Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 16976Fiche technique32209 caractères32209
Temps de lecture estimé : 19 mn
27/08/15
Résumé:  Lise, une étudiante de dix-neuf ans, vit en collocation avec deux autres jeunes femmes qui ne se supportent pas. Un soir, elle recueille les confidences de l'une d'elles...
Critères:  init ff copains amour cérébral fmast
Auteur : Nokta  (Séductions et fantasmes)

Série : Le triangle mauve

Chapitre 01
Confidences

Confidences




Inès n’avait jamais réussi à supporter Charlotte. Les deux jeunes filles vivaient en collocation depuis près de sept mois dans un petit appartement de soixante mètres carrés avec une troisième étudiante, et le bilan de cette expérience sociale n’encourageait guère à l’optimisme. Extérieurement elles adoptaient une attitude indifférente, intérieurement elles se haïssaient.

Dans la théorie l’une ne voyait pas l’autre, dans la pratique la première ne voulait pas voir la seconde. Mais parfois l’inévitable se produisait : les deux contraires s’attiraient, faisant jaillir des étincelles à volonté.


Lise, la troisième et la plus jeune occupante, supportait de moins en moins ce climat de tension entre ses deux camarades. Elle commençait en effet à se lasser sérieusement de son rôle de médiatrice qui, à ses yeux, ne remplaçait pas la maturité que deux femmes de vingt-cinq et vingt-six ans sont censées avoir. Du haut de ses dix-neuf ans, Lise, qui était pourtant d’une timidité presque maladive, avait su à maintes reprises calmer le jeu, jusqu’à ce beau matin où, après une nouvelle rixe, la bombe à retardement explosa, laissant échapper tout le ressentiment qu’elle avait accumulé pendant des mois.



Le ton menaçant de la benjamine eut sur les autres l’effet d’une douche froide. L’obsession d’avoir le dernier mot sur l’autre, juste avant que le silence radio ne revienne polluer l’atmosphère, s’était momentanément éteinte. Elles restèrent ainsi, bêtes comme deux enfants faisant leur boudin, à regarder la révoltée quitter les lieux. Mais une fois la porte claquée, ce ne fut pas du tout le printemps ou l’odeur des fleurs du mois d’avril qui envahirent l’appartement, mais bien un souffle glacial hivernal, celui-là même dont on sent les crocs se planter dans notre chair quand il nous mord.

La haine peut aisément être à la fois glaciale et caniculaire, mais jamais tempérée.



******



Lise revint en fin de journée, heureuse d’avoir pu s’aérer l’esprit et d’avoir évité d’assister à une nouvelle scène. Elle avait passé un bon moment en ville avec ses quelques amis : il faisait doux et la perspective des beaux jours la faisait sourire spontanément. Les passants regardaient avec curiosité, parfois avec désir, cette petite brune aux cheveux courts, toute maigrelette et réservée, qui les faisaient davantage penser à une petite fille fragile et bien élevée. Mais Lise savait aussi qu’en dépit de sa bonne humeur, elle allait devoir, une fois le seuil franchi, affronter encore la hargne des deux belligérantes. Et comme l’idée d’être prise entre deux feux et donc d’être obligée d’endosser son rôle de médiatrice l’insupportait, elle décida de s’enfermer dans sa chambre.


Elle n’en ressortit que tard dans la soirée lorsqu’elle comprit qu’elle ne pourrait pas se coucher le ventre creux. Il faisait noir dans le salon et la cuisine, la sérénité régnait à nouveau à la maison. Elle se saisit d’un petit quelque chose qui puisse calmer la bête qui lui griffait l’estomac, puis elle alla se brosser les dents, se démaquiller en bonne et due forme, et retourna enfin discrètement se coucher.

Les paupières de Lise étaient déjà très lourdes et sa conscience bien engourdie lorsqu’un bruit sourd lui parvint. Ce n’est qu’au deuxième écho lointain qu’elle réalisa : quelqu’un grattait à la porte. Telle une patiente émergeant de son anesthésie, elle se redressa lentement, sortit un pied du lit, et le posa lourdement sur le carrelage froid.



La porte s’ouvrit lentement, sans grincer, et Lise reconnut le visage de Charlotte bien qu’il fût très marqué par la fatigue et la contrariété. Pieds nus, elle referma la porte derrière elle en silence puis, à pas de loup, alla s’asseoir sur le matelas à côté de sa camarade.



En écoutant la lamentation de sa colocataire, Lise comprenait bien ce qu’il devait se passer dans la tête de cette dernière. Elle se figura la gêne et le sentiment de honte que son esclandre avait pu provoquer chez les deux entêtées et en conclut que cette intrusion à pas d’heure était peut-être justifiée. Cependant elle se sentit rapidement envahie par ce sentiment d’oppression qu’elle détestait plus que tout et décida que désormais elle ferait abstraction de sa timidité et parlerait franchement à ses camarades. Elle fixa Charlotte de ses yeux vairons et lui dit simplement :



Charlotte resta un instant muette, bouche bée, comme sonnée par l’accusation qui la visait. Voyant qu’elle tardait à réagir, Lise précisa son propos :



Lise se retrouva alors devant un tableau qu’elle n’aurait jamais pu imaginer même dans ses rêves : Charlotte s’était mise à pleurer, les nerfs à vifs. Elle avait soupçonné un instant plus tôt sa camarade de l’avoir rejointe en catimini dans sa chambre pour lui jouer un numéro afin de la rallier à sa cause, mais elle comprenait à présent que trop de mal avait été fait. Et bientôt, le bon sens lui souffla que c’était à elle de proposer ce que sa colocataire n’oserait jamais confier.



L’aînée baissa ses yeux larmoyants. Pour Lise, ce spectacle pathétique était tout simplement inconcevable : Charlotte, la femme rebelle, fière, véritable garçon manqué, s’était transformée en une gamine nerveuse, fébrile, dépassée par ses propres émotions, bien loin de l’image qu’elle s’efforçait de donner aux autres. Elle l’enlaça une nouvelle fois pour la réconforter et sentit dans son cou un étrange parfum qui, l’espace d’un instant, lui donna l’envie de l’étreindre plus fort encore. Peut-être était-ce l’odeur d’une féminité refoulée et malmenée, ou alors juste la sueur qui bouillonnait sous les braises de la frustration. Lise sourit intérieurement car elle avait le sentiment d’avoir découvert se qui se cachait sous cette hideuse armure qu’était le caractère de Charlotte : un cœur qui de temps en temps a besoin d’écoute et de tendresse, comme tout le monde.



Ivre de sommeil, Lise adressa une grimace incongrue à celle qui la tenait pour sa confidente, autant pour lui faire comprendre qu’elle ne devait pas trop se reposer sur ses épaules que pour lui souhaiter une bonne nuit.



******



Le lendemain matin, Lise se leva très tôt pour aller à ses cours à l’université et ne rentra à l’appartement qu’en fin d’après-midi. Elle trouva dans la cuisine Inès qui s’amusait à préparer des macarons. Lorsque cette dernière l’aperçut elle l’interpella :



Lise appréciait beaucoup le fait que son coup de gueule de la veille eût secoué ses camarades, les forçant ainsi à se remettre en question, même si elle pensait lucidement que le naturel reviendrait au galop et que toutes deux reprendraient tôt ou tard leurs chamailleries enfantines. Pour la jeune fille, il était évident que, sauf prise de conscience de leur part, il allait être impossible de les réconcilier. Peu convaincue de ses talents de diplomate, Lise évita délibérément d’aborder le sujet sensible avec Inès, malgré la promesse faite du bout des lèvres à Charlotte. Inès était elle aussi étudiante, mais en dernière année de faculté, une jeune femme accomplie, amoureuse et des ambitions plein la tête. Elle avait aussi un caractère bien entier et Lise n’avait aucun mal à comprendre qu’une cohabitation avec cette dernière puisse se révéler, à l’occasion, difficile. Sa longue et belle chevelure noire qui tombait sur ses reins, sa taille gracile, son teint légèrement hâlé et ses yeux d’un vert hypnotique rendaient les autres femmes folles de jalousie. C’était l’un des rares points communs entre Lise et Inès : elles n’avaient qu’un petit cercle d’amis, contrairement à Charlotte qui semblait être plus accoutumée au tumulte des foules.


Lise décida donc de sauter sur l’occasion pour se joindre à Inès et ainsi se libérer du stress de cette journée harassante. Mais les rires et les blagues cessèrent lorsqu’on entendit le moteur d’une moto qui remontait la rue : Charlotte rentrait à son tour de sa journée. Elle monta les escaliers qui menaient à l’appartement, entra, et Lise feignit de ne pas s’apercevoir qu’une dépression polaire tournait à présent au-dessus de leur tête. Mais la soupe au lait ne monta pas et les minutes s’enchaînèrent doucement vers l’heure du dîner. Il n’y eut aucune parole d’échangée, mais Lise se réjouissait car toutes trois mangeaient ensemble, chose qui n’était pas arrivée depuis un moment.


Cette nuit-là, elle ne fut pas prise au dépourvu lorsqu’elle vit une Charlotte plus nerveuse que jamais la rejoindre, comme elle l’avait fait la veille. Il y avait une expression de frustration qui semblait avoir soudainement émacié son visage, une impression qui mit Lise particulièrement mal à l’aise.



Les cheveux bonds, extrêmement courts, de Charlotte semblaient avoir blanchi comme si sa préoccupation avait fini par déteindre sur son physique. Son teint était livide comme si elle était sur le point d’être victime d’une attaque de panique. Lise eut du mal à trouver les mots pour lui répondre honnêtement.



Charlotte vint alors s’allonger sur le dos, à côté de sa camarade. Elle ferma les yeux un instant, fit mine d’essayer de se détendre en inspirant profondément. On voyait qu’elle avait envie de dire quelque chose mais qu’elle cherchait encore la façon de le dire. Ses petits yeux bleus fixaient un point imaginaire et ses lèvres marmonnaient un message inaudible. Lise balaya l’air de sa main devant la tête de Charlotte pour la sortir de sa bulle.



Charlotte ne fit aucun cas du ton sarcastique et provocateur de la question et continua de réfléchir un bref instant. Elle semblait chercher ses mots. Enfin elle prononça sans regarder Lise :



Lise ne fut pas surprise de la question et l’avait même anticipée. Dès lors, elle considéra que la situation était suffisamment claire pour pouvoir donner son opinion. Mais elle décida de se montrer digne de la confiance de Charlotte et de rester à son écoute. Elle répondit :



Charlotte fixait toujours le plafond et semblait absorbée dans ses pensées. Elle ne répondit pas. Lise se résolut à appuyer là où ça fait mal.



Lise eut d’abord l’impression que sa camarade avait le souffle coupé. Elle ne savait pas si cette dernière serait à l’aise sur ce terrain et elle craignit un instant qu’elle réagisse violemment à ses insinuations. Mais Charlotte finit par répondre calmement à la question sans toutefois tourner la tête.



Lise avait écouté attentivement la confession de Charlotte, et elle sentit en effet que dans la voix de sa camarade, transpirait beaucoup de mal-être. La réponse fut aussi franche que la question.



Charlotte eut le réflexe nerveux de vouloir jouer avec ses cheveux, avant de se rendre compte qu’ils étaient tout juste assez longs pour pouvoir y emmêler un doigt.



Charlotte continua de se triturer les cheveux et de se ronger les ongles pour canaliser sa gêne. Elle finit par se rendre compte que la petite étudiante était particulièrement à l’aise dans ce sujet. Une hypothèse lui vint à l’esprit, laquelle elle ne tarda pas à vouloir vérifier.



Charlotte resta silencieuse pendant ce qui sembla être une éternité. Le silence dura si longtemps que Lise commença à craindre d’avoir mis sa colocataire mal à l’aise, mais au moment où elle s’apprêtait à lui suggérer de dormir, cette dernière reprit la parole.



La petite étudiante se retourna alors sans prévenir et vint se placer contre Charlotte qui sursauta légèrement et fixa sa camarade, tout intimidée.



Lise posa sa main sur la chemise de nuit de Charlotte. Elle pouvait sentir les reliefs de la poitrine de la jeune femme. Elle effleura les tétons pointus dans une caresse lente et mesurée, elle plongea son regard dans celui de Charlotte puis, elle entrouvrit la bouche en laissant s’échapper un soupir d’excitation à peine audible. Lorsque devant cette expression orgasmique feinte, Charlotte se sentit troublée et se mit à rougir, Lise lui adressa un sourire coquin.



Lise revit devant elle ce tableau invraisemblable dans lequel Charlotte, méconnaissable, tremblait comme une feuille et affichait un regard indéchiffrable.



Lise posa son menton sur l’épaule de sa camarade, elle fit courir ses doigts de pianiste sur son bas-ventre, et lui murmura :



Charlotte hésitait toujours et continuait de trembler comme une enfant intimidée par une promiscuité inhabituelle. Elle fuyait volontiers le regard de Lise, laquelle en profita pour lui mordiller l’oreille et l’embrasser une nouvelle fois sur la joue. Au moment où la main baladeuse parvint à se faufiler jusqu’à hauteur de ses hanches, à caresser cette peau douce et chaude, elle réagit :



Charlotte prit une profonde inspiration et ses paupières s’alourdirent. Elle tressaillit, puis, elle se mit à décrire les tableaux qu’elle visualisait :



Lise laissa échapper un rire moqueur et coupa :



Charlotte ne rouvrit pas les yeux. Lise la vit faire passer sa langue entre ses dents et elle sentit les abdominaux de la blonde se mettre à vibrer légèrement dans le sillon de ses doigts. Sa voix se faisait de plus en plus posée, d’un débit de plus en plus lent, comme si elle avait besoin de reprendre son souffle entre chaque mot.



Charlotte s’arrêta de parler et se mit gémir car Lise avait commencé de lui caresser l’entrejambe. Cette dernière porta le bout de ses doigts humides sur sa langue : c’était un doux nectar pensa-t-elle. Elle répéta son geste, arrachant au passage un nouveau gémissement à la soupirante, avant de faufiler son index et son majeur entre les vrombissantes petites dents.



Lise plaqua alors doucement sa main sur la bouche de sa complice pour lui signifier qu’elle devrait rester silencieuse.



Lise fit asseoir Charlotte au bout du matelas, dos au mur, puis s’installa entre ses cuisses pour venir poser sa tête contre son épaule. Elle se saisit de la main de sa complice, vint la poser sur sa petite poitrine, puis s’empara de la seconde qu’elle plaqua contre son propre visage, comme pour s’assurer d’avance qu’aucun cri d’extase ne s’échapperait pour réveiller la voisine. Lise sentit la pression excitante de cette main moite qui lui interdisait toute nouvelle parole pour guider sa partenaire. Elle se contenta d’un gémissement étouffé pour communiquer son désir ardent. Et ce fut donc au tour de Charlotte de caresser sensuellement Lise, avec la maladresse d’une première fois certes, mais avec sensualité tout de même.


Lise mit un certain temps avant d’apprécier véritablement les caresses tantôt trop rudes, tantôt trop timides de Charlotte, mais en fin de compte ce fut bien la conscience d’être dans les bras d’une jeune femme vivant son premier voyage sur Vénus, qui raviva la flamme de la petite étudiante. Elle sentait la main, le bras et tout le corps de Charlotte vibrer et se raidir au même rythme que le sien, ce qui lui donna la sensation d’être entrée dans une espèce de symbiose avec elle. Les minutes s’évanouissaient lentement et la nouvelle Vénusienne se montrait de plus en plus à son aise : elle ne rechigna pas à goûter au nectar de Lise et à savourer l’odeur aphrodisiaque qui se dégageait de sa nuque. Enfin, elle libéra l’espiègle brunette de son étreinte et la fit s’allonger. Charlotte lui déboutonna sa chemise de nuit, s’arrêta un instant pour contempler ce corps mince qui lui parut presque fragile, puis elle porta son regard sur la paire d’agrumes dont elle eut envie de se délecter.



À peine Lise eut-elle le temps de lui adresser un regard approbateur, que sa complice se lança à l’assaut du petit corps aussi élancé que délicat. Et une fois parvenue sur l’autre versant de la montagne du désir, la fougueuse blondinette de vingt-six ans avait butiné le sucre des agrumes et le pistil des fleurs de ce tout jeune verger.



******




Lise n’osa cependant pas lui faire part des remarques qu’elle aurait aimé lui faire, estimant que tout le monde faisait des maladresses la première fois, même avec une personne du même sexe. Comme elle se sentait à présent très fatiguée, elle décida de conclure l’acte.



Lise réfléchit un instant, fut prise d’un profond bâillement qu’elle communiqua à Charlotte, puis lui répondit :



Charlotte sourit et acquiesça. Avec une étonnante vivacité elle plongea une dernière fois vers Lise pour lui voler un baiser, une certaine façon de la remercier, puis rejoignit le seuil de la porte silencieusement. Avant qu’elle n’ait eu le temps de disparaître de l’autre côté, la petite crevette maigrelette lui rendit le sarcasme :



Charlotte lui adressa un ultime clin d’œil pour lui montrer qu’elle ne le prenait pas mal. Elle chuchota simplement dans l’entrebâillement de la porte :




À suivre…