n° 17565 | Fiche technique | 40781 caractères | 40781Temps de lecture estimé : 20 mn | 19/09/16 corrigé 06/06/21 |
Résumé: Une histoire d'amour, c'est toujours banal pour ceux qui ne la vivent pas. Alors j'ai tenté une mise en forme particulière... | ||||
Critères: amour poésie -amouroman -extraconj -internet -poésie | ||||
Auteur : Brodsky Envoi mini-message |
Poésie |
Préface
Lorsque j’étais en classe de seconde, j’ai eu la chance formidable d’avoir un professeur romancier, qui était également un ami d’Aragon. C’était un érudit, drôle, fantasque, subversif et… impitoyable avec les scribouillards que nous étions. « Ayez l’intelligence de ne parler que de ce que vous connaissez ! » répétait-il sans cesse.
Depuis toujours, je me suis efforcé de suivre ce conseil…
Une histoire d’amour… Comment écrire une histoire d’amour ? Si l’on suit ce conseil, on est bien obligé de ne parler que de celle(s) qu’on a vécue(s).
C’est alors qu’apparaît le problème de la pudeur. Mes sentiments profonds, mes altercations, mes cas de conscience, mes galipettes… il y aurait quelque part comme une sorte d’exhibitionnisme malsain à tout vous raconter. Mais en même temps, comment être crédible si, comme le disait Céline, je ne suis pas prêt à mettre mes tripes sur la table ?
C’est peut-être mon ancienne fréquentation des Jésuites qui m’a aidé à trouver la solution : « Ne pas hésiter à mentir, pour mieux dire la vérité. »
Dans l’histoire qui va suivre, tout est vrai, et tout est faux à la fois. Tout est arrivé, mais pas forcément dans l’ordre, ni de la manière décrite dans la suite de ce texte. C’est une histoire banale, et en même temps exceptionnelle. Le mythe d’Orphée, réactualisé pour vous. Oui, le héros descendra en enfer afin d’y délivrer sa bien-aimée. C’est donc un conte… qui comme tous les contes, contient sa part de vérité.
Et finalement, cette vérité, ne se trouve-t-elle pas dans le cœur de chacun d’entre nous ?
*
Il était une fois une histoire… une histoire qui commence bien avant l’écriture de cette première chanson. Je postais des nouvelles sur des forums littéraires et je recevais des critiques très diverses, bonnes ou mauvaises, peu importe. Une lectrice a commencé une correspondance avec moi, mêlée d’encouragements et de sarcasmes. Elle se demandait si mon côté « ours mal embouché » était réel, ou si je jouais un personnage.
Nous avons échangé de longues lettres où chaque fois son esprit et sa témérité me donnaient un réel sentiment d’avoir à faire à quelqu’un d’exceptionnel. D’abord indifférent, je me rendis compte un jour que j’aimais nos conversations, que je recherchais sa présence.
Mais rien n’était possible entre nous. Elle habitait loin. Elle était mariée, et elle avait deux enfants… État que je respectais trop pour imaginer quoi que ce soit d’autre qu’une tendre complicité littéraire.
Nous échangions la nuit. Parfois, en sortant fumer sur mon balcon, je regardais les étoiles, et je pensais à ce que j’allais lui raconter.
« Peut-on aimer quelqu’un qu’on ne rencontrera jamais ? » Je ne sais plus qui a posé la question… Ni pourquoi, ni comment… Je sais par contre que ce soir-là, j’ai écrit ceci :
ESTRELLA
Je suis un loup amer qui se guide aux étoiles
Dans la nuit sur la mer, l’océan de la toile.
L’une d’elles scintille et guide mon radeau ;
Je suis Mars, et Vénus me parle de là-haut…
À des années-lumière, flirter ne fait pas mal ;
Quand on parle d’amour, ce n’est pas immoral.
Je suis un dieu perdu au milieu des héros
Qui regarde Vénus et qui rêve tout haut.
Estrella,
Séductrice belle et fatale,
Ne pars pas !
Viens donc cueillir la fleur du mâle…
Je veux écrire des mots d’amour
Qui disparaissent avec le jour.
Le matin dans la nuit, le soir dans ta lumière,
Tes mots sont le nectar d’un amour éphémère ;
Je suis ivre, et pourtant, ta coupe je la bois :
Oubliant mes serments, j’ai largué Nausicaa.
Estrella,
Séductrice belle et fatale,
Ne pars pas !
Viens donc cueillir la fleur du mâle…
Je veux écrire des mots d’amour
Qui disparaissent avec le jour.
J’ignorais encore les souffrances qui étaient les siennes, au quotidien. Elle a fini par avoir le courage de m’en parler. Je crois que, par acquit de conscience, j’ai tenté mollement de l’encourager à sauver son couple. Mais je n’étais pas sincère… Plus le temps passait, plus je me sentais irrésistiblement attiré par elle. Et nous avons fini par nous rencontrer.
Les textes qui suivent furent écrits peu de temps après nos premières rencontres…
LOVER DOSE
Je suis en manque, et j’ose
Te réclamer ma dose
De toute ces belles choses
Que tu me dis tout bas
Avant que je n’explose
Derrière la porte close,
Le corps en loverdose
Et le cœur en éclats.
Je t’en supplie, mon âme,
J’ai besoin de ma came
Et de tes mains de femme
Qui se posent sur moi.
Tu en joues, c’est infâme,
Mais tant pis pour les flammes :
Je te vendrai mon âme
Pour une heure contre toi.
Je suis en manque, et j’ose
Te réclamer ma dose
De toutes ces belles choses
Que tu me dis tout bas
Lorsque tu prends la pose
Et qu’alors tu m’imposes
Une feuille de rose
En riant aux éclats…
Circé, ta voix me charme,
Sorcière aux mille larmes !
Tu as volé mes armes
Et tu as fait de moi
Le junkie de tes mots,
De tes yeux, de ta peau,
Qui parle à tes photos
Lorsque tu n’es pas là.
AMOUR KAMIKAZE
Mon amour kamikaze,
Même si j’ai l’occase
De m’enfuir comme un naze
En jouant les blasés,
Dans un dernier Banzaï,
Laisse-moi m’écraser
Sur le pont de corail
De tes jambes écartées.
Mon amour impossible,
Même si je suis la cible
D’un malheur indicible
Qui devrait me troubler,
Laisse-moi donc encore
Dans un dernier sursaut
Sortir du château-fort
Et crever sur ta peau.
Je jouerai ma dernière chemise ;
Si je perds, je jouerai ma peau.
Ce qu’il me reste, je le mise
Sur ton unique numéro.
Mon amour interdit
Par les lois, les édits
De ceux que je maudis,
Je voulais te dédier
Ces mots de rébellion
Et venir te donner
Un peu de ma passion
Dans ce monde glacé.
Mon amour défendu
Par les coincés du …
Les ligues de vertu
Qui n’ont jamais aimé,
Ne les écoute pas :
L’Amour est un mystère
Qu’ils ne comprennent pas,
Et pas une chimère.
Je jouerai ma dernière chemise ;
Si je perds, je jouerai ma peau.
Ce qu’il me reste, je le mise
Sur ton unique numéro.
Je jouerai ma dernière chemise ;
Si je perds, je jouerai ma peau.
Ce qu’il me reste, je le mise
Sur ton unique numéro
Sur ton unique numéro…
Mon amour kamikaze,
Même si j’ai l’occase
De m’enfuir comme un naze
En jouant les blasés,
Dans un dernier Banzaï,
Laisse-moi m’écraser
Sur le pont de corail
De tes jambes écartées.
À TES GENOUX
À tes genoux,
Je n’aurais pas supporté ça
De la part d’une autre que toi ;
Je me sens comme le méchant loup,
Apprivoisé, à tes genoux.
À tes genoux,
Tu sais, je n’aurais jamais cru
Qu’on pourrait me manger tout cru
Et que j’aurais trouvé ça doux,
Heureux et fier, à tes genoux.
À tes genoux,
Et par je ne sais quel charme,
Accepter de poser mes armes,
Content d’avoir ta corde au cou,
D’être à ma place, à tes genoux.
À tes genoux,
C’est moi qui dois lever les yeux
Afin de contempler un peu
Cette peinture de l’amour fou
Qu’on ne peut voir qu’à tes genoux.
ELLE A…
Elle a le regard d’un ange,
Elle a des pouvoirs étranges,
Un truc qui fout le dawa sur mon radeau,
Des yeux verts qui prennent les commandes
De mon cerveau…
Ouais, tous les soirs je la mange ;
Tant pis si ça vous dérange
De savoir qu’on passe nos nuits à rêver
Et que tous nos voisins se plaignent
De ne pas pioncer.
J’adore quand elle prend les choses
En main, et sans faire de pause
Quand elle me joue des airs qui font mes délices,
En virtuose experte du trombone
À coulisse.
Elle a le regard d’un ange,
Elle a des pouvoirs étranges,
Un truc qui fout le dawa sur mon radeau,
Des yeux verts qui prennent les commandes
De mon cerveau…
Quand son regard me transperce,
Parfois elle devient perverse
Et elle me cloue au pieu jusqu’au p’tit matin ;
Elle fait de moi son Crucifié
Du traversin.
Lorsque j’ai rendu mon âme
À ses mains et à ses charmes,
Elle délie mes poignets et puis elle m’invite
Dans son divin tombeau pour que
Je ressuscite…
Elle a le regard d’un ange,
Elle a des pouvoirs étranges,
Un truc qui fout le dawa sur mon radeau,
Des yeux verts qui prennent les commandes
De mon cerveau…
Dans son Paradis étrange,
Je jouis du sexe des anges
À la lumière tamisée d’un nuage irréel,
Et ça swingue dans tous les Carlton
Du septième ciel.
… Difficile cependant de vivre une histoire d’amour dans le plus grand secret. Le monde dans lequel nous vivons a un mot pour la qualifier : adultère. Difficile lorsqu’on a peur de la réaction des proches. Difficile aussi d’admettre que celui qui la garde dans la prison dans laquelle elle est enfermée peut se comporter en bourreau cruel et inconscient.
LE CHANT TRISTE DES OISEAUX CE MATIN
Le chant des oiseaux m’a réveillé
comme tous les matins,
mais ce matin
leur chant avait quelque chose de particulier :
il était triste.
Même sans parler la langue des piafs,
la tristesse, l’angoisse et le désespoir
qui s’échappaient de leurs pépiements
étaient d’une terrible évidence…
Et puis, ils chantaient plus fort que d’habitude ;
alors j’ai écouté plus attentivement
jusqu’à m’apercevoir
qu’ils étaient tous
juste sous ma fenêtre
et qu’ils tentaient de me faire passer
un message important.
J’ai fini par comprendre
que dans un pays pas si lointain,
une brute épaisse avait enfermé
l’hirondelle qui venait parfois
jusque chez moi
pour me parler du printemps
des amoureux.
Puis, après avoir ricané
du rire cruel des enfants stupides
et avoir jeté au loin la clef
de la cage,
il s’était allongé sur le canapé
et endormi tranquillement
du sommeil de la brute
qui ressemble tant à celui des justes,
sans honte, sans soucis, sans remords,
et j’ai compris que les étoiles allaient bientôt tomber du ciel
pour disparaître à jamais
dans le néant de la connerie humaine.
DON’T TRY
(« Don’t try » est l’épitaphe que l’on trouve sur la tombe de Charles Bukowski.)
Y a des bouteilles de rhum et des bouteilles de sky,
Et sur la pierre tombale, on a écrit « Don’t try ».
N’essayez pas d’être un homme libre,
N’essayez pas d’être écrivain,
N’essayez pas d’être un poète :
Le sang se nettoie mieux que l’encre sur les mains.
N’essayez pas, tout est déjà perdu :
Tout votre amour, vos pitoyables histoires de cul
Ne feront jamais le poids
Contre les ligues de vertu.
Pas le droit d’écrire,
Pas le droit de boire,
Pas le droit de rire ;
Juste le droit de croire
Au bon Dieu des riches,
À celui des patrons
Et des bigotes au cul serré
Qui ont excommunié les petites blondes aguichantes
Et les rouquines à la chatte accueillante.
N’essayez pas, à moins d’être prêt à tout,
Prêt à devenir fou,
À devenir un bon à rien :
Le sang se nettoie mieux que l’encre sur les mains.
Y a des bouteilles de bière et des bouteilles de sky,
Et sur la pierre tombale, on a écrit « Don’t try ».
UNE BOUTEILLE À L’AMOUR
Je regarde la glace
Lorsque nos corps s’enlacent
Dans cet hôtel de passe ;
Un amour clandestin,
Un balourd incertain,
Une Déesse en détresse…
Une bouteille à l’amour,
Un amour à la mer,
Et puis l’amer à boire,
Et puis la peur du noir…
Sur le miroir, des traces,
Messages qu’on efface,
Les étreintes fugaces
D’un amour incertain,
Passagers clandestins
Dans le strass et le stress.
Une bouteille à l’amour,
Un amour à la mer,
Et puis l’amer à boire,
Et puis la peur du noir…
Cette peur qui nous glace
Et nos cœurs qui se lassent
Avec le temps qui passe,
Tous ces petits matins
De bonheur incertain
Entre stress et tendresse.
Une bouteille à l’amour,
Un amour à la mer,
Et puis l’amer à boire,
Et puis la peur du noir…
Je sais tout ça, ma belle ;
Pourtant, mon cœur rebelle
Saura rester en selle.
Je monterai aux cieux
Botter le cul des dieux
Pour tes yeux de Princesse.
Boire le philtre d’amour
Et reprendre la mer
Et ton amour à boire
Et ton corps dans le noir…
Mais nous nous aimons… Et nous prenons des risques. Se revoir est chaque fois une fête. Se quitter est toujours un drame. Et son absence est devenue insupportable. Et j’ai peur pour elle chaque fois qu’elle rentre chez elle… Ô, mon amour, je voudrais tant qu’elle prenne enfin la décision de me rejoindre pour toute la vie. Mes vieux démons sont de retour… Jalousie…
UNDER THE RAINBOW
I am under the rainbow
Of your legs, my baby ;
Boire la pluie, voir le soleil
Comme un sauvage au pays des merveilles…
Dis-moi à quoi tu rêves, bébé,
Au milieu des lilas en fleurs
Quand Cupidon t’a transpercée
D’une flèche d’amour en plein cœur.
Le monde entier connaît la suite ;
Ta voix m’invite,
Ton cœur m’habite,
Plus de limites…
Dis-moi pourquoi j’en crève, bébé,
Seul dans mes draps, pourquoi j’ai peur
Dans le noir, les volets fermés,
Lorsque tu pars parce qu’il est l’heure ;
Et le monde entier me dégoûte,
Toi sur la route,
Et puis le doute,
Et la déroute…
Dis-moi pourquoi j’écris, bébé,
Toutes ces chansons dans la douleur.
Je les voudrais tendres et sucrées,
Mais plus je t’aime et plus j’ai peur,
Et le monde entier devient flou.
Je pense à nous,
J’en deviens fou,
Et puis jaloux…
LES NUITS SANS TOI
Les nuits sans toi quand j’éteins Skype,
Lorsque la peur dit « No escape »,
Que je suis seul face à tes doutes,
Perdu, impasse de la déroute…
Les nuits sans toi, les nuits sans lune
Et sans autre lumière aucune
Que la lueur des cigarettes
Qui se reflète dans la fenêtre…
Les nuits sans toi,
Je sors sur le balcon ;
Je fume, je bois,
Je fais le con.
Les nuits sans toi,
Les fruits de ma passion
Se diluent dans
Mes illusions.
Les nuits sans moi quand je raccroche,
Quand tu trouves que la nuit est moche,
Que tu soignes avec la vodka…
Les heures où je ne suis pas là,
Les nuits sans moi à pas dormir,
Que trop épuisée pour écrire,
Le corps ouvert, les yeux fermés,
Sans mes mains pour te caresser…
Les nuits sans moi,
Tu sors dans le jardin ;
Tu ne fumes pas :
Tu pleures en vain.
Les nuits sans moi,
Les mots de ma passion
S’envolent sans
Ta permission.
Pour toi et moi, la nuit s’efface ;
Un petit matin dégueulasse
Qu’on veut noyer dans un café.
Un jour pour rien sans te parler,
Un jour à attendre la nuit,
Une parenthèse infinie
Qu’on finira par refermer
Lorsqu’on pourra se retrouver.
ET RIEN DE PLUS
Ce front percé par les épines
et dont le sang a coulé
comme des larmes vermeilles
sur mes joues,
ce flanc qu’ils ont percé
avec leurs lances,
ces mains qu’ils ont clouées
sur la croix de l’infamie,
toutes ces plaies devenues cicatrices,
tu ne les verras plus,
je n’en parlerai plus :
je saurai les cacher
dans le noir protecteur
de mes sombres pensées
et de ma chambre close
où, sur le lit défait,
je ne veux plus
que faire l’amour,
et rien de plus.
LE MIROIR BRISÉ
Nous avons fait l’amour pendant des heures
et des heures
comme à chacune de nos rencontres
et je t’ai fait jouir
et tu t’es endormie dans mes bras
et je me suis levé pour me nettoyer
dans la salle de bain
et je me suis regardé dans le miroir
et pour la première fois depuis bien longtemps
je me suis trouvé beau
et puis soudain tu as poussé un cri
et le miroir s’est brisé
et tu t’es mise à pleurer
et il ne reste plus de tout cela
que des morceaux de miroir
qui jonchent le sol glissant de ta salle de bain.
Alors j’ai ramassé un morceau du miroir
et je l’ai glissé dans ma poche
avant de te quitter
et je me regarde dedans ce soir
en espérant y retrouver le souvenir
de nos merveilleux moments
mais il me renvoie l’image
d’un pauvre type ahuri
qui n’a pas dormi la nuit dernière
et qui a retrouvé
sa sale gueule d’écrivain insomniaque.
Il fallait bien que ça arrive un jour… Une imprudence, et il lui a fallu tout avouer. Et ce fut le début du cauchemar. Bien sûr que notre amour est pur, mais pour les autres il n’est qu’une faute, un crime, une trahison. Voilà que sont lancés les ultimatums. Plus question de se voir, désormais… La voilà surveillée, épiée, enfermée, privée de tout moyen de communiquer. Déchaînement de violence… Hier, se voir, c’était prendre des risques. Désormais, se parler devient une folie…
ET JE CRIE
Et je crie vers les étoiles
et je maudis les dieux
en laissant couler les larmes
qui me brûlent les yeux
et mon cœur est brisé
et je pense à nous deux
et je vomis ma haine
contre les gens heureux ;
et mon verre est sec
et mon cœur est vide
et le silence
et ton absence
et ma main qui cherche ta main
et qui ne trouve
rien.
COMME ÇA
J’ignorais que l’on pouvait souffrir
comme ça.
J’ignorais que l’on pouvait haïr
comme ça.
J’ignorais le feu
qui dévore les entrailles.
J’ignorais l’envie
des veines que l’on taille.
J’ignorais que je pourrais mourir
comme ça
après lui avoir dit dans un dernier sourire :
« Tout va bien, ne t’en fais pas… »
IL Y A PARFOIS DES OISEAUX…
Il y a parfois des oiseaux
qui viennent se poser sur nos épaules
sans qu’on sache vraiment pourquoi
ils ont choisi les nôtres.
Et ils pépient sans cesse
et du soir au matin
et leur chant est si doux
et on se sent si bien
lorsque du bout du bec
ils cherchent notre cou ;
et nos bras alors
se parent de plumes immenses,
se déploient comme des ailes
et nous prenons notre envol
pour rejoindre le ciel
prendre un peu de bon temps
sous le soleil
de Satan.
Mais l’oiseau doit repartir ;
même l’oiseau le plus sage
ne saurait vivre en cage
alors il promet
de revenir
très bientôt
du pays des oiseaux
et on reste là à attendre
avec son épaule soudain
devenue trop lourde
pour voler à nouveau.
Un seul être vous manque,
et tout est déplumé.
Et dans les bois au loin
on entend les chasseurs
tirer sur les oiseaux…
Et il ne reste que la peur,
la peur surnaturelle
d’une nuit froide et éternelle.
MON ANGE
Après une journée à mentir,
Après toutes ces heures à maudire
L’obligation des apparences,
Après tous ces sourires forcés,
Après ces rires exagérés
Afin d’endormir la méfiance…
Être apparue irréprochable
Aux yeux de ces gens responsables
Qui fuient devant les évidences
Pour ne pas être bousculés
Dans leur confort prêt-à-penser
En se fichant de ta souffrance…
Tu me rejoins enfin, mon ange,
Dans le silence de la nuit
Tandis que d’un sommeil étrange
Dorment ceux qui n’ont pas de vie.
Tu pleures un peu pour commencer
En me racontant ta journée
Toujours semblable et sans surprise.
Tu voudrais bien être plus forte,
Mais il faut bien que les mots sortent
Pour échapper à leur emprise.
Y en a marre de leurs gueules d’apôtres !
Tu partiras un jour ou l’autre ;
Nul ne pourra t’en empêcher.
Qu’ils gâchent leur vie ; mais la tienne,
Tu la veux ta main dans la mienne
Sur une route ensoleillée.
Tu murmures tous ces mots, mon ange,
Dans le silence de la nuit
Tandis que d’un sommeil étrange
Se fanent ceux qui n’ont pas de vie.
Et puis tu me parles d’amour
Avec des mots de tous les jours
Qui provoquent en moi le désir.
Tu es douce ou crue, c’est selon ;
L’ange se transforme en démon
Dans la recherche du plaisir.
Puis, au Diable les apparences,
Tu me reproches mes silences
Et mes caresses un peu trop sages ;
Tu me veux gourmand et vulgaire
Et tu me montes en écuyère
Tout en dégrafant ton corsage.
Et nous nous rejoignons, mon ange,
Dans la fureur et dans le bruit,
Sans souci des cris qui dérangent
Ceux qui dorment et n’ont pas de vie.
TOUS CES MOTS
Et tous ces mots qu’il m’est interdit
d’écrire à présent,
de prononcer,
de penser,
ne les vois-tu pas qui transpirent
à chaque instant,
à chaque minute,
à chaque seconde,
ne les vois-tu pas se former
sur le sol,
ne les entends-tu pas
recouvrir tous ces bruits de tonnerre ?
Ils n’existent que par toi,
ils ne vivent que pour toi,
à l’intérieur
de ce sanctuaire.
J’Y CROIS ENCORE
Et même si la nuit est noire
Et le silence assourdissant,
S’il reste au cœur si peu d’espoir
Que croire encore est affligeant,
S’il n’y a plus sur le goulot
Que la lie d’un vin bon marché,
Plus de poignard dans mon fourreau,
Plus de balles dans mon barillet,
J’y crois encore…
Et même si le mot « futur »
Disparaît de mon dictionnaire,
Si le bout de cette aventure
Mène aux portes du cimetière,
Si je dois signer le papier
De l’un des sbires de Satan,
Vendre mon âme déglinguée
À de sinistres charlatans,
J’y crois encore…
Même si le chant des sirènes
Vient pour bercer d’illusions,
M’ensorceler pour que je prenne
Un peu de leur foutu poison,
Même si leurs mains me caressent
Et me tentent jusqu’au matin
Pour profiter de ma détresse,
Je sais pourtant qu’elles n’auront rien…
J’y crois encore…
Et même fichu, même mort,
Même aux portes du Walhalla,
Je dirai aux dieux qu’ils ont tort,
Que je ne rentre pas sans toi ;
Et peu importent ton silence
Et le froid du petit matin,
Même si j’ai tort d’avoir confiance,
Même si je fais tout ça pour rien,
J’y crois encore…
Cette fois, tout est perdu. J’ai tout tenté, et elle aussi. Je suis à bout, et elle aussi. La nuit dernière, nous avons eu une longue conversation au téléphone. J’ai essayé d’être dur ; je lui ai dit des mots que je ne voulais pas, mais c’était la seule manière (pensais-je) pour qu’elle accepte l’inacceptable. Combien de temps ai-je pleuré après ça ?
ESTRELLA 2
Je suis un loup amer
Sur un bateau sans voiles
Perdu dans le désert
De cet océan sale,
Condamné par les dieux
Pour avoir trop aimé,
Trop cru au merveilleux
Parfum de tes baisers…
Estrella,
Séductrice belle et fatale,
Ne pleure pas ;
Tu l’as cueillie, la fleur du mâle,
Et comme un rêve, notre amour
S’efface avec le petit jour…
Pour raconter la fin de cette tragédie,
Il faudrait que je parle avec des mots choisis ;
Je n’en ai pas la force, je n’en ai pas envie ;
Il y a si longtemps que je n’ai plus dormi…
Oh, je sais bien que tout ça c’est ma faute ;
« Mea culpa, mea culpa », comme disent les autres :
J’avais pris notre amour comme un heureux défi
Tout en sachant qu’il faudrait en payer le prix.
Tu sais, mon Estrella, je n’oublierai jamais…
Ton petit corps tout chaud blotti entre mes bras
Et nos nuits sans sommeil, et tes yeux qui riaient,
Et nos conversations, et nos rires aux éclats.
Mais il fallait qu’un jour tout reprenne sa place ;
C’est pas juste, je sais… C’est pire : c’est dégueulasse !
Ils nous diront que c’est la vie, et rien de plus ;
Eh bien, elle vaut la peine pour ce qu’on a vécu.
Oh non, mon Estrella, s’il te plaît, ne pleure pas ;
Je vais m’y mettre aussi, on s’en sortira pas…
Comme un beau souvenir, garde-moi dans ton cœur
Comme je garderai nos instants de bonheur.
Et puis, on sait jamais de quoi demain est fait…
Mais c’est une autre histoire qu’il faudra raconter,
Une histoire moins tragique, une belle histoire d’amour ;
Nous nous retrouverons, qui sait… peut-être un jour…
SUR LA ROUTE DE MADISON
Sur la route de Madison
Ou de Memphis, je sais plus trop,
J’avais rencontré la personne
Qu’il me fallait.
Je méprisais les gens qui raisonnent,
Ont peur de tout, calculent trop.
Sur la route de Madison
Je suis passé…
C’est si beau de croire aux étoiles,
Aux sentiments, à l’infini…
C’est beau, lorsqu’on lève le voile
De la nuit.
C’est doux de plonger dans des yeux
Sans avoir peur de se noyer,
En oubliant que c’est dangereux
D’aimer…
Sur la route de Madison
J’ai pris son corps ; il était chaud.
Je l’ai aimé comme personne
Ne le pouvait.
J’ai encore de l’amour qui résonne
Dans le cœur et dans le cerveau.
Sur la route de Madison
On s’est aimé.
C’est si beau de croire aux étoiles,
Aux sentiments, à l’infini…
C’est beau, lorsqu’on lève le voile
De la nuit.
C’est doux de plonger dans des yeux
Sans avoir peur de se noyer,
En oubliant que c’est dangereux
D’aimer…
Sur la route de Madison
Nous étions trois, dont un de trop.
Il a fallu que j’abandonne
Pour rien casser.
J’ai écouté les gens qui raisonnent
Et je suis parti, le cœur si gros,
Sur la route de Madison
Et j’ai pleuré.
Mais je crois encore aux étoiles,
À l’infini, aux sentiments.
J’ai jeté sur mon cœur un voile
Et j’attends
De pouvoir plonger ses yeux
S’ils reviennent un jour me chercher
Quand il ne sera plus dangereux
D’aimer…
J’ai erré longtemps, désespéré entre les quatre murs de mon appartement. Moi qui me croyais si fort, je n’étais plus qu’une ombre, un fantôme. J’écoutais du soir au matin ces chansons que j’avais écrites pour ELLE. J’avais mal. Et je savais qu’elle avait mal. Et…
Quoi ? Qu’as-tu dit ? Tu es libre ?
Libre de quoi ? Tu… reviens ? Tu ne peux pas imaginer vivre sans moi ? Tu as renversé la table… les convenances… Tu arrives… tu es là ! Mon Dieu, mon Amour, comment est-ce possible ?
« La seule force de l’Amour… » : c’est moi qui ai dit cela ?
NE LÂCHEZ RIEN !
On est dans cette vie comme
sur un foutu ring de boxe
et on prend une multitude de coups
qui nous envoient parfois au tapis.
Mais l’homme vaincu n’est pas
celui qui tombe :
c’est celui qui ne se relève pas.
On est dans la vie comme
devant une satanée table de poker
avec juste un jeton en poche
et l’interdiction de se recaver.
Mais un jeton suffit
pour tout changer.
On est devant la vie comme
devant une pute sublime
qu’on n’a pas les moyens de se payer.
Mais même avec les poches vides,
il reste encore l’espoir que cette fille
te remarque et tombe amoureuse
de ta sale trogne cabossée.
On est devant la vie comme
devant une feuille blanche
sans plus aucune histoire à raconter.
Mais il suffit de commencer à écrire,
et les mots se chargeront du reste…
J’ai attendu l’amour pendant si longtemps
que j’ai fini par croire qu’il n’existait pas,
et puis j’ai croisé les beaux yeux verts de cette femme.
Alors je suis retourné m’asseoir
à la table de poker
avec mon unique jeton en poche.
J’ai rappelé mon manager
pour qu’il me trouve de nouveaux combats
et j’ai recommencé à écrire des histoires.
Ne lâchez rien,
JAMAIS !
C’est ce qu’ils voudraient tous,
mais ce n’est pas ce que VOUS voulez.
L’Homme accompli n’est pas toujours
celui qui gagne :
c’est celui qui sait ce qu’il vaut.
Oui, mon Amour, je sais, je ne manque pas de culot. C’est toi qui me sauves la vie, et c’est moi qui fais le fier. Mais je suis tellement heureux aujourd’hui… Cette vie que nous avons tant espérée tous les deux, la voilà possible désormais.
Le monde est laid, les gens sont fous, tout part en sucette… Mais tu es là.
Viens…
LES ROSES DE LA VIE
Cueillons les roses de la vie
En prenant bien garde aux épines ;
Cueillons les lilas de l’envie
Et respirons les aubépines.
Le mal n’est jamais où l’on pense,
Surtout pas dans le creux d’un lit
Où éclot le plaisir des sens ;
Aucun amour n’est interdit.
Dans mon refuge ou dans ton antre,
Je serai ton preux chevalier.
Tu veux mon épée dans ton ventre ?
Je veux te faire mourir d’aimer !
Cueillons les roses de la vie,
Et tant pis si quelques épines
Parfois laissent nos doigts meurtris
Quand tu t’endors sur ma poitrine.
Et si c’est au mâle que tu penses,
Celui dont tu veux chaque nuit
Que le corps, le cœur et les sens
Se soumettent à toi sans un cri,
Dans ton donjon, à tes genoux,
Je serai à toi, ma Maîtresse,
Et je t’aimerai comme un fou
En murmurant sous tes caresses :
Cueillons les roses de la vie
En prenant bien garde aux épines ;
Cueillons les lilas de l’envie
Et respirons les aubépines.
PHILOSOPHIE DANS LE BOUDOIR
J’aime quand, les yeux dans les yeux,
Comme un défi ou comme un jeu
Nous refaisons le monde à deux,
Moi tout nu et toi en peignoir.
Henri Lévy n’est pas sérieux,
Mais si comme Freud tu penses « queue »,
Chérie, je crois que c’est l’heure de
Philosopher dans ton boudoir.
Ces heures entières à discuter
Sur la bonne façon de tourner
Les mots, les phrases ou les idées,
Tous les deux plongés dans le noir…
Pourquoi Justine et la vertu ?
Pourquoi Socrate et la ciguë ?
Pourquoi tes seins mais pas ton cul ?
L’amour repose sur l’espoir.
Quand on se perd en conjectures
En parlant de littérature,
Tu aimes les romans d’aventures,
Mais pas les aventures d’un soir.
Baudelaire et les fleurs du mal,
Je préfère Céline à Pascal
Et je plains le pauvre Tantale
Quand tu m’allumes dans le noir.
Et puis Platon et sa caverne,
Le vieux Diogène et sa lanterne,
Tes jolis yeux, leurs jolis cernes,
Ta douce peau sous ton peignoir,
Alors je redeviens sérieux
Et, comme Sigmund, je pense queue
Vraiment, chérie, il est l’heure de
Philosopher dans ton boudoir.
PRESQUE MORT
Presque mort,
Je ressuscite entre tes doigts,
Mi Amor ;
Sous la caresse de la soie
De ton corps,
Sous les murmures de ta voix,
Sans effort,
Je ressuscite à chaque fois.
Presque mort,
Épuisé par la longue nuit,
Par tes sorts,
Enivré jusqu’à la folie
De ton corps,
Boire à la source de la vie…
Mon trésor,
De ta liqueur je me remplis.
Presque mort,
Mais toujours prêt à tous tes vices,
Boire encore
Jusqu’à la lie de ton calice…
Sans effort,
Te transpercer entre les cuisses
Puis encore
Éclater en feu d’artifice.
Presque mort…
SWITCH
Tes talons ont claqué,
Tes ongles m’ont griffé
Puis ton fouet a sifflé.
Et puis après…
Je suis devenu fou
Quand, tombant à genoux,
J’ai crié sous tes coups.
Et puis après…
Et puis après, il reste quoi ?
Il reste toi, il reste moi.
Et puis après, dis-moi pourquoi
J’ai aussi fort envie de toi ?
Et puis après, il y a nos cris
Perdus au milieu de la nuit.
Et puis après, il y a la vie
Quand tu dis que tu m’aimes aussi…
Tes poignets dans mes liens,
Mon souffle sur le tien,
Caresses sur tes seins,
Et puis après…
Le murmure de ta voix
Et mes yeux qui se noient
Dans les tiens, chaque fois.
Et puis après…
Et puis après, il reste quoi ?
Il reste toi, il reste moi.
Et puis après, dis-moi pourquoi
J’ai aussi fort envie de toi ?
Et puis après, il y a nos cris
Perdus au milieu de la nuit.
Et puis après, il y a la vie
Quand tu dis que tu m’aimes aussi…
Ils disent que nous sommes fous ;
Ils nous jugent, surtout.
Peu importe, après tout.
Et puis après ?
Ils cherchent des mots sales
Pour mieux nous faire du mal,
Pour nous sortir du bal.
Et puis après ?
Il reste quoi de leurs délires
Lorsqu’à la fin je viens mourir
En toi dans un dernier soupir,
Émerveillé par ton sourire ?
Il reste quoi de la folie
De ceux qui, petit à petit,
Ont vu disparaître leur vie ?
Et puis après…
ET ON IRA DANSER
Et on ira danser jusqu’au petit matin,
Moi dans mon jean usé, toi dans ta robe en satin,
Et on ira danser, et on se foutra bien
Que tu sois pas douée, et que je ressemble à rien.
Ils nous racontent à la télé
Que le monde est en perdition,
Que l’on va mourir étouffés,
Asphyxiés par la pollution,
Que même si on échappe à ça
On finira tous irradiés
Par un nouveau Fukushima ;
Mais on s’en fout, viens m’embrasser…
Et on ira danser jusqu’au petit matin,
Moi dans mon jean usé, toi dans ta robe en satin,
Et on ira danser, et on se foutra bien
Que tu sois pas douée, et que je ressemble à rien.
Ils appellent dans le journal
À un retour de la vertu :
« Travailler plus, ça fait pas mal ! »
Disent ceux qu’ont jamais rien foutu.
Paraît que c’est fini, la fête,
Puisqu’il est temps de rembourser
Un déficit et une dette
Dont ces messieurs ont profité.
Et on ira danser jusqu’au petit matin
Juste pour oublier les mauvais politiciens,
Et je t’embrasserai, tes beaux yeux dans les miens
Avant de me noyer dans ton merveilleux parfum.
Comme sur le pont du Titanic,
Quand l’orchestre jouait encore,
On entendait de la musique ;
Danse, mon cœur, serre-moi fort…
Et on ira danser, jusqu’au petit matin,
Moi dans mon jean usé, toi dans ta robe en satin,
Et on ira danser, et on se foutra bien
Que tu sois pas douée, et que je ressemble à rien.
Fin ? Non, à suivre…