n° 17974 | Fiche technique | 104557 caractères | 104557 17953 Temps de lecture estimé : 72 mn |
02/07/17 |
Résumé: Hélène se retrouve au chômage. Après de nombreuses recherches, seule une recruteuse énigmatique lui propose un poste. Ici, commence pour cette veuve et mère un voyage initiatique dans le monde saphique et des pratiques SM soft. | ||||
Critères: f ff fplusag travail fsoumise fdomine soubrette noculotte lingerie ffontaine fmast sm | ||||
Auteur : Yuri Plume Envoi mini-message |
Une agence de placement m’avait proposé un entretien pour un travail de femme de chambre alors que je recherchais un poste de serveuse. Toutefois, je n’avais pas hésité longtemps vu ma situation financière catastrophique. Je suis cependant un peu inquiète, car après avoir insisté je n’avais réussi à obtenir que peu d’informations, si ce n’est le montant du salaire et le lieu de travail situé en région parisienne.
Mon second rendez-vous a lieu dans un très vieil immeuble de la capitale parisienne. Aussi, j’emprunte l’étroit escalier de peur de me retrouver coincée entre deux niveaux dans une cabine d’ascenseur capricieuse. Je m’arrête essoufflée sur le palier du quatrième étage lorsque mon regard croise une feuille de papier. Scotchée sur la porte d’entrée d’un appartement, elle est recouverte d’une écriture rédigée au marqueur noir :
Pauvrement meublée, seule une chaise m’y attend.
Après avoir patienté quelques minutes, je vois une jeune femme passer en trombe dans le couloir. Visiblement fâchée, elle claque la porte d’entrée en sortant. Lorsqu’une voix impérative crie mon nom au loin, je comprends que c’est à mon tour.
Inquiète, je suis le long corridor débouchant sur ce qui doit être un salon. Il est presque aussi dépouillé que la salle d’attente. Le mobilier se résume à un fauteuil de direction occupé, à une chaise vacante et à un bureau sur lequel reposent un ordinateur portable et une pile de dossiers.
Seuls un silence de mort et une atmosphère lourde m’accueillent. Assise dans le fauteuil, la préposée des ressources humaines me regarde avancer. Devant ma démarche hésitante, elle tape, impatiente, l’extrémité de son index droit sur le tissu rouge foncé de la nappe recouvrant la table lui faisant face.
Son regard inquisiteur me fait froid dans le dos. Malgré mon appréhension, je me présente tout sourire.
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Je ne quitte pas des yeux la nouvelle postulante. La durée que je me suis fixée pour chaque entretien ne me laisse pas beaucoup de temps pour me faire une idée sur les candidates. Comme on dit, c’est la première impression qui est la bonne et à ce stade, mon appréciation était plutôt négative.
Pourtant, son curriculum vitæ survolé hier m’avait intrigué. Je m’étais interrogée sur son patronyme à consonance japonaise. Toutefois, au vu de son nom de jeune fille, j’avais tout de suite compris qu’elle n’était pas native de ce lointain pays.
Dans la quarantaine, petite boulotte d’un mètre soixante environ, brune, avec des cheveux tirés en arrière et maintenus par une barrette. Vêtue d’un tailleur bleu marine, d’un chemisier blanc ivoire et pour finir, des ballerines assorties. Elle ressemble à un épouvantail, pensais-je. Ses habits doivent sortir tout droit d’un magasin de prêt-à-porter bas de gamme. Je laisse passer un moment afin d’accroître son stress, avant de me présenter d’une voix détachée.
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Ça commence bien, elle ne se lève même pas pour me recevoir ! Elle me rappelle mon institutrice de CM2. Pourquoi ne me donne-t-elle pas son nom de famille ? Je ne vais quand même pas l’appeler par son prénom ! Je fais le vide dans mon esprit pour me concentrer sur cet entretien d’embauche, car j’ai vraiment besoin de ce poste.
Je me retiens de faire une grimace en m’asseyant, car l’assise de la seule chaise disponible est encore plus inconfortable que celle de la salle d’attente. En effet, bien qu’elle possède un dossier, aucun rembourrage n’amortit la dureté du bois et il manque des accoudoirs.
Je me sens mal à l’aise devant cette femme d’une cinquantaine d’années. Ses cheveux coiffés en chignon lui donnent un air sévère. De mon perchoir, je ne vois que le haut de sa robe, taillée dans un beau tissu noir. Son maquillage froid met en valeur ses yeux marron outrageusement entourés de couleurs sombres. Cette façon de se farder me rappelle des camarades de classe de ma fille, que j’avais aperçues une fois ou deux à la sortie de son école. Comment les surnomment-elles déjà ?
Au ton de sa voix impérative, je sursaute avant de lui répondre :
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Je soupire intérieurement de lassitude, car je ne recherche pas d’employée dans la force de l’âge, mais des midinettes facilement manipulables. De plus, les postulantes de la première catégorie racontent toutes la même histoire, à quelques détails près : veuves ou divorcées, ont mis leur carrière professionnelle de côté pour s’occuper de leurs enfants, sont motivées, blablabla.
La preuve, cette greluche avait travaillé moins de quatre ans. Du reste, elle n’a aucune expérience en tant que femme de chambre. J’avais pourtant demandé à l’agence de recrutement de me proposer des candidates certes motivées, mais aussi avec un minimum de compétences !
Toutefois, je ne vais pas la congédier tout de suite, car la sonnette de la porte d’entrée n’a pas annoncé mon prochain rendez-vous. De plus, je ne me suis pas encore amusée avec elle ou si peu. Je fais donc semblant de m’intéresser à ce qu’elle raconte.
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J’ai l’impression que cet entretien est mal barré. Mon interlocutrice a pris un air identique à tous les recruteurs rencontrés jusqu’à présent. Déçue et fatiguée de mes échecs à répétition, je continue néanmoins à faire bonne figure.
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Je me redresse afin de jeter un coup d’œil à son CV posé devant moi. Comment avais-je pu passer à côté de cette information ? Pour ma défense, je croule bien évidemment sous une montagne de travail au domaine. Par ailleurs, ces derniers temps, je dois aider pour le ménage. Bref, je n’ai pas étudié consciencieusement les dossiers transmis par l’agence de recrutement. Je lui pose donc la prochaine question avec une attention nouvelle.
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Surprise par son regain d’intérêt, je lui réponds non sans une certaine fierté.
Suite à son hochement de tête, je sors un cliché abîmé de mon sac à main et me lève afin de le lui donner. Lorsqu’elle s’en empare, je remarque ses ongles impeccablement manucurés et vernis. La couleur foncée utilisée est identique à celle de son rouge à lèvres. J’attends debout devant le bureau, soulagée de pouvoir me dégourdir les jambes et surtout de ne plus ressentir sur mon postérieur le bois dur de cette chaise inconfortable. Elle s’attarde les yeux dans le vague, et son froncement de sourcil me fait penser à mon défunt mari. Il avait le même tic lorsqu’il devait prendre une décision importante.
De nouveau en possession de mon bien, je me rassois. Sa posture me paraît plus dynamique et volontaire.
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Sa fille change tout. Finalement, je n’ai peut-être pas perdu mon temps avec elle. Je dois traiter son cas avec habileté, car l’enjeu est de taille. Néanmoins, il est hors de question de modifier pour autant ma méthode de recrutement.
Le moment est venu de vérifier qui est véritablement la personne en face de moi. Je m’extirpe donc de mon siège et, en faisant claquer mes talons sur le carrelage, je me place derrière ma proie. J’approche mes lèvres à quelques centimètres de son oreille afin d’y chuchoter :
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Je sens son haleine parfumée sur ma joue. Je sursaute, me lève d’un bond et me retourne pour lui faire face. Cependant, son corps est droit comme un « I » tout contre la porte d’entrée de cette pièce. M’interrogeant du regard, elle esquisse l’espace d’un instant un sourire avant de reprendre son air pincé.
Ai-je rêvé ? Pourtant, j’ai bien ressenti la caresse de son souffle sur ma peau. Une grande bouffée de chaleur m’envahit, mais aussi soudainement qu’elle était venue une sensation de froid la remplace. J’ai la chair de poule tout d’un coup par cette chaude journée parisienne de juin.
Que fais-je debout ? Je suis folle ! Si je continue comme ça, je n’aurai pas le poste. Je me rassois donc en répondant à la question.
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Elle a eu la réaction assez basique d’une bonne mère de famille. Cependant, j’ai une longue expérience, et je devine sous le masque que nous portons toutes en société, un certain potentiel prometteur.
Je viens appuyer le haut de mes cuisses contre le bureau. Face à elle, je la domine de toute ma hauteur alors qu’elle s’est rassise. Je dissimule la clef au creux de ma main gauche. Celle-là même qui ouvre la porte de cette pièce.
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Pourquoi vient-elle juste devant moi maintenant ? D’abord, je lève mes yeux à la recherche des siens. Toutefois, lorsque je les croise, je me sens toute petite et insignifiante, comme une fillette qui se fait gronder par sa mère après avoir fait une bêtise. Je détourne donc mon regard. Celui-ci s’arrête sur le bas de sa robe droite descendant à mi-cuisse. Malgré la chaleur estivale, elle les a recouvertes de nylon qui laisse deviner la peau de ses jambes. Ses pieds sont chaussés d’escarpins fermés avec des talons carrés. Je trouve que ces dernières lui vont bien et… Que m’arrive-t-il ? Je dois rester concentré sur l’entretien ! Elle me trouble et je ressens de l’angoisse. Pourquoi me fait-elle si peur ?
Elle m’interrompt d’un ton solennel, ce qui accentue davantage mon malaise.
Je lui réponds d’une voix hésitante.
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Bingo ! Si ce n’est pas du grand art, ça ! J’ai préparé le terrain pour sa progéniture. Si ma maîtresse la veut, elle devra elle-même faire le reste du travail. Pour ma part, je dois maintenant m’assurer que la mère me convienne.
Je présente sommairement les tâches qui lui incomberont ainsi que le fonctionnement auquel notre petite communauté est soumise. Après avoir répondu évasivement à ses questions, je viens placer mon index droit sous son menton. Avant qu’elle n’ait le temps de se rebeller de mon geste cavalier, je relève sa tête. Lorsque ses yeux surpris et peureux croisent les miens, je m’exprime d’un ton sévère, en la tutoyant.
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Mais… elle est folle cette femme ! Que me veut-elle ? Je vais pour me lever, cependant mon corps refuse de répondre à ma volonté. Je cherche en vain à fuir son regard perçant qui m’hypnotise. Au contact de son doigt chaud sur ma mâchoire inférieure, des fourmillements envahissent mon cou, puis mes épaules avant de se répandre au reste de mon être.
Après ce qui me semble une éternité, je retrouve ma mobilité lorsqu’elle retire son index. Apeurée, je me lève en faisant crisser la chaise sur le parquet et me précipite vers la porte. J’actionne la poignée, mais la porte ne s’ouvre pas !
J’entends au loin mon prénom. Je me retourne affolée pour constater qu’elle s’est rassise derrière son bureau durant ma tentative de fuite. Elle tient entre son pouce et son index un petit anneau soutenant une clef. Suivant le mouvement de son poignet, cette dernière se balance d’avant en arrière comme une clochette. Elle finit par la jeter négligemment sur la nappe. D’une main, la paume vers le haut, elle me la montre, me défiant de venir la chercher. N’ayant pas le choix je m’avance à petits pas, à la fois craintive et remplie d’espoir.
Sa tirade renforce ma première impression : cette femme est folle à lier ! De plus, elle a osé m’enfermer avec elle dans cette pièce. J’écoute ses boniments, mais pour rien au monde je ne travaillerai pour elle. Je suis presque arrivée à son bureau. Après avoir fini de parler, elle s’est adossée dans son fauteuil, jambes et bras croisés. Elle m’observe, le sourire aux lèvres, et a l’air de savourer ce moment comme un chat qui joue avec une souris.
Lorsque j’évite ses yeux qui m’ont hypnotisé tout à l’heure, mon regard s’arrête sur un bout de jarretelle que sa posture dévoile. Celui-ci virevolte à présent de la clef à l’attache maintenant son bas. Pourquoi suis-je attirée par ce morceau de tissu ? Porter ce genre de sous-vêtement à notre époque et surtout en été, c’est n’importe quoi !
Je ne réponds pas à sa dernière question qui, j’en suis certaine, n’est que purement rhétorique. Tout en la surveillant du coin de l’œil, je m’empare de mon sésame et me précipite vers la porte.
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Mon sixième sens ne m’avait pas trompée, elle a bien un potentiel caché. Je pèse alors dans ma tête le pour et le contre : elle n’a aucune expérience pour ce travail, mais elle n’aura pas de défauts. Notre discussion a révélé un certain savoir-vivre. Elle s’exprime dans un français correct et d’après les tests qu’elle a passés, elle possède une intelligence dans la norme. Ce n’est pas un mannequin, mais elle n’a pas un physique ingrat. Une fois relookée et un sévère régime, elle sera à mon goût et ne jurera pas avec le reste de l’équipe.
Je ne compte même pas la cerise sur le gâteau : sa fille. Il est certain que si cette dernière vient vivre avec nous, elle ne sera pas attachée à ma brigade. Par ailleurs, bien qu’à cinquante et un ans je n’aie plus rien à prouver, j’ai cependant quelque chose à me faire pardonner. Cette jeune métisse franco-japonaise serait bien ma chance pour que ma maîtresse enterre la hache de guerre.
Avant qu’elle ne sorte, je m’empresse d’ajouter sur un ton le plus aimable possible.
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Je ne réponds pas et me dépêche de quitter l’appartement afin de retrouver mon chez-moi sécurisant.
Je tourne mon aventure à la plaisanterie bien que j’aie eu très peur ce matin. Il ne me reste plus qu’à continuer mes recherches, car bientôt je ne percevrai plus d’allocations chômage. Il est donc impératif que je trouve un travail. N’importe lequel, pour ne pas finir à la rue.
J’ai déjà du mal à terminer les fins de mois et au terme des vacances scolaires, il faudra acheter les affaires d’école pour ma fille. Cette année encore, elle n’a pas quitté la région parisienne. À la rentrée, la plupart de ses futurs camarades de classe conteront leur été à la mer alors qu’elle n’aura rien à raconter. Elle ne se plaignait jamais, mais une mère sent ce genre de chose.
Nous vivons dans un deux-pièces situé dans le centre du XIXe arrondissement de Paris. Le loyer n’est pas trop cher, car grâce à ma situation familiale j’ai droit à des aides aux logements ainsi qu’à cet appartement. J’ai laissé la chambre à Asami. À son âge, elle a besoin d’un endroit à soi.
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Il m’a fallu deux jours et demi pour recevoir les vingt-trois candidates. Au final, je n’en retiens que trois en comptant Hélène. Trois pour un seul poste. Il va falloir faire un choix ! Je téléphone alors, d’un mobile jetable, à l’agence de détectives privés avec qui j’ai l’habitude de faire affaire.
Je ne manque jamais l’occasion de pratiquer un de mes jeux préférés : l’espionne. De toute façon, je dois être prudente avec la réputation de la famille Largue. Vu mon comportement avec les vingt-deux postulantes qui ne seront pas retenues, elles ne pourront pas répandre de vilains commérages sur ceux que je sers, puisqu’elles ne savent même pas qui les a reçues. Un appartement loué sous un faux nom deux jours pour y tourner un film. Des meubles bas de gamme, achetés et livrés, que je vais abandonner sur place. Une agence de recrutement qui ignore le véritable nom de sa cliente. Un téléphone mobile jetable qui rejoindra la première poubelle rencontrée sur mon chemin. Il ne me reste plus qu’à effacer toutes traces de mon passage en y faisant le ménage, et ça, c’est ma spécialité.
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Il s’est passé plusieurs jours depuis mon entretien. Cependant, encore marqué par mon aventure, je fais chaque nuit le même cauchemar : je pénètre dans une pièce. Bien que je ne la voie pas, je devine une présence féminine dans l’obscurité. Tout à coup, je suis éblouie par le puissant faisceau lumineux d’un projecteur. L’instant d’après, je me retrouve attachée à une chaise et j’entends un bruit de talon me tourner autour. Soudain, une paire de jambes gainées de bas tenus par des jarretelles rentrent dans le rond éclairé. Quelques secondes plus tard, un visage apparaît recouvert d’un fond de teint blanc avec des lèvres foncées et le contour des yeux grimé de noir. Il se place à quelques centimètres du mien. Une main pénètre à son tour dans le cercle lumineux et secoue une clef qui sonne comme une clochette. Je commande à mon corps de se mouvoir, mais sans succès. J’entends des rires, tout autour de moi, se moquer de ma personne. Je me réveille toujours à ce moment-là en sueur et le souffle court.
Après avoir bu un verre d’eau dans la cuisine, je fais un détour par la salle de bain pour me passer un gant humide entre mes cuisses. Car sans pouvoir me l’expliquer, ce mauvais rêve me fait mouiller.
Pourtant, je suis hétérosexuelle. Depuis la mort de mon mari, il y a de cela quatre ans maintenant, j’ai fréquenté plusieurs partenaires masculins. Nous allions parfois finir la nuit à l’hôtel après un bon restaurant. Toutefois, mes liaisons ne duraient jamais plus d’une semaine, car soit il ne me rappelait pas, soit c’est moi qui faisais la working girl trop occupée pour le revoir.
Je téléphone à ma référente de Pâle Emploi pour la prévenir que dorénavant j’agrandis mon secteur de recherche.
J’allai passer tout ce temps sans bosser ?
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Je consulte les rapports de l’agence de détectives privées des trois postulantes. Une jeune femme de vingt-deux ans, une autre âgée de vingt-neuf ans et celui d’Hélène.
J’étudie soigneusement les deux premiers, puis j’attaque le troisième.
Voyons voir ! Une vraie sainte malgré ses quarante-deux ans. Une enfance tranquille avec un père sévère et une mère protectrice… À sa banque, elle est dans le rouge depuis qu’elle a été licenciée… Elle a dépensé toutes ses économies après le décès de son conjoint. Un casier judiciaire vierge… Des amies sans histoire… Une famille qu’elle voit parfois pendant les fêtes… Aucune relation intime suivie…
Bref, rien de bien croustillant en définitive. Personnellement, je porterai bien mon dévolu sur la demoiselle de vingt-deux ans. Je m’amuserais davantage à la faire casser avec son petit copain actuel avant de la convertir à ma cause. Cependant, il y a la fille d’Hélène.
J’ouvre son dossier : dix-huit ans depuis avril de cette année. Née en France d’une mère française et d’un père japonais. D’après les clichés joints, elle a hérité son physique des gènes de son papa décédé dans un accident de voiture. En effet, elle ressemble davantage à une Japonaise qu’à une Européenne avec ses cheveux foncés, son mètre cinquante-cinq, sa taille toute fine et ses yeux noirs en forme d’amande.
Je referme son dossier, car ce sera à ma maîtresse de décider. Dans le cas où elle ne l’intéresserait pas, je prendrai la plus jeune des candidates. Sinon, je ferai avec Hélène qui, à tout bien réfléchir, sera certainement beaucoup plus facile à dresser.
Toutefois, pour avoir l’aval de l’héritière, je vais devoir obtenir un rendez-vous. Seulement, il y a un hic ! Une de mes ouailles a fait… une très grosse bêtise et elle a dû intervenir en personne avant que ça tourne mal. Elle a fini par étouffer l’affaire et la renvoyer, mais elle m’en tient pour responsable. Pour résumer, je ne suis pas dans ses petits papiers en ce moment. Je l’évite donc au possible.
J’espérais bien, en lui proposant une nouvelle « friandise », remonter dans son estime.
Je suis rentrée au service du domaine Largue du Vésinet il y a vingt-six ans, soit un an avant la naissance de l’héritière. Je l’ai donc vue grandir. Ses parents étant continuellement en voyages d’affaires, la précédente gouvernante m’avait donné la lourde tâche de la surveiller. Elle m’en a fait baver, lorsqu’elle était encore une petite fille, à toujours courir partout dans la propriété et à se cacher pendant des heures. Néanmoins, j’avais su faire ma place avec les années, car de femme de chambre j’étais devenue Nounou. Puis, après avoir renoué avec mon ancienne activité, j’occupe maintenant mon poste actuel.
J’ai dû m’y reprendre à deux fois avant qu’elle ne réponde au téléphone.
Elle ne me laissa même pas finir ma phrase en m’interrompant d’un ton agacé.
Aie ! Ça commençait mal. J’ai intérêt à vite en venir à l’objet de mon appel avant qu’elle ne raccroche.
Elle avait raccroché. Ce qu’elle peut être énervante lorsqu’elle se comporte de cette façon !
Après quelques secondes de réflexion, je reprends en main le combiné, car j’ai peut-être trouvé une solution à mon problème de communication. Je vais passer par Chloé, sa demoiselle de compagnie. Elle lui donnera le dossier et me tiendra informée de sa décision. Pourquoi n’y ai-je pas pensé plus tôt ?
Je téléphone donc dans le salon de sa suite, mais personne ne répond. J’essaye la chambre de ma patronne, puis celle de Chloé à tout hasard, mais sans plus de succès. Peut-être qu’elle fait le ménage de la salle de bain ? Mais là, il n’y a pas de poste téléphonique ! Pourtant elle ne la quitte jamais. À moins qu’elle soit dans son bureau et que c’est justement elle qui l’accapare. Dans ce cas, si je me rends physiquement dans ses appartements sans y être invitée, je suis morte.
Par contre, je peux envoyer une de mes femmes de chambre. De toute façon, elle ne viendra pas me tuer dans la dépendance et si je perds une recrue, je pourrai en embaucher deux au lieu d’une.
Je plaisante (quoique), mais il faut quand même lui soumettre le dossier, car j’aurai des gens de pressions à contacter suite à sa décision. Je téléphone donc à la cheffe cuisinière qui passe le plus clair de son temps dans les cuisines du bâtiment principal du domaine.
En attendant la venue de ma future messagère, mon esprit s’égare sur notre petite communauté.
Nous sommes vingt et un employés à travailler dans la propriété située dans les hauteurs du Vésinet. Sandrine, cheffe cuisinière de son état, a quatre cuisinières/serveuses sous ses ordres. Aurélie, jardinière-paysagiste, manage trois horticultrices. Enfin, il y a Marc qui, épaulé de quatre vigiles, s’occupe de la sécurité du domaine.
Officiellement, en tant que gouvernante générale, tout le monde dépend de mon autorité. Cependant, dans les faits, je n’ai plus que deux femmes de ménage (bientôt une troisième) à encadrer ainsi que le factotum et Amédée. Ce dernier est le chauffeur et garde du corps de Mademoiselle. Ceux déjà cités sont sous la responsabilité de leur supérieur et ça me va très bien comme ça. J’ai aussi en charge le personnel des autres domaines. Toutefois, ce sont des propriétés beaucoup plus petites que celle du Vésinet. Généralement, il a juste un couple pour entretenir la demeure et le jardin.
J’ai failli oublier Chloé qui a le statut trompeur de demoiselle de compagnie. Elle est au service de notre patronne jour et nuit et effectue exclusivement les tâches ménagères de sa suite. Cette soubrette est sous sa responsabilité directe vu qu’elle l’a éduquée personnellement.
Il reste à préciser que la blanchisserie est tenue par les gens de cuisine durant leur temps « libre ». Ils n’en manquent pas avec deux convives à nourrir (Mélanie et sa demoiselle de compagnie). Sandrine y pourvoit seule. Chloé vient non seulement chercher le repas de sa Maîtresse, mais aussi le sien à l’office.
Bref, hormis la présence d’invités ou des parents de l’héritière, quatre employées se seraient retrouvées au chômage technique. Il y avait donc eu une discussion, il y a plusieurs années, entre les responsables. Soit, son personnel s’occupait de la blanchisserie, soit elle perdait trois sous-fifres et devait avoir recours à l’intérim lorsqu’elle en aurait besoin. Avec tous les problèmes causés par la deuxième solution, elle n’avait pas hésité une seconde à convertir son équipe en blanchisseuse.
Trois coups à ma porte de bureau, pourtant ouverte, interrompent mes pensées.
L’heureuse élue qui jouera le rôle de messagère est Sylvie. J’enferme le dossier d’Asami dans une grande enveloppe kraft et j’écris, au marqueur noir, le seul mot qui titillera la curiosité de ma maîtresse, quelle que soit son occupation.
Je n’allais pas la laisser sans recommandations dans sa périlleuse mission. N’étant pas stupide et connaissant mon différend actuel avec notre maîtresse, elle comprit très bien la dangerosité de sa tâche.
Une quarantaine de minutes plus tard, mon téléphone sonne. Je décroche et avant que je puisse m’exprimer, une voix chantante aboie un ordre et raccroche :
Heureusement que les voiturettes électriques que nous utilisons pour nous déplacer dans le domaine ont une vitesse de pointe de 40 km/h, car je ne dois pas traîner pour relier mon cabinet de travail au sien en si peu de temps.
Je rentre dans la pièce de mon rendez-vous tout essoufflée d’avoir pressé le pas dans l’immense manoir. Je comprends alors la raison pour laquelle Chloé n’avait pas répondu à mes appels téléphoniques. Elle est suspendue à un mètre du sol et reçoit une fessée au paddle. Personnellement, je n’aurais pas choisi cet ustensile au vu de la position horizontale de la suppliciée, mais l’héritière ne se mêlait pas de mes « jeux » et je n’intervenais pas dans les siens. Surtout en ce moment !
Après m’être repu de la vision du jeune corps nu se balançant légèrement sous les coups, mes yeux revinrent se poser sur ma maîtresse que nous appelons tous respectueusement, Mademoiselle. Sa grâce et sa beauté n’avaient d’égale que son intelligence. De plus, sa faculté à toujours deviner les pensées de son interlocuteur en faisait une redoutable femme d’affaires.
D’ailleurs, elle avait déjà reçu plusieurs demandes en mariage de très bons partis appartenant à l’élite de la société française. Toutefois, la gent masculine ne l’avait jamais intéressée. Elle avait toujours été attirée par l’autre sexe et surtout par leur éducation.
En effet, elle avait commencé très jeune à former certaines de ses camarades de classe. Cependant, encore novice, elle n’avait pas pu empêcher une convocation de l’ex-gouvernante des domaines, par son école. Mon prédécesseur avait si bien étouffé l’affaire que même les parents de Mélanie n’en ont jamais rien su. Une fois rentrées au manoir, elles étaient restées toutes les deux plusieurs heures à discuter dans sa chambre. Par la suite, il n’y eut plus jamais d’assignation, bien qu’elle ait certainement continué à exercer sa « passion ». Elle laissa en plan son « travail » et brandit le rapport du détective privé.
Un seul mot sur l’enveloppe (Japonaise) et j’avais enfin toute son attention.
Pour toute réponse, elle sortit d’un grand sac noir de sport un casque antibruit et l’appliqua sur les oreilles de Chloé. Tout en m’invitant d’une main à prendre une chaise, elle s’assit derrière son imposant bureau en bois massif. Elle m’incita à continuer d’un hochement de tête.
Je lui parle alors d’Hélène. Que malgré son âge, elle a un certain potentiel, qu’elle-même ignore et que si nous la manipulions bien, la jouvencelle pourrait venir habiter au domaine. Toutefois, je m’empresse d’ajouter que je n’ai pas reçu Asami, car je ne sais pas si elle a le même « caractère » que sa maman.
La connaissant bien, je prends sa réplique pour ce qu’elle est : une semi-plaisanterie. Car, telle une chasseuse qui a entraperçu une proie, elle sera assurément prête à pardonner à sa rabatteuse son erreur passée du moment que je « travaille » bien cette fois.
Mes pensées sont-elles comme un livre ouvert pour son esprit aiguisé ? Dans ce cas, elle sait sûrement que ma « modestie » m’empêchera de tomber dans ce piège grossier. Si toutefois, c’en est bien un ? Bref, je n’allais surtout pas me vanter de lui accorder une faveur.
Son visage impassible ne laisse rien paraître, mais si elle me propose de m’aider, c’est qu’elle est enthousiaste à la venue d’Asami.
Elle me regarde malicieusement et je comprends le message avant qu’elle ne le dise.
Elle se lève, me signifiant ainsi la fin de l’entretien. Sans même attendre que je sorte, elle retourne à sa précédente occupation. Je m’incline et me dépêche de quitter ses appartements. Cependant, juste avant de passer la porte, je ne peux m’empêcher de me demander ce qu’a fait Chloé pour mériter une telle punition. Je regagne mon chez-moi tout en me félicitant de ma bonne fortune. Une fois Asami, entre ses griffes, elle me pardonnera définitivement ma faute.
Revenue à mon point de départ, mon bureau dans la dépendance B, je téléphone à deux connaissances de la famille Largue. Un membre du directoire de la banque dans laquelle Hélène possède son compte courant et à un adjoint du Maire de Paris. Ils doivent tous les deux quelques services aux parents de ma maîtresse.
Je communique par courrier électronique le nom d’Hélène Miyazawa à l’agence de recrutement, dans un web café. Il ne me reste plus qu’à patienter. Ils m’informeront du choix de ma future soubrette par retour de mail et je n’aurai plus qu’à lui téléphoner. En attendant, je me dépêche de régler mes tâches administratives afin d’aider pour le ménage. Deux préposées pour s’occuper du manoir, des deux dépendances, du poste de garde, des différents vestiaires…, ce n’est pas suffisant.
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Il m’arrive de repenser à cette femme qui m’a fait moult impressions. Je ressens encore parfois son index sous mon menton et je me mets à frissonner. Suite à mon entretien d’embauche dans l’immeuble parisien, des souvenirs de mon enfance ont refait surface. Toujours cette maîtresse de CM2 qui envoyait les élèves turbulents au coin, face au mur, avec les mains sur la tête. À trois reprises, elle m’y avait puni et jamais pour un motif valable. J’avais ressenti une grande honte en imaginant les yeux de mes petits camarades dans mon dos.
La sonnerie du téléphone me ramène dans le présent.
Je suis assez surprise que le directeur me contacte personnellement. D’habitude, c’est ma conseillère qui m’appelle en début de mois et j’arrive toujours à négocier avec elle mon découvert. Elle compatit, car elle est aussi mère célibataire.
Anéantie, je repose le combiné sur son socle. Comment vais-je faire si je suis interdite bancaire ? Je ne pourrai plus rien payer et les prélèvements automatiques seront rejetés.
Faisant bonne figure, je lui réponds sur un ton doucereux.
Je lis les deux cartes postales de mes cousines qui me racontent leurs vacances au soleil et ouvre une lettre à fenêtre. Encore une facture, me dis-je.
Madame… Votre dossier a été réétudié et suite… Nous avons le regret de vous aviser… En conséquence, nous vous informons que nous ne pourrons plus vous verser les allocations à partir du mois d’août… Au sujet de l’appartement que vous occupez… étant réservé seulement aux particuliers percevant ces primes, vous devrez le libérer au plus tard le 1er août de cette année…
Je saute sur le téléphone et appelle l’organisme. Après vingt minutes d’attente, je tombe sur un hurluberlu qui visiblement n’en a rien à faire.
Je raccroche furieuse, et me réfugie dans les toilettes en pleurs afin que ma fille ne me voie pas dans cet état.
Il s’est écoulé quinze jours depuis mon entretien. Malgré mes recherches, je n’ai pas trouvé de travail. On m’a bien contacté pour un poste de serveuse, mais c’était un remplacement de cinq heures par semaine, le midi, et seulement pour une quinzaine de jours. Bref, j’avais refusé afin de rester disponible pour une éventuelle autre proposition.
Depuis ce matin, je m’arrête chaque fois que je passe devant le téléphone. J’ai peut-être la possibilité d’avoir un CDI ! Cependant, pour être fixée je dois appeler l’agence de recrutement et leur demander. Que dois-je faire ? De toute façon, ai-je vraiment le choix ? Car je suis obligée de rendre l’appartement dans moins d’un mois.
Au bout de combien de temps la police sonnera-t-elle à la porte, si je l’occupe toujours ? La honte devant ma fille et les voisins si les forces de l’ordre débarquent. Je peux demander peut-être de l’argent à mes cousins/cousines, mais ils vont le dire au reste de la famille.
Pourquoi me torturer comme ça ? De toute façon, je ne serai jamais retenue. Je n’ai pas les compétences pour être femme de ménage. Je finis par composer le numéro de téléphone de l’agence de recrutement. J’ai une grosse boule au ventre et mes mains tremblent légèrement.
Ce n’est pas possible, j’ai été choisie ! Que dois-je faire ? Comment ferai-je avec Asami si je travaille là-bas ? De toute façon, ai-je vraiment encore le choix ?
Je raccroche avant de grimper sur le clic-clac du salon qui me sert de lit. Tout en sautant sur les coussins, j’exulte en criant :
Essoufflée, je redescends du canapé. Finie la galère, finalement tout allait s’arranger. Je gagnerai suffisamment d’argent pour renflouer mon compte bancaire. Je serai logée, nourrie, blanchie… et je reverrai Corinne. Je l’imagine face à moi, ses cuisses contre son bureau et me toisant de sa hauteur. J’en ai un frisson dans le dos. Pourquoi, escomptai-je tant être en sa présence ?
Il n’y a que le logement pour ma fille qui m’inquiète. Ma nouvelle patronne avait dit que je pourrais m’arranger avec l’héritière. J’espère que cette dernière fera preuve de complaisance. En tout cas, ça ne peut pas être pire que maintenant.
J’ai envie de faire la fête. J’appelle Asami, mais elle ne répond pas. Mince, j’avais oublié qu’elle passait la journée chez une copine et qu’elle ne reviendrait que demain. De toute façon, si je sors de l’appartement je risque de rater son appel. Quand va-t-elle me contacter ?
Anxieuse, jei vérifie deux fois le téléphone pour m’assurer qu’il est bien en état de fonctionner et raccroché. C’est vers 15 heures qu’il sonne. Je suis dans la cuisine en train de me servir une tasse de thé. Je me précipite le cœur battant la chamade.
C’est elle ! Sa voix est douce et sensuelle. Je ne sais pas trop quoi dire.
Elle ne répond pas à ma question et continue sur le même ton.
Je me sentis rougir. Pourquoi suis-je aussi gênée ?
Je note d’une main tremblante l’adresse qu’elle me dicte. Elle a exigé que je me relise à haute voix pour être certaine de ma ponctualité.
À l’énoncé de son identité, de vives émotions me submergent et m’empêchent de lui répondre. Sur un petit nuage, j’essaye désespérément de redescendre sur Terre.
C’est donc dans un état second que j’entendis au loin de nouveau le son de sa voix émaner du combiné avant qu’elle ne raccroche.
Les bips du téléphone me sortent de mon apathie. Avait-elle dit quelque chose d’autre ? M’avait-elle souhaité une bonne journée à la fin de la conversation ? Je ne le saurai jamais. Tout ce dont je me souviens, c’est d’être restée un certain temps immobile, l’appareil collé à l’oreille, avant de le reposer machinalement sur son socle.
C’est devant ma penderie, à la recherche de vêtements pour demain, que je retrouve pleinement mes capacités.
Non ! Pas cette robe. Pas un jean quand même… et pour les chaussures… non, elles ne vont pas avec la couleur de ce pantalon. Peut-être, qu’avec cette jupe ? Finalement, après une vingtaine de minutes passées à faire l’inventaire du placard, je m’aperçois que je n’ai rien à me mettre ! Il serait mal avisé de m’y rendre avec les mêmes habits que la dernière fois et puis elle a dit : de me faire belle.
Je regarde la pendule, il est 15 h 46 ! Décidée, je téléphone à mon salon de coiffure.
Munie de mon sac à main, je me dirige vers le centre commercial de Châtelet-Les halles. J’ai une heure pour faire du shopping, sans compter le trajet. Je n’ai pas d’argent, mais qu’importe. Je ferai un chèque et puis de toute façon, j’ai un CDI maintenant.
J’emprunte la ligne de métro 4 qui me dépose à destination. Que vais-je acheter ? Elle veut que je sois belle. Je me serais bien vêtue comme elle. Toutefois, vu nos différences anatomiques, c’est impossible. Ce n’est pas grave, je prendrai des habits sérieux et chic.
Dans le magasin de fringues S&M, je jette mon dévolu sur une jupe droite bleu marine, mais il n’y a plus ma taille. Alors, je me rabats sur le même modèle en rouge foncé. Taille haute, l’ourlet tombe quelques centimètres au-dessus de mes genoux. Ce n’est pas autant que la sienne, mais c’est parfait. Je prends un chemisier noir, car elle a l’air de bien apprécier cette couleur. Pour les chaussures, j’ai dans ma garde-robe des escarpins sombres qui feront très bien l’affaire.
Je monte d’un étage afin de me rendre à l’espace des sous-vêtements. Je m’arrête aux collants et regarde ceux légèrement fumés avant de me rappeler que c’était des bas qui recouvraient ses jambes. Je change de rayon et tombe dessus. Mais non, elle avait des jarretelles. Rien que d’y repenser, je revois le haut de sa cuisse. Je vais en mettre moi aussi. Ne trouvant pas mon bonheur, je me renseigne auprès d’une vendeuse.
Ce n’est pas grave, je me dirige vers les caisses. J’irai faire un tour au magasin de lingerie fine, dix mètres plus loin. Je sors avec mes achats dans un grand sac. Direction la boutique de sous-vêtement. Je pousse la porte et une femme très élégante, la vingtaine, vient à ma rencontre.
Ne voulant pas passer pour une idiote devant cette jeunette, je fais semblant de comprendre sa question.
Tout en la suivant dans le magasin, je la lui révèle dans un souffle. En effet, mon regard est subjugué par ses jambes habillées d’une matière cristalline. Cette dernière galbe ses « échasses » tout en reflétant la lumière et sans pour autant dissimuler sa peau. Toute gênée, je constate que mon intérêt ne s’arrête pas là, puisque je me demande maintenant si elle possède un porte-jarretelles sous sa robe-fourreau lui arrivant au trois quarts de ses cuisses.
Lorsqu’elle se penche pour attraper le produit souhaité, le bas de son vêtement remonte pour laisser apparaître des jarretelles saumon. C’est en sentant mon visage rougir que j’étudie ce qu’elle me montre. Prenant mon courage à deux mains, j’ose lui poser ma prochaine question.
Bien que j’aie honte de mon attitude, je la regarde de nouveau se pencher pour remettre la boîte à sa place. Elle n’eut pas l’air de s’apercevoir de mon manège, car après avoir changé de rayon elle me présente toujours très posément le même modèle. Cependant, ceux-ci sont dépourvus de bandes de caoutchouc adhérentes sur le haut.
Devant mon air dubitatif, révélant mon ignorance sur cette famille de dessous féminins, elle me lance un clin d’œil qui me fait rougir de plus belle. Patiente, elle me présente chaque pièce qu’elle vient de citer. En professionnelle, elle m’en explique leur utilité et leur histoire. C’est à quarante-deux ans que j’apprends encore des trucs !
Elle me le montra sur un mannequin avant de poursuivre :
Je suis de suite séduite. Après un rapide passage en cabine, je règle par chèque, creusant ainsi davantage le découvert de mon compte bancaire. Lorsqu’elle me tend le sac avec mes achats à l’intérieur, elle me fait de nouveau un clin d’œil tout en s’exprimant d’une voix sensuelle.
Je sors de la boutique toute fière d’avoir acheté cet ensemble de lingerie et un peu troublée par la dernière phrase de la vendeuse.
Mince, déjà 18 heures ! Ça va être juste pour ma coupe. Je n’ai pas le temps de passer à l’appartement. J’arrive donc dans le salon de coiffure, mes sacs à la main et avec quelques minutes de retard.
Ma coupe ressemble enfin à quelque chose. Je rentre chez moi épuisée, mais contente de ma journée. Ça fait très longtemps que je n’avais pas couru comme ça pour me faire belle. En sortant mes dessous du sac, je tombe sur la carte de visite de la dernière boutique. Au stylo à bille, la vendeuse avait rajouté deux phrases suivies d’un numéro de téléphone portable. « Je me nomme Barbara. N’hésitez pas à m’appeler si vous avez la moindre question à me poser ».
Qu’est-ce que ça veut dire ? C’est bien la première fois qu’une femme me fait ce genre de proposition. Choquée, je m’empresse de jeter la carte à la poubelle tout en ressentant une bouffée de chaleur. J’enlève les étiquettes et prépare mon sac à main pour le lendemain.
Après avoir mangé une salade composée, je consulte mes mails et surfe un peu. Tout d’abord, je recherche le nom des propriétaires résidant à l’adresse communiquée par Corinne. Cependant, une demi-heure plus tard, je dois m’avouer vaincue. Agacée de ma prospection infructueuse, je prépare mon trajet pour aller de mon domicile au domaine.
Sur le point d’éteindre l’ordinateur, je me ravise au dernier moment. Excitée comme une adolescente, je tourne ma tête à droite puis à gauche afin de vérifier que je suis bien seule avant de sourire de ma bêtise. Lentement, je tape sur le moteur de cherche Poople le prénom et le nom de la femme qui obsède mes pensées depuis maintenant quinze jours : Corinne Leportin !
Toutefois, je ne trouve aucune trace d’elle. Elle n’est ni sur les Pages mauves, ni dans les Copines d’avant et encore moins sur Facelivre. Déçue, je finis par tomber sur l’origine de son prénom que je lis attentivement. Curieuse, je regarde aussi la fonction d’une gouvernante. Je m’aperçois alors de l’étendue de ses responsabilités et j’éprouve un vif plaisir lorsque je constate que je serai certainement directement sous ses ordres.
Exténuée par ma journée riche en émotions, je me couche. Toutefois, je n’arrive pas à m’endormir. Je n’arrête pas de penser à demain, aux vêtements que je me suis achetés, au regard de Corinne sur ma personne, à sa voix, à sa robe manifestement hors de prix, à son index sous mon menton. Je ne sais plus ce que je fais. Je retire ma chemise de nuit et la jette au sol. Tout en fermant mes yeux, je caresse doucement mes seins.
Je me revois entrer dans ma classe. Ma maîtresse de CM2 est là, assise à son bureau en train d’annoter mon cahier de liaison. Sans me regarder, elle me montre du doigt le coin près du tableau noir. Une fois en place, j’écarte légèrement les jambes et mets mes mains sur ma tête. Ce n’est pas la jeune moi qui m’y trouve, mais celle âgée de 42 ans. Toutefois, je suis vêtue d’une petite jupe d’écolière qui m’arrive juste en bas des fesses et d’un chemisier cintré bien trop serré pour ma corpulence actuelle. Une sonnerie stridente retentit, annonçant la fin de la récréation. Tous mes anciens camarades rentrent dans la classe et se moquent de ma personne. Ils ont aussi la quarantaine. J’ai honte et de grosses larmes coulent sur mes joues.
Je remonte la couette sur mon corps et bouge lentement le haut de mon buste afin de m’y frotter. Mes seins durcissent au contact du tissu. Une agréable onde se répand dans ma poitrine avant de gagner mon ventre. Je prends mes deux mamelons entre mes index et mes pouces. Je les fais rouler sous mes doigts et les pince. Je pousse mon premier soupir de bonheur.
Je suis toujours au coin dans la classe. Grâce au bruit de ses talons claquant sur le carrelage, je peux suivre ses déplacements de son bureau au tableau noir. À chacun de ses passages, les effluves capiteux de son parfum titillent mon odorat. Deux de mes camarades se moquent de la longueur de ma jupe et font des commentaires sur ma petite culotte blanche.
Ma main droite descend le long de mon corps, effleurant ma peau sur son passage. Je joue avec les poils de mon pubis en les entourant autour de mon index. Le tiraillement, localisé au début dans mon bas-ventre, se répand dans tout mon abdomen. Que c’est bon ! Répondant à l’appel de ma vulve, j’abandonne ma poitrine pour venir caresser mes grandes lèvres en les griffant légèrement. Lorsque je trouve mon clitoris, ma respiration s’accélère.
Mon institutrice, équipée d’une règle en bois, frappe une de mes fesses à chaque aller-retour. Les adultes applaudissent dans la classe.
Je rentre un doigt dans mon vagin et roule du bassin. Mon plaisir monte rapidement. Les extrémités de mes seins continuent de frotter le tissu. Ils sont durs et me font mal. Je persévère, car je sais d’expérience que cette « douleur » est le prélude d’une grande libération de bonheur.
Ma jupe est relevée et ma maîtresse d’école fait glisser très lentement la règle en bois à l’intérieur du compas de mes cuisses. Une fois finie, elle tapote mon postérieur avec son ustensile. Je pleure de plus en plus. J’ai mal, mais en même temps j’éprouve du plaisir.
J’enfonce un deuxième doigt dans ma fente et en plus du mouvement de mes hanches, je bouge mon poignet. Tout mon corps ondule au rythme de mes vagues d’euphories. Chaque fois que mes fesses touchent le drap, je pousse un râle de satisfaction. J’accélère les cercles de ma main sur mon clito. Je n’en peux plus, je cherche à me libérer de ma douce douleur.
Je n’ai pas envie qu’elle cesse de me maltraiter. Elle doit continuer ! J’ai placé chacune de mes paumes sur les deux pans de murs afin de cambrer mon dos et tendre mon postérieur en arrière. Je pousse un petit cri à chaque coup, de souffrance et de bien-être. Du fait de ma position, mes camarades doivent pouvoir voir mes grandes lèvres se dessiner sur le fin tissu de ma petite culotte.
Je ne me contrôle plus. Je sens la vague monter, elle est là, au sommet. J’ai mal à mon index et à mon majeur, à force de frotter mon clitoris. Je prends à peine conscience du surplus de cyprine qui dégouline de ma vulve. Mon corps est pris de soubresauts, je convulse du bassin tout en exultant.
Mon institutrice a arrêté de malmener mes fesses. Mes jambes ne me portant plus, je gis à genoux dans le liquide que ma petite culotte n’a pas pu retenir. Mes camarades ne moquent de moi. Tout en sanglotant, je me retourne pour voir que Corinne a remplacé ma maîtresse de CM2. Elle est seulement vêtue de la parure de lingerie que j’ai achetée aujourd’hui. Elle me console dans un souffle tout en m’enlaçant :
J’ouvre les yeux. Je suis allongée sur le dos dans mon lit. J’ai toujours deux doigts au fond de moi. Mon corps est couvert de sueur et mon postérieur baigne dans l’excédent de mon liquide vaginal. Je ressens encore de légers soubresauts dus à ma jouissance. Je place mes mains sur mon ventre et ils bougent au rythme de ma respiration qui se calme lentement.
Après un bref nettoyage au gant dans la salle de bain, je me recouche. Je n’ai pas remis ma chemise de nuit et je positionne mon pubis contre la tache de cyprine. Je me sens bien, reposée, détendue. Ça fait longtemps que je ne m’étais pas touchée comme ça. Je n’ai même pas honte et m’endors en pensant à demain, à ma future patronne et à ses bras.
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Je prends ma correspondance à Châtelet-Les halles. Au Vésinet, je perds quelques minutes à chercher le bon arrêt de bus. Ne possédant pas de voiture, j’utilise les transports en commun afin de me rapprocher le plus possible de la propriété. Une fois descendue du véhicule, j’ai dû marcher une bonne vingtaine de minutes. J’avais mal évalué mon temps de parcours hier soir. Il ne m’avait pas semblé que la demeure soit aussi excentrée du centre-ville.
Toutefois, ce matin je me sens guillerette. Pleine de confiance dans mes nouveaux vêtements, j’avance d’une démarche féminine. Je n’ai pas arrêté de songer à mon interlocutrice durant mon trajet.
Après avoir longé une clôture interminable, j’arrive enfin à destination. Je suis essoufflée et j’ai mal au pied. Malgré mes dix minutes de retard, je patiente quelques secondes devant l’entrée. Mon regard est attiré par le grand portail massif mesurant dans sa longueur au moins quatre mètres. Il est entouré de hauts murs avec trois rangées de fils barbelés en son sommet.
Deux plaques en cuivre rectangulaires sont encastrées dans le pilier de gauche. Sur la première, il y a l’inscription suivante : « Domaine Largue ». Sur la deuxième qui se trouve en dessous, je peux lire : « Attention aux chiens – Propriété privée sous surveillance vidéo et avec vigiles ». Je remarque que dans chacune des colonnes un objectif de caméra effleure le revêtement. De plus, en hauteur et bien visible, une autre caméra de surveillance surplombe l’espace devant l’entrée. De chaque côté de la porte, deux imposants lions en pierre semblent monter la garde. Pas rassurée du tout, j’appuie sur le bouton de l’interphone. Quelques instants après avoir retiré mon doigt, j’entends une voix masculine sortir d’un haut-parleur dissimulé :
Tout en parlant devant ce que je pense être un microphone, je m’annonce :
Je m’exécute et moins de trente secondes plus tard, une porte dans le portail s’ouvre. Un homme rasé de près, la trentaine, habillé d’un fin costume beige en lin de bonne qualité, d’une chemisette bleu ciel, d’une cravate et de chaussures de ville en cuir marron, maintient l’accès dégagé en attendant que je m’avance.
Lorsque je suis à sa hauteur, il la relâche. Elle se referme avec force dans un bruit métallique qui me fait sursauter. Après avoir marché sur une dizaine de mètres. Il me fait signe de pénétrer dans une « guérite » en pierre de meulière avec des barreaux aux fenêtres. Un autre homme est assis derrière un comptoir, habillé exactement de la même façon que son confrère.
Je vois mon bien disparaître dans une machine aussi grande que celle des aéroports, pendant qu’un des vigiles passe le long de mon corps un détecteur de métaux portatif. Mon fourre-tout m’est rendu et l’homme qui m’a fait entrer prend la parole.
Il m’invite à prendre place sur le siège passager d’une voiturette électrique qui ressemble à celles utilisées dans les golfs. Au début, nous roulons sur une large allée goudronnée, puis après avoir bifurqué à gauche, nous empruntons un petit chemin bordé d’arbustes et de parterres d’herbe. Quelques minutes plus tard, il me dépose au pied d’une grande bâtisse.
Corinne m’attend devant la porte. Elle est vêtue d’une robe droite noire qui ressemble à un uniforme. Malgré la chaleur, ses jambes sont gainées de collants ou bas blancs. Elle ne me laisse pas le temps de remercier mon chauffeur, car à peine mes pieds posés hors du véhicule, elle m’entraîne dans la dépendance tout en bavardant avec moi.
Ils étaient assez impressionnants. Beaux gosses, leurs vêtements cachaient un corps musclé. Lorsque mon chauffeur avait ouvert sa veste pour s’asseoir devant le volant du bolide, j’avais entraperçu un holster à sa ceinture qui devait certainement contenir un pistolet.
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J’ai tout de suite remarqué les efforts de toilette de ma future employée. Sa nouvelle coupe et un maquillage léger lui donnent quelques années de moins. Un effluve de parfum bon marché vient titiller mon odorat. Sa jupe rouge et son chemisier noir lui vont à ravir. Ses bas gris foncés, recouvrant ses jambes, doivent être tenus par des jarretelles, vu l’intérêt porté aux miens lors de notre précédent entretien. Sur ce point, j’allai m’en assurer dans moins de cinq minutes. Pour finir, elle a avantageusement troqué ses ballerines pour des escarpins à talons qui cambrent sa silhouette, rehaussent ses fesses, affinent ses chevilles et galbent ses mollets.
Elle promettait ! Je lui ai juste dit de se faire belle et elle s’est acheté des habits, alors que son compte bancaire est à découvert.
Je prends place en face d’elle, derrière mon bureau.
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Voilà qu’elle recommence avec ça. Je ne sais pas pourquoi, mais aujourd’hui, j’ai envie d’accéder à sa demande. Je repense à hier soir, dans mon lit, lorsqu’elle est venue me sauver de toutes les moqueries. Que m’arrive-t-il ? Pourquoi cette femme me fait-elle autant d’effet ? C’est en sentant mes joues s’empourprer que je lui réponds :
Je ne sais pas trop quoi dire. Je ne peux m’empêcher de la dévisager et mon regard est attiré par ses yeux. Pourtant elle a un maquillage discret aujourd’hui.
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Elle semble troublée par mes questions. Je me félicite intérieurement de son comportement. Car, si elle est dans cet état après ce simple échange verbal, comment va-t-elle réagir dans quelques instants ?
Cette petite « introduction » eut pour effet de la mettre en confiance. Après quelques instants de silence, je lui souris, accentuant ainsi davantage sa gêne. Il est temps de renforcer mon contrôle sur sa personne. J’abandonne donc ma douce voix qu’elle semble tant apprécier.
Surprise par mon changement de ton, elle bafouille avant de répondre.
Elle s’en souvient maintenant, c’est exactement les mots que j’ai employés hier. Mince, elle s’est présentée à la grille avec dix minutes de retard.
Je consulte sur mon écran d’ordinateur le logiciel des entrées et sorties. J’esquisse un sourire avant de continuer tout en adoptant le ton d’une mère qui gronde son enfant.
Elle ne sait pas pourquoi, mais elle essaye de se justifier comme une adolescente prise en faute.
Je fais une pause avant de continuer afin de voir si elle est assez idiote pour me répondre.
Nerveusement, suite à mon haussement de ton, elle se torture les mains posées sur ses genoux et son regard fuyant est braqué sur les pieds de mon bureau. Je vais m’assurer de son obéissance tout de suite, pour ne pas avoir de mauvaises surprises lorsque je serai dans le cabinet de travail de ma maîtresse.
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Je suis conne ! Pourquoi n’ai-je pas fait amende honorable ? J’ai vraiment besoin de cet emploi. Elle ne va quand même pas me renvoyer chez moi pour si peu ?
Je la regarde surprise. Mais elle est folle ! À quarante-deux ans, j’ai passé l’âge d’être fessée. Je vais pour me lever, mais mes jambes refusent de me porter. Que m’arrive-t-il ? Je me sens toute chose. Mes tétons s’érigent et viennent se compresser contre le tissu de mon nouveau corsage. Ma gorge se noue. Bien que je sois profondément choquée, mes sens n’ont pas l’air d’être d’accord avec ma raison. Je suis encore à essayer de me mettre debout lorsque je l’entends réfléchir à haute voix.
Je la regarde se « battre » contre elle-même. Sa pudeur l’empêche pour le moment d’oser goûter à un « fruit » qui visiblement lui fait envie. Elle doit lui susurrer à l’oreille que c’est mal, que ça ne se fait pas dans la « bonne » société française à laquelle elle appartient encore.
Je rougis, car elle a remarqué mes nouveaux habits. Elle s’intéresse à moi. Qu’est-ce que je dis-moi ? Ils ne lui sont pas destinés, c’est pour l’entrevue. Mais alors pourquoi ai-je pris le porte-jarretelles et ai-je imaginé le porter lorsque je me suis caressée la nuit dernière ?
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Ne voulant pas y passer la journée, il est temps de lui donner le coup de grâce. D’autant plus, que Mademoiselle l’attend dans ses appartements pour son propre intérêt.
Je contourne donc mon bureau et me positionne devant elle. Je prends sa mâchoire inférieure dans la paume de ma main droite afin de la mettre debout tout en lui disant d’une voix coquine.
Je romps le contact physique entre nous deux. Plus petite que moi, elle lève la tête pour me fixer du regard. Je la sens plus que jamais en train de lutter. Elle finit par tourner les talons et se diriger vers la porte. Je reprends ma voix de mère qui gronde son enfant.
Sa main s’est arrêtée sur la poignée. Je hausse le ton.
Lorsqu’elle se retourne, je vois ses yeux se remplir de futures larmes.
Je me tais un bref instant avant de poursuivre. Ses yeux sont suspendus à mes lèvres. Baissant le ton, je continue mes explications.
Je reprends mon souffle tout en lui laissant le temps de bien appréhender les deux options exposées.
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J’avais perdu toute mon assurance de ce matin. Elle veut que je lui donne mes sous-vêtements, mais pourquoi ? Une petite voix à l’intérieur de ma tête me répondit :
De toute façon, je n’ai pas trente-six solutions, car seuls l’insécurité et un avenir sombre m’attendent dehors. Je suis fatiguée de me battre depuis que mon mari est mort. Je suis exténuée d’essayer de maintenir ma tête hors de l’eau alors que d’autres l’y enfoncent. Si je reste, elle prendra soin de moi en contrepartie de mon obéissance. Je n’aurais alors plus besoin de lutter pour vivre et respirer. J’ai juste à lui abandonner mes dessous et tous mes ennuis sont finis.
Je m’avance tout en ressentant son regard qui m’enveloppe. Une douce chaleur m’envahit. Je suis bien et en sécurité. Plus rien de fâcheux ne peut m’atteindre tant que je suis à ses côtés. Je m’arrête les bras ballants. Pourquoi je n’arrive pas à les soulever ? Pourquoi, sont-ils si lourds alors que le reste de mon corps est si léger ? J’essaye de l’implorer pour qu’elle vienne à mon secours. Cependant, malgré mes efforts, aucun son ne sort de ma bouche bien que je souhaite faire acte d’obédience envers sa personne. Mes yeux se font suppliants, quémandant son aide. Je suis certaine qu’elle va y répondre positivement, car elle me l’a juré ! Pourquoi de grosses larmes coulent sur mes joues ?
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Elle est au centre de mon bureau, j’ai remporté la victoire. Elle a troqué son libre arbitre pour ce que je lui offre. De toute façon, elle m’appartient depuis que je l’ai choisie. Soit, elle reste au domaine, soit elle dort sous les ponts, et ça, je pense qu’elle l’a bien compris.
Oui, j’ai gagné, mais il me faudra la dresser afin d’abattre toutes ses barrières psychologiques. Ce processus se fera par petites touches, à son rythme. Pour le moment, ce que j’exige d’elle est au-dessus de ses forces.
Plus tard, elle se réjouira que je lui demande d’enlever son linge de corps, mais pas à ce stade. Aujourd’hui, sa pudeur l’en empêche. Elle me supplie de la secourir, je vais répondre à sa requête. Je vais lui prouver qu’elle peut avoir confiance en moi. Je prends ma voix la plus avenante.
Elle me regarde tout en sanglotant. Son maquillage est dans un sale état.
Je vais devoir l’encourager, car la fin de sa phrase reste en suspens.
Je m’approche d’elle tout en lui disant :
Mon visage fermé, je déboutonne lentement son chemisier avant de lui enlever. Elle a un joli soutien-gorge tout noir. Je me colle à elle pour passer mes bras dans son dos afin d’atteindre l’attache que je fais sauter. En récupérant le tissu, je remarque que ses mamelons sont érigés. Elle est excitée la coquine. Du bout de mes doigts, j’effleure d’une fausse inadvertance l’extrémité de ses seins. Son buste bouge légèrement, suivant le mouvement de mes mains vers l’avant.
Je m’accroupis et, au lieu de retirer sa jupe, je passe mes deux mains dessous à la recherche de sa petite culotte. Je la trouve, mais je n’arrive pas à la faire glisser le long de ses jambes. Je lève la tête à la rencontre de ses yeux. Elle a arrêté de pleurer et j’y lis à la fois de la reconnaissance mêlée à de la honte. Je détache sa jupe qui tombe à ses pieds sur le carrelage. Je comprends alors la raison pour laquelle je ne suis pas arrivée à la déculotter : son slip est pris à l’intérieur des jarretelles. Je défais ces derniers tout en lui expliquant.
Je finis par récupérer mon « cadeau ». Je remarque que la partie du tissu recouvrant le bas de son coquillage est légèrement mouillée et ce n’est pas de la sueur. Gentille, je ne fais aucun commentaire, car ça la mettrait encore plus mal à l’aise. Toutefois, c’est de bon augure pour ce qui l’attend dans le bureau de Mademoiselle. Je la rhabille et lui sèche les joues. Je sors un nécessaire de maquillage afin de la retoucher un peu avant de la conduire devant l’héritière.
Elle fait un hochement de tête pour toute réponse. Elle me semble bien éteinte. Son combat intérieur a dû la vider de son énergie. J’espère qu’elle va se « réveiller », car je ne veux pas que Mademoiselle m’accuse de l’avoir droguée. Je téléphone à ma supérieure afin de la prévenir de mon départ imminent de la dépendance avec Hélène.
Je place bien en évidence sur mon bureau mes trophées. Nous prenons une voiturette. Direction le manoir !
Elle m’a obéi. Sa vulve déjà humide va être rafraîchie par la vitesse de la golfette, lancée à vive allure sur le chemin en terre compressé. Le reste du voyage se passe en silence. Toutefois, je ressens bien son trouble certainement dû à l’absence de sous-vêtements. Elle doit éprouver tout plein de sensations encore inconnues jusque-là. Elle gigote donc pendant tout le trajet. Cependant, elle ne manque pas de marquer son admiration pour le parc. En effet, elle n’arrête pas de tourner sa tête de droite à gauche afin de contempler l’agencement des différents espaces verts que nous laissons derrière nous au fur et à mesure de notre avancée. Lorsque nous arrivons à portée de vue du manoir, ses yeux ne le quittent plus.
Je gare le véhicule devant l’entrée de service, à droite de l’imposante bâtisse. Je pénètre avec Hélène dans les cuisines et demande à Élodie, qui nettoie un fourneau, de m’apporter un verre d’oranges pressées.
En attendant, j’ai envie de marquer ma nouvelle possession en lui mettant une main aux fesses, mais la règle tacite est claire : aucune incivilité d’ordre sexuelle dans les parties communes. Il en va de même pour celles privées qui ne nous appartiennent pas. Je sais que Sandrine, la cheffe des cuisines, verrait d’un très mauvais œil que je « joue » avec une de mes subordonnées « chez elle ». Je me tiens donc à carreau tout en attendant que la cuisinière revienne avec la boisson demandée.
Une fois le liquide bu, nous utilisons le monte-charge réservé aux employés. Arrivées au premier étage, nous empruntons le long corridor Est. Tout en cognant à une porte, je lui fais des recommandations :
Voilà ! De toute façon, l’entretien devrait bien se dérouler vu l’enjeu.
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Mon appréhension, déjà au plus haut après ma petite aventure, est montée d’un cran suite à la tirade de Corinne. Cependant, je n’ai pas le temps d’y penser davantage, car la porte s’ouvre sur une jeune femme blonde âgée tout au plus d’une vingtaine d’années. Elle nous accueille avec un grand sourire. Sa jeunesse et sa gaîté sincères renforcent l’austérité de la robe qui recouvre son corps. C’est une sorte d’uniforme noir et blanc de domestique qui s’apparente à ceux de certains vieux films.
Elle s’efface pour nous laisser pénétrer dans un grand salon meublé avec goût.
Après avoir frappé trois coups, ma nouvelle responsable m’invite à pénétrer la première dans un cabinet professionnel, avant de me suivre.
Une femme d’une très grande beauté est assise derrière un bureau de ministre, un casque-micro sur la tête et les yeux dans le vague. Elle parle en anglais à un interlocuteur que je n’entends pas. S’apercevant de notre présence, elle nous fait signe de fermer la porte, d’avancer et de patienter.
Je prends le temps d’examiner, d’un coup d’œil circulaire, ce nouveau lieu. C’est une immense pièce rectangulaire plus spacieuse que la précédente. Elle respire le luxe, mais est fonctionnelle…
Je sursaute de surprise, car Corinne vient de saisir mon avant-bras gauche d’une poigne ferme tout en appliquant son autre main sur mon postérieur. Bien que choquée, je n’ose rien dire. Elle m’entraîne avec elle vers l’extrémité droite de la salle. Ses doigts posés sur mes fesses indiquent, par de légères pressions, la direction à prendre. C’est donc sous son contrôle que j’évite deux canapés se faisant face, séparés par une table basse. Une fois à l’arrêt, elle vient se placer derrière moi pour me chuchoter à l’oreille :
À quelques pas et malgré mon trouble, j’examine cette œuvre d’art dans son ensemble. Elle est en effet magnifique. Son foyer doit bien faire un mètre de large et son manteau de marbre est incrusté en relief d’animaux sauvages… Tout à coup, je sens un bras, venant de derrière, encercler fermement mon ventre et plaquer mon dos contre un corps chaud. J’essaye de me retourner en vain. Cependant, j’arrête de me débattre lorsque j’entends la douce voix de ma nouvelle patronne.
Je ressens au travers de mon chemisier la chaleur de son enveloppe charnelle. Inconsciemment, je cherche à me blottir en son sein.
La jeune femme que j’entends est toujours au téléphone. Toutefois, si elle tourne la tête elle va nous voir. À cette pensée et après une profonde expiration, mon propre corps frissonne de plaisir.
Bien que mes pieds touchent encore le sol, je suis légèrement penchée en arrière. Si elle s’écarte brusquement, je tombe.
Ses deux mains viennent de nouveau défaire les boutons de mon chemisier. Elle a commencé par le haut, déjà deux puis trois… Mes bras jaillissent d’eux-mêmes pour l’empêcher de continuer.
En me parlant, elle a plaqué la paume de ses mains sur la peau de mon cou avant descendre plus bas. Ses doigts caressent maintenant doucement la partie haute de mes seins. Son chuchotement me rassure et vient faire taire la petite voix au fond de moi, disant que c’est mal, qu’il ne faut pas la laisser faire. Je range mes bras le long de mon corps. Vainqueur, elle continue à opérer, quatre, cinq et enfin six. Elle écarte les pans de mon chemisier et fait courir ses mains sur mon ventre, mon nombril, ma poitrine. Je suis aux anges.
Elle apprécie mon corps, alors que je le déteste, me trouvant trop grosse. Je suis sur un petit nuage. Je rentre mon ventre et bombe ma poitrine, mais ses mains sont déjà… sur ma jupe ! Je les sens tâtonner, à la recherche de l’attache sur le côté. Une fois les deux boutons défaits, elle descend la fermeture éclair. Il faut que je l’arrête. Pas mon deuxième vêtement ! N’ayant plus de petite culotte, je vais me retrouver en porte-jarretelles et en bas. De plus, celui-ci à terre, je ne pourrai pas le renfiler rapidement lorsque la communication téléphonique sera finie. Mon chemisier ouvert, je ne pourrai pas le fermer promptement.
Cette situation m’inquiète, mais en même temps elle m’excite. J’ai envie qu’elle continue. Ma jupe est complètement desserrée, mais elle reste sur mes hanches maintenue par la pression de mon corps contre le sien.
Ai-je bien entendu ? Elle veut me dévêtir, mettre loin de moi mes habits. Que va dire la jeune femme ? Elle va forcément s’en apercevoir. Je n’ai pas le temps de m’en soucier davantage, car je ressens deux vives douleurs au niveau de mes seins. C’est Corinne qui étire violemment mes mamelons en avant. De lui même, mon corps suit le mouvement afin qu’elle cesse de malmener mon buste. N’étant plus soutenue par l’arrière, je replace mes pieds pour ne pas tomber. Avant que je m’en aperçoive, ma jupe a chuté sur le sol et elle vient de m’enlever mon chemisier que je vois voler vers un canapé. Lorsque le corps chaud de la gouvernante revient se coller au mien, je cherche malgré moi à frotter mon dos contre sa poitrine. Elle me mordille une oreille avant de me chuchoter.
Elle n’arrête pas de me faire des compliments. Même mon mari n’était pas si gentil.
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Elle est sous mon emprise ! Je ne sais pas encore ce qu’elle est vraiment. Je pencherais pour une sorte d’exhibitionniste/masochiste qui s’ignore. Aussi, une fois que j’aurai trouvé ce qui la fait planer, je la pervertirai définitivement afin d’avoir un total contrôle sur elle. Aujourd’hui, je vais juste l’accompagner jusqu’au bout pour donner à Mademoiselle la preuve qu’elle attend. Cependant, pas n’importe comment ! La honte a l’air d’être déclencheur chez elle. C’est de cette façon qu’elle atteindra son orgasme et qu’elle jouira dans moins d’une quinzaine de minutes.
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Ses mains sont revenues sur le haut de mon corps, elle masse mes seins qu’elle vient de martyriser. J’accepte ses « excuses » d’un ronronnement de plaisir. Elle embrasse mon cou et mon épaule. Pourquoi, je fonds comme ça dans ses bras ? Je ne suis pas lesbienne, mais j’apprécie ses caresses. Une voix à l’intérieur de ma tête me dit : tu vois, tu as eu raison de rester. Me répondant à moi-même, je pousse un petit « oui » de bien-être.
Cinq ongles viennent griffer gentiment mon ventre et suivre le contour du porte-jarretelles avant de descendre sur une attache. Se laissant guider par cette fine bandelette, ils poursuivent sans aller toutefois jusqu’en bas. Les doigts s’arrêtent au niveau de la fourche de mon bassin et jouent un instant avec le bout de tissu en le faisant claquer contre le haut de ma cuisse. Abandonnant là cette occupation futile, ils plongent vers ma vulve y chercher mon clitoris.
Bien sûr que je le veux et je m’exécute. Elle l’a trouvé et vient faire de petits cercles dessus avec deux doigts. Je ferme mes yeux afin de mieux ressentir les effets de ses caresses. C’est divin ! Les sensations éprouvées me font perdre toutes notions de temps et d’espace. Je suis dans un jardin et je sens l’odeur de la terre légèrement humide après la pluie. J’entends des oiseaux chanter. De grands traits électriques irradient mon ventre, ma poitrine et mon cou. Je me laisse porter par le vent qui fait onduler mon corps.
Cependant, ma raison m’avertit que si Chloé rentre dans le bureau, elle va nous voir et le dire à sa maîtresse. Toutefois, bizarrement, au lieu de m’en inquiéter, je souhaite que ça arrive. Que l’on me surprenne en petite tenue dans le cabinet de travail d’une milliardaire pour un entretien d’embauche. Que l’on se moque de moi… J’ai un mini orgasme et je m’écroule presque.
C’est sans compter sur une main puissante qui me retient par le compas de mes jambes. Sa paume plaquée contre ma vulve me porte tant bien que mal. Je consolide mes pieds sur le sol et viens moi-même par un ample mouvement de hanche vers l’avant m’y frotter.
J’entends cette voix en qui j’ai confiance. Qui, je suis certaine, saura me combler. Je m’abandonne davantage. Deux doigts prennent possession de mon vagin. Lorsqu’un troisième les rejoint, je pousse un long feulement pour lui fêter la bienvenue. Ma respiration se fait haletante. Tout mon corps suit le rythme de ses piques qui coulissent à l’intérieur, en caressant ma paroi vaginale. Sa paume frappe mon clitoris en cadence.
Mes mamelons sont pincés très fort à tour de rôle. Un raz de marée se forme dans le haut de mon corps avant de le parcourir lentement. Les doigts dans mon « coquillage » partent vers la droite en me faisant légèrement tourner sur moi-même. Mes escarpins, emmêlés dans ma jupe au sol, suivent le mouvement par petits pas. Toujours les yeux fermés, je ressens des morsures dans mon cou. Que c’est bon ! De nouveau immobile, je repositionne mes pieds. Je n’ai jamais éprouvé une telle sensation de bien-être.
Le cône dans mon vagin accélère son pilonnage. La vague gonfle davantage, j’ai du mal à rester debout.
Pourquoi devrais-je le faire ? Dans quelques secondes, le tsunami va m’écraser. Cependant, la voix se fait insistante au-dessus de moi.
Mon plaisir semble s’être arrêté à son point culminant en précaire équilibre. Aussi, je lève mes paupières. Lorsque mes pupilles se sont réhabituées à la luminosité ambiante, je vois l’héritière qui me regarde debout à quelques enjambées devant moi. Les pas effectués il y a quelques instants me font maintenant tourner le dos à la grande cheminée.
La honte de ma luxure me submerge. Je lui crie silencieusement de porter son attention ailleurs, de ne pas me détailler comme elle le fait… Toutefois, je n’ai pas le temps de m’en inquiéter davantage, car un doigt appuie sur un endroit bien précis à l’intérieur de mon vagin pendant que d’autres pincent mon clitoris. Le raz de marée vient de se fracasser sur mon être. Mon bassin s’écarte en avant et je pousse un long et puissant cri de plaisir. Mon puits d’amour enserre par spasmes les « piques » restés à l’intérieur.
J’ai refermé les yeux. Mes jambes ne me portent plus. Je tombe ! Cependant, un bras encercle vigoureusement ma taille afin de ralentir ma chute. Une fois sur le parquet, je m’allonge recroquevillée sur moi-même en position de fœtus. Je continue de cuver ma jouissance par soubresauts.
Je somnole et me sens soulevée dans les airs. Après quelques secondes, ma peau rentre en contact avec une surface chaude et douillette. Des voix parlent au loin, mais je ne comprends pas ce qu’elles disent, je m’endors.
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La voix chantante de ma maîtresse hèle sa demoiselle de compagnie avant de lui ordonner d’aller chercher un gant, un récipient rempli d’eau, des petites pièces de linge en éponge et un slip de maintien extensible avec une serviette périodique. Lorsqu’elle revient, je lave mes mains dans la bassine avant de les essuyer. Par la suite, Chloé m’aide à rafraîchir et à rhabiller la belle au bois dormant. Une fois ceci fait, nous nettoyons les dégâts provoqués par l’éjaculation de cette femme fontaine, sous le regard amusé de Mélanie.
Elle vient de me faire un compliment et nous arrivons à aligner trois phrases sans qu’elle m’envoie promener. Je suis vraiment sur la voie de la réconciliation.
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Où suis-je ? Confortablement installée sur un canapé, en face de moi une jeune femme a ses yeux plongés dans un dossier reposant sur ses genoux. Elle ressemble à un ange.
La caresse d’une main sur mes cheveux et la douceur de la soie sur ma joue me font retrouver ma lucidité. Je suis allongée et ma tête repose sur les cuisses de Corinne. Je ressens un léger vertige lorsque je m’assois brusquement.
Mes souvenirs reviennent tout à coup ! Je suis dans le bureau de l’héritière pour un poste de femme de chambre et… j’ai joui devant elle, sans compter… Je me lève d’un bond pour m’apercevoir que ma jupe et mon chemisier ont retrouvé leur place sur mon corps. Mes escarpins et mon sac à main sont posés à côté du canapé. Je sens mon bassin compressé par une sorte de filet et quelque chose appuie légèrement sur ma vulve.
Hagarde, il s’écoule un certain temps avant de m’apercevoir que Corinne est venue placer son bras gauche autour de mes épaules. Sa voix me fait l’effet d’un doux chant de sirène.
Que se passe-t-il ? Je n’ai pourtant pas rêvé ! Je ressens encore l’humidité de mon bas-ventre. Toutefois, la jeune femme qui me regarde, tout en faisant des gestes d’impatiente, n’a pas l’air fâchée. Qu’est-ce que c’est que cette petite culotte compressant légèrement mon pelvis ? Je croyais ne plus en avoir. À moins que, cela aussi je l’aie imaginée ? Je ne sais plus où j’en suis.
Tout en me parlant, l’héritière troque le dossier qu’elle étudiait avec un autre portant mes nom et prénom.
Elle lève ses yeux de mon curriculum vitæ afin de constater l’effet de sa dernière phrase sur ma personne. Je suis vraiment mal à l’aise après mon comportement en sa présence. Pendant sa lecture, j’ai eu tout le loisir de la dévisager. Elle est âgée tout au plus de vingt-cinq ans. Sa beauté féline, sa silhouette élancée et ses traits fins attirent le regard. Sa peau ivoire fait ressortir ses taches de rousseur. Son visage angélique est illuminé par deux yeux vert clair. De longs cheveux roux ondulent jusqu’au haut de son dos. Elle est vêtue d’un chemisier blanc cassé cintré et d’une jupe droite violette. Ses pieds, recroquevillés sur le coussin du canapé, sont nus. Sa voix chantante fait l’effet d’une douce mélodie. Ne me voyant pas régir à sa dernière phrase, elle poursuivit.
Elle saisit une tablette posée sur la table basse et pianote quelques instants avant de reprendre la parole.
Elle relève sa tête et ses yeux me transpercèrent de part en part. Après une brève réflexion, je lui réponds, non sans une profonde crainte de me tromper.
Après un bref regard vers Corinne, qui hoche la tête positivement, elle enchaîne :
Je répondis d’une petite voix, impressionnée de la puissante aura dégagée par sa jeune personne.
Visiblement enchantée de ma réponse, elle poursuit :
Ma voisine fait un geste de la main à l’attention visiblement de la jeune femme rousse, car cette dernière après un petit rictus d’agacement précisa un point :
Elle fait une pause tout en me fixant afin de s’assurer de ma bonne compréhension. Traduction : dans l’enceinte de la propriété, il n’y aura pas de batifolage avec la gent masculine qu’elle n’a pas l’air d’apprécier plus que ça. Après mon hochement de tête, elle continue :
Mince, je m’étais parfumée ce matin plus que de raison. Je baisse les yeux, espérant que les effluves de ma fragrance ne parviennent pas à ses narines. Ne s’apercevant certainement pas de ma gêne, elle enchaîne d’une voix plus posée.
Je prends mon courage à deux mains pour aborder le seul point qui me tracassait depuis plusieurs jours.
Je la regarde surprise, ne comprenant pas ce que j’avais pu bien dire ou faire pour mériter cette remontrance. Corinne, ressentant certainement mon désarroi, vient à mon secours, tout en plaçant une main sur ma cuisse. Elle me chuchote d’utiliser son titre de « Mademoiselle » dans mes phrases. Je hoche la tête timidement et fais une moue penaude en signe d’excuse. Visiblement, elle l’accepte puisqu’elle répond à ma question :
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Nous y voilà ! Un sourire carnassier illumina mon visage. D’habitude, je ne reçois pas les futurs domestiques dans mes appartements et je leur expose encore moins le fonctionnement du domaine. C’est le rôle de Corinne, que diable !
Cependant, elle détient un « bien » qui m’intéresse au plus haut point et je suis prête à lui accorder plusieurs dizaines de minutes de mon précieux temps afin de l’en déposséder. En effet, je compte bien en acquérir dès maintenant l’usufruit et petit à petit la nue-propriété.
Finalement, plus je converse avec les gens du peuple, plus je les trouve niais. En effet, elle est en train de négocier sa rétribution, tout en se félicitant certainement des bienfaits de sa bonne étoile, alors qu’elle aurait dû se poser des questions : pourquoi je la reçois ? Pourquoi, malgré son inexpérience, son niveau d’étude, son absence de références, ses quarante-deux ans…, c’est sa candidature qui a été retenue au lieu de celles de femmes certainement plus jeunes et qualifiées qu’elle ?
Il est bien là le problème avec cette couche sociale ! Ils ne réfléchissent plus ou pas suffisamment. Ne se rend-elle pas compte qu’en ce moment je négocie « l’achat » de sa fille ? Si j’osais, je pourrais comparer cette situation à celle des Indiens Algonquins qui ont vendu aux Hollandais l’île de Manhattan pour l’équivalent de 60 florins. Bref, pour une bouchée de pain ! Déçue par ma future victoire trop facile, je prends mon air le plus jovial avant de lui demander :
Il est temps d’abattre mon jeu et de lui faire une proposition qui devrait l’enchanter.
N’ayant pas du tout envie, à défaut de fumer un calumet pour sceller notre accord, qu’elle me saute au cou pour me remercier, j’ajoute rapidement :
Je les raccompagne à la porte de mon bureau et laisse ma gouvernante la faire sortir de ma demeure.
J’appelle Chloé que j’invite sans manière à s’asseoir en face de moi sur le canapé.
À ma dernière phrase, son visage se décompose et ses yeux expriment une très grande peur. Connaissant la vie qu’elle a menée avant de rentrer à mon service, j’en compris tout à fait la raison. Afin de la rassurer, je m’empresse de continuer :
Me voyant me lever et croyant certainement la discussion terminée, elle fait de même avant de s’incliner en signe de soumission et de se diriger vers la porte. Consciente du profond trouble dans lequel je l’avais plongée, je ne relève pas de suite son comportement. Toutefois, je lui administrerai une punition ce soir ou demain.
Avant qu’elle ne quitte le bureau, je lui précise un point me tenant tout particulièrement à cœur. Au son de ma voix, elle se retourna précipitamment, pensant peut-être que j’avais changé d’avis.
Devant mon agacement perceptible, elle me répond d’une petite voix.
Je ne veux pas qu’elle fasse le ménage des dépendances, car il ne me concerne en rien. Au moins, en exerçant dans le bâtiment principal, elle sera à portée de mon joug.
Je suis bien consciente qu’elle sera chagrinée de devoir partager mon affection avec une nouvelle venue. Cependant, ce qui l’affectera le plus, c’est de ne plus s’occuper de ma personne qu’une journée par semaine.
Pour ma part, je suis assez émoustillée par l’arrivée prochaine de cette Japonaise. Toutefois, saura-t-elle m’estimer à ma juste valeur ?
Après un « Bien, Mademoiselle », ma demoiselle de compagnie sort, les yeux tristes.