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19/12/16
Résumé:  Mes vacances reposantes au bord de l'atlantique changent d'allure lors de l'arrivée de mes deux voisines.
Critères:  fh voisins vacances bain fellation cunnilingu 69 pénétratio -occasion
Auteur : Scarlett O            Envoi mini-message
Tendresses et surprises océanes

Depuis plusieurs années je viens, une quinzaine durant, interrompre les rigueurs hivernales, ici, à Lanzarote, plus exactement dans le minuscule village de Playa Quemada, la plage brûlée.


Grâce à une amie, je loue l’une des cinq petites maisons mitoyennes qui ne sont séparées de la côte que par cette voie sans issue que les autorités locales ont pompeusement et récemment baptisée « Avenue Maritime ». Comme lors de mes précédents séjours, je cherche à m’y éloigner des sollicitations du monde, à me reposer peut-être, mais surtout à me libérer l’esprit des scories qu’y accumule la vie quotidienne en perdant mon regard sur l’immensité azur du ciel, les étendues céruléennes océanes et l’aridité des terres noires. Cette seconde moitié de ce mois de janvier répond délicieusement à mes attentes et même les vents si puissants et constants sur l’archipel font relâche, laissant au soleil tout loisir d’attiédir l’air tant que l’eau. Je flotte ainsi dans une sorte de liquide amniotique qui va, je l’espère, assurer ma renaissance. Levé aux aurores, je traîne mes galoches sur les flancs d’un volcan, et ils ne manquent pas sur l’île. Ma balade matinale s’achève aux alentours de treize heures, puis après un frugal déjeuner, je m’attache à écrire selon l’inspiration du jour quelques lignes ou quelques pages. Bref, une retraite quasi monacale, d’autant plus que les deux habitations qui encadrent la mienne restent momentanément libres de tout occupant.


J’écris essentiellement ces derniers temps de courts récits érotiques tout en réfléchissant à un roman que je n’achèverai probablement jamais, mais en vue duquel je continue à accumuler des notes. Depuis mon arrivée, je me sens le cerveau un peu éponge, capable certes d’absorber les beautés âpres du pays bien que parfaitement stérile quand il s’agit de les éjaculer sur le papier en dépit de la force ou de la manière dont je pressure ladite éponge.


Pour écrire, il est nécessaire que je me sente emporté par mon sujet, qu’une épine fichée dans mon esprit me titille et me gratte, crée un abcès qu’il me faut ensuite purger sur un papier vierge ou selon des techniques plus contemporaines sur le disque dur de mon ordinateur.



Je suis aujourd’hui à trois jours de mon retour quand, en cours d’après-midi, j’entends du bruit sur la terrasse contiguë. Jetant un coup d’œil par-dessus le muret, je découvre deux superbes jeunes créatures allongées sur leur transat, les yeux fermés. Elles ont dû investir les lieux pendant ma promenade matinale. Leurs traits sont si semblables que je suis d’abord tenté de les tenir pour jumelles. À y mieux regarder, je constate que plusieurs années les séparent, il doit s’agir d’une grande sœur et de sa cadette. C’est amusant, elles portent les mêmes vêtements que la plus jeune décline en blanc et l’aînée en rouge. Détail troublant, dans leur béate somnolence, elles resserrent et desserrent les cuisses dans un mouvement machinal, rythmé par le bruit des vagues s’échouant sur la grève. Je les imagine abandonnées à de sensuelles rêveries qu’elles entretiennent et favorisent par ces aguichantes oscillations. Je me retire très vite ne voulant pas jouer le rôle du voyeur de service, mais ne cesse de penser à elles et ma concentration en pâtit terriblement.


En début de soirée, installé sur ma terrasse, je me sers un de ces vins blancs doux, un Rubicon Amalia, caractéristique de la région. Un geste inconsidéré me fait accrocher mon verre que je précipite sur le carrelage où il se brise. Un « merde » retentissant ponctue cet exploit et attire un minois interrogatif au-dessus de la barrière. Est-ce la plus jeune ou la plus âgée ? Moi, qui ne suis guère physionomiste, à ne pas les voir côte à côte, je ne jurerais de rien, en tout cas : c’est la rouge. Je hausse les épaules face au désastre et la regardant d’un air contrit que j’accompagne d’un sourire, je déclare :



Elle retient difficilement son rire et répond volubilement dans un idiome qui me paraît être de l’espagnol. Je me redresse et viens lui serrer la main tout en lui disant que je ne parle que le français ou éventuellement un brin d’allemand. Elle me fait comprendre à son tour qu’à l’exception de l’espagnol et d’un peu d’anglais, elle ne pratique aucune autre langue. Nous regrettons vivement tous deux cette infortune linguistique et je m’applique à lui souhaiter la bienvenue. Nous échangeons ensuite des « gracias » à profusion et des banalités dans une langue des signes que nous inventons selon nos besoins. Nous voudrions d’évidence poursuivre cette pantomime, mais une voix l’appelle : Vicenta. Avec un très gracieux sourire, elle prend congé et rentre dans son gîte. L’incident m’aura au moins appris son prénom.



Le soir, je vais dîner au Salmarina qui ouvre sa terrasse sur l’océan. Je ne suis pas plus tôt installé que je les vois arriver toutes deux, toujours de vermillon et de blanc vêtues. C’est incroyable, elles ont vraiment les mêmes silhouettes, tailles et corpulences. D’un geste de la main, je les convie à partager ma table ou tout au moins l’apéritif que je souhaite leur offrir. Après s’être brièvement consultées, elles acceptent sans le moindre embarras et se placent face à moi. Je me présente et les salue un peu cérémonieusement appelant la benjamine Vicenta. Elles rient et m’expliquent que c’est l’aînée qui se prénomme Vicenta et que la puînée est Maria Dolorosa. Force mimiques, je m’excuse de cette bévue et les invite à commander un apéritif.


Puis j’essaye de décrypter les mystères de la carte grâce à leur aide. En fait, le serveur parlant un assez bon allemand me serait plus utile qu’elles, néanmoins ce décodage nous lie dans un babillage complice. Pour sceller cette union, nous décidons de commander un de ces délicieux poissons au sel, qui précisément ne figure pas au menu, qu’on ne peut obtenir qu’en fonction des pêches du jour et dont le restaurant défend jalousement le secret. J’y ajoute un petit blanc provenant de la Bodega (*) Stratus.


J’ai ensuite l’impression que les deux me courtisent. Elles me causent oubliant que je ne comprends pas un traître mot à leurs discours et que Babel est passée par là. Je réponds comme je peux, entremêlant mes rares ressources d’espagnol avec une abondance de gestes, pitreries, simagrées et sourires. Moi, d’habitude si confiant dans mon verbe quand il s’agit de séduire, je me sens, en ces circonstances, quasi mutilé.


J’en profite pour les détailler : même imposante coiffure d’ébène relevée en casque, mêmes yeux sombres à l’iris doré brillant d’un éclair malicieux, même peau légèrement duveteuse au teint mat et cuivré, même menton volontaire et carré, même buste conquérant qui se passe de renfort et pointe fièrement des tétons qui marquent leur érection à travers le coton des tee-shirts. Les différences ne sont que nuances : des traits qui s’empâtent à peine, une très fine patte-d’oie vaguement esquissée, un ventre un brin replet et un corsage plus lourd et tendu accusent les quelques années supplémentaires de l’aînée. De toute évidence, les deux belles s’appliquent à cultiver leur parenté. Il n’est jusqu’aux rimmel et rouge à lèvres qu’elles ne se plaisent à partager.


Lorsqu’un serveur vient flamber la carapace de sel avec un anisé qu’il appelle Pernod, puis qu’il la fracture pour en extraire des filets goutteux, je sens une jambe se glisser entre les miennes. Le contact n’est pas accidentel, son insistance le prouve. Voilà donc les sucreries servies avant le plat principal. C’est, à n’en point douter, Maria qui m’entreprend, car à ce moment elle me regarde de ses yeux implorants quêtant mon assentiment. Je résiste d’autant moins à cet appel de détresse que je suis moi-même affamé et je serre ardemment ce mollet annonciateur d’autres plaisirs entre les miens. Ce jeu, qui se prolonge ensuite, m’enchante certainement, mais encore me flatte et allume des désirs plus fantasques.


Je n’ai qu’exceptionnellement passé aussi agréable soirée, grimaçant sans interruption afin de pallier l’insuffisance de mon vocabulaire, réinventant le langage des sourds et surtout, surtout, souriant jusqu’à distendre les commissures de mes lèvres qui en deviennent douloureuses. Au dessert, alors que la cheville si aimablement provocatrice se retire, je leur demande si elles sont sœurs ou cousines, ce qui les fait éclater de rire. Vicenta m’explique qu’elle est la « madre », maman et que Maria Dolorès est sa « chica », fille. Mon incrédulité lui cause évidemment une très vive satisfaction.


Nous rejoignons nos gîtes qui ne sont hélas qu’à quelques centaines de mètres du Salmarina. En ce qui me concerne, je poursuivrais volontiers cette promenade en escortant mes deux séduisantes compagnes et Maria tout spécialement. Je les invite à déguster un dernier verre dans mon enclos, mais, contre toutes les attentes qu’avaient suscitées des frôlements affriolants, elles me font signe qu’elles préfèrent désormais aller dormir.


Je m’installe donc seul sur ma terrasse dans une obscurité presque totale. Seul, enfin pas tout à fait, tant leur pensée me hante. Je déplie mon portable et me sers un grand verre de vin. Les idées ne se bousculent pas dans ma tête, ou plutôt, pour être sincère, leur image de femmes lascives ruine infailliblement toute tentative de réflexion. Bientôt, je me disperse en nébuleuses rêveries en tétant mon consolant breuvage.



Perdu dans ces confusions, le claquement violent du portillon de mes voisines me fait sursauter. Intrigué, je me lève, jette un coup d’œil par-dessus le muret et aperçois une silhouette blanche qui ne peut être que celle de Maria qui se dirige, à droite, vers la grève. Avec la marée basse, elle n’éprouvera aucune difficulté à franchir l’éperon rocheux séparant la côte très caillouteuse, face à nos gîtes, de la petite anse sablonneuse, à peine plus loin. Ses intentions, quant à elles, me paraissent aussi claires que la nuit est ténébreuse : elle veut profiter de la quiétude de cette soirée afin de s’offrir un bain de minuit. Et pourquoi ne succomberais-je pas à la même tentation ? Abandonnant mon matériel sur la terrasse, je me contente de vider mon verre de vin blanc, d’enfiler une paire de sandales et de me lancer à sa poursuite. Je vois le lumignon dont elle s’éclaire déjà loin sur la plage et j’estime qu’elle dispose de suffisamment d’avance pour ne pas me repérer.


Parvenant à la crique, mes habits sombres me permettent de me glisser discrètement jusqu’au rivage en circulant parmi les importants éboulis de basalte qui s’amoncellent au pied de la falaise. Un rayon de lune malicieux filtre entre les nuages et illumine la berge et l’océan d’une étincelante tant qu’étroite coulée de nacre. Dans cette auréole éblouissante, je distingue nettement les formes élancées de l’adorable Maria qui s’ébat à quelques pas de là.


Immergée à mi-cuisse hormis lorsqu’un rouleau écumant vient fouetter son buste, elle est radieusement nue. Nue, non pas d’une simple absence de vêtement, mais d’une nudité essentielle et originelle qui évoque infailliblement la naissance d’une déesse marine. Elle exhale ainsi des grâces et forces élémentaires si intenses que je me demande si les flots ne constituent pas son milieu naturel. Selon les lumières et les caprices de l’onde, son corps s’allonge ou se recroqueville, s’exhibe immense ou insignifiant, blafard quand les eaux s’assombrissent, obscur quand elles s’éparpillent en traînées mousseuses. Elle ne nage pas, mais s’amuse, cabriole et danse dans les effervescences houleuses. Tantôt elle joue dans les crêtes bouillonnantes, saute pour leur échapper ou s’en laisse enlacer, tantôt elle s’abandonne à l’étreinte brutale des lames qui la chahutent dès lors sans ménagement.


Par instant, je vois cette farouche fille d’Espagne, moirée de perles scintillantes, toréer les fureurs de Poséidon en s’improvisant une muleta des paquets d’écume. Lorsqu’elle s’ébroue, fougueuse cavale aquatique, elle fait virevolter sa crinière dispersant à l’entour des gerbes d’argent. Sa peau pourtant mate et halée s’éclaire comme un fanal réfléchissant les blêmes ferveurs lunaires. Ses contours se dissolvent dans les agitations de la mer, les vapeurs d’embruns attiédis, les giclées des vagues et les lueurs pâles de l’astre nocturne. Il en résulte une vision assemblant une entité évanescente et irréelle, la posant en parangon de beauté. Je ne suis pas spécialement voyeur néanmoins, je cède à la magie de ce saisissant tableau, au magnétisme de cette scène envoûtante qui me fige dans une extase fascinée. Comment, après la contemplation de son somptueux ballet, récuserais-je désormais l’existence des sirènes ? Comment les concupiscences des vieillards admirant Suzanne à ses ablutions pourraient-elles m’apparaître illégitimes et coupables ? Je m’étonne enfin que cette enfant du soleil puisse braver si longuement les froidures océanes. Soudain, elle s’affole et court vers le rivage, effarouchée par quelque énigmatique et angoissante menace tapie au fond des abysses.


Je m’inquiète de la voir mettre un terme à sa prodigieuse récréation. Il n’en est rien et elle la prolonge maintenant d’un bain de lune en venant s’installer dans cette zone de lapilli (**) noirs que les eaux ne recouvrent qu’épisodiquement.


Elle s’assied là, s’appuyant sur ses bras tendus en arrière, rejetant par-dessus ses épaules sa longue et dense chevelure ébène, offrant sa gorge sublime aux effluences célestes, exposant ses seins aux éclats livides qui les frangent d’un liseré brillant. Les reflux me dévoilent nettement la ténébreuse toison pubienne qui dévore d’ombre son paradis secret. Enfin, elle rejoint la berge et vient s’étendre à deux pas de sa robe abandonnée sur un rocher. Contrarié, l’astre se voile et je ne perçois plus qu’une forme claire allongée sur le picón (**) maussade.


Je sais que je tiens dorénavant mon épine, que je n’en ai que rarement rencontrée d’aussi piquante et j’éprouve grande hâte à m’y frotter afin de m’en infecter. Je me dévêts complètement en un tour de main et je vais vers elle, flamberge à son adoration dévotement érigée, en faisant bruyamment rouler les galets sous mes pas pour l’avertir d’une présence. Je ne veux aucunement l’effrayer.


M’approchant davantage, je constate qu’elle est couchée de tout son long, les yeux fermés, les cheveux couvrant de leurs lourdes mèches de jais son poitrail, les bras en croix et les jambes résolument écartées, offerte déjà. Tranquille, elle ne montre aucun signe d’anxiété. M’a-t-elle aperçu pendant sa baignade ? Je ne le pense pas, à ses jeux elle était trop occupée. Il est plus vraisemblable que, dès son départ des gîtes, elle a soupçonné, espéré peut-être, que je la suivrais. Qu’importe, elle est là, splendide nymphe échouée, éclaboussée de perles argentées, vibrante d’un appel que je ne saurais dédaigner. Je me place face à elle et, paupières toujours closes, elle me tend ses mains que je saisis dans les miennes. Elle me tire ensuite vers elle de sorte que je m’agenouille entre ses jambes.


D’une façon générale je n’apprécie guère les tatouages, cependant celui qu’elle affiche ne lasse pas de m’intriguer. C’est un serpent dont la tête surveille et protège jalousement son sein gauche puis s’enroule autour de son épaule avant de s’écouler au long de son flanc et de pointer de sa queue le pubis de la déesse. Je l’avais bien suspectée de réincarner quelque figure de légende, Ève, Méduse ou Cléopâtre et ne sais trop sous laquelle de ces bannières la ranger. Je sais par contre qu’au fruit défendu, je n’entends plus renoncer. Je me penche sur ce corps superbe, tout frissonnant encore de l’assaut des houles qui l’ont cinglé. Je pose mes mains brûlantes sur des cuisses glacées qui s’horripilent alors d’une exquise chair de poule. Longuement, je contemple ce divin spectacle que le ciel, qui a cessé de bouder, consent à éclairer d’un rayon pâle et jaloux.


Je m’incline pour humer ses senteurs d’iode, de varech, de sel mêlées et d’autres effluves subtils puis poursuis ce mouvement afin de m’étourdir de ses grisantes sapidités. Elle tressaille et je promène mes concupiscences condensées au bout de ma langue sur son ventre et son buste, admirant les stimulants effets de cette caresse sur ses tétins. Doucement, je m’étends sur elle pour absorber sa froidure, lui communiquer ma chaleur et nous fondre ainsi dans nos rayonnements réciproques. Nous restons immobiles un grand moment, heureux déjà, dans l’attente néanmoins de cet instant que nous savons inéluctable de notre union. Je me redresse et ramasse une pleine poignée de minuscules scories et de sable noir, toujours tièdes du soleil de la journée, et la déverse en pluie fine sur ses jambes, son nombril et son poitrail. J’adore observer le rebond de ces grains durs sur sa peau élastique ou les voir s’agglomérer dans des gouttes qu’ils assèchent. J’entreprends ensuite de la masser sans accentuer la pression avec mes mains désormais recouvertes de papier de pierre. Surprise, Maria sursaute avant de s’abandonner à cette rugueuse câlinerie qui incendie son épiderme.


Après cette fantaisie, nous craignons que la silice se fasse cilice et que des effusions plus appuyées ne s’épicent de désagréables abrasions. D’un commun accord nous courrons nous immerger puis jouons à nous perdre et à nous retrouver dans des flots complices. Je veux l’agripper, pourtant cette sirène tout enduite de mucus ne cesse de filer entre mes doigts et j’aime la sentir se dissiper et se dissoudre dès que je la frôle. J’aime ces étreintes esquissées et aussitôt relâchées. J’aime que nos corps exacerbés se nouent et se détachent, se cabrent semblant s’affronter. Nous nageons et roulons accolés dans des effleurements légers qui nous donnent une impression d’apesanteur. Rejoignant la grève, elle s’arrête dans les eaux peu profondes, s’agenouille et saisit mon sexe qu’elle guide vers sa bouche en m’épiant avec des yeux brillants de désir et de luxure. Mon pauvre phallus s’est beaucoup contracté et, mais à peine est-il accueilli en ces moelleux auspices qu’il récupère calibre et enthousiasme requis.


Je suis du regard sa manœuvre experte, vois ses lèvres s’arrondir autour de la hampe sur laquelle elles coulissent l’enserrant d’une ferme pression. Attentive à l’ouvrage, elle se distrait de petits coups d’œil espiègles pour apprécier la progression de mes ébranlements. Lorsqu’une vague vient la gifler, enveloppant la scène d’écume, elle ne bronche pas et réapparaît, dégoulinante de mousse et toujours rivée à ma verge. Constatant l’imminence de ma déflagration, elle s’interrompt, me prend par la main et me reconduit sur la plage où j’étends mes vêtements au sol avant de la coucher et de prendre ses lèvres qui tremblent légèrement, froid ou émoi. Un baiser de feu nous emporte alors sous d’autres tropiques. Que conter ensuite ? Les bruits de l’océan rythment nos fougues désordonnées. S’ouvre un grand chaos de félicité en lequel s’enchevêtrent

des bouches gloutonnes et salées qui se happent frénétiques,

des cris stridents de goélands effarouchés,

des mamelles ballantes qui dansent endiablées,

des yeux exorbités qui noient leur iris dans les blancs révulsés,

des mains qui flattent et griffent les velours de somptueuses hyperboles,

des relents de marée fondus à ceux de cyprine et de foutre,

des membres lactescents qui se nouent, se cramponnent et s’étreignent,

des reins qui se cambrent se faisant tremplin à des rêves flamboyants,

des soupirs mugissants de cétacés échoués,

des laves torrides par les entrailles distillées,

des doigts qui s’égarent dans des fions béants,

des aréoles somptueuses, dilatées comme des soleils,

des chevelures fleurant les goémons,

un grand coquillage, baveux de sucs mélangés,

l’hallucinant va-et-vient d’une pique turgide déchirant des chairs avides.


La marine créature m’absorbe et me vide, m’épuise et m’anéantit, m’étourdit et m’hébète, soutenue en cet enivrement par le martèlement indéfiniment répété du ressac. Et nous nous roulons encore dans les pouzzolanes (**) corrosives sans plus de souci de nous écorcher, peut-être même avec le secret désir d’en sortir tout éraflés. La vigueur de cette fille des eaux est telle que, plusieurs fois, elle ressuscite mes fièvres à l’ardeur des siennes et j’ai l’impression qu’elle transvase en moi ses excédents d’énergie.


Je m’affaisse, exténué et, une seconde, c’est du moins ce que je crois, ferme les yeux. Me suis-je endormi dans les étreintes de la petite mort ? Quand je les rouvre, je suis seul, la nuit s’est obscurcie et un vent glacial s’est levé. Je scrute une plage déserte sans y découvrir la moindre lueur qui s’éloigne. J’épie la mer, son véritable élément, en laquelle elle a dû plonger pour rejoindre son aréopage sous-marin et n’y distingue que les franges blêmes qui viennent s’échouer à mes pieds dans un rythme lancinant. Je me rhabille avec des vêtements humides, mêlant les odeurs océanes à celles, très subtiles, de nos ébats. Je rentre, il en est temps, car déjà la marée montante et quelques vagues plus fortes inondent mon pantalon et mes sandales.



Tout le lendemain, les rideaux qui occultent leurs fenêtres restent tirés, enfermant leur mystère. Cent fois, je délaisse mon travail espérant qu’elles se sont enfin réveillées, mais rien ne bouge. Je pourrais aller jusqu’au parking pour vérifier la présence de leur voiture, néanmoins je crains sans doute qu’un démenti aussi flagrant ne casse mes illusions et je préfère couver un espoir incertain, les imaginer tapies dans l’ombre de l’appartement, espionnant furtivement mes impatiences. Moi, qui présumais avoir trouvé l’aiguillon qui stimulerait ma production, constate que cette dernière chute effroyablement. Le soir, je demeure désespérément seul au Salmarina. La nuit se referme sur mes rêves que je tente de forcer en regagnant la crique enchantée. Elle est déserte, venteuse, froide et sombre comme mes pensées. Je me déshabille, frissonne sous le vent glacial balayant la plaine atlantique, me couche sur le lapilli tentant d’extraire de ce triste minéral les tiédeurs que me refuse un corps aimant. Moult fois j’entends un bruit de pas derrière moi et fouille, à l’aide de ma torche, les ténèbres qui me renvoient à mon désappointement.



J’entame aujourd’hui mon dernier jour sur l’île, plein d’amertume et de ressentiment. Je voulais grimper ce matin sur la caldera Blanca, toutefois mon asthénie m’en dissuade. Vers onze heures, je perçois enfin du mouvement chez mes voisines. Je ne peux pourtant pas les envahir dès qu’elles remuent un orteil. Je parviens assez vite à les saluer, mais elles me font comprendre que d’autres urgences les empêchent de se perdre en bavardage dès à présent. Je ronge donc mon frein tout en me disant que l’idéal serait que la maman s’absente seule. La ferveur de mes prières me vaut d’être exaucé, car, effectivement, vers quatorze heures, je vois Vicenta s’éloigner. Aussitôt, je me précipite chez elles où Maria m’accueille un brin effarée, vêtue seulement d’un long déshabillé blanc qui, dans la pénombre du salon, met en valeur son teint cuivré.


Je me jette sur elle, l’enserre et réclame sa bouche que la coquine me dérobe d’abord, avant de me l’abandonner timidement. Quand je m’introduis sous le tissu dans l’intention de pétrir ses fesses, elle m’oppose une assez vive résistance, qui me déconcerte au vu du souvenir de nos emportements de l’autre nuit. La belle se cabre, faisant semblant de se refuser et agrippe fermement ma main qu’elle repousse. La clarté du jour rend ma nymphe nocturne rétive et, mal à l’aise, elle tend à se réfugier derrière d’incompréhensibles minauderies. Je butine enfin fougueusement ses lèvres et elle ne réplique d’abord que fort peureusement, puis, lentement, tout en roulant de grands yeux affolés, daigne riposter avec une ardeur qui va croissant. Je m’égare ensuite dans son cou et descends dans le triangle de peau nue qu’encadre moelleusement le col du peignoir qu’elle me défend d’ouvrir davantage et maintient solidement fermé. Je décide de lui répondre sur le même ton et à mon tour, feins la lassitude et fais mine de renoncer. Elle hésite, et se résigne à me retenir craintivement par la manche de ma chemise.


Toutes ces feintes rebuffades, ce pugilat simulé et dépourvu de toute brutalité, m’attisent singulièrement et je suis tout prêt à l’amuser de cette manière. À nouveau, je me faufile sous son vêtement et encore, elle tente de se soustraire. D’un bras, je l’attire et l’écrase alors contre mon torse immobilisant les siens tandis que l’autre repart en exploration sous ses voiles. Après une hélas trop brève résistance, affichant un air consterné, elle s’avoue vaincue et bientôt je promène des phalanges chafouines sur le coton innocent de sa petite culotte, avant de les y introduire.


Toute cette séquence s’est déroulée dans un silence parfait que n’ont troublé que quelques geignements témoignant des efforts de Maria qui essayait de se dégager. Là, maintenant, elle lance un léger et bref cri de reddition dont je ne peux deviner s’il exprime dépit ou satisfaction et dans des mouvements contraires, elle resserre ses cuisses pour m’interdire de m’aventurer dans ses chasses réservées et se love contre moi tout en enchaînant ma nuque.


Me mettant à genoux devant elle, j’accroche la fine cotonnade de mes deux mains et l’abaisse sur ses chevilles. Un pubis superbe s’exhibe décoré d’un frisson dru et noir qui fait mon régal. Ruisselant des fureurs marines, ce dernier m’était apparu moins dense. Mouillé, il l’est cependant aussi à présent bien que par d’autres sèves. J’y porte de vaporeux baisers et je sens la rebelle qui se détend et s’amollit, accepte toute mon affection, semble même la souhaiter plus résolument démonstrative et appuyée. Elle rabat les pans de son habit sur ma tête qu’elle tire et presse contre son mont de Vénus. Dans la soyeuse prison, je m’insinue entre les gardiennes du tabernacle et entoure de mes attentions le frêle bourgeon qui, au lieu des relents maritimes, exhale actuellement des arômes ténus et envoûtants.


Là-haut on tressaute et mugit alors qu’ici-bas la capsule gonfle et libère un pistil délicat et odorant. Point n’est besoin d’insister beaucoup avant que de liquoreux onguents ne me baptisent tandis que la jeune et belle dame hurle à l’agonie. Je me redresse pour découvrir son visage ravagé, grimaçant des émotions qu’elle vient d’essuyer. Je la conduis doucement vers la grande table en bois brut sur laquelle la belle naïade qui a totalement oublié ses velléités de combat se courbe en avant, tout en écartant complaisamment les jambes. Je regrette presque cette capitulation trop rapide, moins excitante que nos récents affrontements. Je remonte les pans du peignoir haut sur ses hanches découvrant une croupe hallucinante, veloutée et mordorée que la splendide sirène, figée dans une impatiente attente que dénoncent les frémissements qui parcourent son épiderme, m’offre sans condition.


Il serait fort malséant de différer davantage son plaisir. Je porte ma verge entre ses cuisses et viens frapper à l’huis déjà entrouvert du temple qui l’accueille affablement. Elle se recule et je m’avance, m’enfonçant dans cette gaine de délice qui me paraît plus étroite qu’antérieurement lorsque la mer la lubrifiait. Je glisse une main sous son ventre pour dénicher l’interrupteur qui décuple ses tensions ; de l’autre, j’entoure son sein aplati contre le bois dur et froid. Elle ondoie sous mes assauts et émet de petits jappements vifs qui se transforment progressivement en longs et graves hululements.


La belle gigote et contracte ses chairs sur ma colonne qui, reconnaissante, ne tarde pas à lui prodiguer son bouillon. Maria dès lors tremble et se raidit. Ses mains se crispent si fort sur la table qu’elle y plante et casse ses ongles. Après une ultime et tétanique convulsion, elle se détend brusquement, écoulant de chaudes humeurs, agitant ses longues jambes et ses fesses dorées de soubresauts spasmodiques. Elle étouffe un brûlant soupir, demeure un instant paralysée, semble assommée puis brusquement elle me repousse et se dégage haletante.


Il ne s’agit plus de dérobade et courant en riant dans le couloir, elle retire enfin l’unique vêtement dont elle se couvrait qu’elle abandonne à terre derrière elle. Je la poursuis et la retrouve dans la chambre, splendidement nue et offerte, étalée sur le lit. J’achève à mon tour de me déshabiller et me penchant sur elle pour embrasser un téton mendiant qu’elle me tend comme une friandise, je constate, oh surprise, que le reptile qui se prélassait avant-hier encore sur ce sein l’a déserté.

J’interroge, en désignant l’endroit :



Elle regarde son épaule sans avoir l’air de comprendre.



Du bout du doigt, je trace la figure reptilienne qu’elle a effacée. Là, soudain, elle éclate de rire :



Ma confusion est extrême, quand je réalise que, sur la plage, j’ai fait l’amour avec Vicenta croyant rendre cet hommage à la fille. C’est donc ce qui explique les réticences de cette dernière face à mes assauts précédents et je l’ai en quelque sorte presque contrainte à l’encontre de mes intentions. Je dois faire une drôle de tête, car son hilarité redouble, puis triple lorsqu’elle saisit le fin mot de l’histoire. La friponne se gausse de ma déconfiture, et s’ébaudit gaiement des fredaines de sa mère. Cette déconvenue – toutefois en est-ce bien une ? – me coupe tous mes moyens et moi qui étais dans les meilleures dispositions, me voici queue basse, au propre comme au figuré. Mes faibles aptitudes à distinguer les physionomies m’ont déjà valu des déboires, mais jamais aussi cuisants, ni somme toute aussi agréables.


Voilà en conséquence deux serpents qui se dégonflent simultanément, car la surprise a des effets dévastateurs sur ma verge. Maria, très câline, m’attire vers elle et joue d’une main avec les frisottis de mon poitrail tandis que de l’autre elle entreprend de rendre sa vigueur à mon boutoir qui réagit favorablement à cette caresse ferme et efficace. Imperceptiblement, elle pivote sur le lit de sorte à placer son visage face à mon dard et le mien face au plus enchanteur des jardins d’éden. Dire que nous nous précipitons sur ces friandises exposées à nos appétits libidineux relève de l’euphémisme. Bientôt, je défaille, elle se pâme et nous confondons nos émois ne sachant pas si nous tirons notre propre jouissance du fait d’en recevoir ou d’en dispenser.


La polissonne est émérite en cet art et je ne tarde pas à bander ainsi qu’un faune surprenant les ébats d’un essaim de nymphettes. C’est à cet instant qu’elle m’arrache la conque parfumée des lèvres et se retournant vient s’empaler sur moi, m’emprisonnant dans un vagin constricteur. Je m’hallucine des mouvements de la belle écuyère qui me chevauche jetant sa tête alternativement d’avant et d’arrière, fouettant l’air de sa longue crinière ébène, balançant follement ses seins au rythme de sa cavalcade. Je les accompagne de ceux de mon bassin tout en pétrissant ses fesses. Très vite, elle m’arrose du moût de sa félicité et j’admire la vitalité qui l’élève sur mon épieu pour retomber sur mon ventre avec des chuintements obscènes qu’elle souligne par ses rauques halètements. L’explosion qui nous secoue ensuite est violente et partagée. Elle fauche brutalement Maria qui vient s’abattre sur moi. Nous sommes encore dans les remous de ces plaisirs quand soudain, la porte d’entrée s’ouvre et j’entends qu’on pénètre dans la maison. Un peu gêné, je regarde Maria qui n’a pas l’air de s’en formaliser, pas plus d’ailleurs que lorsque sa mère entre en tornade dans notre refuge. Je cache piteusement mon sexe ce qui la fait s’esclaffer. Elles échangent de brèves appréciations qui me restent incompréhensibles, mais ma vanité croit discerner les mots « buen amante » dans les propos de Vicenta et constater un acquiescement résolu de la part de sa fille. Tout cela me rassure et je propose à l’intruse de nous rejoindre à son tour sur la couche.


Il ne faut pas exagérer, je suis tout de même avec des espagnoles et le Bon Dieu n’en est jamais tapi trop loin. Là, pour le coup, la maman s’indigne et lâche des borborygmes qui ressemblent à : « Con mi hija, no, sería un pecado ! ». J’y reconnais hya et pécado, la fille et péché, et tente de lui expliquer combien le pecado peut être bon dans certaines occasions et que les vanités de la vertu, en ces domaines tout du moins, ne sont pas de bon conseil. Elle affiche un air terrifié, se fâche presque et quitte prestement la pièce. Nous essayons de reprendre nos ébats, mais si Maria ne semble pas perturbée, j’ai pour ma part beaucoup de difficulté à oublier la présence espionne de sa mère séparée par une frêle cloison et le cœur n’y est plus. Malgré quelques voluptueuses cajoleries, je reste embarrassé et préoccupé. Bientôt je décide de prendre congé, ramasse et enfile mes fringues si hâtivement que cette célérité n’est pas exempte de muflerie.


Traversant le salon, je m’approche de Vicenta bien décidé à ne pas me retirer sans lui soustraire un dernier baiser. Nul n’est besoin de l’y forcer et elle m’abandonne sa bouche tout en plongeant une main impudique dans mon bermuda. Peut-être qu’après le crépuscule, sur la plage…


Je la quitte et à peine rentré chez moi, j’entends un énorme éclat de rire qui émane du gîte mitoyen. Il roule avec la force d’un coup de tonnerre puis s’apaise un peu avant de repartir et de s’enfler jusqu’à se faire tonitruant. Pas de doute possible, elles se foutent de moi et je les imagine se contant leurs aventures, Maria imitant ma mine déconfite lorsque je ne décèle aucun reptile sur son épaule. Elles se calment pour récidiver ensuite avec des pics de virulence. J’y comprends que ces dames se sont octroyé un petit extra et que naïvement je me suis prêté au rôle de « jouet sexuel » dans leur récréation. Au demeurant, je n’ai pas trouvé cela désagréable, mais ne conçois pas poursuivre maintenant que je suis conscient de mon statut. Elles pourront toujours faire claquer leur portillon ce soir. En une demi-heure, je rassemble mes affaires pour préparer mon départ avant d’aller balader mes déconvenues sur les flancs de la caldera Blanca. Il ne sera pas dit que ces deux intrigantes auront su me détourner de mes projets.



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(*) Bodega : cave où l’on commercialise et déguste du vin.

(**) Lapilli, pouzzolane, picón : les lapilli, pluriel du latin lapillus qui signifie en français « petite pierre » sont des fragments de lave éjectés par les volcans. La taille des lapilli est comprise entre 2 et 30 millimètres. L’empilement de lapilli forme des couches meubles appelées lapilli, mais également pouzzolane. Ce gravier volcanique est réduit en un produit appelé picón (appellation locale propre à Lanzarote), une cendre volcanique qui recouvre les champs d’un manteau noir, capte la précieuse rosée et protège les cultures du vent.