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n° 18395Fiche technique45078 caractères45078
Temps de lecture estimé : 24 mn
28/05/18
corrigé 06/06/21
Résumé:  Avis : ceci est une histoire vraie. Les noms des protagonistes ont donc été modifiés, ce pour des raisons évidentes d'anonymat. Merci de votre compréhension.
Critères:  fh frousses rousseurs inconnu uniforme fépilée 69 pénétratio zoo délire humour fantastiqu -humour -fantastiq
Auteur : Radagast      Envoi mini-message
Animaux de compagnie


  • — Tu les mets dans une boite ?
  • — Oui mais en plexiglas et ouverte sur le dessus, comme les autres, qu’on puisse les voir, y accéder pour nettoyer la litière et qu’ils respirent, mais assez haut pour qu’ils ne se sauvent pas.

Les deux corps flasques furent déposés dans une enceinte aux parois transparentes hautes de quatre mètres.

D’une surface de cent mères carrés environ, l’étrange geôle au sol recouvert de paille ne comprenait d’autre aménagement qu’un abreuvoir dans un angle et un appareil étrange non loin de là.


  • — Voilà, il ne reste plus qu’à attendre qu’ils se réveillent.


~o~o~o~



Lucie Novie se retourna. Elle se gratta un sein et les fesses ; un truc piquant et pointu tentait de pénétrer dans la raie de son cul. Elle avait la bouche pâteuse et mal au crâne. Elle passa sa langue sur ses lèvres sèches, ouvrit un œil et se retrouva face à un pénis.



Elle ne se rappelait plus rien, à part une grande lumière blanche. Qu’avait-elle fait la veille ? En outre, elle n’était pas de ces femmes qui font la fête en boîte et ramènent des hommes chez elles. Pis encore, était-on le lendemain de la veille de son dernier souvenir ?


Elle était allongée sur de la paille. De la paille chez elle ? Impossible ! Chez le propriétaire du paf, peu probable aussi. Seule hypothèse plausible, elle était repartie avec ce gars et, n’y tenant plus, ils s’étaient arrêtés dans une grange pour faire ce qu’ils avaient à faire. Pourtant, ce n’était pas son genre de bagateller n’importe où avec le premier venu. Nulle trace de ses vêtements, ni de ceux de son voisin ; qu’avaient-ils pu fabriquer ? Merde, ils devaient en tenir une bonne ! La tête lui tournait un peu.


Il faisait clair dans cette pièce sans qu’une source de lumière ne soit visible ; elle semblait venir de partout et de nulle part.

Elle se souleva sur un coude, regarda le type… Non, il ne lui disait rien. Plutôt séduisant, à peu près de son âge – dans la trentaine –, cheveux châtains ébouriffés, visage ovale, bouche charnue, nez droit, les épaules larges.

Son regard s’arrêta sur le bas-ventre où la bête dormait, nichée entre les poils.



Le bonhomme remuait ; il semblait sortir du coaltar. Il devait avoir la même bouche en papier-buvard qu’elle. Il largua une caisse et se gratta l’entrejambe. « C’est bien un homme dans toute sa splendeur ! » s’insurgea Lucie. À l’instar de son propriétaire, le zoziau s’éveillait, pointant le nez hors du nid, s’étirant et prenant de l’ampleur.


Il ouvrit un œil, le referma aussi vite, ébloui. Il tâta autour de lui, tripota la paille qui lui grattait le cul.



Il se releva vite fait et vit la jeune femme à ses côtés.



Il sembla remarquer tout à coup sa nudité et son baromètre remonté presque au nombril qui indiquait grand beau temps.



Il réalisa que Lucie se trouvait dans la même tenue que lui ; une jeune femme pas désagréable à regarder. Grande rousse, de jolies lentilles sur le nez et les joues, les yeux noisette, les lèvres pulpeuses, un menton volontaire agrémenté d’une adorable fossette, les seins hauts, orgueilleux et épanouis piquetés d’éphélides, les tétons rose vif au centre de larges aréoles ; un ventre plat doté d’un petit coussin du plus bel effet au niveau du nombril. La taille fine et les hanches larges, auxquelles il devait faire bon s’agripper. Les jambes étaient longues et musclées, et pour ce qu’il pouvait en deviner, de jolies fesses bien fermes ; sûrement une sportive, vu sa forme et ses formes.


Pour sublimer le tout, un joli coquillage aux lèvres délicatement ourlées, proéminentes et brunes, coquillage bien lisse sans l’ombre d’un poil. Il pouvait même deviner le petit pédoncule impertinent qui pointait le nez en haut de cette merveille.

Vraie rouquine ou pas, il ne pouvait que supputer.



Il se rendit compte, sans remords, qu’il l’examinait de la tête aux pieds – qu’elle avait fort beaux – et des pieds à la tête. Elle hésitait entre courroux et satisfaction. Lisant l’admiration dans le regard du mâle, elle se sentait flattée, d’autant plus qu’elle ne s’était pas privée de le détailler lors de son réveil ; surtout son concombre galant bien tendu.



Main dans la main ils partirent vers l’inconnu en trébuchant sur les mottes de paille.


Ils trouvèrent vite une paroi transparente qu’ils longèrent. Ils découvrirent ensuite l’abreuvoir, où ils burent jusqu’à s’en faire péter la panse, un effet secondaire de leur sommeil artificiel.

À quelques pas de là ils virent un appareillage étrange.



Ils contournèrent l’objet et se heurtèrent de nouveau à la paroi. Celle ci faisait un angle, puis un autre angle, et pour finir ils revinrent à leur point de départ. Ils se trouvaient dans une boîte translucide, un terrarium ou un vivarium géant ; ce fait les affecta fortement.


Lucie, folle de rage, prit appui sur le mur de verre, les mains à plat, jambes écartées et poussa. Pour ce faire elle cambrait les reins, tendait les fesses en arrière et montrait son joli brugnon tandis que ses seins remuaient en cadence alors qu’elle donnait des à-coups.

David admirait le spectacle, son érection reprenant de plus belle.



Il mit ses mains en coupelle au niveau de son bas-ventre ; elle y posa le pied, se tenant aux épaules masculines.



Il avait le nez posé sur le clito ; les lèvres intimes de la jeune femme se collaient au siennes.

Elle posa un pied, puis deux sur les épaules du gars. Il la tenait par les mollets. Tenté, il leva les yeux et vit le plus merveilleux des spectacles : un joli coquillage entrebâillé, paré de belles draperies.



Elle gesticula. Il essaya de la retenir alors qu’elle vacillait, puis Lucie chuta sur le dos de toute la hauteur de leur pyramide improvisée, David lui tenant toujours les chevilles, les jambes en l’air et largement écartées. Il n’en demandait pas tant.



Tout en poussant un cri de terreur elle se réfugia dans les bras de l’homme.



Elle montrait du doigt un point vers le haut. Il leva les yeux et se sentit défaillir. Sa bandaison n’étant plus qu’un souvenir, la frousse fit se racornir son bâton de maréchal.

Deux choses gigantesques se penchaient par-dessus leur enclos. Deux êtres poilus dotés de six yeux pédonculés et d’une paire d’antennes ; quatre paires de pattes s’agrippaient au rebord.




  • — Ils sont réveillés !
  • — Je crois qu’ils ont peur.
  • — Il faut les rassurer ; mets en route le traducteur. Faut leur parler.
  • — Voilà.
  • — Trabacloc younzi.
  • — Espèce d’andouille ! C’est du Klingon !
  • — Fais-le, toi qu’es si maligne.
  • — Scoubidou macron slurps.
  • — Ça, c’est du Zlagoullien…
  • — M’énerve, ce truc. On cherche le langage de Terra, du Terranien… Merde, y’a plein de dialectes.
  • — On les a attrapés là, sur ce territoire ; le langage doit être du… français. J’y vais.


Une voix métallique les interpella :




  • — Attends un peu, je vais faire un petit réglage sur le traducteur.


Après un temps, la voix reprit :




  • — Tu n’as pas encore bien réglé le traducteur, t’es un bon à rien !
  • — Toi t’es qu’une emmerdeuse.



Les deux humains restèrent quelques instants bouche bée. Puis parlèrent en même temps :



~o~o~o~



Les deux personnages disparus, la jeune femme incendia son compagnon :



Le temps de s’engueuler quelques minutes et les deux extraterrestres revenaient, les pattes chargées. Ils aspirèrent toute la paille, installèrent une moquette épaisse, une douche, des toilettes à la turque, une table, des chaises et un seul lit king size avec un sommier et un gros matelas.



Les deux humains se regardèrent, abasourdis. Même les extraterrestres étaient contaminés par la pub.



Il réfléchit quelques instants.



Les deux créatures s’éloignèrent.



~o~o~o~



  • — Tu sais ce que ça mange, les Terraniens ?
  • — On va chercher sur les guides tourismiques, celui du Routard Galactique, du Go et Dillot, du Michemin.

Ils ouvrirent la page d’accueil et trouvèrent les menus servis sur Terre.


  • — Quelle horreur ! Regarde, petit frère, les Terraniens mangent de la viande !
  • — Il est hors de question de leur en servir.
  • — On va leur donner des fruits et des légumes. Comme aux autres.
  • — Regarde : aliments aphrodisiaques… Si on en ajoutait à leur ration ?
  • — Ouais, on a tout ce qu’il faut.
  • — Mais il faut revérifier le traducteur, il dit n’importe quoi.


~o~o~o~



La dispute débuta le premier jour à cause du lit.



Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, Lucie se coucha aussi, en plaçant les oreillers entre eux, telle une fortification protégeant sa vertu.


Quelques semaines plus tard ils s’engueulaient encore, pour un tout autre sujet.



Il regardait les seins et les fesses de la jolie rousse : elle n’avait rien à envier aux omnivores de ses connaissances.



Il réfléchit quelques instants.



Elle farfouilla dans leurs réserves.



Il réfléchit un instant avant de réaliser.



Quelques minutes passèrent, pendant lesquelles ils n’osaient se regarder, puis il réalisa soudain.



Elle le prit par la main et l’entraîna vers le lit.



Étendu en travers du pieu, il vit sa compagne d’infortune s’allonger sur lui tête-bêche.



David examina de près le joli cratère. La Nature reprenant ses droits, une fine toison rousse couvrait les alentours de la fissure.



Il ne se fit pas prier. Un simple baiser sur l’étui à clarinette et elle se mit à gémir, ruer du popotin et pomper le dard comme une affamée. Le système pileux de David prenait aussi de l’ampleur ; une barbe douce et drue lui couvrait le visage. Cette barbe chatouillait l’entrecuisse de Lucie d’une manière diabolique.


Il ne leur suffit que de trente secondes pour se mettre tous deux sur orbite. Elle lâcha un beau torrent de lave sur le visage de David tandis qu’il envoyait la purée directement au fond du gosier de la rouquine.

Sa queue pointait encore vers le ciel.



Ils se remirent à l’ouvrage. Il embrassait, léchait les cuisses, l’aine ; il caressait les fesses tout en évitant soigneusement le joli brugnon. De son côté, elle câlinait d’un doigt délicat les roubignoles velues, tirait sur la peau du prépuce pour lui décalotter le vicaire général. D’un commun accord ils se visitèrent le troisième œil ensemble, y enfouissant un doigt curieux. David ficha sa langue dans la caldera qui palpitait tandis que Lucie, électrisée, embouchait avec ardeur la trompette de Jéricho.



  • — Ils se dévorent ! Ils se dévorent ! Viens vite !
  • — Tu es sûre ?
  • — Oui, c’est horrible, il ne va rien en rester, hurlait la Tryculienne (1). Fais quelque chose !
  • — Attends un peu, je vais regarder leur mode d’emploi.

Il ouvrit un livre et le feuilleta.


  • — Vite ! Ils sont en train de fondre, ils dégoulinent de partout !
  • — Là, regarde : ils ne se mangent pas, c’est une cunu, cuno, cunnilation ou un truc du genre ; un « 69 » qu’ils appellent ça.
  • — Ils vont faire des petits ?
  • — Euh, non, je crois qu’ils les mangent. Enfin, la femelle les gobe.
  • — Mais c’est scandaleux ! Faut les arrêter !
  • — Non, parce que le livre dit que c’est un préliminaire à la reproduction.
  • — C’est quoi, ton livre ?
  • — Les œuvres complètes de Radagast le Sage (2), directement inspirées d’un livre sacré, le Kâma-Sûtra.
  • — N’importe quoi… Je suis sûre qu’ils se bouffent tout crus.

Les deux Tryculiens regardèrent de nouveau dans la cage.


  • — Et là, que font-ils ?
  • — Euh, un coït intermammellaire, d’après le livre.
  • — Si j’en crois ton livre et les illustrations, on n’est pas encore près d’avoir des petits.


~o~o~o~



David et Lucie, allongés sur le lit, se tenaient serrés l’un contre l’autre ; elle lui caressait le torse tandisqu’il emmêlait ses doigts dans la chevelure rousse et embrassait le front de sa codétenue, l’air absent.



Après quelques secondes de réflexion elle reprit :



Bouger la roue fut plus aisé que prévu. L’engin glissant facilement sur la moquette, les quelques mètres qui les séparaient de la paroi furent presque une formalité. Ils escaladèrent aussitôt l’agrès, enjambèrent la muraille translucide et se laissèrent tomber de l’autre côté. David prit la main de Lucie dans la sienne et ils partirent tous deux vers l’inconnu.


~o~o~o~



Si l’intérieur du terrarium était bien éclairé, à l’extérieur régnait une obscurité presque totale. Ils avançaient prudemment, ne voulant pas tomber dans le vide ou sur une chose peu sociable. Au bout de quelques minutes à tâtonner dans le noir, ils virent une faible lueur. Ils se dirigèrent aussitôt vers elle pour découvrir un autre aquarium ou vivarium.



Ils longèrent la paroi, craintifs, la main de l’homme serrant un peu plus fort celle de sa compagne.

Une grosse patte frappa la vitre, arrachant un cri aux deux humains.

Lucie distingua derrière la paroi deux yeux intelligents et doux.



David posa sa main sur la vitre, contre la paume du primate. Les yeux du grand singe les fixaient avec intensité et tendresse. Derrière lui se tenait une petite femelle. Le singe se mit à agiter les doigts avec frénésie ; David marqua un temps de surprise et se mit lui aussi à agiter les doigts. De temps à autre, la petite orang-outang agitait elle aussi les siens.




Ils ont été enlevés un peu comme nous et se sont retrouvés ici depuis ils ne savent pas combien de temps. Ils ne se connaissaient pas avant.

Ils sont tombés amoureux l’un de l’autre ; il cherchait sa moitié, c’est elle qui l’a trouvé. Il n’y a qu’elle, il n’y a que lui.

Lui se prénomme Ulysse, elle Pénélope. Ils viennent de deux laboratoires de recherche différents. Ulysse pense que les êtres étranges qui les ont enlevés veulent qu’ils se reproduisent ; Pénélope ne veut pas avoir un petit et le laisser aux pattes de ces choses. Ils voudraient retrouver le soleil, le vent sur le visage, le chant des oiseaux. Il dit aussi qu’il vous trouve très belle pour une humaine, surtout votre pelage qui est presque comme le leur. Ils ne peuvent s’évader comme nous ; leur vivarium ne possède pas de roue à hamster.



David et Lucie firent le tour de la cage sans trouver de porte ; les deux singes les suivaient tout en continuant la discussion.



David traduisait au fur et à mesure.



David la regarda, surpris, puis il la prit dans ses bras et l’embrassa tandis qu’Ulysse et Pénélope applaudissaient.


C’est cet instant que choisirent leurs ravisseurs pour réapparaître. Un faisceau lumineux les épingla sur place tandis qu’ils se retrouvaient pris dans les mailles d’une épuisette. Lucy croisa le regard désespéré de Pénélope.



Ils furent replacés dans leur terrarium d’origine.



  • — Le traducteur déconne encore !
  • — Ça fait trois fois que je le règle, ce truc à la cong !


~o~o~o~




David caressait les cheveux de la jeune femme, ne sachant que faire d’autre pour la rassurer et la consoler.



Ils s’embrassèrent alors que les mains et les doigts partaient en exploration, qui sur un sein, dans une toison douce, dans des vallées humides ; qui sur un torse velu ou une verge tendue.

Il s’allongea sur elle, en appui sur les coudes, tandis qu’elle entourait la taille de son amant de ses longues jambes, s’ouvrant et se donnant à lui.


Elle agrippa le soc d’une main ferme et le présenta à son sillon. Il la pénétra lentement, en une seule poussée. Elle gémit de plaisir sous cette intrusion, gémissement qu’il éteignit sous un baiser vorace qui dura tout le temps de leur étreinte, qui fut tout d’abord tendre et lente, puis plus vive et musclée, pour se poursuivre de façon presque bestiale par des morsures des lèvres, des tétons malaxés et des ongles plantés dans le dos, des pelvis qui se heurtaient violemment, pour se terminer par l’apothéose, des corps qui se pressent l’un contre l’autre, des râles de bonheur et un étourdissement commun.



~o~




  • — Regarde, petite sœur, ils recommencent !
  • — Ouais, shlumpy (3) ! Tu crois que s’ils le font plusieurs fois de suite il y aura plusieurs petits ?
  • — Euh, je sais pas…
  • — Que faites-vous de beau, les enfants ?
  • — Ri… rien, papa.
  • — Humm ? Vous faites la tête de ceux qui ont fait une bêtise. Qu’est ce… Des Terraniens ? Vous avez capturé des zumins ? Vous êtes inconscients !
  • — On faisait rien de grave, on voulait juste qu’ils nous fassent des petits.
  • — Des petits ? Mais vous êtes pires que stupides ! Vous n’imaginez pas à quelle vitesse ça se reproduit, ces bestioles ; pire que des lamuches (4). Il y a sept mille ans, paraît qu’il y en avait un seul couple ; maintenant, ils sont huit milliards !
  • — Mais, papa…
  • — Y’a pas de maispapa : vous aller les ramener où vous les avez trouvés ; pas envie qu’ils chient partout, rongent les câbles et envahissent la soute !
  • — Tous ?
  • — Tous. Et vous effacez leur mémoire, qu’ils ne se souviennent de rien de ce qui s’est passé ici.



Les Terraniens ne voulaient pas se laisser attraper ; ils se sauvaient en piaillant. Pourtant, il fallait qu’ils soient réveillés pour effacer la mémoire, impossible de le faire sous anesthésie.

Coincés dans un angle de la cage, un filin gluant les immobilisa, puis une spirale hypnotique capta leur regard, et pour finir une lumière rouge palpita devant leurs yeux, effaçant leurs souvenirs récents.


~o~o~o~



Extrait des Dernières nouvelles d’Alsace :


Hier matin, monsieur David Cicode, qui avait disparu soudainement il y a quelques mois, vient de réapparaître près de Furdenheim, uniquement vêtu d’un caleçon. Monsieur Cicode a été emmené à l’hôpital de Hautepierre ; il semble en effet souffrir de troubles de la mémoire.

Monsieur David Cicode est un habitant honorablement connu de la commune ; sa disparition soudaine avait provoqué une vive émotion chez les Furdeinheimois, sa réapparition brutale tout autant.

Nous lui souhaitons un prompt rétablissement.

La gendarmerie enquête et lance un appel à témoins.


~o~


Extrait du Dauphiné Libéré :


Hier en fin d’après-midi, un agriculteur d’Antraigues-sur-Volane a fait une étonnante découverte : il a trouvé dans son verger deux orangs-outangs, un mâle et une femelle. Les animaux ne semblaient ni craintifs ni agressifs. Les singes, pris en charge par un vétérinaire et les services de secours, ont été transportés au parc animalier de Peaugres.

Les Antraiguins se perdent en conjectures quant à la présence de ces animaux.

La gendarmerie enquête et lance un appel à témoins.


~o~


Extrait de L’Éveil de Haute-Loire :


Hier en fin d’après-midi, sur la D42 menant d’Yssingeaux à Marnac, a été retrouvée le capitaine de gendarmerie Lucie Novie, errant en petite tenue. Nous vous rappelons que sa disparition il y a quelques mois avait provoqué un vif émoi dans la région ; les battues organisées pour tenter de la retrouver se révélèrent vaines. Sa voiture retrouvée vide et accidentée faisait craindre le pire. L’enquête ouverte pour disparition inquiétante ne donna aucun résultat. Sa réapparition soudaine trouble tout autant les Yssingelais que sa disparition, le capitaine Novie étant une personnalité appréciée de ses subordonnés et des habitants.

La gendarmerie ne fait aucun commentaire.


~o~o~o~



David avait repris son travail au centre éducatif ; il ne semblait souffrir d’aucune séquelle de son amnésie, bien que les soins prodigués n’eussent servi à rien. S’il ne se souvenait plus des dernières semaines après sa disparition, sa mémoire antérieure n’était en rien affectée. Presque un an s’était écoulé depuis sa réapparition soudaine.


Depuis quelque temps il faisait des rêves récurrents, étranges et biscornus. Une jolie capitaine de gendarmerie en tenue d’apparat et accompagnée d’un orang-outang l’arrêtait et demandait les papiers de son véhicule. Dans ses rêves – et comme chacun le sait – la tenue de cérémonie des personnels féminins de la gendarmerie est uniquement composé d’un tricorne, d’un porte-jarretelles et de bas bleus.

Il n’en parlait pas à ses collègues, ni à sa famille, ni surtout au psy qui le suivait encore.


~o~



Le capitaine Lucie Novie, après un passage au CHU de Clermont-Ferrand pour évaluer ses troubles de mémoire, fut longuement interrogée par ses collègues et supérieurs pour faire ce qu’ils appellent dans leur jargon un débriefing. Quand ils eurent la conviction que la jeune femme ne simulait pas et ne se souvenait de rien, elle fut réintégrée dans son grade d’origine mais ne reçut pas une affectation de commandement ; plus de brigade pour elle, mais un travail administratif de gratte-papier.

Prise d’une envie subite, elle apprit le langage des signes. Elle ne savait pas pourquoi, mais ça pouvait toujours servir.


Elle s’emmerdait fortement, laissant parfois son esprit s’évader, l’amenant à faire des rêves étranges et récurrents où elle se voyait nue en train de deviser philosophie et poésie compagnie d’un homme hirsute et de deux orangs-outangs, tous trois sympathiques et cultivés.

Elle n’en parlait pas à ses collègues ni à sa famille, ni surtout au psy de la gendarmerie qui la suivait encore.


~o~o~o~



À quelques centaines de kilomètres l’un de l’autre, un samedi soir, Lucie Novie et David Cicode regardaient le même programme sur le petit écran, le journal télévisé.

Le présentateur, mèche au vent, lança le dernier sujet :



Pris d’une subite frénésie, David entassa dans un sac quelques effets et une trousse de toilette, démarra sa voiture et partit toutes affaires cessantes vers l’Ardèche. Il lui fallait absolument rencontrer ces bestioles ; il ne savait pas pourquoi, mais sa vie en dépendait.


Prise d’une subite frénésie, Lucie entassa dans une valise quelques effets de rechange, de quoi se maquiller et faire sa toilette, enfourna le tout dans sa voiture et fila toutes affaires cessantes vers l’Ardèche. Elle ne savait pas pourquoi, mais il lui fallait absolument rencontrer ces animaux.


~o~



À quatre heures du matin, il gara sa Peugeot sur le parking du parc animalier. Il était presque le premier ; seule une autre voiture stationnait. Il sortit, fit quelques pas pour se dégourdir les jambes et se dirigea vers les portes d’entrée et les caisses. Aussitôt une femme sortit de l’autre véhicule et le suivit. Ils allaient devoir attendre cinq heures, mais ils étaient les premiers. Ils se dévisageaient du coin de l’œil, à la lueur naissante du jour. Elle, une belle jeune femme à la chevelure de feu, lui un grand type baraqué aux cheveux bruns en bataille, pas mal de sa personne.



Ils laissèrent le silence s’installer.



Une foule importante se pressait derrière eux quand à neuf heures le directeur du parc, le comte de la Panouse, vint en personne ouvrir les portes.



Après les photos incontournables pour les journaux et les dépliants publicitaires, ils furent emmenés près de l’enclos des grands singes. Là, dès qu’ils les virent, les deux primates se pressèrent à la vitre, faisant de frénétiques moulinets de leurs bras. Les deux parrains ouvrirent de grands yeux et s’écrièrent en même temps :



Puis ils se regardèrent et se jetèrent dans les bras l’un de l’autre, se roulant une pelle digne de Jean-Baptiste (5) ; tout leur revenait brutalement en mémoire. Ulysse et Pénélope s’excitaient de plus belle encore, parlant avec les mains comme des Italiens énervés.



Sitôt entrés, David et Lucie se firent soulever, embrasser. Le comte regardait tout cela bouche bée. David et Ulysse se flanquaient de grandes tapes sur les épaules ; Pénélope déposa son bébé dans les bras de Lucie. Tous versaient de grosses larmes de joie.



Devant l’étonnante entente entre les singes et les humains, Paul de la Panouse proposa à David de devenir soigneur des grands primates et à Lucie, en sa qualité de gendarme, d’endosser le costume de chef de la sécurité, postes qu’ils acceptèrent tout de suite.

La nuit de leurs retrouvailles dans une chambre d’hôtel fut épique et épicée.


Quelques mois plus tard, les deux couples papotaient de choses futiles et amusantes. Pénélope caressait le ventre arrondi de Lucie.



D’un commun accord, il fut convenu de ne jamais révéler quoi que ce soit de cette aventure, ni de leur rencontre.

Le mot de la fin revint à Ulysse :




~oOo~




(1) Vous noterez que l’auteur, pour éviter à ses lecteurs une fastidieuse traduction tryculien/français, a lui-même fait cette démarche, lui occasionnant de douloureuses migraines.


(2) Note aux aimables lecteurs : vous pouvez remplacer Radagast le Sage par Gufti le Cérébral, Mithrandir le Sentencieux ou Ldcc le Culturé, selon votre humeur.


(3) Shlumpy : terme tryculien signifiant joie, bonheur, félicité, allégresse.


(4) Lamuche : petit animal endémique de Trycul, doté de longues oreilles et d’une queue en pompon, qui a la particularité de se reproduire rapidement. D’où la célèbre expression tryculienne « se reproduire comme des lamuches ».


(5) Une pelle Poquelin Jean-Baptiste. Oui, je sais, elle est tirée par la perruque.


Pour ceux que ça intéresse, Trycul est la quatrième planète qui tourne autour d’une étoile nommée Acubens, dans la constellation du Cancer.