perdre. Visiblement, lui encore moins. Nous avons fait l’amour à même le sol, riant ensemble de l’inconfort de la situation. Il me voulait profondément, et m’a aimée comme une femme qu’on pilonne tendrement en lui disant des mots doux, qu’on fait patienter avant de lui donner le coup de grâce, qu’on flatte pour la chaleur et la douceur de son corps, qu’on lèche avec avidité, dont on mordille les seins à la faire geindre.


Il m’a fait m’envoler, voyager au-dessus de nos corps à les regarder s’étreindre avec passion. Cette passion qui nous aura fait aller au bout de notre envie du soir. Personne avant lui n’était allé aussi loin et aussi profond dans mon vagin trempé. Je n’avais autorisé personne avant lui à jouir sans retenue, à m’inonder de sa semence, à rester encore un peu pour que je savoure. Il s’est affalé sur moi, a continué de me caresser, de me dire des mots doux, de se délecter de mon corps. Malgré son âge il était tonique et viril, et sans doute n’avait-il pas fait un usage aussi sauvage de son corps depuis bien longtemps. Il a pris mon visage à deux mains, a fixé mes yeux de son regard de braise, et alors que je sentais son sexe à nouveau dur chercher le chemin de ma vulve dégoulinante de sperme, il a posé un baiser sur mes lèvres en me disant ce que je n’avais jamais entendu de la part d’un homme : « Je t’aime. »


J’ai accueilli sa verge à nouveau raide avec un plaisir incommensurable, l’écho de sa déclaration me revenant en boucle. Il m’aimait, il m’aimait comme un fou. Il me voulait, il me baisait, et j’ai joui encore et encore, jusqu’à l’épuisement, jusqu’à dormir avec lui, sans toucher à notre café.


À son réveil, il s’est montré à nouveau d’une immense tendresse, me répétant qu’il m’aimait, comme un enfant répète un mot qu’il vient de découvrir. Son œil émerveillé et la chaleur de son corps n’ont cessé ce soir-là de me transporter, jusqu’au bout de la nuit.


Nous sommes partis ensemble à Seattle pour y vivre quatre ans, cinq années faites d’un bonheur parfait, d’une communion de tous les instants. J’avais quitté la France un mois après notre première relation, le ventre plein d’une nouvelle vie conçue dès le premier jour dans l’ivresse de l’abandon. Notre petite fille est née en pleine forme, entourée par l’amour de ses parents.


J’avais l’impression que plus jamais je ne reviendrais en arrière, que notre bonheur était éternel. Mais rien ne dure jamais aussi longtemps que les impôts. Ça a commencé à déraper lorsque Laure avait quelques mois. Edmond me montrait un respect grandissant, celui qu’on doit à une maman ; j’aurais aimé qu’il me manque de temps en temps de respect, justement. Qu’il oublie que j’étais une jeune maman pour me traiter comme une femme, comme sa femme. Qu’il exige que je le suce, qu’il m’écarte les cuisses pour me sauter, qu’il me regarde avec envie, qu’il me baise. Ça me manquait de plus en plus.


Je m’en suis ouverte à lui quand la coupe était presque pleine, mais il m’a avoué qu’il ne pouvait pas, qu’il avait peur de mon corps, que je n’étais plus seulement sa femme mais aussi la mère de sa fille. Placer son sexe là où notre enfant avait suivi son chemin vers la vie lui était devenu insupportable. Ne plus sentir son désir enflammé, c’est ça qui pour moi était devenu insupportable.


Nous étions revenus en France, à Lyon, depuis trois mois. Laure était chez ses grands-parents pour deux semaines. Edmond, qui avait pris un poste de DG dans un autre cabinet, était parti en déplacement à l’étranger. Je travaillais à mi-temps dans une agence régionale où je me faisais draguer allègrement par plusieurs collègues et par les clients. Ça m’amusait au début, ça a fini par me monter à la tête.


Un soir j’ai accepté une invitation à dîner. Je savais ce que ça voulait dire dans la tête du client qui m’avait invitée. Un gars d’une soixantaine d’années, bien de sa personne, mais doté d’un regard sournois, du genre qui ne dit pas ce qu’il pense. Il lorgnait mon décolleté et ne se gênait pas pour mater aussi mes fesses. À chaque fois que j’allais le voir, ça m’agaçait. Mais ce soir-là, alors que rentrer pour être seule à la maison ne me disait rien, j’avais accepté son invitation juste pour ça. Je voulais sentir la convoitise dans le regard d’un homme, le voir me désirer, le voir bander pour moi, le voir tenter de me séduire. Et peut-être me laisser faire, pour une fois.


C’était en effet un sacré salaud. Dès le début du repas, ses allusions salaces étaient envoyées sans détour. Il a d’abord demandé poliment si on pouvait se tutoyer. Ma réponse positive devait être pour lui le déclencheur de la suite, qui fut moins polie et plus directe.



Il était en terrain conquis, et je n’avais pas envie de lui résister. Durant tout le dîner il ne m’a parlé que de frivolités, de ses aventures innombrables, de son goût pour des choses bizarres. Vers 23 heures, nous avons quitté le restaurant. Je l’ai laissé me conduire où il le souhaitait. Après tout, au point où j’en étais…


Sa voiture garée, il m’a prise par la main pour quelques dizaines de mètres. Nous sommes arrivés devant une porte en bois clair, sur laquelle était sobrement affiché « Club Privé ». Un rapide appui sur la sonnette. Une jeune femme court-vêtue nous a ouvert la porte en grand, affichant un sourire ultra-bright et un décolleté tellement profond que ses seins en débordaient. Elle nous a souhaité la bienvenue, a confié à Marc les clés d’un vestiaire, et nous a lâchés dans l’entrée.


J’ai vite compris ce que voulait dire « particulier ». Les clients étaient peu nombreux. Des femmes dansaient à moitié nues sur la piste alors que des hommes leur tournaient autour en les caressant. D’autres étaient au bar, à reluquer le spectacle. Je ne connaissais pas encore le nom de ce genre d’endroit. Marc a cherché à me rassurer en me disant que tout était permis, mais que rien n’était obligatoire dans un club échangiste. Puis il m’a rapidement avoué que son plaisir, c’était de regarder les autres se trémousser, montrer leurs culs et se faire sauter. Il m’avait amenée là pour ça. Pour que je me laisse toucher par des inconnus. Pour que je me fasse baiser devant lui. Il m’a laissé la possibilité de partir si je le souhaitais. J’étais tellement stupéfaite que j’ai préféré rester un peu, pour voir ce qui se passait réellement, plus que tentée par l’expérience.


Nous sommes allés poser nos vêtements au vestiaire avant de nous installer au bar. Rapidement, des hommes sont venus parler à Marc, pas assez fort pour que j’entende. Visiblement, tout le monde le connaissait. La serveuse au bar n’arrêtait pas de discuter avec lui. Je devais avoir l’air un peu nunuche, les mains sur les genoux, à compter les minutes. Ce qui se passait autour de moi n’avait franchement rien d’excitant.


Marc est resté à discuter avec un grand gars baraqué, noir de peau. Ils faisaient tous les deux de grands gestes et me regardaient de temps en temps en parlant. Puis Marc est venu me parler à l’oreille en me montrant le gars du doigt.



J’ai tendu ma main à Rony, avec un sourire un peu contraint.



Ça m’a mise en colère. Ce type que je ne connaissais qu’à peine et auquel j’avais fait le plaisir de lui consacrer de mon temps se croyait décidément tout permis. Il pensait qu’il suffisait de demander pour que je me laisse sauter par un parfait inconnu. C’est tout de même assez confiante, puisque je pourrais dire non, que je l’ai suivi. Il m’a prise par la main pour me guider vers le fond de la piste de danse et entrer dans un couloir obscur où l’on entendait un peu moins la musique.


Des portes fermées étaient alignées le long de ce couloir, et j’entendais des gémissements de plus en plus forts à mesure que nous avancions. Nous sommes arrivés jusqu’à une pièce dont l’intérieur était visible au travers d’une vitre. Un simple matelas posé au sol. Un type dont je ne voyais pas le visage était allongé au sol. Une femme un peu ronde était sur lui, plantée sur sa verge. Un autre type, tout maigre et visiblement assez jeune, était à genoux derrière elle. Il la pilonnait avec fougue. Pas besoin d’être grand clerc pour comprendre qu’ils la baisaient tous les deux, l’un enfoui au chaud dans son sexe, l’autre lui dilatant l’anus à grand coups. Rony marchait devant moi. Je l’ai retenu quand il allait avancer. Sans savoir ce qui me fascinait dans ce trio, j’ai souhaité rester quelques instants pour les regarder. Rony a lâché ma main, puis il s’est mis derrière moi, tout contre moi, se frottant à mes fesses. Pendant que je regardais ces deux hommes défoncer cette femme qui hurlait de plaisir, il a remonté ma jupe pour glisser ses grosses mains dans ma culotte. D’abord sur mes fesses, puis entre mes cuisses. Je n’avais pas envie de réfléchir à la folie que j’allais faire, ou plutôt à ce que j’allais le laisser faire. Je pouvais encore dire non, rebrousser chemin, partir. Mais je l’ai laissé faire. Il a extrait son sexe de son pantalon et m’a attrapé une main pour que je le touche. C’était une façon à lui, sans doute, de me prévenir que si l’endroit était particulier, lui aussi avait quelque chose de spécial à m’offrir. Sur le coup, j’ai cru que c’était un objet, et pourtant il était chaud et vivant. Des sexes d’hommes, j’en avais vus quelques-uns ; mais jamais de cette taille.


J’étais prise au piège de mon propre désir d’être malmenée, de subir les assauts d’un homme que je n’aurais pas choisi, et qui abuserait de mon corps sans vergogne. La douce peau de son énorme sexe coulissait dans ma main ; je pouvais sentir son plaisir au gonflement des veines sous mes doigts. Rapidement il a tiré ma main pour de la sienne guider son gland entre mes cuisses. D’une main il m’a poussée contre la vitre pendant que de l’autre il pressait sa verge pour écarter mes lèvres. Je l’ai senti entrer, difficilement, son bassin produisant un effort pour forcer le passage. Il me déchirait littéralement, et j’aimais ça. Je n’avais jamais senti mon vagin aussi dilaté, aussi plein. Mon abondante sécrétion est venue lubrifier son engin qui petit à petit a coulissé avec plus de facilité. Quand il a compris que le chemin était ouvert pour lui, Rony s’est déchaîné dans mon dos, me soulevant du sol à chaque fois qu’il poussait. Je voyais cette femme jouir de deux hommes ; un seul suffisait à me combler. Haletante, j’ai aperçu à côté de nous mon client qui nous matait en se masturbant. Pour glauque que soit cette situation, elle n’en fut pas moins excitante pour moi. Tous ces hommes que je faisais bander, toute cette énergie bestiale que je provoquais… Mon ego était alors à son paroxysme, comme le fut mon orgasme alors que je sentais Rony éjaculer.


Moi, la mère de famille bien sous tous rapports, la femme aimante, le modèle, je venais de me plonger dans le stupre, dans la débauche, dans le degré zéro. Marc est venu m’appuyer sur la tête pour que je le suce. Il n’y avait là aucune sensualité, aucune tendresse, juste l’exigence d’un homme au bord de l’extase de se finir dans la chaude humidité de ma bouche. C’est en me traitant de salope qu’il a craché son foutre épais, ne cessant ses poussées que quand il fut vidé totalement. C’est bien ce que j’étais : une salope, une immonde salope ; mais transgresser tous mes interdits ne pouvait pas se faire sans conséquence. J’en avais bien conscience lorsque Marc m’a proposé d’aller chez lui avec Rony pour finir la nuit.


Je les ai suivis sans résister. Mon cœur disait non, mais pas mon corps qu’il me fallait rassasier après ces années trop raisonnables. Ils voulaient une salope déchaînée pour la nuit ; ils l’ont eue. Ils voulaient me voir nue, me voir faire n’importe quoi ; ils m’ont vue. Ils voulaient profiter de ma chatte et de mon cul ; ils ont pu, autant qu’ils le voulaient. Quand j’étais empalée pour la nième fois sur Rony qui me pistonnait, Marc a voulu en profiter pour me sodomiser. Non seulement ça ne m’a pas fait peur, mais j’en avais terriblement envie. J’ai écarté mes fesses de mes mains alors que ma bouche et celle de Rony étaient liées par une bave abondante. Marc s’est introduit trop vite, me faisant un mal de chien. J’ai protesté ; il a insisté. J’ai adoré. Adoré avoir deux sexes en moi, rien que pour moi. Je n’étais plus qu’un sac à foutre, un vide-couilles, mais les problèmes de conscience allaient attendre le lendemain. Un lendemain douloureux.



Je ne pouvais pas cacher mes frasques à Edmond. Après tout, avant d’être mon mari, il était aussi mon ami. J’ai vu la surprise sur son visage avant que n’arrive la colère, une colère sourde, violente, immobile. Pas de hausse de ton, pas de sarcasmes, pas de vaisselle cassée. Il m’a écoutée, froid comme de la neige carbonique, la tête enfoncée dans les épaules, ébahi. Il est resté longtemps à me regarder, silencieux, l’air crispé. Jusqu’à ce qu’il me demande, comme s’il n’avait rien compris, si j’allais le quitter.


Mes explications longues et tortueuses, peu convaincantes, visaient à lui faire comprendre qu’il n’était pas en cause, qu’il était un mari parfait, que le problème c’était moi. Il m’a évidemment demandé si je regrettais, mais j’ai voulu être honnête. Je ne regrettais rien. Juste peut-être qu’il ne comprenne pas que tout ça n’était rien d’autre que du sexe, du vice. Les hommes comprennent que d’autres hommes, eux y compris, puissent avoir des pulsions irrépressibles. Ce sont des hommes. Ils comprennent en revanche moins bien – voire pas du tout – qu’une femme puisse avoir des envies folles. Encore moins qu’elle les assume, qu’elle les vive pleinement.


Edmond a fini par m’avouer, alors que je ne le questionnais même pas, qu’il avait lui aussi fait des écarts. J’ai compris qu’il me faisait des confidences pour que je lui dise, moi aussi, tout ce que j’avais fait. Mais je lui avais déjà tout raconté. Edmond allait voir des professionnelles. Des filles qu’on paie, et qui ne laissent aucune trace à l’âme. Des filles qu’on n’a pas besoin de respecter, qui jamais ne seront comparables à la mère de ses enfants. Des filles qu’on ne voit qu’une fois, qui s’appliquent à bien vous sucer pour que vous repartiez vite, et qui occasionnellement peuvent vous proposer des pratiques un peu limite, pourvu que vous soyez généreux.


Mon mari aimait donc le sexe, le sexe brut, la baise sans amour, l’amour sans sentiment. Il lui aurait suffi de me baiser comme il baisait ces filles pour que jamais une envie d’ailleurs ne me vienne. Mais il était trop tard. Nous nous étions dit trop de choses définitives.


Notre vie commune, en apparence tout à fait ordinaire, s’est poursuivie sans l’hypocrisie des dernières années. Edmond continuait d’aller se distraire de temps en temps. Moi, j’étais le plus souvent sage. Et quand l’envie m’en prenait, je sortais avec mon client, ou avec d’autres, sans jamais revenir bredouille. Il est vrai que ma première expérience avec un Black bien monté m’avait laissée avec un arrière-goût de reviens-y. D’ailleurs, Rony est devenu sinon un régulier, au moins un occasionnel répétitif. Tous les Blacks que j’ai connus ensuite n’étaient pas aussi disproportionnés, mais beaucoup me faisaient honneur.


Edmond et moi, si nous avions l’un pour l’autre beaucoup de tendresse, n’avions plus réellement de relations physiques. Il arrivait qu’il me fasse l’amour, mais c’était assez rare. J’avais rencontré un jeune Kurde dans une boîte qui ne n’attendait plus qu’un appel de ma part pour, toutes affaires cessantes, venir sustenter mes envies. J’avais 36 ans, lui 22. On ne parlait pas encore de cougars dans ces temps-là, mais c’est ce qu’on dirait aujourd’hui. Bakir était vraiment monté comme un âne, et son endurance était sidérante. Il était capable de re-bander et de me satisfaire six ou sept fois dans la même nuit sans jamais montrer le moindre signe de fatigue. Il parlait mal le français, mais son vocabulaire était suffisant pour me dire et me répéter qu’il m’aimait, qu’il voulait vivre avec moi, qu’il se tuerait pour moi. Je ne lui en demandais pas tant. J’avais aussi occasionnellement des relations avec Marc ou avec des gens qu’il me présentait, mais c’était assez souvent décevant. Rony et Bakir me suffisaient. Vous voyez, j’étais raisonnable : je me contentais de peu.


Je posais ma plaquette de ces maudites pilules sur la tablette dans la salle de bain, vers ma brosse à dents, pour être sûre de ne pas l’oublier. Et j’oubliais quand même, la plaquette ayant changé de place comme par magie. Et le plus souvent je ne la retrouvais même pas. Notre fille avait sa propre salle de bain. Ça ne pouvait être qu’Edmond qui jouait avec, à moins que je ne sois devenue dingue. Puis une fois je l’ai vu faire. Il n’avait pas réalisé que j’étais là quand il a pris la plaquette de la tablette et l’a glissée dans la poche de son pantalon.


Edmond cherchait sans doute à me piéger ; j’ai trouvé ça dingue, mais je ne lui en ai pas parlé. Simplement, j’ai laissé une plaquette vide sur la tablette, bien en évidence, en attendant que lui-même se décide à venir me dire ce qu’il avait derrière la tête. Durant deux ou trois semaines, j’étais restée sage à la maison. Puis un week-end où Laure était chez ses grands-parents avec son père, j’ai ressenti un énorme vide. Il me fallait du sexe. J’ai appelé Bakir. Il n’était pas disponible, mais il est quand-même arrivé moins de trente minutes après mon appel, une bouteille de champagne à la main.


Quand il a sonné, j’ai failli me défiler, inventer un truc de dernière minute. Finalement, je me suis ravisée. J’ai ouvert le portail en lui disant que j’avais besoin de quelques minutes pour me préparer. Je me suis enfermée dans la salle de bain pour prendre une douche. Quand j’en suis sortie, la serviette nouée sur la tête, j’ai retourné dix fois la plaquette vide dans ma main, me demandant si j’avais bien compris ce que voulait mon mari adoré.


Bakir était venu pour me baiser, par pour admirer ma garde-robe. Quand j’ai ouvert la porte de la salle de bain, il était là, devant moi, à m’attendre. Je me suis retrouvée assise sur le lavabo, soulevée du sol comme une plume, les cuisses nouées autour de son bassin. Malgré son français approximatif, j’ai compris que ça l’excitait à mort de voir mon dos dans le miroir alors qu’il était en train de me défoncer. J’ai voulu voir aussi. C’était beau, en effet. Je ne l’ai pas laissé se retirer quand la pression a été trop forte, et j’ai senti ses jets chauds se loger bien au fond. Nous sommes restés serrés ainsi, collés l’un à l’autre le temps qu’il reprenne des forces.


Ce garçon était décidément un phénomène. Je l’ai senti gonfler à nouveau dans mon vagin. Il m’a à nouveau soulevée pour me retourner et me prendre debout par derrière, appuyée au lavabo. J’ai pu assister dans le miroir à ses assauts autoritaires. Mes seins blackboulaient au rythme de ses coups de queue, ses yeux exorbités lui donnaient un faciès de bête féroce, de lion possédant sa lionne. Il venait de me remplir la chatte moins de dix minutes avant, et cette fois il ne m’a pas demandé de sortir. Il a vu à mes traits crispés et à ma bouche ouverte que j’allais jouir. Il a prolongé mon orgasme autant qu’il a pu, et s’est lâché en moi avec le cri rauque du félin qui règne sur la meute. Malheureusement, il travaillait le lendemain. Nous avons dû nous quitter alors que j’étais exsangue et que j’aurais volontiers partagé ma couche avec lui en espérant un réveil en fanfare.


Vers midi le samedi, j’ai reçu un appel de Rony, qui lui ne travaillait pas. Nous nous sommes retrouvés pour déjeuner à la terrasse d’une brasserie avant d’aller faire quelques pas dans le quartier latin. Le porche d’un hôtel particulier était resté ouvert. Nous nous sommes permis de faire quelques pas dans la cour intérieure pour admirer l’architecture. C’est en ressortant que Rony m’a collée au mur pour m’embrasser. Il était chaud comme une baraque à frites. Sentir son énorme engin emprisonné dans son pantalon m’a réveillée moi aussi. Nous avons vite trouvé un hôtel pour assouvir nos envies.


J’adorais décalotter tout doucement mon amant, faire apparaître progressivement ce qui ressemblait à une boule de glace au chocolat, en aussi gros, mais en beaucoup plus chaud. Mordiller ses seins d’homme, lécher ses bourses prolifiques, gober son manche jusqu’à m’en étouffer. Il m’a laissé jouer un moment, râlant quand j’allais trop loin, pestant quand je le laissais en plan après l’avoir amené au bord de l’explosion. Un instant j’ai eu envie de le faire venir dans ma bouche, sentir sa semence gluante sous mon palais, puis je me suis ravisée.


Il était allongé sur le dos, les bras derrière la tête. Je lui ai demandé de me laisser faire, de se laisser faire. Je l’ai enfourché sans cesser de le branler doucement pour maintenir son engin à la limite ; j’ai caressé ma vulve avec son gland, portant mon clito à sa température de fusion. J’ai senti Rony se crisper. Il devait se dire que j’allais encore le torturer, cesser mes caresses et le laisser en plan. J’ai vu à ses yeux ébahis qu’il était surpris et ravi de me voir au contraire diriger sa queue vers ma vulve, lâcher son engin pour m’empaler profondément, me coucher sur lui pour l’embrasser à pleine bouche, et remuer mon cul jusqu’à ce qu’il vienne. Rony a eu un geste de panique, cherchant à extraire sa queue avant le jaillissement de sa purée céleste. Mais comme son concurrent la veille, je l’ai maintenu bien au fond pendant qu’il jouissait, et je suis partie avec lui comme à chaque fois que je sentais les gonflements ultimes de son arme fatale pousser à leur maximum mes capacités d’accueil.


Autant je pouvais baiser avec Bakir toute la nuit, autant avec Rony c’était l’affaire d’une ou deux fois. C’était avec lui que j’avais mes orgasmes les plus fulgurants, comme si tous ceux que j’avais eus avant n’étaient que des répétitions ; mais il me laissait distendue, et je mettais quelques jours à m’en remettre. Ce soir-là j’ai dormi seule, et mal, envahie par un sentiment de culpabilité terrifiant. Et si je m’étais trompée sur les intentions d’Edmond ?


La semaine suivante, Edmond a tout fait pour me laisser seule le plus souvent possible. C’était très clair : il voulait que j’en profite, et j’en ai profité.


Quand au petit déjeuner quelques semaines plus tard je lui ai annoncé que j’étais enceinte, il a accueilli la nouvelle en affichant un énorme sourire. Il m’a prise dans ses bras pour m’embrasser comme du bon pain. Ce matin-là, nous ne sommes pas allés travailler, préférant célébrer notre entente sous la couette.


L’arrivée d’un petit frère brun aux yeux bleus, puis celle d’une petite sœur au teint très mat, deux ans plus tard, ont permis de compléter une famille hétéroclite qui m’a remplie de bonheur. Je crois que mon mari y a trouvé lui aussi son compte. Il m’attend quelque part là-haut, où je le rejoindrai sans doute dans quelques années, ou demain.


Ces souvenirs me ravissent, mais je n’ai malheureusement plus que cela pour me distraire de ma vie de mamie comblée. Ma petite Laure, mon petit Norbert et mon petit dernier, Rodolphe, s’ils ne sont bien entendu pas au fait des détails de notre vie à moi et à leur père, savent que s’ils sont différents génétiquement, ils ont la même place dans mon cœur, comme ils eurent la même place dans le cœur de leur père.