n° 17255 | Fiche technique | 18713 caractères | 18713 2961 Temps de lecture estimé : 12 mn |
07/02/16 |
Résumé: Une princesse mythique est conviée à danser devant une assemblée de courtisans avinés et salaces. | ||||
Critères: #exercice #historique danser exhib | ||||
Auteur : Laure Topigne Envoi mini-message |
La chronique commence un soir torride quand l’orage s’enfle, asphyxiant la ville écrasée de chaleur et que déjà des éclairs jettent leurs zébrures éblouissantes sur un horizon lourd de menaces.
En ce jour, Hérode a convié ses courtisans à un festin qu’il donne en l’honneur des vingt ans de sa belle-fille : la princesse Salomé. Celle-ci pourtant ne sera introduite qu’à l’issue de la fête, aussi pour l’instant, s’adonne-t-on sans retenue à ripaille. Il ne s’agit point là d’un banquet honnête, cérémonieux et protocolaire mais de sauvages bacchanales organisées autour d’une estrade à peine surélevée et d’un bassin qui, du firmament, reflète les sombres alarmes. Vautré au bord de l’eau sur des tapis luxueux étalant les raffinements et les fastes de l’Orient, parmi des coussins aux brocards somptueux, on dévore plus que de raison et surtout, on boit bien au-delà de la déraison.
Rivalisant avec un ciel qui disperse son ultime pourpre, des flambeaux, tout autour, se sont allumés pour incendier de leurs rougeoiements infernaux et sanglants cette effarante scène. Se presse là une foule de plus d’une centaine de personnes composée de vieux aristocrates accompagnés de leurs épouses, favorites, esclaves ou concubines auquel s’ajoute le peuple fourmillant de la valetaille, des échansons et musiciens. Tous ces notables sont maintenant abominablement ivres et ne s’écartent qu’à peine pour cracher et régurgiter abondamment, puis reviennent se gaver à nouveau. La touffeur ambiante se combinant à d’autres concupiscences les a dépouillés des toges ou robes et de lourds corps adipeux exsudant de répugnantes humeurs s’entremêlent à moitié nus parmi les riches étoffes et vêtements abandonnés. Les parfums subtils d’onguents onéreux et les fragrances capiteuses de la myrrhe se conjuguent à d’âcres odeurs de vinasse, de sueur et de vomissures. On échange de louches caresses, de gras baisers et un convive un peu plus aviné plante son couteau dans la cuisse d’une servante, puis sans vergogne, s’esclaffe de son geste. Tel spectacle effraierait bien des hétaïres totalement corrompues et journellement nourries aux sources du vice.
Hérode lui-même n’est pas en reste et délaissant sa chère Hérodiade, il lutine allègrement une jeune esclave. Il lui a arraché sa tunique et la malheureuse enfant dénudée, qui assure son service pour la première fois en ces lieux, pleure en silence tandis qu’il la fesse brutalement en se divertissant de ses détresses. Bien que le visage renfrogné par d’autres tracas, son épouse aussi se distrait avec deux mignons qui, fougueusement de bouche et de doigts alternativement, flattent ses tétons. La ménade est dépoitraillée et s’offre à leurs mains lestes tout en poursuivant une conversation entrecoupée de soupirs avec un barbon écarlate d’agitation qu’une courtisane costumée de ses seuls fards pourlèche énergiquement. Déjà certains convives saouls et repus s’assoupissent et ronflent bruyamment.
Hérode, qui ne souhaite pas se retrouver face à un public totalement avachi, décide alors de les ranimer et envoie quérir Salomé.
La jeune fille, depuis le début de l’après midi se prépare et se pare. Il y a longtemps qu’elle attend d’être dans le monde mystérieux des adultes introduite. Ce monde dont sa mère, jusqu’à ce jour, l’a jalousement écartée nourrissant ainsi son imaginaire d’espoirs et de craintes fantasques, développant de ce fait une vive fascination à son endroit. Elle n’a cependant pas vécu en recluse et pouvait librement vaquer comme bon lui semble dans l’enceinte du palais et dans la ville bien que dès lors, accompagnée au moins d’une duègne.
Elle ne s’est nullement ennuyée dans l’univers feutré et douillet de l’appartement de sa mère et dans l’immense salle qui lui faisait office de chambre. Elle y partageait régulièrement la compagnie charmante de jeunes suivantes avec lesquelles elle riait, s’amusait mais surtout dansait. Elles l’avaient initiée aux tortillements du ventre et des fesses tandis qu’en retour elle les avait essoufflées dans le tourbillon de sauts et pirouettes qu’elle s’était inventée. Elles lui avaient encore longuement dépeint ces fêtes brillantes qui confortaient la réputation d’Hérode et où « tout ce qui compte dans la cité » ambitionnait d’être convié. En longs récits, très imagés, elles l’avaient d’avance plongée dans l’ambiance de ces festins officiels un peu pesants à force d’être guindés, et dans celle des réjouissances plus intimes un brin périlleuses à force d’être friponnes.
Salomé donc, n’est point niaise ; elle subit pourtant l’envoûtement de ce monde ignoré qu’elle présume sauvage et cruel sans toutefois attribuer un sens clair à ces mots. Dans la perspective de la soirée, elle s’est baignée accompagnée des effluves de ses angoisses, coiffée, portée par la houle de ses désirs, fardée, rongée par la crainte de ses défaillances, très soigneusement parfumée pour soutenir l’éther de ses rêves et pour parachever ces préparatifs, minutieusement habillée. À cette fin, elle a choisi de se couvrir d’une série de fines voilettes dont la dernière la recouvre de pied en cap. C’est la plus opaque, bien que comme les autres résolument diaphanes, qui lui permettra de dissimuler ses rougeurs et confusions. Elle sait qu’il lui faudra danser, aussi de sandales ne s’est-elle encombrée.
Enfin retentissent à sa porte les coups répétés d’une mère fière et inquiète qui vient la chercher. Celle-ci prévient : « Ils sont ignoblement saouls et surexcités mais danse comme tu sais le faire jusqu’à les étourdir et ils seront séduits. Ne les écoute pas, ne les regarde pas, ne te laisse pas impressionner et ne t’interrompt sous aucun prétexte avant de te les sentir acquis. Tu deviendras de la sorte leur reine et ils se battront entre eux pour accéder à tes désirs les plus saugrenus qui feront leur bonheur. Va, tu es ma fille et sauras les dompter ! » Elle pousse ensuite la frêle innocente élevée dans le secret de son boudoir sur l’estrade, au cœur de l’arène.
Une fraction de seconde la surprise fige l’assistance. Quelle est cette monstruosité à conformation vaguement humaine et sordidement camouflée, qui à danser veut s’ingénier alors qu’en cet exercice l’apparat d’une presque complète nudité est exigé ? Une voix, apostrophant Hérode, bafouille : « Dis donc roi, c’est ça ta belle-fille, cette efflanquée d’un monceau de chiffons affublée pour à sa maigreur pallier ? Si tu lui cherches mari, la dot devra ce manque de chair dispendieusement compenser ! » Le ton ainsi est donné et tous se déchaînent, s’esclaffent et rigolent à gorge déployée. En cette bauge surchauffée, la grâce et la fraîcheur ne se conçoivent que comme une insupportable provocation qu’il importe d’avilir et de souiller.
Que peut-elle face à tant de férocité déchaînée ? Elle ne sait guère que danser, donc, selon l’injonction de sa mère, elle dansera, non point en enchaînant les lascifs déhanchements et tortillements du ventre qu’ils attendent, mais ainsi qu’en le refuge de sa chambre elle s’entraîne. Sous les sifflets et quolibets, Salomé déjà a bondi au milieu de la scène poursuivie par de grasses railleries et d’ignobles obscénités dont sans saisir la teneur elle devine l’outrageuse et ordurière verdeur. Elle s’enroule et s’élève, virevolte éperdument tandis qu’on la bombarde d’épluchures et d’écorces, d’os à moitié rongés et de bas morceaux. Ces huées, elle se fait fort de les apaiser et tant pis si, pour l’instant, elle s’écorche sur les reliefs qui jonchent le plateau.
Les musiciens d’abord hésitent, peu accoutumés à des cabrioles aussi rapides et débridées mais tentent désormais sinon de conduire, au moins de suivre le rythme endiablé et déconcertant de ses pas. Les pieds agiles se sont rapidement adaptés à l’aire de leur évolution et s’agitent transportés par une fièvre inspirée, flottent et s’ébattent au-dessus du sol, transgressant ses graves pesanteurs. Dans une surprenante envolée, Salomé jette les bras très haut au ciel entraînant la gaze qui la masque quand, aussi soudaine que brutale, une première rafale, prémices d’une tempête de dieux odieux complice, l’emporte et elle s’envole parmi les convives enivrés.
De la meute la fureur alors s’emballe : on attrape ce trophée et on se l’arrache en une frénétique mêlée. Il n’en reste bientôt que charpie mais cet intermède achevé tous les yeux se reportent vers le visage dévoilé de la princesse éplorée. Elle, qui escomptait ses troubles sous la voilette acolyte occulter, se sent irrémédiablement dépouillée et s’enlumine de ravissantes rougeurs mais ce contretemps ranime ses ardeurs qu’elle déploie en impétueuses voltiges.
Cette pâle et blonde figure par l’effort et le désarroi empourprée s’éclaire d’un feu intérieur, se détache dans le halo d’une rayonnante auréole. Elle parcourt la foule du regard glaçant de ses yeux immenses dilatés par la frayeur et le fard, étincelants d’une farouche flamme qui intime à l’entourage un calme précaire. Celui-ci, déjà par toute cette exquise et sévère beauté fasciné, paraît à présent pétrifié. Éole une fois l’a trahie mais dorénavant elle entend la situation dominer et ne plus, fût-ce par les éléments, se faire berner. Tout en dansant elle défait l’agrafe qui maintient la seconde étoffe. Un élan prodigieux l’enlève et elle semble par les nues aspirée, quand à l’apogée de son essor elle étale l’aile bariolée, que la foudre illumine et qu’elle abandonne délibérément aux furies venteuses avant qu’à terre s’affaisser.
À l’exception des sistres, des flûtes, des tambourins qui l’escortent et de lointains et sourds grondements, l’apaisement désormais est complet.
Une brève minute, elle apparaît pantin désarticulé se disloquant en gestes extravagants qui affirment sa juvénile souplesse. Elle roule et glisse sur les ordures amoncelées, se vrille et s’entortille avant qu’une troisième pelure sur le sol déposer. Une impulsion la redresse et elle se balance, d’un pied chassant l’autre, comme si à l’attraction de la glèbe elle voulait encore et toujours échapper. Ce blême fantôme, nimbé d’éclairs, dont la violence et le nombre s’accroissent, qui exhibe son ensorcelante beauté doublée d’une émouvante fragilité, graduellement prend de la consistance. Dans le contre-jour des torchères, une créature légère et vaporeuse s’ébauche sous les derniers tulles, plus fins et transparents tandis que du tabernacle des chairs ils approchent. On discerne le corps gracile et délicat qui les sous-tend et les anime, la peau ivoirine et subtilement duvetée, frissonnante d’ardente fièvre sous leur illusoire protection. Une silhouette nubile s’esquisse, déjà harmonieuse, magnifique et élancée, ferme et fuselée, délicieusement proportionnée, presque de femme à l’orée d’une divine plénitude. On pressent l’épanouissement imminent de ce sublime bourgeon de sève vitale gorgé bien qu’encore sur lui-même refermé. Dans cette ambiance irréelle, un silence fracassant s’est établi.
Les musiciens ne jouent qu’en sourdine et il n’est, jusqu’à l’orage, qui ne retienne ses tonnantes bordées. Plus que quiconque Salomé s’en trouve assourdie. Elle, qui avait supporté sans broncher et sans l’entendre le tollé des invectives, appréhende la lugubre menace en ce muet vacarme celée et en est présentement toute ébranlée. Éméchés comme ils le sont, en les contraignant à suivre d’un regard par les éclats de la foudre déjà éblouis sa bondissante équipée, elle a dû les hébéter, mais le mutisme soudain, qui pétrifie l’odieuse assemblée, lui reflète son charme captivant, lui divulgue le funeste sortilège de sa beauté. Jamais pourtant elle ne s’est sentie belle. Certes, elle s’était parfois émue lorsque dans l’intimité de sa chambre, elle émergeait de son bain n’osant qu’à peine pudiquement épier le galbe pâle de sa troublante nudité, habillée des seules perles de buée sur le miroir déposées. Jamais non plus, elle n’avait conçu que cette forme éthérée, dont elle doutait qu’elle fut sienne, et pour laquelle d’un désir confus elle s’était passagèrement éprise, puisse se faire offense. Ce silence pesant, chargé de louches équivoques, le lui révèle.
Le peuple courtisan resserre et replie ses rangs, ébahi par cette vibrante hallucination. Les mâles à l’œil lubrique et concupiscent, époumonés, halètent bruyamment et bavent sans gêne avec des mimiques de carpes extraites de l’eau. Eux, qui n’imaginent le plaisir que vénal et corrompu, sont attendris par tant de délicatesse mais n’en forcent pas moins, conjointement, leurs compagnes à des attouchements libidineux. Les femelles la haïssent, débordantes d’une irrévocable animosité. Elle leur fait découvrir et maudire l’accablante pesanteur de leurs mamelles, l’empâtement gluant de leur bedaine, l’ampleur outrée de leur hanche, l’énorme bouffissure de leur croupe et la distension pâteuse de leurs cuisses. En outre elle a ressuscité en elles, indûment tant qu’inexcusablement, des espérances et des rêves depuis des lustres oubliés et enterrés. De leurs hommes enfin, elle a attisé pour des tendrons les appétences si bien que longtemps durant, quand ils les étreindront distraitement, elles sauront que c’est en ses bras chimériques qu’ils convolent.
Sa mère l’en avait avertie : « Tu les dompteras ! » et la foule salace est à présent envoûtée. Elle devrait s’en tenir là et dignement se retirer. Une seconde elle hésite… Toutefois un obscur et mystérieux instinct l’aiguillonne et sa mère, impitoyable, elle entend qui susurre : « Surtout ne t’arrête sous aucun prétexte. » Elle pressent pourtant qu’un seul pas de plus l’entraînera dans une spirale infernale que rien ne saura briser, qu’un voile de moins l’obligera à tous les enlever. La tentation cependant se fait irrésistible de céder à ce vertige inconnu qui, en fourmillement diffus combinant désir et crainte, s’arroge et son esprit et ses chairs. Dans l’ombre elle reflue un bref moment puis s’en dégage, s’avance et d’un seul mouvement s’écorche de deux étoles encore qu’elle porte en une ronde triomphale au bout de ses bras éployées. Sous ses dernières voilettes, elle sent ses seins menus et si frêles, s’affermir jusqu’à s’irriter d’une crampe douloureuse qui les raidit. Une brûlure au creux de son ventre s’est éveillée et une flamme, dont avant ce soir elle ignorait tout, embrase ses entrailles, progresse inexorablement pour incendier son sexe d’une envie aussi imprécise qu’impérieuse.
Les rugissements et mugissements ont repris de plus belle mais à l’invective ont succédé l’exhortation et l’invite malsaines. Un damoiseau outrecuidant complètement dévêtu se redresse en titubant et la hèle pour son pénis en précaire érection lui désigner. Elle n’en a cure et sous ce nouveau déluge d’insanités saute si haut que d’une frange de son voile elle coiffe une vasque embrasée. Un bref instant la voici en oiseau de feu transformée, par les éclats de la foudre environnée en déesse astrale métamorphosée. De ses muscles le contrôle lui échappe et elle se sent possédée par une transe hallucinée qui la fait palpiter, trembler et chanceler, victime comblée d’un sortilège confusément souhaité. La tempête lâche enfin ses premières gouttes, immenses, de sombres mélancolies gonflées qui s’écrasent sur sa face effarouchée y roulant en épais sanglots englués de fard.
Des convives le délire s’exaspère ; cet interminable effeuillage en aurait énervé de moins libertins et ils s’agacent sur le gril de leurs impatiences réfrénées. On braille et vocifère, on se trémousse odieusement tandis que menaçant, autour d’elle, le cercle on resserre. Elle frissonne, offerte désormais, vierge pâle et nue, vulnérable et exposée, d’une unique et dérisoire enveloppe caparaçonnée, aiguisant toujours davantage l’obscène appétit des prédateurs. Elle devine que sa moindre bévue sonnera l’hallali et augure que c’est à son sacrifice qu’ils aspirent. Elle comprend que cette danse ne doit ni ne peut se terminer car elle n’aura pas plus tôt ses entrechats achevés et son dernier voile retiré qu’elle deviendra la proie des fauves exacerbés. Elle a déjà observé des charmeurs de serpents et conçoit que là, elle en tient le rôle bien qu’ignorant comment sur ces reptiles le panier refermer. À leurs libidineux délires seul Hérode peut la soustraire.
Vers lui sa danse glisse mais elle le découvre plus congestionné et rubicond que les autres et l’entend implorer : « Salomé, de grâce ce voile, écarte ce maudit voile. » Elle réalise qu’il sera premier à l’écharper et se recule pour pavoiser dans l’orbe aveuglant des torchères, affublée de sa seule altière et ardente nudité, puis revient vers lui accablante comme les félicités de l’enfer.
Hérode à nouveau de l’adjurer : « Tout ce que tu souhaiteras, Salomé, serait-ce de mon royaume la moitié, si tu quittes cet odieux voile. » De puérils colifichets, fussent-ils « la moitié d’un royaume », elle n’ambitionne nullement. Son unique vœu viserait à détourner les fureurs présentement à peine contenues de la foule. Il lui faut les esprits effaroucher et les emplir d’une frayeur épouvantée. Se souvenant soudain de la lancinante et vaine requête de sa mère, elle retourne vers son beau-père et, dans une déférente révérence, la tête du Baptiste requiert, ici, sans délai. En ce palais lui seul en effet commet l’irréparable faute de ne la point désirer.
Hérode, une courte et interminable minute hésite, puis obtempère ; bourreau, billot et condamné, promptement, sont alors amenés. Salomé face à l’exécuteur s’est rangée et quand la lame acérée décolle la victime propitiatoire, elle tombe l’ultime voile et du sang, d’abondance par la carotide éjecté, se vêt et se pare, tunique écarlate à l’incarnat de sa peau accordée.
Une terreur sacrée étreint l’assistance médusée. Elle se penche pour ramasser ce chef bafoué et se fait ainsi entièrement asperger d’une sanglante giclée. Au bourreau elle arrache son arme et d’un pas ferme regagne le centre de l’estrade. Là, elle risque quelques pesantes foulées mais la flamme blanche s’est en rouge fanal épuisée et pendant que d’une main elle serre convulsivement la tête du Baptiste sur son sein dont les tétons roidis semblent vouloir crever les orbites, de l’autre elle enfonce brutalement le pommeau du cimeterre dans son vagin enfiévré, avec un cri dont on ne sait s’il exprime la douleur, l’horreur ou le bonheur. En gorgone transfigurée, bien assurée qu’en ce rôle nul ne la voudra aimer, elle virevolte sur elle-même en un tourbillon désespéré, paraît encore vouloir s’envoler mais retombe comme foudroyée et s’effondre inanimée.
Tandis qu’on l’emporte, un sang vermeil empourpre l’ivoire de son ventre et de lourdes larmes cramoisies transpirent sur ses cuisses proclamant le terme d’une virginité par un airain meurtrier déflorée.
Les cieux enfin ouvrent leurs bondes et libèrent à torrent des flots détersifs.