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n° 18374Fiche technique20160 caractères20160
Temps de lecture estimé : 13 mn
13/05/18
Résumé:  Les confessions d'une femme de ménage dans un bordel. Découvrir des facettes méconnues de cet univers, passer derrière le volet clos.
Critères:  prost nopéné nonéro confession -tarifé
Auteur : Julien Mar            Envoi mini-message

Série : Illusions et mirages - Le rouge bordélique

Chapitre 03 / 04
Derrière les volets clos

Résumé de l’épisode 1 : Le quartier à la lumière rouge


Journaliste, je déambulais dans les rues du quartier des prostituées de Francfort pour rédiger un article sur le sujet. Je me voulais comme en immersion, et pour cela j’avais choisi un hôtel miteux du quartier. Je voulais m’imprégner de cette atmosphère si particulière, mettre des visages, des odeurs et des couleurs sur ce monde interlope, à deux pas du centre de la finance européenne. De mes déambulations me revenaient en mémoire mes deux expériences avec des prostituées, la première, très mauvaise ; la seconde m’avait laissé un souvenir ému.


Résumé de l’épisode 2 : Un homme sur deux


Le hasard du métier de journaliste avait fait revenir le narrateur sur les lieux de son article. Peut-être trop descriptif aux yeux de certains, il voulait cette fois-ci rencontrer une prostituée pour pouvoir offrir à ses lecteurs un témoignage, et pour lui approfondir ce sujet en questionnant une professionnelle. Sa rencontre avec Klaudia lui permit de comprendre la complexité d’une activité pratiquée pour beaucoup dans l’anonymat, voire la clandestinité, et qui conduit pourtant un homme sur deux dans sa vie à payer une femme pour un rapport sexuel. Là où le journaliste connaît les limites de son métier, la confession permettait d’ouvrir bien des portes de maisons pourtant closes…



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Stuttgart, 12 mars, 6 h 30


La journée commence pour moi. Café avalé, trois biscottes et une orange. Je n’ai jamais aimé trop déjeuner le matin… Six chambres aujourd’hui à rafraîchir : les occupantes vont encore rester pour au moins une nuit encore, et trois à passer au propre pour les nouvelles. Va y avoir du boulot, mais c’est comme ça presque tous les jours ici. Faut qu’à treize heures tout soit terminé, tip top pour l’ouverture.


Moi, ça fait quarante-six ans que je suis dans le métier, voyez-vous, alors bon, c’est la routine, quoi. 62 ans que ça me fait. La retraite ? N’y pensez pas, elle me suffirait pas à vivre, et puis de toute façon au début j’ai travaillé sans être déclarée, alors c’est tout pour ma pomme : va falloir travailler en plus pour des années que j’ai déjà faites. C’est ainsi. Et puis veuve, alors qui va m’aider, hein ? Ça faisait trente-cinq ans qu’on était mariés, moi je peux le dire : j’ai eu un gentil mari. Il causait pas beaucoup, il travaillait beaucoup, dur sur les chantiers du bâtiment en Alsace. Et puis j’ai eu de la chance : pas beaucoup d’alcool, contrairement à ses collègues, et toujours là quand j’avais besoin de lui… et puis le cancer, le crabe, quoi : en six mois c’était plié, j’avais plus qu’à fleurir sa tombe. J’y pense souvent à mon René. J’ai toujours été dans les ménages, moi, depuis mes 16 ans.


Ma mère était française et elle a épousé un Allemand qu’elle a rencontré à Donaueschingen en allant visiter son frère qui faisait son service militaire. Elle me disait : « Pas de chômage dans le métier, faut toujours que ça brille partout là où les gens sont bien éduqués. » Alors à 16 ans, chez mes patrons dans une famille alsacienne de la haute pour m’occuper de tout. C’était dur, j’en ai bavé voyez-vous, mais ça m’a montré le boulot. Ma mère me disait encore : « Si à 20 ans tu es fatiguée, tu seras fatiguée toute ta vie. » Alors fallait bien bosser, et ça fait quarante-six ans que ça dure.


Quand mon René est parti, c’était pas facile pour moi ; avec son salaire, on vivait bien. Pas comme des riches, mais on était heureux avec notre argent, alors j’avais un petit mi-temps dans différents magasins, c’était bien. Et puis toute seule, ça suffisait plus pour le loyer, alors fallait trouver des heures en plus. C’est là qu’une amie m’a parlé d’une patronne qui cherchait quelqu’un, elle avait du mal à trouver du personnel compétent, le travail plaisait pas, mais il était tout de même bien payé… Moi, avec mes années dans le métier, je me suis dit : « C’est pas le boulot qui te fait peur, alors tu vas aller voir cette patronne. » Mon amie m’a alors dit que c’était pour la Maison Schiller… en rigolant.


Je connaissais bien de nom cet endroit, je suis pas tombée de la dernière pluie, mais je me suis dit : « Allez, fais donc pas ta difficile : passer la patte, c’est pareil dans un hôtel ou un bordel. » Et puis ça rimait en plus. Alors voilà que je me retrouve devant Ursula. Elle voulait quelqu’un de professionnel, pas compliqué et discret : c’était tout moi. Ursula n’était pas de ces femmes à s’occuper de ça, un peu bourgeoise, les ongles bien faits. Neuf chambres en tout, une cuisine et quelques salles encore… Préparer les trois repas du jour, rafraîchir les chambres et tenir propre la cuisine pour que les filles puissent y prendre à manger pour le soir, de 7 h à 13 h et de 16 h à 18 h du jeudi au lundi (mardi et mercredi, c’est relâche), voilà mon boulot : femme de ménage… dans une maison close qu’on disait de mon temps, une maison de passe. Un bordel, quoi.




Stuttgart, 15 mars, 10 h


Allez, faut y aller avant que la maison rouvre à 13 heures pour les clients. Les clients, je ne les vois pas, de toute façon : je suis en coulisse. Ça ne m’intéresse pas, et je pense qu’ils n’ont pas envie de voir une femme comme moi. J’vous dis ça, je sais pas… tous les goûts sont dans la nature, mais les hommes veulent quand même plutôt des jeunesses, j’ai passé l’âge. Mais j’en apprends beaucoup sur eux quand les filles en parlent entre elles… Que ça les turlupine, ces choses-là, aux hommes ! Du coup, je me demande si mon René y allait pas aussi de temps en temps, voir les prostituées. Nous deux vous savez, on était pas si créatifs : avec les années, de moins en moins ; et puis c’était du classique : une fois par semaine, souvent le week-end…


Quand je vois les chambres spéciales… je rigole parce que tout ça je ne connaissais pas. Moi, la visite chez le gynécologue, c’est pas quelque chose qui m’excite beaucoup, mais les hommes, eux, ils semblent bien aimer le fauteuil où nous les femmes on doit se mettre. Mais ma salle préférée, c’est là où il y a les trucs pour le sado-maso : on croirait une pièce de donjon comme dans les films d’horreur ; c’est noir avec du cuir et du latex partout. Des fois, je me sens comme à Disneyland, mais pour les adultes, hein ! Tous ces objets, je trouve ça amusant. Elles m’ont expliqué tout ce qu’on peut faire avec… Quand je vois tout ça, je me dis qu’on était vraiment sages avec mon mari ; tout ça ne me serait pas venu dans la tête. C’est peut-être aussi le porno qui fait ça, j’en sais rien… Y’a pas d’âge pour apprendre de nouvelles choses, mais c’est tout de même plus de mon âge que de faire ça.




Stuttgart, 16 mars, 15 h


La maison Schiller est une ancienne adresse avec des hauts et des bas, depuis vingt-cinq ans que la patronne est Ursula. Elle vient du milieu, et puis elle est montée en grade, comme on dit. J’aime bien la décoration… un peu kitsch, un peu vieillot. C’est la marque de fabrique de la maison : on vient ici comme dans une maison close des années 70. Vous vous rendez pas compte : il y a encore des meubles en bakélite ! Avec plein de fausses dorures, des fauteuils en skaï, des rideaux en dentelle et des tapisseries à motifs géométriques… C’est une autre époque, ici, et je m’y sens bien parce que c’était aussi la mienne.


Ursula a épousé un ancien client, un homme d’affaires qui avait pas mal de biffetons dans la banque. Il aurait laissé sa femme et ses enfants pour elle. Du coup, Ursula avait pu réaliser son rêve : ouvrir sa propre maison. Son mari est mort il y a longtemps dans un accident de voiture… veuve et seule comme moi. Ça nous fait un lien. Elle s’est consacrée à son petit commerce. Une belle femme, cette Ursula : elle présente bien. Un peu comme une secrétaire, je trouve… Petit chignon strict, cheveux blonds, presque toujours en tailleur… il y a un peu de Catherine Deneuve chez elle. Son boulot, c’est tenir la boutique et faire office d’accueil pour les clients. Quand quelqu’un rentre, c’est avec « Madame Ursula » qu’il parle d’abord. Et elle sait y faire pour mettre le client à l’aise : pas de chichis, ici ; j’ai eu l’occasion d’entendre de ces trucs ! Les clients réservent parfois comme au restaurant : je veux ça et ça, et puis elle devra être comme ça, et patati-patata… Mais bon, ils paient pour ça, et pas qu’un peu : c’est un peu le luxe ici.


Ma patronne (je l’appelle par son prénom, mais en la vouvoyant) s’est rangée des voitures : finis les rendez-vous avec les hommes. Et comme nous avons une clientèle qui en a dans le portefeuille, alors elle peut se permettre de m’embaucher : je suis dans les coulisses comme elle dit avec humour (je vais pas me plaindre, ma patronne est pas chiante pour un sou, mais elle a des principes). Avec une femme de mon âge, il n’y a pas de risque que je vienne gêner ses petites affaires ; et moi, la discrétion c’est avec un grand « d » ici… sinon j’en ferais, des divorces dans les maisons !


Et les coulisses, c’est justement quand les filles ne travaillent pas : la cuisine et le petit salon juste pour elles. C’est mon univers. Dès mon arrivée à sept heures, je prépare le petit-déjeuner : une heure maximum pour disposer pain, muesli, beurre, confiture, café, jus d’orange et thé. Les filles peuvent déjeuner dès 8 heures, si elles ne se sont pas couchées tard la veille ! Elles ne mangent pas grand-chose, de toute façon… elles picorent, voilà tout. C’est pas bon pour la ligne de trop manger, qu’elles disent. Elles me racontent aussi que pour certaines pratiques, il vaut mieux avoir le ventre vide. Vous voyez ce que je veux dire… De 8 heures à 10 heures, nettoyer les parties communes, passer la patte sur le parquet et les escaliers qui mènent chez nous.


À partir de 10 heures, les filles doivent être levées : c’est que j’ai trois heures pour faire les neuf chambres si elles sont toutes occupées ! Alors faut pas traîner : vider les poubelles (vous devinez bien ce qu’il y a dedans), changer les draps s’ils sont tachés (j’appelle ça des « accidents »), passer un coup de patte dans la salle de bain (avant la petite affaire, après la petite affaire… parfois pendant la petite affaire… (elles peuvent y passer, du temps, dans la salle de bain, et le client aussi !) et remettre tout en ordre : coussins, minibar, corbeille à capotes et tout le toutim. Je passe les commandes des repas du midi que les filles paient de leur poche chez l’Italien ou l’Asiatique du coin ; c’est pas cher, et comme je vous le dis, elles mangent pas grand-chose. Et ma matinée est terminée.


Une fois rentrée, je me fais un petit truc à manger et ma sieste. Ma sieste… Avec les années, elle est devenue tellement importante pour moi, comme une coupure dans la journée pour encaisser la matinée. Parce que vous voyez bien que j’ai beaucoup à faire, et que je ne suis pas une jeunette, hein !


L’après-midi, c’est plus calme : juste préparer le repas du soir et en profiter pour tailler une bavette avec les filles, préparer les petites choses à grignoter pour les clients qui ont réservé leur soirée chez nous, m’assurer que le frigo est bien approvisionné en champagne.


Avec les filles, je suis un peu leur maman, leur confidente… elles peuvent tout me dire, ça reste entre nous et ça leur fait du bien, je le sens. Elles n’ont pas eu des vies faciles, voyez-vous, et moi pas plus ; alors du coup, on se comprend. Elles me racontent leur vie d’avant, au pays. Souvent c’était un peu la misère, et puis l’espoir d’une vie meilleure, l’argent facile. Mais cet argent, il n’est pas facile pour elle : c’est dur. Les hommes peuvent être tellement brutes des fois, et puis certains ils ne pensent qu’à ça… Elles sont comme mes filles, voilà. Les clients les voient avec leurs machins à dentelle, leurs strings et leurs trucs pour les exciter, mais moi je les vois comme elles sont en vrai : encore des enfants. Elles viennent au petit-déjeuner en pyjama, elles emmènent parfois un ours en peluche. C’est de la tendresse qu’elles veulent après avoir fait du bien aux hommes. Et moi je le vois, pas les clients…


Alors elles me font des confidences… Y’a celui qui aime les jeux avec le caca. Il paye 250 € pour ça, et il repart content. Celui qui veut qu’on le fouette ; celui qui ne veut être qu’avec des blondes. Beaucoup de gens de la finance ; et puis il y a le commissaire aussi : je ne l’ai jamais vu, mais on raconte qu’il y a un Navarro (j’adorais Roger Hanin) qui vient souvent pour s’amuser avec les filles, et même qu’il paye plus que bien. Les discrets qui parlent à voix basse pour ne pas qu’on puisse les reconnaître, les habitués qui viennent depuis le début et qui racontent à Ursula leur vie de famille… la femme, les gosses, les petits-enfants, l’opération du chien. De temps en temps les médecins du service d’hygiène de la ville pour s’assurer que tout le monde va bien. Les flics aussi : peut-être qu’ils savent aussi pour le commissaire ?


La sécurité et la discrétion sont importantes chez nous : c’est mauvais pour le commerce, sinon. Je sais qu’Ursula a un permis de port d’arme d’ailleurs, et son pétard est à portée de main au cas où (heureusement, ça n’est jamais arrivé qu’elle pointe un type avec). Le pognon qu’on peut se faire dans ce milieu est bien connu, et toujours bien au chaud dans un coffre. Le plus vieux métier du monde, paraît-il, alors je crois qu’il y en aura tout le temps, des filles pour coucher contre de l’argent.


Le salon privé ou la cuisine, c’est là qu’elles peuvent se reposer entre deux rendez-vous. Certains annoncent leur venue et savent avec qui ils ont envie de faire leurs petites affaires. D’autres viennent à l’improviste et se font présenter les filles. Quand la petite sonnerie se fait entendre, les filles doivent tout de suite sortir pour se présenter au client, avec sourire et entrain : là-dessus Ursula est intraitable. En vitesse se déshabiller et remettre de l’ordre dans la coiffure et tout reste en plan, aussi bien notre discussion que la tasse de café. C’est comme Miss France… et Ursula, c’est Geneviève de Fontenay. Celle qui est choisie part dans la chambre avec le client, les autres reviennent… parfois soulagées de n’avoir pas été choisies quand le client ne leur plaît pas (il doit y en avoir des moches), mais des fois déçues : c’est qu’elles doivent payer chaque jour un loyer, et Ursula prend sa part sur les filles.


Ça ne me dérange pas qu’elles soient avec moi dans la cuisine pendant que je travaille : au contraire, c’est de la compagnie agréable pour nous tous. Comme je vous le dis, je suis la confidente. Avec Ursula, c’est plus distancié : normal, c’est la patronne. Elles ont des moments de cafard parfois… la dureté du métier, l’éloignement de la famille, tout ça. Ursula a vite remarqué que ma présence faisait du bien aux filles, et si elles vont bien, elles travaillent mieux, et Ursula fait rentrer les biffetons dans la caisse. Alors ça pianote souvent sur leurs téléphones, ou elles écoutent de la musique dans le salon. Ça leur fait du bien que je sois là pour leur préparer un bon chocolat chaud ou faire un petit sandwich comme elles les aiment.


Les filles restent chez nous plus ou moins longtemps : deux ou trois semaines, s’en vont pendant un mois, reviennent… faut offrir un peu de changement aux clients, les hommes se lassent vite de tout, voyez-vous. Mais au final, c’est toujours un même groupe d’une trentaine de filles que je vois souvent ; alors avec le temps, je connais leurs habitudes et je me les note parfois sur mon carnet. Ursula s’occupe des réservations des chambres, je sais qui sera chez nous la semaine suivante.




Stuttgart, 17 mars 17 h 50


La journée de travail touche à sa fin. Pour le dîner, ça sera salade et gâteau aux pommes pour les filles. Ma patronne m’a demandé de bien approvisionner le frigo réservé aux clients. Un groupe devrait venir ce soir et Ursula prévoit une belle soirée (pour le tiroir-caisse, bien sûr). Un habitué devrait venir fêter un gros contrat avec ses collègues, et il a prévu de commander trois/quatre filles. Il me faut mettre plusieurs bouteilles de champagne au frais et préparer quelques canapés à grignoter… Ma patronne adore le champagne : la bouteille achetée 35 € est revendue 190 € au client ; ça lui fait une belle marge de gras à se faire sur sa pomme !


Les filles sont un peu nerveuses : elles savent que pour celles choisies, la soirée va beaucoup rapporter. Mileva, elle ne se faisait pas trop de souci : le client l’a souvent choisie, et elle est presque sûre qu’il va vouloir la faire connaître à ses collègues. Ça fait six mois qu’elle est une régulière chez nous ; elle vient de Moldavie et est ambitieuse : elle m’a dit vouloir faire le plus d’argent possible pour ensuite faire des études en Angleterre. C’est souvent ainsi : le bordel est juste un moyen pour autre chose. Avec ses formes et ses lolos, ça ne m’étonne pas qu’elle plaise aux hommes.


Pour Ursula ces genres de filles sont des presses ; c’est un peu vulgaire, mais c’est comme ça : elles pressent aussi bien le jus des clients que le pognon. Et un bordel, ça fonctionne quand l’argent coule. Il y a des filles, elles n’ont pas beaucoup de succès chez nous : elles n’attirent pas physiquement (encore que tous les goûts sont dans la nature, comme on dit) ou elles ne font pas très bien les choses au lit. Du coup, ça leur coûte cher d’être chez nous et de ne pas être choisies, alors elles restent un peu, reviennent tenter leur chance, et si ça ne marche pas trop on ne les voit plus. Certaines ont eu des problèmes avec Ursula aussi… ma patronne n’aime pas qu’on lui marche sur les orteils, et comme c’est chez elle, allez, oust !


J’aime bien mon travail : c’est pas commun d’être femme de ménage dans une maison close, et ça n’en finit pas d’étonner mes amies et ma famille… pour moi c’est comme un hôtel, mais en mieux : je n’aurais pas dans un hôtel d’aussi bons contacts avec les occupants des chambres. Au Schiller, je suis comme une maman pour ces filles et j’apporte un peu de chaleur et de douceur. Le Schiller est une maison comme il n’en existe presque plus en Allemagne : une mère maquerelle indépendante, une déco kitsch, une femme de ménage pour s’occuper de tout… J’aimerais bien qu’on voie ces prostituées comme des jeunes femmes comme les autres. Elles bossent comme les autres femmes, elles ont leur passé et leurs envies d’avenir… elles ne sont pas des bouts de viande pour jouir dedans. La prostitution existera tant qu’il y aura des hommes sur cette planète, alors je me dis qu’on ferait bien de voir ce métier autrement qu’en les jugeant.