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n° 18071Fiche technique15891 caractères15891
Temps de lecture estimé : 10 mn
10/09/17
Résumé:  Peut-on aimer plus encore, quand on aime déjà trop ? Je fais tout pour qu'elle m'aime un peu plus, y compris renoncer à moi-même.
Critères:  fh couplus extracon collègues enceinte amour hsoumis confession -regrets -couplea3 -cocucont -hsoumisaf
Auteur : Tito40      Envoi mini-message
Dévotion

J’aurais dû l’aimer davantage. Je l’aimais pourtant tellement, déjà, mais sans doute pas assez.


Chaque jour je lui offrais des fleurs, je l’embrassais tendrement, je la complimentais, j’étais aux petits soins. Le week-end, je lui servais le petit déjeuner au lit, et nous nous aimions paisiblement. Je la lavais sous la douche, je faisais les courses, j’étais attentif à chacune de ses envies, à chacun de ses besoins. Je ne montrais jamais la moindre impatience, j’étais toujours gai et rieur, positif et volontaire. Quand elle me refusait un câlin, je ne m’en offusquais jamais. Je revenais plus tard à la charge, avec patience, sans jamais la brusquer ou lui reprocher quoi que ce soit.


En pourtant j’avais sans cesse envie d’elle, de sentir sa peau contre le mienne, de caresser ses jolis petits seins, de sentir son souffle, de humer son intimité, de m’introduire au plus profond de sa chaude hospitalité et de m’y répandre. Je lui répétais sans cesse mon amour, sans attendre en retour qu’elle en fasse autant. Je voulais qu’elle soit heureuse, qu’elle soit bien avec moi, que nous vieillissions ensemble, que nous ne fassions qu’un.


Quand nous sortions, elle sentait le regard des hommes sur elle et ça la faisait rire. Je sentais le même regard sur moi, un regard de jalousie, et j’en étais fier. Ils devaient m’envier d’avoir à mon bras une si jolie femme, vêtue avec goût, à peine maquillée, dont les formes exquises prenaient la lumière. Leurs regards de prédateurs qui se fixaient sur ses fesses ne pouvaient rien contre le mien, celui de la tendresse, celui de l’emphase.


Il m’arrivait souvent de l’embrasser en pleine rue, pour leur montrer à ces vautours qu’elle était mienne, que nous nous aimions ; leur montrer que ce soir, elle serait avec moi, nue, offerte, et que c’est devant moi qu’elle écarterait ses jolies jambes pour me prendre en elle et entendre mes « je t’aime ».


Marie fut pour moi un cadeau du Ciel, une offrande. J’avais eu, jusqu’à la rencontrer, de nombreuses aventures avec des filles de rien, des baiseuses déchaînées, des frigides qui essayaient de se soigner, des amoureuses pathétiques, des nymphos gourmandes, des intéressées, des alcoolisées. De tout. Je ressortais de ces aventures fugaces comme j’y étais arrivé, vite, et sans regret. Parfois, j’entretenais même plusieurs relations simultanées. Les « gonzesses », je me les tapais au kilo. Puis je l’ai vue, elle, la déesse inespérée, mon avenir joyeux, ma muse pour toujours. Je ne voulais même pas la toucher tellement elle me faisait peur, tellement je ne me sentais pas à la hauteur, tellement j’étais persuadé qu’elle me rirait au nez. Et pourtant dès le premier regard, j’ai su. J’ai su que c’était elle, que c’était nous, pour toujours.


Le temps avait passé, mais sans entamer mes convictions. Je faisais tout ce que je pouvais pour qu’elle m’aime autant que je l’aimais, même si ça me semblait impossible. Dans un couple, il est normal que l’un soit plus amoureux que l’autre. Eh bien là c’était moi, et ça m’allait très bien. Je voulais le meilleur pour elle, tout ce qu’il y avait de mieux pour elle.


Ça faisait presque dix ans que nous filions le parfait amour, rendant jaloux nos amis communs. Le couple idéal c’était nous. Sauf que nous voyions le cercle s’agrandir avec l’arrivée d’enfants dans toutes ces familles, mais pas dans la nôtre. Bien que nous ayons tout essayé, ça ne venait pas. Marie commençait à en nourrir une forme de mélancolie que je m’efforçais de compenser en étant encore plus présent, plus attentif, plus prévenant. Au point de l’agacer.


Il nous fallait faire l’amour à dates et heures déterminées par sa courbe de température, s’abstenir en dehors, et organiser notre vie en fonction de ce projet. Je l’aimais tellement. J’aurais tout accepté, tout tenté, tout entrepris. Notre vie sexuelle jusque-là tout à fait satisfaisante – en tout cas pour moi – était devenue une espèce de rite procréatif un peu mécanique. Ma jouissance en était devenue le seul but, peu important qu’elle y prenne du plaisir, et elle n’en prenait plus aucun. Elle ne s’en plaignait d’ailleurs pas, mais c’est moi qui le vivais mal.


J’étais toujours le même, en mieux, mais elle avait de plus en plus de mal à accepter ma tendresse, ma serviabilité qu’elle prenait pour de la servilité, mes attentions de tous les instants, ma prévenance un peu obséquieuse. Et je ne l’ai pas compris, et tout cas pas assez vite.


Un jour elle m’a avoué avoir eu une aventure lors d’un séminaire. En rentrant de son déplacement, alors que j’allais la prendre dans mes bras, elle m’a fait face, l’air tendu, et m’a assommé.



Je suis resté paralysé des muscles et du cerveau, incapable de réagir. J’aurais dû crier, bouger les bras, me mettre en colère, menacer de la quitter, chercher à savoir qui c’était, mais au lieu de cela je n’ai rien dit. J’ai fait du moi, du respectueux, du compréhensif. Je l’ai prise dans mes bras, tremblant, me demandant ce que j’avais fait de mal pour mériter ça. Et je me suis excusé, excusé de l’avoir obligée à faire ça parce qu’il devait lui manquer quelque chose pour qu’elle me trompe. Ça venait de moi.


Nous avons pleuré tous les deux. J’ai imaginé qu’elle pleurait de honte, comme moi.


Le soir nous avons peu parlé, pas du tout même. La courbe de température était favorable – je l’ai vu sur son cahier – mais elle ne m’a rien demandé, alors je n’ai pris aucune initiative. J’ai mal dormi, imaginant ma douce Marie dans les bras d’un autre la nuit précédente. Avait-elle eu du plaisir, avait-elle aimé, avait-elle joui ? Et lui ? Voudrait-elle le revoir ? Et lui ? Est-ce qu’il était mieux que moi, plus endurant, plus « gros », plus tendre, plus autre chose ?


Toutes ces questions, j’aurais peut-être dû les lui poser, mais ça m’aurait semblé inconvenant et vulgaire. Nous valions mieux que ça elle et moi. Elle avait commis un écart ; ce n’était pas si grave, et c’était de ma faute. Alors j’ai redoublé d’efforts pour lui être agréable, et nous n’en avons plus parlé. Mais quand nous faisions l’amour, j’y pensais à chaque fois. C’était une troublante torture, une douleur lancinante mais je m’y étais habitué. Elle faisait partie de nous. J’imaginais un autre homme en ses cuisses, un autre homme dans sa bouche, une autre odeur que la mienne, un autre sperme que le mien. Ça me dégoûtait mais je n’avais pas le choix. Mon cerveau tournait tout seul.


Marie est partie six mois plus tard pour un autre séminaire. À aucun moment je n’ai fait la moindre allusion au précédent. À aucun moment je ne lui ai demandé de me promettre quoi que ce soit. À aucun moment je ne lui ai demandé s’« il » serait là aussi, ni si elle avait l’intention de le revoir. « Quelle injustice… » me suis-je dit, mais je devais le mériter.


Quand elle est rentrée, j’ai vu à ses yeux qu’elle portait la honte et la culpabilité sur ses épaules. Je l’ai prise dans mes bras sans rien demander, et je lui ai glissé « je t’aime » à l’oreille, comme signal de pardon définitif. À l’évidence, elle avait recommencé. À l’évidence, elle en avait envie, et peut-être même était-elle allée à ce séminaire juste pour ça, pour être aimée d’un autre, pour être touchée par un autre, pour être prise par un autre. C’était ma faute, ma grande faute. Je n’ai fait aucun reproche à ma moitié ; j’ai assumé, me promettant d’être un mari encore meilleur à l’avenir.


Sauf que le lendemain matin, au petit déjeuner, c’est Marie qui a voulu qu’on en parle.



Elle m’a regardé avec le mépris que je méritais, infini, s’est dirigée vers la salle de bain où elle est restée longtemps, puis vers la chambre où elle s’est habillée. Elle est partie d’un air joyeux et s’est retournée sur le pas de la porte pour me dire de ne pas l’attendre, qu’elle rentrerait peut-être, mais tard.


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C’était il y a trois ans. Je suis resté aux petits soins, faisant fi de ses absences, de ses silences, de son mépris. J’ai dû accepter qu’il vienne à la maison en mon absence, puis plus tard qu’il vienne même quand j’étais là. Ils m’ignoraient. Elle était à son service. Ils prenaient un verre dans le salon, s’embrassaient devant moi, puis il finissait par l’emmener dans la chambre, cette chambre qui avait été la mienne. Ils faisaient l’amour, bruyamment, longtemps, plusieurs fois. Je restais assis dans la cuisine, le regard dans le vague. Le prix à payer pour qu’elle ne parte pas était élevé, très élevé. Elle semblait heureuse ; je m’oubliais dans son bonheur, faisant comme si c’était le mien.


Parfois il arrivait à la maison avant qu’elle rentre. On buvait un verre tous les deux. Il me remerciait d’être compréhensif, de le laisser s’amuser avec elle. Pour lui, c’était une situation idéale. Une femme mariée, belle comme un ange, salope comme pas deux au lit, et qui ne parlait pas d’amour. Une femme qui ne lui demandait pas de vivre avec elle ou de faire des projets, une femme qui baisait comme si c’était la dernière fois à chaque fois, qui le faisait cracher comme un dingue : une salope ; la salope ultime ! Il ne se rendait même pas compte du mal qu’il me faisait, comme si j’étais d’accord avec cette situation comme si, même, je l’avais souhaitée. Il ne parlait pas de « ma » Marie, mais d’une femme que je ne connaissais pas.


Marie est rentrée un soir, paniquée, une enveloppe à la main. Elle était enceinte. Enceinte de lui. Je fus immédiatement heureux pour elle, mais elle ne réalisait pas encore son bonheur.


Ils ont continué à baiser chez nous aussi souvent que possible alors que son ventre s’arrondissait. On aurait même dit qu’elle aimait encore plus ces parties déchaînées de jambes en l’air qu’il lui proposait. Plusieurs fois durant cette période, elle a laissé la porte de la chambre ouverte, ce qu’elle ne faisait jamais avant. Puis presque sur la fin, ils ont fait l’amour devant moi. C’est elle qui en a décidé ainsi. Alors qu’il la prenait par la main pour l’entraîner dans la chambre, elle a résisté, s’est dévêtue et s’est allongée sur le sol pour qu’il la prenne. Je dois avouer que c’était beau, chaud, très excitant. Ce n’était pas elle, pas Marie, juste une belle femme enceinte jusqu’au yeux qui se faisait du bien, qui demandait plus de vigueur à son amant, qui se mettait à quatre pattes pour se faire saillir plus profondément, puis qui hurlait sa jouissance alors qu’il la bourrait.


Je suis devenu papa. Lui non. Lui est parti. Il n’a pas supporté qu’elle devienne maman, qu’elle lui refuse sa couche, qu’elle pense à sa fille. Et j’ai retrouvé ma Marie que j’aime tant, celle d’avant, celle à qui je fais le petit déjeuner le week-end, celle à qui je pense jour et nuit en me demandant comment lui faire plaisir. Et il y a Julie, notre fille, belle comme sa maman, et que j’adore.


Si j’avais su que je l’aimais autant, je l’aurais aimée plus encore. J’aurais proposé à mon amour d’autres hommes pour lui donner ce que je ne pouvais pas lui donner. Je suis prêt à tout accepter maintenant, et si demain elle a envie d’un homme, je veux que ce soit devant moi, qu’elle m’humilie. Je l’aimerai plus encore, si c’est possible.