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n° 18498Fiche technique8977 caractères8977
Temps de lecture estimé : 6 mn
01/08/18
corrigé 06/06/21
Résumé:  La rencontre entre une aide-soignante et un nouveau patient.
Critères:  fh inconnu médical handicap bizarre travail cérébral massage nopéné mélo -amourcach -amourdram -extraconj -h+medical -attirautr
Auteur : Snerba      Envoi mini-message
Soins de suite

Chambre 17 au fond du couloir.

Michel Delaunay, 51 ans. Veuf.

Fiche de renseignements : AVC en date du 12 avril ; 4 semaines en soins intensifs avant d’arriver ici à l’hôpital local en soins de suite.

Hémiplégie droite; aphasie totale.


L’ensemble des éléments cliniques expliquait qu’un homme aussi jeune ait été admis dans ce service, plus habitué à recevoir des octogénaires que des quinquagénaires. Depuis huit ans qu’elle y travaillait, Hélène n’en gardait d’ailleurs pas le souvenir.


Après échange avec sa collègue du matin autour du premier café, c’est Hélène qui lui assurerait les soins du matin : toilette au lit, petit déjeuner et friction des membres "morts". Elle terminerait sa tournée par lui afin de s’accorder plus de temps pour ce nouvel arrivé.


C’était toujours un moment particulier que cette première rencontre. Avant de franchir le pas de la porte de sa chambre, il n’est qu’un diagnostic qui ne dit rien de sa taille, de son poids, de ses odeurs corporelles, de son appétit, de son caractère, et de ses humeurs aussi.


La chambre était dans la pénombre, volet fermé.



M. Delaunay n’a manifesté aucune réaction, même pas un battement de cils, les yeux fermés.

Il faisait bon dans la pièce, les odeurs n’étaient pas trop fortes, contrairement à bien d’autres. Il était plutôt grand mais heureusement pour elle, pas épais du tout, les quelques semaines en soins intensifs ayant fait leur œuvre. Elle constata que sa peau n’avait pas trop souffert : peu de traces de rougeur malgré l’alitement permanent. Les bras et jambe droits étaient quant à eux plus blancs, stigmates de l’AVC et de l’hémiplégie.


Elle avait pu se rendre compte lors de la toilette du manque de plasticité de cet hémicorps. La prise du petit déjeuner était difficile, le risque de fausse-route était grand ; elle devait poser sa main sur sa joue fraîchement rasée pour lui signifier d’ouvrir la bouche, mais ce qui la surprit plus encore, c’est qu’il n’avait pas ouvert les yeux un instant, ni non plus bougé le moindre muscle de son visage durant tout le repas.


Afin de limiter la rigidité musculaire, elle prit le temps d’essayer de faire quelques mouvements des bras, avant-bras, poignets, ainsi que de sa jambe droite. Vraiment très raides. Après s’être assise sur le bord gauche du lit, elle commença à lui frictionner les membres afin d’encourager la tonicité des muscles et de la peau.


Elle aimait cette sensation sur ses mains et l’odeur de l’huile sur sa peau. Elle y passa du temps, agréable parenthèse dans sa matinée, même si aucune réaction ne se fit voir chez cet homme. C’est seulement en sortant qu’elle fit le constat qu’elle n’avait pas parlé elle non plus ; elle n’en avait pas éprouvé le besoin. Elle sourit.


Dorénavant, elle observait le même rituel, s’occupant des autres avant et lui octroyant davantage de temps.


C’est lors du quatrième jour qu’eut lieu l’événement.


Alors qu’elle terminait le soin sur la jambe droite, M. Delaunay a bougé la main gauche ; une contraction à peine perceptible. Elle a suspendu sa friction quelques secondes, interdite. C’était la première fois qu’il se manifestait. Elle a alors contourné le lit, s’est assise sur le bord du lit, a versé de l’huile au creux de sa main et a massé cette main qui s’était manifestée, depuis le creux jusqu’aux extrémités, chaque doigt l’un après l’autre, puis de légères pressions de la paume jusqu’au poignet. Retournant la main, elle l’a posée sur sa cuisse, sentant la chaleur sur sa peau à travers son léger pantalon de travail, pour délicatement la masser. Elle a attendu un instant, paisible, puis a reposé la main sur le lit avant de sortir.


C’est avec hâte qu’elle est revenue le lendemain, pressée de retrouver ce havre, cette main. Toujours aussi délicatement, elle a refait le massage du plat puis du dos de la main, allant cette fois sur son avant-bras, usant de ses deux mains pour lui faire éprouver au maximum la pression, le contact et la chaleur que dégageaient ses mains. Passé le coude, elle a poursuivi sur le bras. La position n’étant pas très confortable pour elle, elle s’est avancée, a soulevé le bras pour poser la main sur son épaule. Ainsi, elle pouvait masser du coude vers l’épaule avec plus d’aise, descendant et remontant lentement.


La main posée sur l’épaule a soudain glissé jusque sur son sein. Elle a aussitôt eu un mouvement de recul ; le bras est retombé sur le lit. Confuse, elle est restée ainsi quelques secondes, silencieuse, ne trouvant que dire, sans attendre non plus de M. Delaunay un signe qui ne viendrait pas. Elle s’est levée, est sortie, bouleversée et fébrile.


De retour après trois jours de repos, elle a réalisé les frictions côté droit, non sans remarquer que M. Delaunay retrouvait une légère élasticité, même si la route vers la mobilité promettait d’être encore bien longue. Puis elle alla s’asseoir sur son côté gauche, posa la main sur son pantalon, lui massa la paume, puis le dessus, le poignet, l’avant-bras, le coude. Elle fit une pause, puis saisit son bras en posant sa main sur son épaule. Après quelques mouvements, elle recula légèrement le buste afin que la main glisse lentement sur sa blouse. Lorsque la main fut sur son sein, elle s’avança légèrement, la maintenant en cette position.


La pression de sa main réchauffée par le massage, l’huile, lui firent fermer les yeux. Elle suspendit son mouvement quelques secondes pour profiter pleinement de l’instant, sans que rien ne bouge. La main englobait son sein, elle le voulait ainsi. Puis elle reprit son massage du bras jusqu’à l’épaule, accentuant la pression par moments. Elle ouvrit les yeux après quelques minutes, reposa le bras et la main sur le lit. Tranquille et sereine, elle quitta la chambre.


Le jour suivant, elle refit la même manœuvre, mais cette fois la main fut arrêtée par la blouse, Hélène ayant pris le soin de dégrafer les trois boutons du haut afin de faire un reposoir pour la main, celle-ci se posant en douceur sur la lingerie, un ensemble bleu nuit acheté durant ses jours de repos spécialement en vue de ce moment. Elle aimait la lingerie délicate qui mettait en valeur ses jolies formes, même si cela faisait quelques années qu’elle n’en n’avait pas achetée de si belle, son mari ne prêtant pas d’attention particulière à ses sous-vêtements. Et même si à cet instant, la main n’agissait pas, elle était bien vivante, chaude, Hélène prenant soin de faire ressentir à chacune des phalanges la rondeur de son sein particulièrement ferme et réceptif à cette occasion. Elle goûtait l’instant, massant ce bras avec toute la sensualité dont elle était capable. Elle reposa le bras, la main et, apaisée, quitta la chambre.


La toilette et le petit déjeuner lui prenaient moins de temps désormais, même si la déglutition restait toujours un souci ; la friction à droite était le temps pour elle d’une montée en tension et elle passait alors côté opposé. Elle y alla plus franchement et, assurée, elle défit les quatre boutons de sa blouse, sortit son sein de son écrin de dentelle, prit le bras et le posa sur son sein, à même la peau. Elle commença alors le massage de la main ; son propre souffle s’apaisa rapidement. Doigt après doigt, phalange après phalange, elle y appliquait une légère pression Elle ferma les yeux lorsqu’elle arriva au poignet ; ses propres sensations la submergeaient. Il lui fallut une minute pour reprendre ses esprits, reposer la main après avoir ouvert de nouveau les yeux. Vidée, ravie, triste et comblée, elle prit le temps de réajuster ses vêtements et sortit.


Après deux jours de congés, sa collègue du week-end lui fit les transmissions autour du café du matin. La nouvelle de la chambre 17 au fond du couloir, Mme Relly, 86 ans, était arrivée la veille. Sa fiche de renseignements mentionnait une fracture du col du fémur occasionnée par une chute à son domicile.

Hélène se risqua timidement à demander des nouvelles de M. Delaunay.


Il avait été trouvé mort au passage du matin la veille ; l’hypothèse d’une fausse-route avait été avancée par le médecin, mais sans certitude. La collègue lui avait précisé qu’il avait le visage apaisé. On aurait dit qu’il souriait.