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n° 18253Fiche technique25204 caractères25204
Temps de lecture estimé : 15 mn
08/02/18
Résumé:  Les voies du changement intérieur sont-elles pénétrables ?
Critères:  fh prost massage hdanus
Auteur : Teddy75      Envoi mini-message
Lily

C’est la troisième échoppe du même genre que je vois dans cette rue proche de la gare du Nord.

Une devanture banale, du verre dépoli enchâssé dans un cadre en métal de couleur indéfinissable, qui a peut-être été blanche. Une affichette représentant la plante d’un pied, grêlée de points, renvoie à des idéogrammes. Et l’enseigne en néon clignotant, violette, avec le mot que je cherche : « Massages ».


Je n’ai pas osé rentrer dans les deux premières ; trop de monde dans la rue. Dans la plupart de ces salons asiatiques, la prestation est le plus souvent suivie d’une proposition articulée en français sommaire :



Je suis partagé entre la honte causée par ce que j’imagine du regard des passants au moment de pousser la porte, la peur de croiser une connaissance à l’intérieur, et mon besoin d’être touché. Touché sexuellement, mais pas seulement.


Ma femme et moi avons cessé toute vie intime depuis plusieurs années. Je n’ai plus de désir pour elle, et refuse à présent tous les contacts que pendant un temps elle a continué à me proposer, avant de se lasser et de renoncer ; je ne peux plus. Je lui en veux ; ses paroles et ses attentions, qui me semblent feintes, m’exaspèrent au point que je ne l’écoute plus. Ses mots sont comme un disque rayé jouant le même refrain ressassé, dont l’audition m’est devenue insupportable.


Seule l’apparence d’un couple uni semble compter pour elle. J’ai de la colère, et depuis mon regard sur elle a changé : elle veut de l’apparence ? Je lui donne, mais pour le reste… je cherche ailleurs. J’explore. Le besoin de contact me taraude. Un besoin de tendresse, de chaleur, qui me pousse en des lieux que je n’aurais pas imaginé fréquenter auparavant.

Aujourd’hui, j’ai deux bonnes heures devant moi, avant d’avoir à reprendre la direction de la gare Montparnasse où le dernier train me ramènera vers ma ville de province. La rue est à présent presque déserte. Les enfants sont raccompagnés de l’école depuis longtemps, les jeunes célibataires ont fait leurs emplettes à la supérette de la rue adjacente. Je pousse la porte qui heureusement s’ouvre sans que je n’aie besoin de patienter après avoir actionné la petite sonnette.

Derrière un petit comptoir situé immédiatement après la porte, sur la droite, une femme sans âge me questionne immédiatement :



Mon hôtesse perçoit mon hésitation ; elle me dévisage un moment, et ses yeux me semblent subitement habités d’une façon intense ; ils dégagent à cet instant beaucoup de profondeur ; en tout cas c’est ce que je perçois, car son expression redevient neutre, presque figée, aussitôt après. Elle esquisse un sourire et m’encourage :



Cela suffit pour me décider et je pose sur le comptoir un billet de 50 et un billet de 20, articulant dans le même temps « massage tantrique, d’accord ». Je ne tiens pas à rester plus longtemps juste derrière la porte ; il y a une chance sur un million pour qu’entre à cet instant une connaissance, mais c’est plus fort que moi ; cette perspective me glace : mon besoin de contact, surtout de contact sexuel et tarifé, je ne peux l’assumer socialement.



Elle me regarde à nouveau… puis à mon grand soulagement, tire un verrou fermant l’accès depuis la rue et me montre le couloir étroit et sombre distribuant plusieurs petites cabines. Elle me guide jusqu’au bout et me désigne la porte en face. J’entre et me trouve dans une minuscule pièce, comprenant une cabine de douche et un tabouret. Un rapide coup d’œil me permet de vérifier qu’un produit lavant quelconque est à disposition et je vois du gel, au sol, dans le bac à douche.



Une fois la douche prise, la serviette nouée autour de la taille, j’ouvre la porte et suis invité à entrer dans la première cabine. Au centre se trouve une table, et juste assez d’espace tout autour pour circuler. Une lampe avec abat-jour orange en applique diffuse une lumière faible. Cette cabine ressemble à celles que j’ai déjà fréquentées.


Je m’apprête à m’allonger sur le ventre, la tête nichée dans l’ouverture destinée à la recevoir… mais ma masseuse pose la main sur mon épaule et dit simplement :



Je pense immédiatement que le massage serait porté au plus vite vers les parties intimes pour être écourté et ressens une forte contrariété ; je n’aime pas les prestations faites de vagues caresses hâtives, uniquement destinées à provoquer un désir mécanique et le paiement du pourboire qui permet de le soulager.

Lorsque les mains de mon hôtesse se posent de part et d’autre de mon front, enveloppant mes tempes, ma contrariété s’évapore aussitôt : ses paumes sont douces, et dégagent une forte chaleur. Mon hôtesse me demande :



Je n’ai pas le tutoiement facile.



Je sens une pression s’exercer au creux des tempes… puis se relâcher… puis recommencer, au rythme de ma respiration. Je ne sais pas qui de Lily ou de moi s’ajuste à l’autre… toujours est-il qu’au bout de quelques pressions, nous sommes parfaitement coordonnés. Je ferme les yeux pour m’abandonner à ce contact apaisant, et alors que je ne m’y attends pas, Lily se penche au-dessus de mon visage et commence à parler d’une voix douce.



Un peu surpris, mais bercé par la voix, je ferme les yeux… et essaye de me concentrer sur ce que je vois. Dans un premier temps, je dois dire… je ne vois pas grand-chose ! Juste quelques étoiles comme lorsque l’on appuie sur les yeux un peu fortement pour chasser la fatigue d’une fin de journée. Puis il me semble discerner une vague lueur, plutôt bleue, froide. Je décide de ne pas la quitter et de jouer le jeu que me propose ma masseuse. Lily resserre alors ses avant-bras autour de mon visage, ses mains viennent entourer le bas de celui-ci, et je sens que son ventre prend appui sur le haut de mon crâne. Le son de sa voix me parvient de façon un peu plus étouffée… Peu à peu, la lumière que je crois percevoir à la base de mon front prend une teinte plus chaude, jaune orangé. Et je la vois croître au rythme mes inspirations, puis décroître à l’expiration. Sans que je ne m’en rende compte, mon souffle s’est encore alourdi, ma nuque s’est relâchée alors qu’au contraire des tensions que j’ignorais quelques minutes auparavant apparaissent dans le dos, les cuisses et les mollets.


Les mains de Lily remontent depuis mon menton, pressent une zone sensible à la base des narines, puis passent sur les paupières avant d’appuyer fortement sur mon front. Elles semblent emporter avec elles toute la fatigue de ma journée de travail, mais bien plus que cela : toute culpabilité s’est évaporée pour faire place à la paisible certitude que je suis au bon endroit, et entre les bonnes mains.

Ses paumes glissent sur le sommet de mon crâne, les doigts fichés dans le cuir chevelu. Puis Lily les porte sur mon torse, l’une après l’autre, de sorte que jamais elle ne quitte le contact avec mon corps ; je crois que je me sentirais abandonné si elles cessaient ne serait-ce qu’une seconde ce contact.



Et à nouveau, elle m’invite à la visualiser, et à la laisser grandir au rythme de ma respiration. Je remarque qu’à présent c’est mon ventre qui guide l’inspiration, par la descente du diaphragme. J’ai déjà appris à respirer comme cela, mais ne songe guère à le mettre en pratique. Mon dos semble s’enfoncer peu à peu dans la table, et les battements de mon cœur s’espacent. Je ressens une joie étonnante. J’aime ce lieu et j’aime celle qui l’anime, et le mot me paraît soudain plein d’un sens nouveau. C’est déroutant, mais c’est cela : Lily semble mettre de l’âme dans ce qu’elle touche. J’ai l’impression que mon cœur s’élargit, physiquement, qu’il se dilate. Des larmes me montent aux yeux subitement en même temps que je me sens envahi de gratitude. Je laisse perler doucement les larmes, sans chercher à les réfréner.


Lily descend ses mains vers le bas de mon ventre, jusqu’à la serviette. J’accueille ce geste sans excitation, ce qui m’étonne : il me semble naturel à présent qu’elle puisse prendre contact avec cette partie de mon corps, comme de n’importe quelle autre. Lily reste un moment immobile, accompagnant ma respiration, puis la serviette qui couvrait encore mon intimité est dénouée ; les deux pans sont écartés et retombent de part et d’autre de la table, me laissant entièrement nu dans la semi-pénombre orangée. Soudain je sens une main se poser à la racine de mon sexe, les doigts de ma masseuse venant envelopper mes testicules et atteignant l’espace si sensible situé en arrière.



Je m’étonne intérieurement que Lily connaisse cette façon de désigner cette partie du corps, car son français est plutôt sommaire. Mais je chasse rapidement cette pensée pour me laisser à nouveau gagner par les sensations. Je n’ai plus envie de penser. D’ailleurs je n’y arrive plus.



Je n’ai jamais été aussi détendu ; je vois intérieurement comme des rais de lumière qui partent du sol, remontent par les jambes, le bassin, le long de la colonne, la nuque, le crâne, pour s’élever vers le ciel. Je suis à la fois relâché et traversé d’une énergie inconnue. La séance s’arrêterait là qu’elle serait déjà quasiment miraculeuse à mes yeux. Jamais je n’ai ressenti cela, une unité entre corps, cœur et esprit.



Ma masseuse accompagne mon mouvement jusqu’à ce que je me retrouve allongé sur le ventre. Laissant une main posée sur mon dos, Lily s’accroupit et prend sous la table ce qui ressemble à un coussin de mousse ; elle m’invite à soulever le bassin et fait glisser le coussin sous mes hanches. M’allongeant à nouveau, je me retrouve les fesses surélevées dans une posture qui m’aurait paru en temps normal franchement impudique ; là elle me semble complètement naturelle, comme il me paraît naturel que Lily saisisse mes chevilles pour les écarter vers le bord de la table. Je me sens offert à mon hôtesse aussi bien que, à travers elle, à la vie bienfaisante tout entière.


Lily pose une main au bas de mon dos, juste à la naissance des fesses, et une autre sur ma nuque. Une chaleur intense se dégage de ses mains, et cette chaleur paraît les relier entre elles à travers ma colonne vertébrale. Puis sa main droite quitte ma nuque, j’entends teinter un flacon, et aussitôt après une huile chaude perle entre mes omoplates ; la sensation est exquise. Le filet d’huile est déversé de façon continue tout le long de mon dos, puis au début du sillon fessier. Dans la position où je me trouve, le postérieur offert, l’huile se fraye facilement un chemin. Des picotements me saisissent au bas des reins et mon membre durcit. Mais au lieu d’éprouver une excitation partant du sexe, comme s’il était directement stimulé par une caresse, je sens que cette excitation part de beaucoup plus en arrière, comme depuis une racine dont je découvre l’existence. Elle me fait sentir tellement puissant qu’il me semble que je vais transpercer le coussin puis la table de mon érection si elle devient complète. Lily déverse encore de l’huile sur chacune de mes deux jambes, jusqu’aux pieds, et repose le flacon. En grands mouvements, elle étale la substance parfumée sur toute la face postérieure de mon corps.



Un instant, je repense à la honte qui m’habitait en entrant dans le salon. Elle me paraît complètement hors de propos, et presque insultante pour mon hôtesse. Lily, en trente minutes, m’a accompagné de toute sa douceur et de son mystérieux savoir-faire de l’humiliation à une sorte d’humilité. J’ai besoin d’être touché, caressé, stimulé et… pénétré. Ce que je ressens à cet instant est tellement bon que ça ne peut pas mentir, ça ne peut pas avilir. Un instant, je suis saisi d’un sentiment d’absurde à l’idée que ce qui va sans doute se passer est prohibé… Je m’abandonne définitivement aux mains de ma masseuse.


Lily pose ses deux mains à l’arrière de mes chevilles, enserrant celles-ci, assez fermement. Puis ses mains remontent lentement le long de mes mollets, et relâchent leur pression au creux du genou. Ses doigts se font alors légers, tournoyant, excitant la peau fine. Je suis attentif, offert, à la fois désireux que son mouvement se poursuive plus haut, mais sans ne ressentir aucune frustration. Elle fait en réalité le bon geste, au bon moment, depuis le début de la séance, j’en suis maintenant tranquillement assuré, ce qui augmente encore mon abandon confiant. Ses deux mains redescendent dans un mouvement à nouveau plus vigoureux. Ses doigts s’enfoncent un moment dans le creux situé derrière les malléoles, puis reprennent leur mouvement vers le haut. Ces mouvements durent plusieurs minutes, je ne sais l’évaluer exactement. Puis et après une nouvelle station au milieu des mes jambes, Lily poursuit sa montée en parcourant mes cuisses. Ses mains s’arrêtent avant d’atteindre le pli qui parque la naissance des fesses, et redescendent jusqu’à la plante des pieds, les orteils, qu’elle pétrit un à un. Je perçois une chaleur grandissante dans le centre de mon corps : le bassin, le creux du dos, les muscles de mon postérieur se détendent encore. Alors que Lily poursuit ses allers-retours tout au long de mes jambes, je commence à tendre les reins légèrement en arrière.


Les mains de Lily remontent à nouveau, mais au lieu de s’arrêter en haut des cuisses, s’écartent et enserrent mes hanches pour venir se rejoindre au bas de mon dos. Je ressens nettement une chaleur intense, qui irradie dans toute la colonne. Lily reste un moment immobile, seule une légère pression de ses mains ponctue mon souffle et atteste de ce qu’elle est parfaitement attentive au corps qu’elle comble ainsi. L’une de ses mains descend lentement, écrasant légèrement le sillon séparant mes fesses ; je sens que sa main pivote, les doigts désormais tournés vers le bas, et elle continue jusqu’à ce que sa paume se trouve au-dessus de mon œillet ; ses doigts viennent au contact de mon périnée, et je sens le délicieux chatouillis de la pulpe de ses doigts à l’arrière de mes testicules. Elle appuie lentement de sa paume jusqu’à venir au contact de mes muqueuses, exerçant de légères pressions de droite et de gauche pour écarter les deux globes et se frayer un chemin.


À nouveau, elle reste un moment sans bouger, et je sens mes muscles internes se relâcher ; Lily remonte son autre main le long de ma colonne, très lentement, deux doigts de part et d’autre de l’éperon de mes vertèbres. Elle atteint finalement ma nuque, qu’elle enserre délicieusement.


Un long frisson me parcourt de la tête au pied ; je m’enfonce un peu plus dans la table. L’érection qui m’a gagné, stable, me fait sentir pleinement homme. Pourtant la main posée au creux de mon intimité et la caresse plus intime qu’appelle ce contact réveille plutôt une dimension d’accueil, plus féminine.


Les doigts de Lily s’animent. Elle remonte en appuyant fermement l’espace situé en arrière de mes testicules, pour revenir les caresser en les enveloppant de plus en plus à chaque mouvement en sens inverse. Les sensations sont incroyables, et je bande comme un taureau. Lorsqu’elle retourne en arrière, elle approche de plus en plus la zone si sensible de l’ouverture de mes reins ; sa main droite quitte un instant la racine de mon crâne, et je comprends en ressentant quelques gouttes d’huile perler directement entre mes fesses que le massage va prendre une tournure plus érotique encore.


De son pouce, Lily vient au contact de mon anus ; elle reste un instant immobile, puis commence à exercer de très légères pressions tout en tournoyant autour, déplissant avec délicatesse l’ouverture élastique qui devient le centre de ses attentions. Sa main se plie, se déplie, le pouce toujours centré au cœur de mes fesses ; imperceptiblement, je tends les reins en arrière pour accentuer le contact de la pulpe de son pouce contre mes muqueuses. La douceur de ce contact est incroyable. J’écarte un peu plus les cuisses, facilitant les caresses qu’elle ne cesse de prodiguer avec une délicieuse application sur mon entrejambe.


Mon souffle se fait bruyant ; toute honte bue, complètement détendu et assoupli par ses mouvements, je cherche à m’empaler sur son pouce, à l’absorber. Enfin son doigt coulisse lentement à l’intérieur, provoquant un léger chatouillis, mais ni aucune douleur ni aucun inconfort… bien au contraire. Sous l’effet conjugué de mes ruades de plus en plus franches et de la pression qu’elle exerce en venant à la rencontre de mon désir, je me trouve comme suspendu à sa main, relié au monde extérieur par son intermédiaire.


Elle me tient dans une pince, moitié en moi, moitié à l’extérieur, et cette pince m’envoie de l’énergie comme on rechargerait une batterie d’une voiture à une autre ! Je fusionne avec son doigt qui m’investit, avec sa main, son bras dont mon sexe tendu est désormais une sorte de prolongement comme si ce bras avait traversé tout mon bassin. Je suis une femme et un homme tout à la fois. Je perds tout contrôle de la situation, prends appui sur mes avant-bras et pousse sur mes cuisses, creusant mon dos, pour me souder encore plus à la main qui me tenaille et me fouille intimement avec mon plus grand consentement. Je veux l’absorber toute entière, accentuer encore la pression ressentie à l’intérieur.


Un plaisir incoercible monte, par vagues successives, comme une marée montante. Au lieu d’être concentrées dans le sexe tendu, les sensations irradient des pieds à la tête, m’innervent d’énergie bienfaisante, me remplissent, débordent…

À la seconde où je viens à désirer que mon sexe soit empoigné, caressé, secoué, et profitant de l’espace qui s’est libéré sous mes hanches, Lily glisse son autre main et s’empare de ma virilité.


Elle exerce de longs va-et-vient huileux sur mon sexe pendant que je sens le petit pieu de chair fiché au creux de mes fesses tournoyer en se concentrant sur une zone qui déclenche des sensations indescriptibles.

Je décroche complètement. Sombre. Décolle. M’enfonce. M’abandonne. Mon cerveau ne réagit plus.

Je râle, soupire, implore, remercie, pousse, absorbe… une vague plus forte… j’arrête de respirer, bouche ouverte…

J’éjacule à jets puissants, arrosant le coussin et la serviette d’une quantité de sperme que je ne me suis jamais senti expulser, broyant le pouce de Lily sous les spasmes internes qui me secouent.


Je suis toujours en appui sur mes avant-bras, fesses relevées, reins et cuisses tendus. Lily glisse rapidement sous mon ventre une serviette sèche. Je reviens doucement au contact de la table de tout mon long, alors que dans le même temps son pouce se retire, très lentement, caressant au passage avec une extrême douceur les bords de mon anus. La pénétration cesse exactement au bon moment, comme elle a commencé ; plus tôt, la frustration aurait été terrible. Plus tard, la sensation d’intrusion serait devenue désagréable.


Lily laisse encore un bon moment sa main posée sur mon dos, accompagnant ma respiration, puis sort doucement de la cabine.



Je reste immobile de longues minutes, goûtant ce moment, surpris de ressentir une joie intense, sans la fatigue qui suit habituellement l’orgasme : pas d’endormissement en vue, juste une relaxation profonde.


Je profite avant de me rhabiller d’une longue douche chaude, regrettant presque de chasser les parfums de l’huile dont j’aimerais garder encore l’odeur.

Je rejoins le petit comptoir de l’accueil ; ma belle-mère, mon patron et l’Évêque pourraient surgir ensemble à cet instant dans l’échoppe que je leur vanterais sur-le-champ les qualités de ma masseuse, sans la moindre honte ni culpabilité. Lily arbore une expression parfaitement neutre comme si elle venait de vendre un journal. Je la regarde un moment sans pouvoir articuler un mot, cherchant un « Merci » à la hauteur de la révélation. Son regard s’allume à nouveau intensément, semblant me dire « Je sais » ou « Bienvenue » ou quelque chose comme cela… rien de plus. Elle sourit humblement, m’ouvre la porte et me salue d’un geste discret de la tête.


Je franchis le seuil et me retrouve dans la rue, un léger sourire aux lèvres : je marche, goûte l’air frais, le contact du sol sous mes pieds, croise des inconnus. Je les regarde joyeux, peut-être avec une certaine forme d’intensité.

Au moment où je m’y attends le moins, ma femme s’invite dans mes pensées ; bizarrement son visage ne déclenche plus sa petite cohorte de ruminations teintées de colère et de déception. Une petite porte s’ouvre intérieurement et, en la franchissant, je sens comme un discret retournement. Un mur semble s’effriter. L’espace qu’il masquait et qu’il découvre dans sa chute a le goût du neuf et de l’inconnu, la teinte d’une musique qui ne bégaye plus son refrain usé, mais ébauche le thème de ce qui ressemble à une improvisation légère.


Tout cela me semble un peu irréel alors que c’est bien là, en moi. Est-il possible que le massage de Lily, son attention mystérieuse, sa connaissance intime – c’est le cas de le dire – de ce qui se passe à l’intérieur d’un homme soit à l’origine de cette sorte de remodelage profond ? Je laisse cette question de côté et retourne à ses sensations nouvelles qui me bercent encore de leur douceur lorsque le train s’élance.